Social et européen, le forum d’Athènes promet

Altermondialisation . 30 000 participants sont attendus dans la capitale grecque, où le FSE va tenter de relancer le processus de construction d’une Europe solidaire.

de Thomas Lemahieu, Athènes (Grèce)

De la bruine londonienne au soleil athénien : pour la quatrième édition du Forum social européen (FSE), qui s’ouvre ce jeudi matin dans la capitale grecque et qui s’achèvera dimanche, les organisateurs locaux ont sorti toutes les couleurs de l’arc-en-ciel pour barioler le lieu des débats, situé à quelques centaines des grandes largeurs de la mer Méditerranée.

Alors qu’au niveau mondial le processus des forums sociaux parvient à se réinventer en permanence (l’expérience réussie, ces dernières semaines, des forums « polycentriques » de Bamako, Caracas et Karachi l’a démontré de manière fracassante), il s’agissait, dans l’esprit de l’écrasante majorité des 30 000 « délégués » attendus ces jours-ci à Athènes, de ravaler le FSE dans ses teintes d’origine, après les déconvenues de Londres en octobre 2004 : participation en nette baisse, mainmise sur l’organisation des organisations groupusculaires de l’extrême gauche britannique et de la mairie de Londres, contenu faiblard de la plupart des « débats » transformés en simples meetings... Et les organisateurs grecs ont mis un point d’honneur à tourner la page, en rendant au réseau Babels de traducteurs volontaires une place centrale dans le FSE, en concentrant le forum sur les « séminaires » d’élaboration des alternatives et d’articulation des actions, et surtout en prenant soin de mettre en valeur les dimensions et les thématiques proprement européennes du mouvement altermondialiste.

Car plus que jamais jus- que-là, peut-être, ce FSE tombe à pic : après le rejet du projet de constitution européenne en France et aux Pays-Bas, une large partie du mouvement altermondialiste s’est attelée à la rédaction d’une « charte des principes de l’autre Europe » qui devrait avancer à grands pas

à l’occasion du forum d’Athènes. Dans le contexte d’une « crise » européenne, alimentée par l’autisme des institutions et des gouvernements, ce document se donne pour ambition de dégager la voie vers une Europe solidaire, conçue comme une puissance alternative, sans domination économique ou militaire, dans la mondialisation actuelle, un espace de progrès et de justice sociale. Dans la foulée de la bataille toujours en cours contre la directive Bolkestein, un réseau permanent sur les services publics, regroupant les ATTAC d’Europe, des syndicats (Solidaires, FSU, CGT, la fédération des services publics de la CGIL italienne, l’UNISON britannique, la CSC et la FGTB belges...) et des autorités locales (les territoires « hors AGCS » ou « stop Bolkes- tein »), va être officiellement créé ces prochains jours à Athènes. Sur la lancée des rencontres régulières engagées depuis plusieurs FSE, les associations et les syndicats travaillant ensemble au niveau européen sur l’immigration, la citoyenneté, l’eau, la santé, l’éducation ou encore le chômage profiteront du forum pour s’élargir encore et approfondir la réflexion. Les mouvements féministes s’apprêtent à lancer, au cours d’une grande assemblée, un manifeste contre les violences faites aux femmes en Europe et contre la précarité.

sans faux nez ni langue de bois

Élément nouveau également dans le paysage altermondialiste : après la campagne unitaire pour le « non » au référendum sur la constitution européenne en France, après les résultats des élections en Allemagne et en Italie, la politique, jusqu’à la question délicate des éché- ances électorales, prend sa place dans le forum. Dans le programme du FSE, les dirigeants de Synaspismos (coalition de la gauche de la gauche) ou encore du PASOK (socialiste), tout comme les leaders du parti de la Gauche européenne ou de la IVe Internationale s’affichent désormais sans faux nez et sans problème, comme acteurs à part entière du mouvement altermondialiste. Dans ces conditions, le FSE d’Athènes promet d’être très social et très européen. Dans le processus tel qu’il a été jusqu’ici, ce n’est pas une lapalissade, c’est une bonne nouvelle.

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