Accueil > Un Mai 68 au ralenti ?
Partout dans le Monde des révoltes éclatent, mais nul ne les mets en perspective.
Que l’on refléchisse un peu :
En Grêce, de grandes grèves dans les Universités sont durement réprimés.
Au Chili, il en est de même.
Au Mexique, 2 enseignants en gréve ont été abattu par la Police.
En Guinée, des manifestations ont été violemment réprimé par les unités antiémeutes faisant ainsi une dizaine de morts, alors que le pays semble devenir un objectif stratégique du fait de ses ressources pétrolières.
En Chine, si j’en crois l’International Herald Tribune, de grandes émeutes ont eu lieu dans differents campus, du fait de la corruption des dirigeants de ses universités.
La France a ouvert le bal avec les manifestations anti-CPE.
L’Italie a elle aussi connue son mouvement social d’ampleur, tout comme la Belgique et la Grande Bretagne.
La perspective d’un conflit armée contre l’Iran semble mettre en ébulition les milieux militants des Etats Unis.
Il semble qu’une vague de contestations, qui n’a pas encore trouvé sa cohérence, commence a balayer le monde.
Est ce une révolte au ralentie, qui pourrait se transformer en révolte à plus grande échelle ?
Messages
1. > Un Mai 68 au ralenti ?, 23 juin 2006, 02:51
Emeutes en Chine
Voilà l’article que j’évoque dans mon petit texte.
2. > Un Mai 68 au ralenti ?, 23 juin 2006, 09:38
Oui, c’est pas qu’un simple mouvement, mais un tsunami qui enfle, prenant de la vigueur dans les profondeurs de la misère, de l’exploitation, du rejet, et plus rien ne peut l’arrêter.
En détruisant le mur de Berlin, les libéraux venaient de signer la mort de leur propre système. On assiste donc à l’effondrement du capitalisme sauvage, sanguinaire. Mieux à son implosion. Ce système est allé jusqu’au bout de sa logique.
Les peuples ont un élastique souple, mais jusqu’à un certain degré de tolérance. Après, no pasaran. Quand l’élastique lâchera, ça fera mal, et ce sera mai 68 mais en plus fort, en plus grand, à l’échelle de la planète. Normal.
3. > Un Mai 68 au ralenti ?, 23 juin 2006, 09:53
La France a ouvert le bal, tant mieux, mais le bal n’est pas termine.N’attendons pas 2007 et leur election de merde.Tous dehors en septembre,ouvriers, chomeurs, etudiants et tous ceux qui en n’ont ras le bol de ce systeme de merde.Abolition de la societe marchande en route pour la societe vivante.
4. > Un Mai 68 au ralenti ?, 23 juin 2006, 12:46
Non pas 68 qui n’a été qu’une exitation passagère des fils de bourgeois, pour prendre les bonnes places ( arrivés aux manettes ceux-ci nous ont joués les années fric, puis bobo,..) ; mais plutôt 48, 1848 vrai mouvement internationnal pour plus de justice sociale.
Mais attention, en France cela a donné Louis-Napoléon, dit Naboléon, suivez mon regard...
1. > Un Mai 68 au ralenti ?, 23 juin 2006, 13:33
Tu dis des bêtises sur 68 parce que tu regardes trop la télé et que celle-ci ne te montre que des traîtres et te fait croire que tous les soixanthuitads étaient des bourgeois !
La télé a seulement oublié de te dire qu’en 68 il y a eu 56% de grévistes pendant 10 jours !
Mieux qu’en 36 !
2. > Un Mai 68 au ralenti ?, 23 juin 2006, 14:01
Mieux vaut soixantehuitard que jamais.
Sur les barricades de Mai 68 il y avait beaucoup de jeunes bourgeois, mais pas que.
La critique de la société de consommation fut noyée par les luttes syndicales et les médias ont jeté un voile pudique sur ce thème central de la révolte. C’était déjà ce que nous appellons aujourd’hui l’ "anti-libéralisme".
On avait mis la révolution à la porte, elle revient par la fenêtre. C’est con, hein, Sarko ??
Flash
3. > Un Mai 68 au ralenti ?, 24 juin 2006, 13:11
68 fut un formidable mouvement social dont le détonateur fut le mouvement étudiant.
Les barricades ? Rapidement des milliers de jeunes travailleurs y allerent... Les luttes sociales ? Ce ne fut pas qu’une grêve, mais énormement de grandes entreprises occuppées par les travailleurs, certaines villes quasi sous contrôle du mouvement social.
C’est la difference fondamentale avec les luttes étudiantes qui existerent, au même moment, un peu partout en Europe et dans le monde, c’est que certains pays, dont la France, l’Italie et la Tchécosolvaquie, les travailleurs se mirent massivement en mouvement, le mouvement social rentrant immédiatement dans la danse (ou en léger différé ) .
Même dans les gauchistes soixanthuitards la plupart n’ont pas fait bombance dans le circuit bourgeois. Il ne faut pas confondre 3 guguss retournés dans le giron bourgeois avec l’essentiel des gauchistes.
Copas
4. > Un Mai 68 au ralenti ?, 24 juin 2006, 20:00
Cher Copas
Les grands mouvements sociaux, la France en avait l’habitude. Avec les accords de Grenelle, le patronat de l’époque achetait la paix sociale et les politiques sauvaient leurs peaux, mais ce que Mai 68 avait déclenché n’était rien moins que la remise en cause de l’ordre moral et du SENS de la société humaine. Pour la première fois étaient mis en opposition l’être et l’avoir. La chimère du consumérisme crétin était dénoncée, la consommation de masse, base du capitalisme Keynésien ridiculisée, (métro-boulot-dodo). C’était SUBSERSIF, et le pouvoir, malgré son temps de retard a fini par le comprendre en décenchant la répression policière et en travaillant l’opinion sur le la peur des "rouges".
Depuis, pendant 38 ans, les médias ont pris grand soin de noyer cette critique dans le flou et d’en donner une interprétation détournée. Tu parles, des fois que ça nous reprenne !
Et bien, ça me reprend !
5. > Un Mai 68 au ralenti ?, 24 juin 2006, 20:01
.... Flash
6. > Un Mai 68 au ralenti ?, 3 juin 2007, 10:23
LE ROLE DES TRAVAILLEURS IMMIGRES EN 1968
On évoque peu le rôle des travailleurs immigrés dans la situation pré-révolutionnaire de 1968.
– Retour sur les conditions de vie :
Il y a vers la fin des années 1960 environ 3 millions d’immigrés en France : au moins 600 000 Espagnols et autant d’Italiens, au moins 500 000 Algériens, probablement 600 000 Portugais dont la moitié sont clandestins. En chiffres bruts ce n’est pas si différent des chiffres actuels, au moins pour les Algériens et les Portugais (au total il y a aujourd’hui 3,5 millions d’immigrés en France, dont 600 000 Portugais et autant d’Algériens). Toutefois, il y a une forte différence dans la pyramide des âges. A l’époque, ce sont beaucoup de jeunes travailleurs masculins, célibataires ou dont la famille est encore dans leur pays d’origine. Il n’y a pratiquement pas la couche que nous appelons aujourd’hui la deuxième génération.
Ils vivent dans des conditions effroyables, soit dans des hôtels garnis complètement insalubres, soit dans des bidonvilles (on compte encore plus de 200 bidonvilles en France à cette époque), dont la moitié en région parisienne (qui est d’ailleurs la zone concentrant plus du tiers des immigrés dans le pays).
Les Portugais et les Italiens travaillent surtout dans le bâtiment, les Algériens et les Marocains sont plus nombreux dans l’industrie. Les Maghrébins sont de façon dominante manoeuvres, alors que les Italiens sont plus souvent des ouvriers qualifiés. Au total 85 % des immigrés n’ont aucune qualification professionnelle, beaucoup de professions qualifiées leur étant aussi interdites par la loi.
Il y a environ 500 000 ouvriers immigrés dans le bâtiment, 370 000 dans la métallurgie et la sidérurgie, 260 000 dans l’agriculture. Les femmes sont souvent femmes de ménage. Les proportions d’immigrés sont très variables suivant les secteurs de la production : dans les hauts-fourneaux en Meurthe-et Moselle, 80 % des ouvriers sont immigrés, chez Citroën il y en a 30 %, il y a 7 000 ouvriers immigrés chez Renault (11 % à l’usine de Cléon).
En général l’activité politique est interdite pour les immigrés ; au niveau syndical ils ne peuvent être élus délégués syndicaux qu’après 6 à 24 mois d’ancienneté, or très souvent les ouvriers immigrés ont des contrats de travail de 6 mois seulement, ce qui les empêche d’être intégrés dans les syndicats.
– Le prolétariat est divisé entre ses différentes composantes :
On dit des Portugais qu’ils sont arriérés et briseurs de grève pour dresser leurs frères de classe contre eux. En fait, ils sont soumis depuis 35 ans à la dictature de Salazar ; en cas d’activité politique ils sont déportés et finissent dans les prisons du Portugal ou dans les colonies en Afrique australe. Plusieurs dizaines d’ouvriers portugais ont ainsi disparu après Mai 1968, ceux qui avaient joué un rôle actif pendant la grève.
Les ouvriers algériens sortent depuis peu d’une guerre de libération nationale victorieuse contre l’impérialisme français. Il semble qu’ils ont solidement fait grève depuis le premier jour. Dans leurs luttes, ils ont souvent en face d’eux des contre-maîtres et autres chefs qui ont été recrutés sur la base de leurs services passés dans les paras ou autres troupes de choc spécialisées dans la répression et la torture en Algérie.
Bien entendu, la bourgeoisie a longtemps dressé les diverses communautés les unes contre les autres. Mais dans le courant de Mai 68 s’effondre largement cette division du prolétariat entre ses différentes couches ethniques. Notamment dans le bâtiment, ce sont les immigrés qui sont à l’avant-garde, car les ouvriers français représentent l’aristocratie ouvrière qui ne veut pas faire grève pendant que les trois quarts des manoeuvres dans le bâtiment sont immigrés.
Si la présence de la CGT ou du PCF est souvent vue pendant cette période comme une protection contre les pires aspects du racisme, la pourriture chauvine du PCF à l’époque de Mai 68 existait bien. Ainsi, quand des secours étaient versés aux grévistes en mai-juin 68, les Algériens devaient se battre pour que le montant de l’aide tienne compte de leur famille restée en Algérie.
Après Mai 68 il y a eu les déportations d’immigrés (officiellement 215 jusqu’en décembre 1968), notamment des Espagnols (c’est l’Espagne de Franco), des Algériens opposants à Boumedienne ; cela a entraîné des protestations assez importantes, relayées surtout par les pablistes et les intellectuels libéraux comme Sartre, etc.
Le fait que la question immigrés ait été peu ou pas soulevée en Mai 68 représente une capitulation au social-chauvinisme et à sa propre bourgeoisie. Dans un pays qui sortait d’une sale guerre coloniale dans laquelle les directions réformistes de la classe ouvrière, sous couvert « des valeurs de la République », défendaient leur propre impérialisme, cette question était clé pour l’unité du prolétariat nécessaire au renversement de la bourgeoisie.
– Citroën et la question immigrés
L’exemple de Citroën est indicatif. Beaucoup des contradictions sociales étaient exacerbées. Il y avait 60 % d’ouvriers immigrés, et seulement 1 500 ouvriers syndiqués sur un total de 40 000, alors que chez Renault le taux de syndicalisation est de 18 %, ce qui est proche de la moyenne nationale. La CGT avait appelé à la grève pour le 20 mai. Un « comité d’action » Citroën s’était formé avec des étudiants de la fac de Censier. Il avait produit deux tracts. Le premier en français sur les comités d’action étudiants-ouvriers et la nécessité de l’unité d’action, le deuxième pour les immigrés, avec un autre texte demandant les mêmes droits politiques et syndicaux pour les travailleurs étrangers.
D’après le document d’Intercontinental Press les immigrés étaient d’abord réticents à se joindre à l’occupation de l’usine. Mais après deux heures de discussion avec les étudiants, ils se joignirent en masse à l’occupation, ce qui inquiéta suffisamment les bureaucrates pour qu’ils se mettent immédiatement à empêcher les étudiants d’entrer dans l’usine occupée. De plus, le contrôle étroit sur les piquets de grève par les bureaucrates fit que ceux-ci furent désertés en masse par les jeunes ouvriers. Donc les étudiants radicalisés se lancèrent dans des appels à des assemblées générales ou des comités dans le but explicite de contourner les bureaucrates, et firent de la propagande politique et du travail de solidarité (comme la distribution de nourriture) dans les ghettos immigrés et les bidonvilles. A Citroën, ils allaient être parmi les derniers à reprendre le travail, nettement après Billancourt et les principales usines.
– Transcroissance des luttes.
On voit aussi le rôle de pont naturel vers la révolution dans d’autres pays que forment les ouvriers immigrés : des membres du comité Citroën sont allés à Turin pour établir des contacts avec la Fiat, qui était alors la plus grosse entreprise d’Europe. L’année suivante, il allait y avoir l’« automne chaud » en Italie où il y a eu la formation d’éléments de double pouvoir ouvrier. Et 6 ans plus tard, il y avait la situation révolutionnaire qui renversa la dictature de Salazar au Portugal.