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Réaction de la CRIIRAD suite à la publication de l’avis du Conseil scientifique de l’IRSN
Publie le jeudi 6 avril 2006 par Open-PublishingCRIIRAD
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Jeudi 2 avril 2006
Réaction de la CRIIRAD suite à la publication de l’avis du Conseil scientifique de l’IRSN
TCHERNOBYL
20 ans après, les services officiels français persistent dans la censure et la désinformation.
La CRIIRAD - Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité - est une association à but non lucratif qui s’est créée en mai 1986, au lendemain de Tchernobyl et s’est dotée d’un laboratoire spécialisé dans les analyses de radioactivité afin d’apporter aux populations une information alternative à celle des exploitants du nucléaire et de l’État.
Depuis 1986, la CRIIRAD a travaillé sur de très nombreux dossiers relatifs au nucléaire mais aussi à la radioactivité médicale et naturelle. Le dossier de Tchernobyl, et en particulier l’obtention de la reconnaissance, par les autorités françaises, des dysfonctionnements de mai 1986 est cependant resté tout au long des années au cœur de ses préoccupations que ce soit sur le plan des évaluations scientifiques, des analyses critiques ou des actions en justice.
Les démonstrations établies par la CRIIRAD concernent notamment : 1/ la sous-évaluation grossière de la contamination du territoire pendant toute la période de crise ; 2/ le refus d’application des recomman-dations et règlements européens visant à limiter la consommation d’aliments contaminés ; 3/ le défaut de protection des groupes critiques, et plus particulièrement des enfants (responsabilité aggravée par le fait qu’en 1988, les responsables français iront jusqu’à altérer la transposition d’une directive européenne afin de supprimer l’exigence de calculer des limites d’incorporation spécifiques pour les enfants ! (cf. décret n°88-521 du 18/04/88).
En réaction à son travail d’investigation et d’information, la CRIIRAD a essuyé des attaques virulentes mais caractérisées par 2 constantes : 1/ jamais de réponses aux arguments scientifiques et autres éléments de preuve avancés ; 2/ jamais de poursuite devant les tribunaux malgré l’importance des mises en cause publiques et nominatives (rappelons que c’est la CRIIRAD qui a poursuivi le Pr Pellerin pour diffamation, et non l’inverse !).
Où en est-on du côté de l’État français et de ses experts à 3 semaines de la commémoration du XXème anniversaire de la catastrophe ?
Les cartes qui prouvent le mensonge sont toujours tabou !
Dans les éléments de preuve que la CRIIRAD a communiqués à la Justice, figurent notamment les bilans établis les 7 et 14 mai 1986 par le SCPRI. Les évaluations de la contamination des sols qui figurent dans ces documents sont accablantes pour les responsables de l’époque. Elles sous-évaluent en effet d’un facteur 1 000 environ (!) la quantité de radioactivité déposée sur le sol français. Ce travail est indéfendable et, pour cette raison, toute mention de son existence a été frappée d’interdiction. Les organismes et experts officiels sont allés jusqu’à falsifier des dates pour ne pas avoir à insérer les cartes des 7 et 14 mai dans leurs reconstitutions historiques.
L’avis du Conseil Scientifique de l’IRSN respecte l’interdit à la lettre.
Le rapport occulte ainsi les chiffres clefs de la contamination des sols et soutient que la « polémique » provient de données insuffisantes, comme s’il s’était agi d’un simple déficit d’information et non de la diffusion de résultats de mesure totalement erronés, sous-évaluant considérablement le risque et utilisés pour justifier l’absence de toute mesure de protection. Il y a tromperie et tromperie aggravée au sens du code de la consommation. Si les experts de l’IRSN considèrent que les chiffres SCPRI de mai 1986 - qui sont les chiffres de la période de crise pendant laquelle il faut savoir pour agir à bon escient - sont corrects mais seulement insuffisants, qu’ils osent les publier ! Pourquoi censurer des cartes qui ne sont qu’insuffisantes ?
La publication de cet avis intervient dans un phase critique de l’instruction que conduit Mme Bertella-Geffroy suite à la plainte déposée par la CRIIRAD le 1er mars 2001, conjointement avec l’AFMT et à ce jour plusieurs centaines de malades de la thyroïde. Il est difficile d’imaginer qu’il s’agit d’une coïncidence (surtout quand on connaît l’historique du dossier). De façon générale, depuis que la plainte a été déposée, les interventions des défenseurs de la gestion de l’État, et plus particulièrement du directeur du SCPRI, le Professeur Pellerin, n’ont cessé de se développer. La plus récente est certainement « l’appel solennel à la presse française », mais la plus éminente est sans conteste la « mise au point historique » rédigée par les professeurs Galle, Coursaget et Paulin, qui a été validée par les professeurs Tubiana et Aurengo et qui a reçu le soutien de l’Académie des Sciences (qui en a notamment assuré la diffusion). Le rapport de la CRIIRAD, qui inclut une critique sans concession de ce document, sera remis au plus tard le 18 avril prochain à Mme le Juge d’instruction et rendu public le 26 avril prochain. La CRIIRAD souhaite en effet que tous ceux qui ont tenté, et tentent encore, de faire obstacle à l’établissement de la vérité soient clairement identifiés et que leurs démarches soient portées à la connaissance de la Justice et du public.
D’ici là, la CRIIRAD essayera de déterminer le niveau de responsabilité des experts extérieurs à l’IRSN. En effet, autant l’on peut considérer que les membres de l’IRSN et de son Conseil scientifique sont informés des tenants et aboutissants du dossier et parfaitement conscients des enjeux, autant l’on peut s’interroger sur le niveau de connaissance des 5 experts extérieurs qui ont assisté le Conseil : Mmes CHAUMERLIAC et SIMMONDS et Mrs FEINBERG, MURITH et THIRY : sont-ils véritablement au fait de ce qui se joue ou ont-ils été manipulés ? Dans cette perspective, la CRIIRAD a demandé ce jour à M. Lacronique et à M. Repussard, respectivement président et directeur de l’IRSN, communication des coordonnées de ces 5 personnes.
La CRIIRAD aura d’ailleurs de nombreuses autres questions à leur poser. Ainsi, on peut lire dans l’avis du Conseil scientifique de l’IRSN que « pour les mesures réalisées après 1986, on ne peut qualifier d’optimal le choix des méthodes instrumentales et des protocoles ». Étant donné que cette conclusion s’applique aux évaluations de l’ensemble des laboratoires, et par conséquent au sien, la CRIIRAD demande que les arguments qui la sous-tendent lui soient présentés. En effet, les remarques qui figurent dans le rapport de l’IRSN s’appliquent sans réserve aux travaux du SCPRI qui sont entachés de graves irrégularités mais pas à ceux du laboratoire de la CRIIRAD qui a établi, et appliqué, des protocoles de prélèvement, préparation et analyses des échantillons spécialement adaptés à l’évaluation des retombées radioactives et tout à fait comparables aux travaux de référence conduits dans ce domaine à l’étranger. Puisque le Conseil scientifique de l’IRSN se permet d’émettre un jugement défavorable sur ce travail, il va falloir qu’il étaye ses accusations, documents et chiffres à l’appui ! C’est le moins que l’on puisse exiger d’un Institut public d’expertise qui déclare s’être doté d’une charte éthique !
Sur toutes ces questions, les responsables de la CRIIRAD sont disposés à être confrontés, de façon publique, à l’ensemble de leurs contradicteurs.
Par ailleurs, compte tenu de la gravité des faits et du contexte, la CRIIRAD a également demandé ce matin aux responsables de l’IRSN la liste des ministères de tutelle qui ont demandé l’établissement de ce rapport. Dès qu’elle disposera de cette information, la CRIIRAD demandera d’urgence un rendez-vous aux ministres concernés.
La CRIIRAD souhaite terminer sur une remarque importante pour l’avenir de notre protection.
Entre 1997 et 2003, une petite minorité de scientifiques appartenant à l’IPSN, puis intégrés à l’IRSN, avaient essayé de faire évoluer les choses dans le bon sens. Sous l’impulsion, notamment, de Didier Louvat, alors responsable du laboratoire de radioécologie de Cadarache, une carte de contamination validant les ordres de grandeur des évaluations de la CRIIRAD avait été publiée. C’est d’ailleurs cette publication qui a déchaîné les foudres de l’establishment nucléaire. Aujourd’hui, cette phase d’ouverture est définitivement achevée. Ceux qui avaient essayé de tourner la page de la désinformation ont quitté l’IRSN, partis à l’étranger ou dans d’autres organismes comme l’INERIS, et ceux qui sont restés sont aujourd’hui rentrés dans le rang ou remisés dans des placards et autres voies de garage.
En cas de nouvel accident, une chose est sure, il n’y aura pas une seule voix discordante au sein de l’Institut officiel d’expertise, tout le monde parlera d’une seule voix... et elle aura les mêmes intonations qu’en 1986 !
Pour plus d’information (et notamment consultation des bilans SCPRI des 7 et 14 mai 1986) :