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Romeurope ment !

Publie le lundi 15 mai 2006 par Open-Publishing

Le rapport Romeurope 2005 est mensonger

Ci-dessous vous trouverez :
Une description rapide de l’émission « Délinquance : la route des Roms », diffusée le 11 février 2005 sur France 5, dans le cadre de la série « C dans l’air ».
La partie du rapport Romeurope relatant cette affaire et ses suites.
Nos clarifications et nos commentaires sur cette partie mensongère et trompeuse du rapport Romeurope. Rien, - et encore moins une éventuelle recherche de fonds, - ne saurait justifier une telle hypocrisie. Cette manière de mentir, ouvertement, nous réconforte dans la position que nous avons prise il y a un an : quitter cette structure autosuffisante dont les actions ou les inactions peuvent se révéler destructrices dans le plus ou moins long terme.

Les associations rroms

 Rromani Baxt
 Ternikano Berno - Cercle de la Jeunesse
 Centre AVER de recherche et d’action sur toutes les formes de racisme
 La voix des Rroms
 Femmes rroms, sinté et kalé

Contact : lavoixdesrroms@yahoo.fr

L’émission « Délinquance : la route des Roms » en quelques mots

Invités :

1. Xavier Raufer, criminologue, membre fondateur de l’organisation « Occident », qu’il ne nous semble pas nécessaire de présenter

2. Yves-Marie Laulan, de l’Institut de Géopolitique des populations, ayant travaillé au Comité Economique de l’OTAN et connu pour ces idées bien à droite plus que pour ses compétences professionnelles, surtout en géopolitique. On lui doit, à l’occasion de cette émission, l’expression « Gitans de Roumanie »

3. Jean-Pierre Rosenczweig, juge pour enfants au Tribunal de Bobigny. Sans être ouvertement raciste, il semble prêt à tout pour passer à la télé

4. Antonio Fiori, policier du syndicat « Alliance », le seul sur le plateau à ne pas avoir tenu de propos raciste, même si parfois il disait des contrevérités flagrantes

Quelques propos tenus :

Présentation de l’émission par Yves Calvi : « Ils sont en effet l’objet de ségrégation dans toute l’Europe, à l’Est comme à l’Ouest. Ils sont aussi une préoccupation permanente pour les policiers, dont la police française. La multiplication des affaires de délinquance concernant les Rroms est assez stupéfiante comme en témoignent les chiffres sur les mineurs à Paris, de la criminalité organisée aux bandes de gamins. Nous avons intitulé cette émission ce soir : « Délinquance, la route des Rroms » »

Les invités :
1. « ... je crois qu’il faut se tenir un peu à distance de l’angélisme, et toute criminalité organisée à base clanique ou ethnique a une loi du silence...
2. C’est de la criminalité organisée par clan. »
3. « On insiste beaucoup, et peut-être à juste titre, sur l’aspect « criminalité » de la communauté rrom, mais il faut s’interroger aussi sur la façon dont ils sont en mesure de gagner leur vie et référons nous par conséquence à la Roumanie. En Roumanie on estime que près d’un cinquième de la communauté des « gitans » est vraiment criminogène et se livre à des activités délinquantes et 50% m’a-t-on dit des prostituées à Bucarest sont des « gitanes », je ne suis pas sûr du chiffre... »

Notre analyse des faits :

L’idée qui traverse toute l’émission est que les Rroms se livreraient à une « criminalité organisée à base ethnique », qu’ils sont extrêmement dangereux et, de toute façon, non intégrables dans nos sociétés modernes.
C’est donc une incitation à la haine raciale tout à fait évidente ; pour mieux s’en rendre compte, il suffit de lire ces phrases en remplaçant les mots « Roms » par « Juifs », « Arabes », ou « Polonais ». Elle est aussi très dangereuse, dans la mesure où l’émission est diffusée à une heure de grande écoute sur la chaîne culturelle France 5 et qu’elle est librement utilisable en classe, comme il en est fait mention à son début et comme c’est le cas pour toutes les émissions de la série « C dans l’air ».

Extrait du rapport Romeurope relatif à cet événement

L’émission C dans l’air

Le 11 février 2005 la chaîne culturelle française, France 5, diffusait à une heure de grande écoute, dans le cadre de sa série C dans l’air, une émission intitulée : " Délinquance : la route des Roms ". L’animateur de l’émission, Yves Calvi et ses invités ont pendant plus d’une heure " enchaîné amalgames, préjugés racistes et fausses informations pour faire croire aux téléspectateurs que les rroms sont des criminels et donc un danger pour la société ou, dans le meilleur des cas ne sont pas intégrable dans une société moderne. "

Toutes les associations et comités de citoyens participant au Collectif Romeurope, extrêmement choqués, se sont émus et ont fait part de leur indignation. Les associations rroms ont été particulièrement traumatisées. Des discussions se sont engagées sur les possibilités de saisir la justice. Les associations rroms souhaitaient une plainte avec constitution de partie civile, ce qui n’a pas été possible étant donné le risque juridique avec des contraintes financières liées à ce genre de plainte en matière d’incitation à la haine raciale. Il s’en est suivi un différend qui a conduit trois associations rroms à quitter le Collectif Romeurope lors d’une réunion le 27 avril 2005.

Les associations rroms d’une part, le collectif Romeurope d’autre part ont écrit à la direction de la chaîne, au CSA et au Procureur de la République. Le CSA a vivement condamné la chaîne. Des négociations ont été entamées avec la Direction de France 5 pour aboutir à un débat contradictoire, ce que les associations rroms n’ont pas souhaité. Cependant un geste a été fait, dont les parties étaient d’accord pour considérer qu’il n’avait en aucun cas valeur de réparation, en diffusant à plusieurs reprises deux films qui visaient à éclairer les téléspectateurs sur un autre point de vue sur les Rroms : " Gitans, Tsiganes, Gens du voyage " de Roland Cottet et " Caravane 55 d’Anna Pitoun et Valérie Mitteaux qui retrace l’histoire de l’expulsion d’Achères d’avril 2004 et de la lutte de la municipalité de cette ville aux côtés des Rroms.

Le Conseil de l’Europe a adressé une lettre au Président de France Télévision pour dénoncer les amalgames qui ont ponctué cette émission, exprimer ses regrets par rapport à l’absence de Roms et gens du voyage et demander un débat auquel participeraient des représentants de la communauté ;

Nos clarifications et commentaires sur cette partie du rapport

Le « traumatisme » des associations rroms versus l’indignation du collectif Romeurope

Il est difficile de vérifier les sentiments des uns et des autres : choc, indignation... Certes, on ne peut être que choqué et révolté. Imaginerait-on une émission intitulé "Délinquance : la route des Chinois" ou bien "des Juifs" ? Ceci dit, Romeurope n’est pas censé s’apitoyer sur telle ou telle manifestation de racisme mais bien la combattre et agir pour le respect des droits des Roms. Au lieu de cela, et c’est la touche médicale de ce collectif, Romeurope diagnostique un traumatisme particulièrement fort chez les associations rroms. Nous demanderons à quelqu’un qui sait lire (car évidemment nous mêmes sommes analphabètes, comme tous les tsiganes) de nous trouver des psychiatres dans l’annuaire. En attendant, nous continuerons à agir sous l’emprise de pulsions suscitées par ce traumatisme.

Le mystérieux « risque juridique » avec des soi-disant « contraintes financières » lié à la plainte

Est-ce notre traumatisme qui nous a fait oublier les discussions d’il y a un an ou bien la mauvaise foi de Romeurope qui n’a fait que grandir depuis lors ? LES ASSOCIATIONS RROMS N’ONT JAMAIS DEMANDE UNE PLAINTE AVEC CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE, comme le rapport le prétend. Ceci n’était pas alors à l’ordre du jour. Nous n’avons demandé que le dépôt d’une plainte simple, c’est-à-dire une lettre adressée au Procureur de la République, indiquant les faits avec une qualification juridique préalable (provocation à la haine raciale en l’occurrence) et lui demandant d’engager des poursuites. Etant donné que la Ligue des Droits de l’Homme et le MRAP, membres de Romeurope, ont une certaine expérience en la matière, nous leur avons demandé de porter cette plainte simple, croyant (certainement à tort d’ailleurs) que leur voix aurait plus de poids que celle de nos associations rroms, ni aussi anciennes, ni aussi connues.

Parlons du fameux « risque juridique » : la Ligue des Droits de l’Homme et le MRAP ont en effet soutenu que leurs avocats ne pensaient pas gagner un tel procès. Pourtant, jamais ces avocats n’ont présenté leurs arguments et leur analyse juridiques au collectif Romeurope, que ce soit par oral ou par écrit. Jamais ils n’ont contacté, ni les associations rroms qui insistaient pour agir en justice, ni l’avocat de ces dernières. Nous aurions pourtant aimé connaître la teneur de cet avis qui a poussé les associations antiracistes à s’abstenir, évidemment dans l’intérêt bien compris des Rroms. Cela nous aurait peut-être aidé à guérir de notre traumatisme.
"Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre un procès" - tel était le leitmotiv LDH-MRAP depuis mi février jusqu’au 27 avril 2005, date à laquelle, lassées d’attendre et indignées de l’immobilisme des "grands", les associations rroms ont quitté le collectif. Différend il y a eu donc, mais il portait sur cette question de principe et non pas sur une quelconque question d’argent, comme le rapport le soutient avec une hypocrisie déconcertante.

Nous nous interrogeons sur les raisons réelles pour lesquelles la LDH et le MRAP n’ont pas voulu porter plainte et n’avons reçu aucune réponse satisfaisante sur ce point.

Quant aux prétendues "contraintes financières", elles n’existent qu’en cas de plainte avec constitution de partie civile, ce que les associations rroms, répétons-le, n’ont jamais demandé. Le seul coût d’une plainte simple, - pour laquelle nous avions sollicité la LDH et le MRAP, - est approximativement de six euros, correspondant à l’envoi d’un courrier avec accusé de réception. Aucune association membre de Romeurope n’a souhaité envoyer une telle lettre au Procureur de la République.

Enfin, pour l’éventualité où nous serions obligés de déposer une plainte avec constitution de partie civile, nous avions indiqué à Romeurope que nous allions faire le nécessaire pour trouver auprès de donateurs étrangers, - notamment auprès du Centre européen des droits des Rroms, basé à Budapest, qui est spécialisé en la matière, - la somme à consigner.
La question demeure alors : Quelle est la raison de l’inaction du collectif Romeurope, que le rapport tente de cacher sous le prétexte d’une fausse contrainte financière, tentant au passage de donner des associations rroms une image de mendiant agressif ?

Qui a fait quoi après l’émission ?

Selon le rapport, « les associations rroms d’une part, le collectif Romeurope d’autre part ont écrit à la direction de la chaîne, au CSA et au Procureur de la République. Le CSA a vivement condamné la chaîne. ». Il est curieux de voir comment les grands esprits bien-pensants présentent les choses. Le "d’une part" et "d’autre part" dans cette phrase ne veulent strictement rien dire, ou plutôt cherchent à faire croire des choses.... Jusqu’à preuve du contraire, ce sont les associations rroms et elles seules qui ont saisi le Procureur de la République. Evidemment, elles n’ont fait en cela que leur devoir et ne demandent ni des prix ni des reconnaissances particulières. Le racisme n’est pas une opinion, c’est un délit ! - dit-on. Certains le disent, d’autres agissent en conséquence, d’autres encore font les deux à la fois. A bon entendeur !

S’agissant des discussions avec France 5 :
(voir aussi la réaction du Centre AVER de recherche et d’action sur toutes les formes de racisme, page 6)

Les associations rroms n’ont participé à aucune négociation avec la direction de France 5 dans la mesure où celle-ci a refusé ce qui était un préalable nécessaire et évident à toute discussion, à savoir la reconnaissance du caractère raciste des propos tenus dans l’émission. Le rapport est bien peu disert à cet endroit et pourtant on aurait bien aimé en savoir un peu plus sur le contenu des échanges entre Romeurope et France 5... Ou quand France 5 tente vainement et piteusement de se racheter sans même présenter des excuses. Pourquoi ont-ils diffusé le film " Caravane 55 " qu’ils avaient pourtant refusé lors de sa sortie ? Notre traumatisme nous incite à penser que les différentes actions lancées par les associations rroms n’y sont pas étrangères.

S’agissant du Conseil de l’Europe :

Effectivement, sollicité par les associations rroms, le Conseil de l’Europe a écrit une lettre particulièrement critique au Président de France Télévision. Nous saisissons encore une fois l’occasion pour féliciter le courage de cette organisation intergouvernementale, qui malgré les contraintes de protocole et de diplomatie inhérentes à toute organisation de ce type, n’a pas hésité à prendre une position très claire et très ferme face à ce racisme manifeste. A comparer le ton de cette lettre avec celui de Romeurope et des associations anti-racistes qui en font partie, on constate que nous vivons dans un monde bien curieux...

Enfin, deux remarques importantes sur cette affaire :
1. Le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel a pris une décision de mise en garde à l’encontre de France 5 pour cette émission. Il est curieux de voir que le rapport de Romeurope est évasif sur ce point, pourtant important. Est-ce parce que la décision du CSA ne cite pas Romeurope mais les associations rroms ? Encore une fois, c’est peut-être le traumatisme profond diagnostiqué par les grands esprits de Romeurope qui nous fait croire des imbécillités de ce genre. Mais bon, nous l’avons dit, nous sommes irresponsables, car traumatisés

2. Romeurope avait promis une « réponse politique forte ». Pour l’heure, le seul résultat tangible tient dans les quelques lignes que nous venons de commenter. Si cette affaire devait finir par atterrir entre les mains de la justice, ce ne serait certainement pas du fait du Collectif Romeurope ni d’aucune de ses composantes, que leur vocation soit de combattre le racisme ou autre.

NEGOCIER AVEC DES RACISTES ?
Le Centre AVER de recherche et d’action sur toutes les formes de racisme a la réponse claire : NON !

On a pu entendre (décryptage mot à mot effectué par nos soins d’après la cassette de l’émission) ces propos dans la bouche des participants :

Premier passage :

M. RAUFER : ...Bien entendu, bien entendu, je crois qu il faut se tenir un peu à distance de l’angélisme, et toute criminalité organisée à base clanique ou ethnique a une loi du silence....

Oser penser, et de plus dire à la télévision, qu’il existe une criminalité organisée à base ethnique est un propos d’une extrême gravité qui tombe sans aucune espèce de doute sous le coup des lois réprimant la provocation à la haine raciale. Des groupes ethniques directement désignés comme étant criminels, ce genre de délires, qui revient malheureusement à la mode, rappelle fâcheusement les heures les plus sombres du 20ème siècle (ou jadis en Inde colonisée, sous la plume de fonctionnaires coloniaux classifiant les populations indiennes en ayant inventé le terme de « criminal tribes », ce qui n’était guère plus conforme aux Droits de l’Homme).

Deuxième passage :

M. LAULAN : Mais il en faut, des gens comme vous, bien entendu, ceci étant , les enfants ou les jeunes filles que vous avez dans votre bureau du matin au soir ont des mères, ils ont des pères (deux mots inaudibles), autrement dit, l’influence familiale qui était soulignée tout à l’heure par notre ami Raufer a quand même une force extraordinaire dans ces familles (deux mots inaudibles, bredouillés) mon avis... donc pour arriver à un résultat, pour bien faire, soustraire ces enfants complètement à la, donc les déraciner, et vous pensez qu’en les déracinant, en les enlevant à leurs familles, vous allez par conséquent pouvoir les intégrer dans le courant de la société française

M. ROSENCWEIG : C’est un autre sujet.

M. LAULAN : Je vous souhaite beaucoup de plaisir, mais ça me paraît une mission impossible, parce qu’encore une fois...d’une part...
...
M. LAULAN : Parce que d’une part c’est assez inhumain d’enlever des enfants à leur père, à la mère, et d’autre part les liens familiaux dans la famille rrom sont quand même la base même des relations sociales, beaucoup plus que le clan, donc tout ceci me paraît, si vous voulez, une belle entreprise généreuse mais très largement vouée à l’échec.

C’est donc une « belle entreprise généreuse » que de vouloir arracher les enfants rroms à leur famille ? Pour le Code Pénal français, tout « transport forcé d’enfants » est un génocide.
D’où pactiser avec des racistes qui tiennent des propos aussi ouvertement fascistes, c’est s’en montrer complices. Il n’y a pas de « geste » à faire, ni à accepter. C’est pour cela que les négociations menées avec la 5 nous sont non seulement totalement étrangères, mais encore directement en contradiction avec le but que nous poursuivons, à savoir la lutte contre le racisme. Si les tout premiers tenants de l’innocence du capitaine Dreyfus avaient raisonné ainsi, il serait sans doute aujourd’hui encore considéré comme coupable...

D’une façon générale :

Oui, nous sommes traumatisés, mais cela ne nous empêche pas, bien au contraire, de porter plainte pour défendre notre honneur. Ne pas vouloir intenter un procès parce qu’on a peur de ne pas le gagner, en revanche, est-ce courageux ? Ou alors, est-ce courageux, de négocier avec des racistes qui le sont ouvertement et qui restent sur leur position, comme cela a été le cas avec la direction de France 5, qui n’a jamais voulu prendre ses distances avec cette émission ?