Accueil > Pragmatisme britannique - la bulle que le NON a crevée

Pragmatisme britannique - la bulle que le NON a crevée

Publie le jeudi 16 juin 2005 par Open-Publishing

A cause de l’incurie des Nonistes (probablement ?) M. Blair s’est révélé tel qu’en lui-même, bien plus préoccupé par la souveraineté britannique (*) que par la construction de l’Union.

Plus sérieusement, c’est à l’ensemble de tous ceux qui spéculaient à la hausse sur la valeur « Economie(s) Européenne(s) solidaire(s) » que doit être imputée l’occultation de la stratégie d’Outre Manche. Dans la bulle résultante de cette distorsion désir/réel ceux-ci avaient par inconscience (en France il s’agit souvent de sur valorisation du potentiel d’action individuel, notamment intellectuel lié aux talents de stratège) ou par intérêt, omis de prendre en compte l’histoire du « mariage blanc » Royaume-Unis / Europe. Histoire aux conséquences pourtant gravées en de multiples endroits du « Traité établissant une Constitution pour l’Europe. » (Là où, en plus de 150 citations, le cas du Royaume-Unis est déclaré spécifique et dérogeant à des obligations concernant l’ensemble des autres états de l’Union.)

Il est peut-être temps de dire à quel point était idéale pour le Royaume-Uni la date choisie pour son référendum.
Elle permettait au pays le plus pragmatique et le moins entiché d’Europe de ne monter dans le bateau qu’une fois la bataille gagnée, éventuellement même après une ultime négociation à la Thatcher.
Dans le cas contraire, il suffisait d’agir comme Monsieur Blair s’apprête à le faire. Puisque dans son idée - et un tel cynisme n’est que pragmatisme de l’autre côté du Channel - « un référendum ne se propose que dans le cas où le vote OUI est assuré » ( ou monnayable !).

Le R-U n’aurait eu d’intérêt à emprunter le « raccourcis » du NON que si cette voie se trouvant bien dégagée (aucun pays ne l’ayant « osée »), celle-ci permettait à nouveau un petit marchandage - qui avait d’ailleurs été annoncé par monsieur Gordon Brown (ministre des finances, mai 2005) : « Ce n’est pas à la Grande-Bretagne de s’adapter à l’Europe, mais à l’Europe de s’adapter à la Grande Bretagne. »

On a beaucoup reproché à ceux qui refusaient une réalité sans en proposer une autre, d’être inconséquents, et de se laisser guider par leur affect.
Ne pas prendre en compte la position du Royaume Uni (Alain Lipietz reconnaissait lui-même qu’il faudrait un jour se coltiner « le cas anglais ») alors même que chacun savait à quel point ce pays mine, davantage à chaque étape, (voir l’OPT OUT) les principes de l’Union, cette attitude d’autruche ou de spéculateur à la hausse refusant de tenir compte de la conjoncture, peut-être jugée bien plus inconséquente (notamment de la part de la quasi-totalité d’une élite).

Au lendemain de la confirmation qu’en matière d’OPT OUT, la Grande Bretagne a nettement gagné la partie (**), il serait bien utile - pour reconstruire la dynamique de l’Europe (et d’une constitution européenne) sur des bases saines - de reconnaître à quel point le NON a permis d’éviter un traquenard supplémentaire posé à l’autre bout de l’Eurotunnel. (***)

* En fait ce vocable ne reflète pas vraiment la petitesse des enjeux Britannico - britanniques sur lesquels se focalisent les préoccupations et l’activité de Monsieur le résident du 10 Downing Street autant que de ses collaborateurs ou même opposants.

** « Cet objectif m’a guidé pour réviser les dispositions concernant le temps de garde et la période de référence pour le calcul de la durée maximale du travail. Il m’a surtout guidé pour aborder le dossier de "l’opt-out" individuel.

D’abord, en cas d’usage de l’opt-out par un pays, la proposition limite la durée du travail maximale à cinquante-cinq heures par semaine.

Elle maintient aussi l’opt-out pendant trois ans seulement après la fin de la période de transposition de la directive. Passé ce délai, si un État membre estime que le fonctionnement de son marché du travail justifie le maintien de l’opt-out, il devra soumettre une demande motivée auprès de la Commission. Voici l’équilibre de la proposition modifiée. Seule une telle approche me paraît être de nature à rapprocher les positions en présence, dans le respect du Parlement et avec le souci de moderniser le texte de mille neuf cent quatre-vingt-treize. »

Vladimir Špidla
Membre de la Commission européenne, chargé de l’Emploi, des Affaires sociales et de l’Egalité des chances

( article ici )

*** Rappelons (et Olivier Pastré le donnait précisément à entendre ce matin sur France Culture, dans sa chronique économique) que c’est ce pragmatisme britannique lié à une extrême réticence vis à vis du soutien publique d’entreprises pourtant utiles à tous, qui a plombé durablement le projet Eurotunnel, et le conduit quasi inéluctablement à la ruine que l’on sait.

http://garde-a-vue.over-blog.com/categorie-42145.html