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Thomas Regnier

Publie le jeudi 14 septembre 2006 par Open-Publishing
8 commentaires

de Franca Maï

Il existe des êtres humains sur cette terre que l’on aurait aimé rencontrer pour parler un peu, échanger des idées et des rires, dérober des instantanés de vie.

Parce que dans son for intérieur, on pressentait que même si les chemins parcourus se dévoilaient différents, la sensibilité était commune, à fleur de peau.

On pensait, on a le temps ou le hasard nous offrira ce rendez-vous. Thomas Regnier, critique littéraire au Nouvel Observateur était un de ceux-là.

Nos regards ne se sont pas croisés, nos bouches n’ont émis aucun son, mais les romans ont été notre fil invisible d’échange, lui, en les lisant moi, en découvrant ses critiques, toujours délicates et intelligentes.

Il s’est défenestré d’un étage pourri inflexible, ce mois d’Août. Il avait trente-quatre ans. L’âge du possible. Il a choisi de voler loin de ses propres fêlures. Il est enterré au cimetière du Montparnasse. Regrets et paix à son âme.

Messages

  • Chére Franca ,

    je ne connaissais pas ce jeune homme , mais tes mots m’ont profondement troublé , me renvoyant à un moment un peu similaire de ma vie .
    ""Il existe des êtres humains sur cette terre que l’on aurait aimé rencontrer pour parler un peu, échanger des idées et des rires, dérober des instantanés de vie.

    Parce que dans son for intérieur, on pressentait que même si les chemins parcourus se dévoilaient différents, la sensibilité était commune, à fleur de peau.""

    m’autorises tu à utiliser ces deux phrases , dans un contexte tout à fait différent ?
    Je comprendrais que tu me dises non , tant ce que tu as ecrit t’est personnel .

    claude de toulouse .

    • Bonjour Claude,

      Tu fais ce que tu veux.

      Thomas Regnier n’est malheureusement plus de ce monde pour lire ou entendre ces mots, et parfois on se dit que même les mots sont inutiles tellement certaines fêlures sont ancrées dans la chair. On comprend que l’on ne sait pas toujours entendre...Et on se sent petite, toute petite...

      Franca Maï

    • Merci Franca ,
      de m’avoir repondu , mais en lisant ta réponse , je me dis que utiliser des mots du domaine de l’intime et de la blessure d’un etre , serait totalement déplacé .
      Excuses moi meme d’y avoir pensé .
      claude de toulouse .

  • Adieu Thomas

    Le 30 Août dernier, à Paris, notre ami Thomas Regnier a mis fin à ses jours. Il avait 33 ans. Il était le petit fils de Robert Antelme, l’auteur de « l’espèce humaine » qui fut déporté à Buchenwald. Né à Rio de Janeiro, Thomas était un garçon à la fois lumineux et douloureux. Sa culture et sa sensibilité étaient immenses, mais il avait l’élégance de ne jamais les montrer. C’est son si tendre sourire dont, aujourd’hui, on veut se souvenir. Féru de philosophie et de littérature, il aimait Maurice Blanchot, Pierre Guyotat, Claude Lévi-Strauss, Marcel Schwob et le théâtre de l’Inde ancienne. Il avait rejoint « l’Observateur » pour dire, avec sincérité et brio, tout le bien ou tout le mal qu’il pensait des livres de l’actualité. S’il était parfois sévère, c’est qu’il plaçait la barre très haut. Le critique va nous manquer. L’homme de coeur nous manque déjà. L’un de ses derniers articles était consacré au roman de Nelly Harrau « Fraise » (Ramsay) et à son héroïne Célia, âgée de 7 ans : « Le réel est devenu pour elle un tyran rugueux auquel elle se heurte. La petite fille décide alors d’inventer sa vie au lieu de la vivre. »
    Jerôme Garcin

    Quelques critiques de Thomas Regnier

     « "La réalité est le seul dieu que nous vénérons ; le dernier qui reste en magasin, peut-être." Journaliste née en 1973, adoubée par Maurice Nadeau, Mona Chollet a décidé de partir en guerre contre la tyrannie insidieuse de ce nouvel épouvantail à moineaux qui a pour nom réalité. Un haro sur la langue de bois politicienne comme sur la télévision, ce « vaccin contre l’imprévisible », qui vaut comme une apologie de la rêverie, celle qu’ont célébrée ses auteurs de chevet, de Bachelard à Walser en passant par Flaubert et Stevenson. Loin de rééditer la vieille opposition rêve-réalité, la Tyrannie de la réalité préfère distinguer un réalisme stérile, celui du repli et de l’appauvrissement, et un réalisme apte, au contraire, à réconcilier profondément raison et imagination. Délaissant volontiers l’analyse pour la polémique, et n’hésitant pas à prendre Michel Houellebecq dans sa ligne de mire, Mona Chollet signe ici l’un des meilleurs essais littéraires de la rentrée. »
    Thomas Regnier, Le Nouvel Observateur, « Ovations », 23 septembre 2004

     « Un été sans juillet » par Salah Guemriche

    Victime d’un attentat OAS, Larbi, collégien de 16 ans, est dans le coma depuis le 1er juillet 1962, le jour de l’indépendance algérienne. Indépendance : un mot que Salah Guemriche choisit de mettre en guillemets, tant restent grandes les tensions entre l’Algérie et l’ancienne métropole. Prévarications, exode des pieds-noirs, massacre des harkis et de notables algériens, autant d’événements qui composent une après-guerre d’apocalypse. Le coauteur de « l’Ami algérien » en ressuscite les tourments, dans un récit porté par une grande intensité dramatique.
    Thomas Regnier. Le nouvel Observateur (Août 2004)

     Blasons de Georges Zaragoza

    Professeur de lettres ayant passé sa vie dans les livres, le héros de Blasons est un vieux garçon doublé d’un misanthrope. C’est sans rage, mais avec un infini dédain qu’il regarde vivre ses contemporains. Un peu à la manière d’un Schopenhauer des temps modernes. Ou des personnages sentencieux et vaguement nihilistes de Houellebecq. L’obsession sexuelle et la xénophobie en moins. Un jour, « parrain » -ainsi l’appellent les siens- se voit offrir, pour son anniversaire, une semaine de vacances dans une station balnéaire en Espagne. Au programme : moins un bain de mer, on s’en serait douté- bien que l’atrabilaire consente, à la fin, à retirer ses chaussettes- qu’un bain de médiocrité, celle de la platitude béate du tourisme de masse. Pour plagier le style de Elle, ce qui s’annonçait comme une promenade de santé se révélera un chemin de croix. Blasons est le vrai-faux journal tenu par le professeur au cours de son bref exil. Les minutes de son calvaire soigneusement consignées dans une « sorte d’agenda vert » prévu à cet effet. Loin de s’inscrire dans la tradition des blasonneurs, comme pourrait le laisser entendre le titre de son premier roman, Georges Zaragoza interroge, pour le retourner, le genre médiéval bien connu : montrant comment, sous l’oeil acide de l’humeur noire, les détails de corps comme l’existence sont voués à se dissoudre dans l’insignifiance des choses.
    Thomas Regnier

  • Chère Franca...
    Je suis la mère de Thomas Regnier ...
    Je viens de lire ,par hasard ton article sur lui...
    Je te remercie beaucoup...
    J’habite au Brésil,mais très bientôt je serais à Paris pour essayer de compreendre l’incomprénsible...
    Mon mail est :
    malu.gomide@terra.com.br

    À bientôt et encore merci pour tes si gentis môts...

    • Chère Madame,

      Je lis depuis de nombreuses années le N.O, et j’aimais beaucoup les critiques de Thomas Regnier, bien que ne sachant pas vraiment qui il était. Je regarde, la petite photo du NO de cette semaine, et je n’arrive pas à détacher mon regard. J’ai deux fils, d’un l’un de cet âge. Et je me dis : la vie est donc si dure, pour cette jeunesse qui n’arrive pas à trouver ses marques. Je suis profondément peinée. Je vous exprime toute mon affection de mère. Robert Antelme, je connaissais grâce aux livres de M. DURAS.

      Mirella. De Lyon.

    • Chère Madame

      C’est une verité cruelle votre réflexion sur la jeunesse actuelle.
      Je suis très émue par vos môts sur mon fils.
      C’est vrai qu’il avait un regard inoubliable...
      Ma douleur est presque insupportable.
      Je vous remercie de tout mon coeur.
      Malu.

  • Il n’y a plus de France BAUD disait CARNAC, perdu quelquepart dans les Landes entre deux machines.

    DARGOON