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Turquie : trois journalistes kurdes, un éditeur et un auteur arrêtés
par Maxime Azadi
Publie le jeudi 6 octobre 2011 par Maxime Azadi - Open-PublishingLa police turque arrête trois journalistes kurdes, un éditeur et un auteur, lors des opérations visant le principal parti kurde BDP, tandis que la justice a interdit l’accès au site internet de l’agence de presse kurde Firat. La Turquie est aujourd’hui la plus grande prison de monde pour les journalistes.
L’éditeur du journal Ozgur Gundem, Kazim Seker, a été arrêté le 4 octobre à Istanbul lors des opérations policières menées simultanément dans six villes contre le parti kurde qui s’étaient soldées par l’arrestation de plus de 150 personnes, dont plusieurs dirigeants du BDP. Parmi eux figurent l’éditeur de la Maison d’édition Belge, Cihan Deniz Zarakolu qui est également le traducteur de plusieurs œuvres dont "La philosophie politique" de Thomas Hobbes et l’auteur Aziz Tunç. Ce dernier est connu pour son livre sur le massacre de Maras, désigné comme le livre du mois par le PEN.
Pour le directeur de la Maison d’édition Belge qui dirige aussi le Comité pour la Liberté de Publication de l’Union des Éditeurs de Turquie (TYB), Ragip Zarakolu, père de Cihan Deniz Zarakolu, ces arrestations font partie d’un plan pour museler les auteurs et éditeurs de Belge. Il a affirmé que son fils a été arrêté pour avoir donné des cours sur la science politique et l’histoire de la pensée politique dans l’Académie du BDP.
Le 3 octobre, la police a arrêté Tayyip Temel, journaliste et ancien rédacteur en chef d’Azadiya Welat, le seul quotidien en langue kurde, dans le cadre de l’affaire KCK (Union des communautés du Kurdistan), une organisation considérée comme la branche urbaine du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), alors qu’il s’agit d’un système confédéral et son chef du conseil est Murat Karayilan.
Le 1e octobre, le correspondant à Mersin de l’agence de presse kurde DIHA, Aydın Yıldız, a été arrêté pour les mêmes motifs et écroué le 4 octobre.
L’ACCÈS A L’AGENCE KURDE INTERDIT
L’accès au site d’internet de l’agence de presse kurde Firat, basé à Amsterdam, a été interdit par la justice turque par une décision datée du 21 septembre 2011. Le Firat News Agency est souvent victime de cyber-attaque provenant de Turquie et pointée du doigt par les dirigeants turcs. Très connue en Turquie, l’agence est dans la ligne de mire des autorités depuis 2005. Son site web a été interdit au moins cinq reprises, ce qui a conduit l’agence à changer plusieurs fois ses noms de domaine. La Turquie figure dans la liste des "pays sous surveillance", publiée par Reporters sans frontières.
LA PLUS GRANDE PRISON DU MONDE
La plate-forme de soutien aux journalistes emprisonnés a exprimé sa profonde inquiétude devant les arrestations de journalistes, affirmant qu’il s’agit des atteintes directes contre la liberté d’expression et de la presse. « La loi anti-terroriste doit être annulé » a dit la plate-forme, pour qui 63 journalistes, dont 12 rédacteurs en chef, sont aujourd’hui dans les prisons turques.
De son coté, la plate-forme de la liberté aux journalistes (GOP) affirme que la justice turque a enfermé 68 journalistes, dont dix femmes. La liste de ces deux initiatives ne compte pas les collaborateurs de médias comme des distributeurs de journaux, alors que la police turque ne cesse pas de traquer, enfermer et intimider ces distributeurs kurdes.
L’Institut international de la presse (IPI) avait appelé le gouvernement turc à libérer immédiatement tous les journalistes emprisonnés, dans la déclaration finale de sa 60e Assemblée générale tenue le 26 septembre à Taipei, à Taiwan.
Des dizaines de journaux kurdes, mais aussi gauches alternatives ont été interdis depuis l’arrivé de l’AKP au pouvoir, dont au moins quatre depuis le 21 aout dernier. Les médias kurdes, notamment Azadiya Welat, Ozgur Gundem et Diha, sont dans la ligne de mire des autorités.
Azadiya Welat a été suspendu à neuf reprises depuis qu’il sort de manière quotidienne en 2006. Parmi les journalistes en prison figurent au moins neuf journalistes de ce quotidien kurde, dont trois anciens rédacteurs en chef et dix correspondants de Diha.