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Un an après, Bilin ne se rend pas

Publie le mercredi 13 juillet 2005 par Open-Publishing

Le village palestinien est devenu le centre de la résistance contre la barrière de l’apartheid. Des Arabes, des Israéliens et des internationaux luttent pour défendre les principes établis il y a un an par la décision de la Cour internationale de justice de La Haye.

de MICHELE GIORGIO traduit de l’italien par karl&rosa

Bilin est le dernier rempart de la lutte contre le mur. Un an après l’historique sentence de la Cour internationale de La Haye qui condamne le projet israélien, les 1.700 habitants de ce petit village à l’ouest de Ramallah sentent qu’ils sont devenus le symbole de la résistance pacifique palestinienne contre l’occupation. "Ils sont en train de nous voler 250 hectares de terre fertile où nos gens ont cultivé et planté des arbres des générations durant. Ils sont en train de bâtir autour de nous un mur qui changera l’allure, peut-être à tout jamais, de notre village et de nos existences", dit Abu Hamid, un paysan devenu un leader de Bilin.

De la maison de Abu Hamid on aperçoit les colonies de Modiin Ilit et Mattit Yahu, bâties le long de la "Ligne verte" entre Israël et la Cisjordanie dans le but de conjurer l’idée d’un retour de l’Etat hébreu aux frontières du 4 juin 1967, précédentes à l’occupation des territoires palestiniens. Ils disent que la terre qu’ils sont en train de nous enlever servira non seulement à faire avancer le mur mais aussi à étendre ces deux colonies.

Ils les appellent étoiles et c’est justement ( le premier ministre) Sharon qui les a voulues", commente Abu Hamid, le regard perdu dans le dégradé de rouge du coucher du soleil, peut-être un des derniers qu’il pourra voir avant que la barrière de barbelés et de blocs de béton armé lui enlève ce plaisir qui n’a pas de prix. "Quand, il y a un an, les juges condamnèrent Israël, dans le village, nous poussâmes un soupir de soulagement - dit l’homme en esquissant un sourire tandis qu’il caresse tendrement Tareq, le plus petit de ses enfants - nous nous sentions en sécurité. Rien et personne n’aurait pu mettre en danger nos terres, l’avenir de nos jeunes nous semblait assuré : l’agriculture aurait nourri eux et leurs enfants. Un an après, tout s’est écroulé sur nous, nous ne nous rendons pas mais nous savons que nous avons en face de nous un adversaire trop fort, que nous ne pourrons plus longtemps empêcher d’avancer".

Depuis environ trois mois, Bilin est le point de rassemblement et de rencontre de militants de toutes les nationalités qui s’opposent à la construction du mur. On voit dans ses rues des Scandinaves et des Allemands aux cheveux blonds et la peau rougie par le soleil de la Palestine. Le craquettement des cigales est rompu par les exclamations sonores des jeunes Italiens. Ce sont les volontaires du préside permanent de l’Assopace de Naplouse. Mais les Espagnols, les Français et aussi les Américains, de plus en plus présents, de plus en plus actifs dans la défense des terres de Bilin ne manquent pas. Edwin vient d’un petit centre californien. "Je ne savais rien de ce qui arrive réellement au Moyen Orient - raconte-t-il - et puis, il y a deux ans, j’ai entendu parler du mur et de ce qu’il aurait fait dans cette terre.

Cela m’a semblé un projet absurde. J’ai à cœur la sécurité d’Israël mais je ne crois pas que ce sera ce mur à l’assurer. Sharon ferait mieux de reconnaître les aspirations des Palestiniens". Dans les rues de Belin retentissent surtout les phrases en hébreu. Des dizaines d’Israéliens militants "Anarchistes contre le mur" ont fait de la défense du village leur bataille. Nombre d’entre eux dorment dans les maisons palestiniennes plus directement menacées par la construction du mur. Ils sont les premiers à avancer vers les soldats israéliens pour empêcher qu’ils tirent sur les Palestiniens pendant les manifestations de protestation du vendredi, quand les gens hurlent : "Appliquez la sentence de la cour de La Haye" "Abattez le mur, laissez nous vivre". Eli Fabrikant, 27 ans, de Tel Aviv, vient chaque fois qu’il peut à Belin. "Avec mes camarades nous devons contourner les check points de l’armée parce que les citoyens israéliens n’ont pas le droit d’entrer dans les Territoires occupés, mais nous faisons tout pour rejoindre le village, nous sommes arrivés à un moment crucial de la lutte et nous ne devons pas rester à l’écart".

"Ils nous ont dit de croire en la justice internationale, ils nous ont assuré que nos droits ne seraient pas piétinés et, en réalité, ils nous ont abandonnés à notre destin", dit Abu Hamid d’une voix faible en observant le soleil qui tombe en se dissolvant dans un horizon de feu.

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