Accueil > Une fusion entre égaux dans le secteur bancaire

Une fusion entre égaux dans le secteur bancaire

Publie le samedi 20 novembre 2004 par Open-Publishing

La fédération CGT des secteurs financiers et une partie de la CFDT banques annoncent un congrès constitutif d’une nouvelle fédération. C’est un processus inédit de rassemblement syndical qui se met en branle.

de Paule Masson

Pascal Lamy était hier soir l’un des experts attendus du colloque organisé par la CFDT pour fêter ses quarante ans. Ex-numéro 2 du Crédit lyonnais, le commissaire européen au Commerce, inconditionnel promoteur de l’économie libérale, était invité à parler de la modernité du réformisme. Au même moment, au même endroit, mais dans un autre bureau du siège confédéral, Jean-Claude Branchereau, ex-secrétaire général de la fédération des banques, démissionnaire depuis mercredi soir, était reçu par Jacky Bontemps, numéro 2 de la confédération pour officialiser son choix de rompre avec « cette CFDT que nous avons construite, aimée, et qui aujourd’hui n’existe plus ».

Tout un symbole. Alors que la CFDT saisit l’occasion de son quarantième anniversaire pour se débarrasser de ce que ses dirigeants nomment la « parenthèse » autogestionnaire, une nouvelle vague de départs collectifs s’engage dans le secteur bancaire. Et avec elle, un processus inédit de rassemblement syndical se met en branle. Hier matin, Jean-Claude Branchereau accompagné de plusieurs secrétaires fédéraux démissionnaires, annonçait la création d’un « collectif national » de coordination des mouvements de démission qui touchent déjà les deux tiers des régions. À ses côtés, Philippe Bourgallé, secrétaire général de la fédération des secteurs financiers de la CGT, annonçait que le 3 novembre dernier, une réunion de 200 syndicats du secteur, décidait de « mettre en débat » la dissolution de la fédération « afin d’ouvrir la voie au rassemblement par la construction d’une nouvelle fédération des banques au sein de la confédération CGT ». Après un congrès CGT de dissolution le 30 mai 2005, un congrès constitutif de la nouvelle fédération est prévu du 31 mai au 3 juin 2005. D’ici là, les six mois à venir vont être mis à profit pour « élaborer l’orientation et la structuration » de la future fédération. Une bonne trentaine des réunions vont se tenir dans les villes. Elles seront ouvertes aux syndiqués CGT et CFDT, aux militants d’autres organisations intéressés par un processus de rassemblement syndical et aux salariés. Dans cette « fusion entre égaux », tout est à inventer puisqu’il ne s’agit pas d’une simple dilution de la CFDT dans la CGT.

De l’indisciplinée Auvergne à la sage Bretagne, des processus de départs de la CFDT sont à l’oeuvre au sein du Crédit lyonnais, du CIC, de la Caisse d’épargne, de la BNP, etc. Bernard Dufil, ancien secrétaire général de la fédération CFDT chiffre aujourd’hui, en début de processus, entre 2 000 et 4 000 militants (sur 20 000) déjà sur le départ. À chaque fois, des syndicats du personnel des banques sont provisoirement créés, dans l’attente du congrès de juin prochain. D’ores et déjà, la direction de la fédération n’existe plus puisque les six secrétaires fédéraux ont décidé de rompre.

Personne pourtant ne se réjouit de ce nouvel épisode de saignée dans les effectifs syndicaux. Au contraire, les uns et les autres espèrent une issue positive qui enfonce un coin dans le mouvement d’émiettement syndical. « Nous souhaitons que 1 + 1 fasse plus que 2 », insiste Philippe Bourgallé, qui considère que réussir cette étape serait un « signe fort » pour que « le syndicalisme de ce pays ait de l’avenir y compris parmi les jeunes qui attendent son unité ». Jean-Claude Branchereau, quant à lui, évoque l’ambition de construire « un syndicalisme majoritaire », dans un secteur où, grosso modo, seuls 10 % des salariés sont adhérents d’un syndicat. Il appelle de ses voeux une « recomposition syndicale qui unifie les forces divisées et génère une dynamique vertueuse de développement d’un syndicalisme attractif, ni accompagnateur des contraintes du libéralisme, ni purement contestataire ».

http://www.humanite.presse.fr/journal/2004-11-19/2004-11-19-450203