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Un début de privatisation de l’enseignement supérieur

Publie le vendredi 27 octobre 2006 par Open-Publishing
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Université : des chaires financées par le privé ?

"Je ne vois pas pourquoi (les entreprises) ne pourraient pas faire des dons à des universités pour que des enseignements soient plus développés qu’ils ne l’étaient avant. Il faut arrêter ce cloisonnement stupide." Lors du débat des candidats PS à l’investiture présidentielle, Dominique Strauss-Kahn a défendu, le 24 octobre, la diversification des ressources des universités. " Pour moi, il n’y aurait pas de scandale à ce que la chaire de physique nucléaire de Paris-VI soit financée par EDF, si EDF trouve que c’est bon pour son image", avait-il déclaré en septembre dans Libération.

Contrairement à des pays comme les Etats-Unis ou le Japon et, dans une moindre mesure, le Royaume-Uni, le financement de l’enseignement supérieur français est encore essentiellement public. En 2004, l’Etat a participé à hauteur de près de 75 % au financement des formations supérieures. Les fonds privés pèsent 18,4 % dont 12 % via les droits de scolarité. Seuls 6,4 % proviennent des entreprises.

Pour l’essentiel, cette contribution est utilisée dans la recherche. Beaucoup de laboratoires universitaires ont signé des conventions avec des entreprises pour financer équipes et matériel.

Plus indirectement, via la taxe d’apprentissage, l’argent du monde économique est également affecté à des formations professionnalisantes. Mais les entreprises n’ont pas vraiment franchi jusqu’ici les portes des campus pour subventionner ouvertement matériel, bâtiments ou enseignements.

L’idée commence pourtant à faire son chemin. Le 18 janvier 2007, le Collège de France devrait inaugurer une chaire d’innovation technologique financée par la fondation Bettencourt-Schueller, présidée par Liliane Bettencourt, principale actionnaire de L’Oréal et deuxième plus grosse fortune de France. Ses dons, dont le Collège de France ne précise pas le montant, permettront de financer heures de cours et séminaires.

" Depuis cinq ans, nous travaillons sur ce projet", explique Pierre Corvol, nouvel administrateur du Collège, où il est aussi professeur. "Mme Bettencourt a décidé de financer cette chaire sur sa fortune personnelle. Nous avons une liberté totale, sur les thèmes de recherche mais aussi sur la personnalité qui va l’animer", précise-t-il.

La vénérable institution espère ne pas en rester là. " Je serais heureux que cette initiative donne des idées à d’autres entreprises, car aujourd’hui on ne peut pas tout attendre de l’Etat", considère M. Corvol.

A l’université de Marne-la-Vallée, son président Yves Lichtenberger partage la même analyse. En pointe sur les formations professionnalisantes, l’université planche sur la création d’une chaire en collaboration avec Veolia. Elle porterait sur les services de protection de l’environnement. Ouverture prévue à la rentrée 2007. " La collaboration avec Veolia nous permettrait d’avoir des moyens supplémentaires pour faire venir, par exemple, des chercheurs étrangers", explique le président de l’université.

Ces premiers projets feront-ils boule de neige ? Juridiquement rien n’empêche les universités de recevoir de l’argent privé. Restent les barrières psychologiques et idéologiques. Au fil du temps, les deux mondes ont appris à se connaître, à se faire confiance. Le développement de formations professionnalisantes qui nécessite des passerelles entre université et entreprise y a beaucoup contribué.

" Là où il existait ce type de formation, les plus sceptiques ont eu la preuve que les deux partenaires pouvaient travailler ensemble intelligemment, sans ingérence", constate Yves Lichtenberger.

La prise de conscience des faiblesses de l’université française dans un marché de la formation de plus en plus mondialisé pousse le monde universitaire à être plus pragmatique.

" L’université a besoin d’argent et il n’y a pas trente-six façons d’en trouver", analyse Yannick Vallée, vice-président de la Conférence des présidents d’université. " L’Etat doit continuer à jouer un rôle majeur mais nous savons que ce ne sera pas suffisant. Outre, la question de l’augmentation des droits d’inscription, la recherche de nouvelles sources de financement, entreprises et collectivités locales, doit être posée et envisagée."

Catherine Rollot

http://www.lemonde.fr/web/article/0...

Messages

  • "" La prise de conscience des faiblesses de l’université française dans un marché de la formation de plus en plus mondialisé pousse le monde universitaire à être plus pragmatique.""

    "faiblesses de l’université française" ? Ah bon ! C’est pour cela que les USA par exemple s’arrachent nos doctorants scientifiques ! Ils nous les prennent les yeux fermés !

    Faudrait arrêter de nous prendre pour des ignares, parce que figurez-vous qu’on connaît la chanson, on commence par une petite porte pour finir par portes-ouvertes. Dites carrément les choses, vous serez moins ridicule, Monsieur Strauss-Kahn !