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Que les procès commencent : Les banques s’attendent à un déluge de litiges

Publie le vendredi 1er août 2008 par Open-Publishing
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Que les procès commencent : Les banques s’attendent à un déluge de litiges

Dans un article paru dans The San Francisco Chronicle en décembre 2007, l’avocat Sean Olender a suggéré que la véritable raison du projet de renflouement du subprime (crédit immobilier à risque), proposé par le Ministère des Finances des États-Unis, ne concernait pas tant le maintien des emprunteurs fauchés chez eux que la conjuration d’une vague d’actions judiciaires contre les banques. Le plan à l’époque sur la table était de geler le taux des intérêts sur un nombre limité de prêts risqués. Olender a écrit :

Web of Debt, Dr Ellen Brown, 13 juillet 2008

Dans un article paru dans The San Francisco Chronicle en décembre 2007, l’avocat Sean Olender a suggéré que la véritable raison du projet de renflouement du subprime (crédit immobilier à risque), proposé par le Ministère des Finances des États-Unis, ne concernait pas tant le maintien des emprunteurs fauchés chez eux que la conjuration d’une vague d’actions judiciaires contre les banques. Le plan à l’époque sur la table était de geler le taux des intérêts sur un nombre limité de prêts risqués. Olender a écrit :

Le seul objectif du gel est d’empêcher les propriétaires de titres adossés à des hypothèques, ou MBS [1], incluant de nombreux étrangers, de poursuivre les banques étasuniennes et de les forcer à racheter des titres à leur valeur nominale : à près de 10 fois leur valeur de marché aujourd’hui. La bombe à retardement dans le système bancaire n’est pas le réajustement du taux des prêts hypothécaires à risques [2]. Le véritable problème est la capacité contractuelle des investisseurs en MBS à exiger des banques qu’elles rachètent les prêts à leur valeur nominale s’il y a eu fraude dans le processus de départ.

Les conséquences catastrophiques de l’action des investisseurs forçant les auteurs des titres à racheter les prêts à leur valeur nominale sont au-delà du discours médiatique actuel. Les prêts en cause éclipsent la somme de la réunion de tous les capitaux disponibles dans les plus grandes banques étasuniennes, et les poursuites judiciaires des investisseurs dévoilerait leur responsabilité accablante, suffisante pour provoquer même la faillite des plus grande banques étasuniennes, entraînant les énormes renflouements, de Fannie et Freddie, et même de FDIC. . ., financés par le contribuable.
La prudence et la logique serait que les banques qui ont vendu ces déchets empoisonnés les rachètent, et qu’un grand nombre de gens aillent en prison. S’ils connaissaient la fraude, ils devraient racheter les titres. (1)

Cette idée pourrait donner la chair de poule même aux plus puissants banquiers d’affaires, en particulier au Ministre des Finances, Henry Paulson lui-même, qui était le patron de Goldman Sachs à l’âge d’or de l’écriture des documents empoisonnés du subprime, de 2004 à 2006. La tromperie hypothécaire ne s’est pas cantonnée aux déclarations faites aux emprunteurs et aux documents des prêts : elle est dans la conception même des « produits financiers » bancaires. Entre autres défauts de conception, il y a le fait que la dette hypothécaire transformée en titres boursiers (titrisée) est devenu si complexe que la propriété sous-jacente aux titres a souvent été perdue dans le brassage et, sans propriétaire légal, personne n’est qualifié légalement pour procéder aux saisies [3]. C’est le problème procédural qui a incité le juge fédéral de district Christopher Boyko à statuer en octobre 2007 que la Deutsche Bank n’avait pas qualité pour saisir les 14 hypothèques de prêts possédées par un fond commun de détenteurs de MBS. (2) Si un grand nombre de propriétaires défaillants avaient contesté leur saisie en prétextant que les plaignants n’avaient pas qualité pour agir, des milliards de dollars en MBS seraient menacés. Les détenteurs de titres furieux pourrait alors réagir par des litiges qui pourraient vraiment menacer l’existence des Goliaths bancaires.

États portant des accusations

Les investisseurs en MBS ayant le pouvoir de mener de grandes poursuites judiciaires comprennent l’État et les gouvernements locaux, qui ont des parts substantielles de leurs actifs en MBS et autres investissements similaires. Un signe des choses à venir est la plainte, déposée le 1er février 2008 par l’État du Massachusetts, contre la banque d’affaires Merrill Lynch, pour tromperie et fausses déclarations concernant une valeur d’environ 14 millions de dollars de titres du subprime vendus à la ville de Springfield. La plainte portait sur la vente de « certains effets financiers ésotériques, connus sous le nom de Collateralized Debt Obligations (CDO, obligation de garantie sur dette). . . inadaptés pour la ville et qui, quelques mois après la vente, sont devenus illiquides [4] et ont perdu la quasi-totalité de leur valeur de marché. » (3)

Le mois précédent, la ville de Baltimore a poursuivi en dommages-intérêts la Banque Wells Fargo pour la débâcle du subprime, alléguant que Wells Fargo avait intentionnellement fait preuve de discrimination en vendant des titres hypothécaires à haut intérêt plus fréquemment à des Noirs qu’à des Blancs, en violation du droit fédéral. (4)

Une autre action en justice novatrices déposée en janvier 2008 a été introduite par le maire de Cleveland, Frank Jackson, contre 21 grandes banques d’affaires, pour avoir autorisé le crédit immobilier à risque et la crise des saisies hypothécaires dans sa ville. Ce procès visait les banques d’affaires qui se sont nourries du marché hypothécaire en rachetant des crédits immobiliers à risques aux prêteurs sur hypothèque pour les « titriser » et vendre ensuite ces titres à des investisseurs. Les fonctionnaires municipaux ont dit espérer recouvrer des banques des centaines de millions de dollars de dommages-intérêts, incluant les pertes d’impôts sur les propriété dévaluées et l’argent dépensé pour la démolition et la condamnation de milliers de maisons abandonnées. Les accusés comportent les géants bancaires : Deutsche Bank, Goldman Sachs, Merrill Lynch, Wells Fargo, Bank of America et Citigroup. Ils ont été accusés de création de « nuisance publique » en achetant et en revendant de façon irresponsable les prêts au logement à haut intérêt à l’origine des défaillances de remboursement, qui ont réduit l’assiette fiscale de la ville et laissé les quartiers en ruines.

Jackson a déclaré au journal de Cleveland The Plain Dealer : « Pour moi, ce n’est pas différent de la criminalité organisée ou de la drogue. Cela a le même effet que le marché de la drogues dans les quartiers. C’est à bien des égards une forme de criminalité organisée, qui est parvenue à être légalisée. » Il a rajouté lors d’un interview enregistré sur bande vidéo, « Ce procès dit : Vous n’allez plus nous faire ça. » (5)

Le journal The Plain Dealer a aussi interviewé le procureur général de l’Ohio Marc Dann, qui envisage des poursuites judiciaires de l’État contre certaines de ces mêmes banques d’affaires. « Manifestement il y a eu une fausse donne, » a-t-il dit, « et la source est Wall Street. Je suis heureux de devoir traquer quelques-unes de ces compagnies. »

Toutefois, une chose bizarre s’est produite sur le chemin du tribunal. Comme le gouverneur de New York, Eliot Spitzer, le procureur général Dann a démissionné de son poste en mai 2008 après une enquête pour harcèlement sexuel dans son bureau. (6) Avant d’être forcés de démissionner les deux procureurs étaient sur la piste des banques, essayant de fixer leur responsabilité dans la vague destructrice de saisies de maisons dans leurs juridictions.

Mais les coups continuent à pleuvoir. En juin 2008, le procureur général de Californie, Jerry Brown, a poursuivi Countrywide Financial Corporation, le plus grand prêteur hypothécaire à l’origine de milliers de saisies, pour commercialisation trompeuse de prêts risqués pour les emprunteurs. Entre autres choses, les 46 pages de la plainte alléguait que :

Les accusés considéraient les emprunteurs comme rien d’autre qu’un moyen pour émettre plus de prêts, mettant ceux-ci en route avec peu ou aucune considération sur les moyens des emprunteurs et à leur capacité à supporter leur accession à la propriété à long terme. . .

La compagnie. . . fermait systématiquement les yeux sur les pratiques trompeuses des courtiers et de ses propres agents de prêt, en dépit de « nombreuses plaintes alléguant que les emprunteurs ne comprenaient pas les conditions de leur prêt. »

Les placeurs qui ont confirmé l’informations sur la mise en œuvre du prêt hypothécaire étaient « sous pression intense . . . traitant de 60 à 70 prêts par jour, faisant qu’il leur était pratiquement impossible d’étudier avec soin la situation financière des emprunteurs et le bien-fondé du prêt. »

La haute pression dans la sphère des ventes de Countrywide et dans le système de rémunération des placeurs a encouragé le refinancement en série des prêts dans le pays. (7)

Des poursuites judiciaires similaires contre Countrywide et son directeur général ont été déposées par les États de l’Illinois et de Floride. Ces poursuites ne visent pas seulement des dommages-intérêts, mais aussi l’annulation des prêts, ce qui crée un cauchemar potentiel pour les banques.

Une avalanche de class action ?

Il est aussi possible que d’énormes actions judiciaires par recours collectifs (class action) des emprunteurs escroqués soient en branle. Dans le Wisconsin en 2007, une décision actuellement en appel de la juge de district Lynn Adelman décrétait que Chevy Chase Banque avait violé la Truth in Lending Act (TILA ou loi sur la transparence en matière de prêts) en cachant les clauses du prêt à taux ajustable, et que, pour ce motif, des milliers d’autres emprunteurs de Chevy Chase peuvent se joindre aux plaignants dans une class action.

Selon un rapport de Reuters du 30 juin 2008 :

La juge a transformé une affaire de class action ordinaire en un cauchemar potentiel pour le secteur bancaire étasunien, en constatant aussi que les emprunteurs pourraient obliger la banque à annuler, ou à résilier, leurs prêts. Cette décision a été suspendue dans l’attente d’un appel à la 7ème cour d’appel du travail, dont la décision est prévue dans quelques jours.

L’idée d’annuler les prêts véreux pour endiguer la marée de saisies a fait son chemin : une action judiciaire, déposée la semaine dernière par le procureur général de l’Illinois, demande au tribunal de résilier ou de corriger les hypothèques immobilières de Countrywide Financial, issues de « pratiques déloyales ou frauduleuses. »

Le secteur bancaire de l’hypothèque immobilière a déjà fait face à la pression des autorités régulatrices fédérales et étatiques, qui ont accusé les banques d’avoir abaissé la norme des garanties et d’avoir obligé les emprunteurs, grâce à des supercheries, à signer des prêts coûteux à taux d’intérêt ajustable, que les banques ont plus tard regroupés et vendus au titre de moyens de placement à taux d’intérêt élevé.

La TILA est une loi fédérale de 1968, dont le rôle est de protéger le consommateur contre l’abus dans le crédit, en exigeant la divulgation claire des conditions du prêt et de son coût. Elle permet au consommateur de solliciter l’annulation ou la terminaison d’un prêt, et le remboursement de tous les intérêts et frais quand le prêteur s’avère être en infraction. Le charme de cette loi, dit Cathy Moran, avocate des faillites en Californie, est qu’elle prévoit une stricte responsabilité : les emprunteurs lésés n’ont pas à prouver qu’ils ont été personnellement escroqués ou trompés, ni qu’ils ont subi un véritable préjudice. Le simple fait de défectuosité dans la divulgation des clauses leur donne le droit d’annuler et de priver le prêteur de ses intérêts. Dans la petite enquête de Moran, au moins la moitié des prêts examinés comportaient des violations à la TILA. (8) Si la class action est appropriée pour l’annulation des prêts sur la base de tromperie dans le processus de divulgation des clauses, le résultat pourrait être un déluge de recours collectifs en justice contre les banques dans tout le pays. (9)

Reporter les pertes sur les banques

La résiliation pourrait être une solution non seulement pour les emprunteurs, mais aussi pour les investisseurs en MBS. Les clauses de nombreux contrats de vente de prêt stipulent que les prêteurs doivent reprendre les prêts qui deviennent très vite défaillants ou qui contiennent des erreurs ou des tromperies. Une avalanche de résiliations serait catastrophique pour les banques. Elles ont sorti les prêts de leurs registres et ont vendu ceux-ci à des investisseurs afin de faire beaucoup plus de prêts que ne l’autorise la réglementation bancaire. Les règles bancaires sont complexes, mais pour chaque dollar du capital propre d’une banque sur son bilan, ses prêts sont censés se limiter à 10 dollar. Le problème pour les banques est que, lorsque le processus est inversé, la règle du 10 à 1 peut travailler dans l’autre sens : mettre un dollar de mauvaise créance irrécouvrable sur un registre de banque peut réduire sa capacité de prêt d’un facteur de 10.

Comme l’expliquait une information de BBC News citant le professeur Nouriel Roubini en qualité d’expert :

La titrisation était la clef pour aider les banques à éviter la règle du 10 à 1 de la réglementation. Pour faire en sorte que leurs prêts à risques aient un semblant d’attrait pour les acheteurs, les banques ont utilisé la complexités de l’ingénierie financière pour repenser leur emballage afin qu’ils semblent absolument sûrs avec un rendement bien au-dessus des placements vraiment sûrs proposés. Les banques ont même trouvé le moyen de retirer les prêts de leur bilan sans les vendre du tout. Elles ont conçu de nouvelles entités financières étranges, appelée Special Investment Vehicles ou SIV (moyens de placement spéciaux), avec lesquels les prêts peuvent être portés techniquement et juridiquement hors du bilan, hors de vue, et hors d’atteinte des règles des autorités de réglementation. Donc, une fois encore, les SIV ont fait de la place sur les bilans pour que les banques continuent le prêt.

Les banques ont contourné les règles de régulation en écoulant leurs prêts à risques, mais comme bon nombre de prêts titrisés ont été achetés par d’autres banques, les pertes étaient toujours à l’intérieur du système bancaire. Les prêts détenus en SIV étaient techniquement hors bilan bancaire, mais quand la valeur des SIV a commencé à s’effondrer, les banques qui les ont créés ont constaté qu’elles en étaient toujours responsables. De cette manière, les pertes de placement, qui pouvaient sembler en dehors du champ d’application de la règle du 10 à 1 de la réglementation, ont soudainement commencé à arriver sur les bilans bancaires. . . Le problème affronté à présent par de nombreux gros prêteurs est que, quand les pertes figurent sur le bilan bancaire, la règle du 10 à 1 de la réglementation entre en jeu car les pertes réduisent le capital propre de la banque. « Si vous avez une perte de 200 milliards de dollars, ça réduit d’autant votre capital, vous devez réduire vos prêt de 10 fois plus, » explique le professeur Roubini. « De cette manière, vous pouvez devoir réduire de deux billions de dollars le crédit total pour l’économie. (10)

Vous pourriez aussi obtenir la faillite des banques mêmes. Le total des fonds propres des 100 premières banques étasuniennes était de 800 milliards de dollars à la fin du troisième trimestre de 2007. On s’attend actuellement à ce que les pertes bancaires s’élèvent à près de 450 milliards de dollars, assez pour éliminer plus de la moitié des fonds propres des banques, laissant nombre d’entre elles insolvables. (11) Si les débiteurs inondent les tribunaux de défenses valables pour leur dette et si les détenteurs de MBS remettent en question leurs titres, le résultat pourrait être encore pire.

Renvoyer le génie dans sa lampe

Ainsi, que se passerait-il en cas de faillite des brontosaubranques qui se sont livré à ces pratiques irresponsables ? Ces banques sont largement reconnues coupables, mais elles s’attendent à être renflouées par la Réserve Fédérale ou les contribuables car elles sont « trop grosses pour couler. » L’argument est qu’en permettant leur banqueroute, l’économie sombrera avec elles. C’est la crainte, mais c’est faux. Nous avons besoin d’une source de crédit, il nous faut donc des banques ; mais nous n’avons pas besoin de branques privées. C’est un fait peu connu, bien caché, que les banques ne prêtent pas leur propre argent ni même celui de leurs déposants. Elles créent en réalité l’argent qu’elles prêtent et cette création d’argent est justement une fonction publique, et non pas privée. La Constitution délègue le pouvoir de créer l’argent au Congrès et seulement au Congrès. (12) Dans l’octroi de prêts, les banques ne font qu’accorder du crédit et la vraie agence accordant l’« engagement parfait et le crédit des États-Unis » est les États-Unis eux-mêmes.

Ce qui est en jeu ici dépasse le simple traitement équitable des propriétaires et des investisseurs en MBS trompés. Les banques et les maisons d’investissement sont à présent en train de presser les dernières gouttes de sang de la cote de crédit du gouvernement étasunien, « empruntant » de l’argent et fourguant des papiers sans valeur au gouvernement et aux contribuables. Quand la poussière retombera, ce seront les banques, les maisons de courtage et les Fonds Spéculatifs pour investisseurs riches qui seront sauvés. Les gens dont la maison a été saisie seront dépossédés, et à moins que votre fond de pension ait investi dans les Hedge Funds bien branchés politiquement, vous pouvez probablement l’embrasser et lui dire au revoir, comme l’ont déjà fait les enseignants en Floride.

Mais le génie de la banque est une créature de la loi, et la loi peut le renvoyer dans sa lampe. La faillite imminente de quelques très grosses banques pourrait fournir au gouvernement l’occasion de reprendre le contrôle de ses finances. Plus que ça, elle pourrait fournir les fonds pour lutter contre des problèmes autrement insolubles, qui menacent actuellement d’anéantir notre niveau de vie et notre position dans le monde [sic, ndt]. La seule solution l’emportant sur une solution provisoire serait de confisquer le pouvoir de créer de l’argent aux banquiers privés et de le rendre collectivement au peuple. C’est ainsi que cela aurait dû être de tout temps, et c’est ainsi que c’était à nos origines, mais nous sommes tellement habitués aux fait que les banques sont des entreprises privées, que nous avons oublié les banques publiques de nos ancêtres. Le meilleur modèle bancaire colonial américain a été mis au point dans la province de Pennsylvanie de Benjamin Franklin, où le gouvernement possédait la banque, émettait l’argent et le prêtait aux agriculteurs à 5 pour cent d’intérêt. Les intérêts étaient remis au gouvernement, en remplacement des impôts. Dans les décennies d’exploitation de ce système, la province de Pennsylvanie allait sans impôts, inflation ni dette.

Plutôt qu’acculer les banques à la faillite et les envoyer sur les roses, la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC) devrait examiner de près les registres des banques et mettre en règlement judiciaire toutes celles jugées insolvables. La FDIC (contrairement à la Réserve Fédérale) est en fait un organisme fédéral. Elle a la possibilité de prendre les actions d’une banque en échange de son renflouement, en fait de sa nationalisation. Cela se fait en Europe avec les banques en faillite, et ça c’est fait aux États-Unis avec Continental Illinois, la quatrième plus grande banque du pays, quand elle a sombré dans les années 90.

Un système bancaire véritablement national pourrait délivrer l’« engagement parfait et le crédit des États-Unis » à des fins publiques, notamment pour le financement des infrastructures, le développement de l’énergie durable et les soins de santé. (13) Le crédit émis par l’État pourraient aussi servir à remédier à la crise du subprime. Les autorités locales pourraient l’utiliser pour racheter les prêts hypothécaires en défaut, indemniser les investisseurs en MBS et mettre l’immobilier à la disposition du public. Les propriétés pourraient ensuite être louées à leurs occupants à un tarif raisonnable, laissant les gens dans leur maison sans l’opportunité d’achat d’une maison sans payer. Un programme de location-vente pourrait aussi être institué. Les bénéfices seraient affectés au remboursement du crédit avancé pour acheter les hypothèques, équilibrant la fourniture d’argent et prévenant l’inflation.

Solutions locales et privées

En attendant que le gouvernement fédéral agisse, il existe aussi des possibilités privées et locales pour atténuer la crise du subprime. Chris Cook est consultant du marché stratégique britannique et ancien directeur de conformité chez International Petroleum Exchange. Il recommande d’obtenir que toutes les parties s’établissent en formant un groupe constitué comme une LLC (société à responsabilité limitée), dans un cadre de partenariat réunissant des locataires et des financiers à titre de copropriétaires, sous un dépositaire neutre. Les propriétaires originaux payeraient une location abordable, et le fond commun résultant des locations serait réparti dans une unité d’intérêts, semblable à une société de placement immobilier. Entre autres avantages par rapport à l’habituel MBS, il n’y aurait pas de prêt à intérêt, puisque la propriété appartiendrait purement et simplement à la LLC. L’élimination des intérêt réduit sensiblement les coûts. Les anciens propriétaires pourraient occuper la propriété à un prix de location abordable, avec la possibilité d’acheter une participation dans celle-ci. Pour les banques, l’avantage serait qu’elles pourrait trouver à nouveau des investisseurs, puisque les risques seraient éliminés de l’investissement par l’assurance d’une pleine occupation à des prix abordables, et, pour les investisseurs, l’avantage serait un investissement sûr avec un remboursement régulier. (14)

Carolyn Betts, une avocate de l’Ohio ayant servi à Washington comme conseillère de sociétés émettrices de MBS formées par diverses entités gouvernementales fédérales, a représenté Resolution Trust Corporation lors de sa vente aux enchères pour non remboursement d’un emprunt hypothécaire commercial durant la dernière crise immobilière. Elle propose de resserrer le jeu des États, dans le style de ce qui a été intenté contre les compagnies de tabac par un consortium de procureurs généraux des État dans les années 90. Elle note qu’à la fin de 2007, au moins 20% des fonds détenus par Ohio Public Employees’ Retirement System (PERS) étaient composés de MBS et d’autres investissements similaires. Cela fait de l’argent public de l’Ohio un investisseur important dans ce genre de titres liés à des créances hypothécaires. Le gouvernement de l’Ohio a intérêt à ne pas avoir de saisies immobilières, puisque les saisies détruisent les marchés immobiliers locaux, contribuent à la baisse des recettes fiscales et aux pertes sur les investissements PERS, et engendrent une contrainte sur le système de logement abordable régional et étatique. Une série d’actions coordonnées intentées par des procureurs généraux pourrait éliminer l’entremise des banquiers coupables et restituer les biens à la maîtrise et au contrôle du pays.

Andrew Jackson aurait déclaré au Congrès en 1829 : « Si le peuple étasunien comprenait seulement l’injustice totale de notre argent et du système bancaire, il y aurait une révolution avant le matin. » Une vague de procès privées, de recours collectifs et de poursuites intentées par le gouvernement, visant à corriger les pratiques bancaire préjudiciables, pourrait déclencher une révolution dans le secteur bancaire, rendre aux États-Unis le pouvoir de proposer l’« engagement parfait et le crédit des États-Unis, » et restituer les biens de la communauté à la maîtrise et au contrôle du pays.

Références
(1) Sean Olender, « Mortgage Meltdown, » San Francisco Chronicle (9 décembre 2007).

(2) Voir Ellen Brown, « The Subprime Trump Card, » webofdebt.com/articles, 26 juin 2008. Traduction française : « La carte maîtresse du subprime. »

(3) Greg Morcroft, « Massachusetts Charges Merrill with Fraud, » MarketWatch (1er février 2008).

(4) Henry Gomez, Tom Ott, « Cleveland Sues 21 Banks Over Subprime Mess, » Journal The Plain Dealer (Cleveland, 11 janvier 2008).

(5) Ibid.

(6) Marc Dann Resigns as Attorney General, NBC24.com (14 mai 2008).

(7) E. Scott Reckard, « California Atty. Gen. Jerry Brown Sues Countrywide, » Los Angeles Times (26 juin 2008).

(8) Cathy Moran, « And the Truth (in Lending) Shall Set You Free, » mortgagelawnetwork.com (11 juin 2008).

(9) Gina Keating, « Mortgage Ruling Could Shock U.S. Banking Industry, » Reuters (30 juin 2008).

(10) Michael Robinson, « City of Debt Shows US Housing Woe, » BBC News (30 décembre 2007).

(11) « Is the Latest Liquidity Crunch in Remission ?, » NakedCapitalism.com (26 mars 2008).

(12) Voir E. Brown, « Dollar Deception : How Banks Secretly Create Money, » webofdebt.com/articles (3 juillet 2007).
(13) Pour en savoir plus sur cette solution de financement et pourquoi elle ne ferait pas monter les prix, voir E. Brown, « Waking Up on a Minnesota Bridge : How to Solve the Infrastructure Crisis Without Selling Off Our National Assets, » webofdebt.com/articles (4 août 2007).

(14) Cook, « Peak Credit and a Flight to Simplicity, » Asia Times (3 avril 2008).

Ellen Brown, JD, a développé ses compétences d’avocate en litiges civils à Los Angeles. Dans Web of Debt, son dernier livre, elle dédie son expérience à une analyse de la Réserve Fédérale et du « trust de l’argent. » Elle montre comment ce cartel privée a usurpé le pouvoir de créer l’argent au peuple et comment nous pouvons récupérer ce pouvoir. Ses sites sont webofdebt.com et ellenbrown.com.

Original : www.webofdebt.com/articles/bracing-storm.php

Traduction libre de Pétrus Lombard pour Alter Info

Notes de traduction

[1] MBS, Mortgage-Backed Security, est un titre boursier garanti par des hypothèques immobilières. Les revenus d’un MBS proviennent du remboursement du capital et des intérêts d’un ensemble de tranches de prêts hypothécaires, chaque prêt étant morcelé en fines tranches dispersées dans une multitude de MBS. Le fractionnement des prêts puis le brassage des tranches servent à répartir les risques (en cas de défaillance d’un emprunteur), et rend le prix des MBS abordables (un titre adossé à un prêt entier serait inabordable pour un investisseur ordinaire). Les paiements sont généralement mensuels sur la durée des prêts. La constance des revenus n’est pas garantie car des prêts inclus dans le MBS peuvent être remboursés par anticipation, ou bien les mensualités peuvent être plus grandes que ce qui a été fixé, ce qui réduit le capital prêté et les intérêts (sans parler des défauts de remboursement avec rejet juridique de la procédure de saisie ou impossibilité de revendre une maison saisie).

[2] On s’attend à ce que la hausse du taux d’intérêt des prêts rende plus difficile les remboursements et entraîne une nouvelle vague de saisies immobilières.

[3] Chaque hypothèque ayant été découpée en fines tranches [1] réparties dans une multitude de titres MBS, chaque hypothèque se trouve aujourd’hui dispersée dans un très grand nombre de titres. La conséquence est que l’acte hypothécaire original, le document officiel qui nomme l’auteur du prêt et lui donne des droits sur le bien immobilier hypothéqué, a été perdu dans ce brassage.

[4] Illiquide : qualifie un actif qui ne peut être aisément transformé en argent, par exemple des titres, des immeubles ou des marchandises difficiles à écouler à cause d’un marché peu actif ; se dit d’un marché dont le faible nombre de transactions conduit à des écarts sensibles de cours ; se dit également d’une entreprise dont la trésorerie est insuffisante pour lui permettre de satisfaire ses besoins d’exploitation courante et de remplir ses engagements financiers.

Mardi 29 Juillet 2008

http://www.alterinfo.net/Que-les-proces-commencent-Les-banques-s-attendent-a-un-deluge-de-litiges_a22279.html?PHPSESSID=06eed74a35623203ef1a3fe0cff9b0cd

Messages

  • Face a la reponse juridique du Capital, un rappel incomplet mais neanmoins necessaire, aujourd’hui en partie depassé ? par la perspective du revenu garanti mondial ;

    Crise de la liquidité internationale et lutte des classes : première approximation

    Loren Goldner, 1998

    http://ecritscorsaires.free.fr/article.php3.24.html

  • Même aux USA, on accule plus facilement en justice les banquiers qu’en France !...

    Dire quelle déréliction se répand chez nous... Ainsi, la racaille bancaire s’est permis de mettre 50 milliards sur la table pour spéculer et d’en perdre allègrement 5, sans que personne ne propose qu’on dise "stop", on va rentrer dans les comptes, on va encadrer la liberté complétement hallucinante des usuriers, bref on va insister et lourdement pour que l’Etat régule. Sauf pour les vautours à passeport américains, c’est qd même le boulot de l’Etat. Et c’est comme ça qu’on l’aime. Ben non. La presse a écrasé un petit prout, genre "Oh, c’est pas bien tout ça que c’est perdu, c’est tellement dommage...pour les banques."

    C’était la Société Générale, pour les oublieux qui avait mis donc des sommes qui combleraient n’importe quel déficit, sur la table. Moi j’ai pas oublié.

    Toutes les grandes banques ont perdu entre 2 et 5 milliards.

    Pourtant, ils ne semblent pas affectés suivant leurs communiqués et, de fait, nous pouvons constater qu’en ville ce sont toujours les banques et les assurances (bonnet blanc...) qui ouvrent sans arrêt des agences.

    Il est vrai qu’ils ont vite fait de remonter les taux de crédit par exemple, que les frais bancaires ils vont sans doute les augmenter, et surtout qu’ils ont quelques petites cacuèts au fond des coffres. Ces gentils banquiers du Crédit Agricole par exemple, ont fait 25% de bénéfices supplémentaires par an, depuis 4 ans au moins. Je leur fais de la pub, c’est normal c’est ma banque, même si je leur ai dit cette semaine que j’en avais marre de me faire enc...et que c’étaient tous des ;<à*&<<

    Donc, je vais peut-être trouver un banquier honnête. Paraît que ça existe. Les oxymores aussi, il faut le reconnaître.

    Mais, en attendant, est-ce que le chevalier Sarko va tout d’un coup, lui qui est si réactif de la cervelle, taper sur la table et crier "class action" ?...

    Voire leur demander de contribuer au sauvetage de la branche maladie de la Sécu, au renflouement des retraites, à la création d’emploi qu’ils pourraient faciliter en abondant, par exemple, un fond spécial créé à partir d’un petit pourcentage des bénéfices insensés qu’elles nous tondent, manière qu’elles ne mangent plus du caviar qu’un jour sur deux et arrêtent de balancer tranquillement les huissiers et les keufs aux pauvres qui peuvent plus payer ?...

    En tous cas, aux dernières nouvelles, l’homme qui embrasse tous les déshérités de la planète, il est en ouacances.

    Y a peu près la moitié des français qui peuvent pas partir. Ca laisse quand même du monde pour venir lui gacher son Gavalda on ze bich.

    D’où l’intérêt d’avoir une plage privée en forme de Fort, et de pouvoir sauteur sur l’un ou l’autre des trois misérables palais de ouacances que cet Etat qui nuit tjs à l’effort des capitaines d’industries, lui octroie.

    De quoi ?!..."C’est quoi le plan pour que les banques elles raquent", c’est ça que tu bredouilles ?"...Le plan c’est ferme ta gueule et bosse.

    Soleil Sombre