Accueil > Pourquoi tu votes pas Marie-George ?
de Christophe Adriani
Mon cher ***,
Nous sommes à quelques jours du premier tour des élections présidentielles et je suis inquiet. Tu files un mauvais coton. La mélancolie te gagne. La dernière fois que nous nous sommes vu, tu m’as dis ton intention de ne pas voter en phase avec tes convictions. Tu m’as dit ça vite fait, triste, sans laisser place à la discussion, comme au lendemain d’une défaite que l’on n’ose avouer. Au lendemain !
Christophe Adriani : Mon cher ***,
Tu te rappelles les mots du père Léo ? La mélancolie / C’est une rue barrée / C’est c’qu’on peut pas dire / C’est dix ans d’purée / Dans un souvenir / C’est ce qu’on voudrait / Sans devoir choisir…
J’ai compris que ce mal dont on cause dans le poste avait fini par t’affecter : tu ne veux pas revivre le "traumatisme" du 21 avril ! Et tu t’apprêtes à glisser dans l’urne le bulletin d’une candidate dont tu ne partages pas les idées. Aussi je ne te fais pas le procès de ses idées. Mais toi que j’ai connu prompt à l’insurrection de la pensée, on va te faire boire le mauvais vin de la résignation jusqu’à la lie ? Toi dont la cave est si savamment composée !
Certes, c’est un calcul. Mais qui a posé l’équation ? Est-ce vraiment toi, tout seul ? Ou bien on a compté pour toi, comme les infirmières comptent les gouttes des médicaments qu’elles administrent aux grabataires ? Je le dis comme je le pense : ce remède de charlatan va te rendre plus malade encore. Et du coup je ne me sentirai pas très bien non plus. Ce vote sans joie sera ton traumatisme du 22 avril. Ah, ça peut durer longtemps...
Qui sommes-nous finalement ? Nos idées doivent-elles se dissoudre dans l’uniforme et le convenu ? Si notre score n’est pas bon dimanche prochain, tu seras tout chose. S’il est encourageant, tu regretteras de n’y avoir pris ta part. Alors, au matin du premier tour, respire un bon coup, va voir la mer, en homme libre. Que ton esprit prenne le large… Et va voter suivant ton cœur.