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Procès d’Ali Lmrabet

Publie le lundi 16 juin 2003 par Open-Publishing

L’Observatoire déplore les conditions dans lesquelles s’est déroulé le procès
du journaliste Ali L’mrabet

Paris-Genève, 10 juin 2003
L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme,
programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de
l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT),
déplore les conditions dans lesquelles s’est déroulé le procès en appel de
Ali L’mrabet, directeur de deux publications satiriques - Demain magazine et
Douman - à Rabat les 6 et 10 juin 2003.

En première instance, le 21 mai 2003, Ali L’mrabet avait été condamné à
quatre ans de prison ferme et à 20 000 dirhams d’amende. Le tribunal avait
également prononcé l’interdiction de ses deux publications. Ali L’mrabet
avait été immédiatement arrêté à la sortie du tribunal.

Depuis le 6 mai 2003, Ali L’mrabet poursuit une grève de la faim pour "faire
valoir [ses] droits" et "faire cesser les intimidations répétées contre [son]
imprimeur et d’autres disposés à imprimer [ses] journaux".

L’Observatoire considère que les poursuites contre Ali L’mrabet sont
arbitraires. En effet, elles sanctionnent l’exercice de sa liberté
d’expression et d’action en tant que défenseur des droits de l’Homme.

L’Observatoire, qui a mandaté Radhia Nasraoui, avocate tunisienne, au procès
en appel, constate que le droit de Ali L’mrabet à un procès équitable n’a pas
été respecté, droit reconnu par l’article 14 du Pacte international sur les
droits civils et politiques, ratifié par le Maroc.

En effet, plusieurs éléments survenus lors des deux audiences font douter de
l’impartialité des magistrats de la Cour d’appel.

Les débats du 6 juin portaient essentiellement sur les conditions de
l’arrestation de Ali L’mrabet, considérée comme arbitraire par les avocats de
la défense. Néanmoins, le Président de la Cour a considéré, dès la levée de
la séance et avant toute audition, que les juges de première instance ne
pouvaient être attaqués sur ce point. Estimant que l’affaire était jugée
avant le début même des débats, la défense a demandé la récusation du
Président. Cependant, la Cour a tenté d’empêcher la constitution de cette
demande en refusant de lever la séance et en menaçant le Bâtonnier Jamaï de
poursuites judiciaires pour outrage à la justice.

En outre, l’Observatoire condamne le rejet de la demande de liberté
provisoire lors de la même audience alors que Ali L’mrabet est hospitalisé
depuis le 26 mai. A cet égard, l’Observatoire constate avec inquiétude que
les magistrats marocains n’ont pas tenu compte de l’état de santé préoccupant
du journaliste. L’audience du 6 juin a, en effet, duré plus de 10 heures. En
fin de journée seulement et grâce à l’insistance de ses avocats,
l’interrogatoire du détenu a été reportée au 10 juin 2003.

Durant l’audience de ce jour, la totalité des requêtes de la défense a été
rejetée par la Cour, notamment le fait d’entendre les juges de première
instance.

A la suite de la subtilisation de certains documents du dossier (une photo du
mariage du roi Mohammed VI parue dans l’hebdomadaire français Paris Match) et
le refus du Président de la Cour d’inscrire cet élément au procès-verbal, les
avocats de Ali L’mrabet ont décidé de se retirer de la salle d’audience,
considérant que leurs droits n’étaient pas respectés. Ali L’mrabet a
également refusé de répondre aux questions des magistrats, dénonçant « un
procès politique » et « la mascarade de justice ».

Le verdict sera rendu le 17 juin 2003, sans qu’aucun débat sur le fond de
l’affaire n’ait eu lieu.

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme,
craint que ce procès d’un journaliste ne constitue un précedent grave pour
l’exercice de la liberté d’expression au Maroc.