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Université d’été du PS : les socialistes au pied du mur
Publie le lundi 30 août 2004 par Open-PublishingL’université d’été du PS devait jeter les bases du projet socialiste pour 2007. Les divisions sur la constitution européenne et les ambitions des présidentiables ont pris le dessus.
de Lionel Venturini, La Rochelle
C’est pas de chance. Le slogan de l’université d’été du PS, " Une nouvelle chance pour la France ", censé lancer le projet socialiste pour 2004, a été largement éclipsé par le débat sur la constitution européenne. Camp du " oui " au traité contre camp du " non ", ce que le Parti socialiste et son premier secrétaire repoussaient jusqu’ici s’est produit : l’université d’été de La Rochelle a surtout vu s’exacerber les positions vis-à-vis du texte, objet d’un referendum interne à la fin novembre. La venue de Lionel Jospin au dîner des militants, traditionnellement organisé à huis clos le samedi, a achevé de porter le débat. Parmi les partisans du " oui ", certains souhaitaient qu’il vienne leur apporter son soutien publiquement, après la démonstration de force des tenants du " non " jeudi, à l’université d’été du courant NPS d’Arnaud Montebourg (lire ci-dessous). Jospin, qui n’en finit plus de revenir en politique, est resté muet sur le sujet, mais il ne se taira pas indéfiniment. De quoi troubler longtemps encore le sommeil des présidentiables socialistes.
Constitution omniprésente
Aucune séance, aucun atelier n’étaient en tant que tels consacrés à la question du traité constitutionnel. " On n’a pas voulu d’un débat d’experts ou de juristes, mais aborder les choses comme le feraient les Français, en parlant par exemple d’Europe de la croissance ", s’est défendu Malek Boutih. " Il faut lire entre les lignes ", convient, goguenard, Henri Emmanuelli, fervent partisan du " non ". Dirigeants et militants ont contourné l’interdit implicite.
Depuis la salle, lors de la première plénière consacrée à la démocratie et aux institutions, des questions fusent, sur " l’accord technique " conclu au Parlement européen avec les conservateurs, ou sur la compatibilité de la constitution européenne avec un projet socialiste. Elles attendront longtemps une réponse : Jack Lang avait balayé l’objection par avance face à un texte " éventuellement en vigueur à partir de 2009 ", préférant discourir sur " le projet politique que l’on proposera aux Français en 2007 ". " Comme si l’on pouvait distinguer les deux ", objecte François Delapierre, du courant Nouveau Monde. " Les convergences dans le camp du "non" ont été frappantes lors de l’université organisée par NPS quand, dans celui du "oui", je note plusieurs manières, et peu enthousiastes, d’accepter le texte ", ajoute-t-il. Sans compter les hésitants de poids. Laurent Fabius, pratiquant un savant effeuillage depuis des semaines, fera connaître son sentiment ultime avant la fin septembre. Ses doutes ont semé le trouble au-delà de ses partisans. D’autres responsables de fédérations ont pris parti pour le " non ", des présidents de région aussi. Pas des moindres en termes de contingents de militants, s’agissant de Michel Vauzelle en PACA ou de Daniel Percheron en Nord-Pas-de-Calais. La dynamique référendaire va faire que les positions de certains responsables vont devenir intenables, pronostique François Delapierre. Plusieurs responsables socialistes manient le sophisme. Pierre Moscovici brandit la menace en cas d’échec du référendum d’un retour au traité de Nice... qu’il a lui-même contribué à négocier. Les signataires d’une tribune au journal Libération, proches de François Hollande, expliquent que " le "non" forcerait les socialistes, en cas de retour aux responsabilités, à expliquer piteusement que ce qui était inacceptable hier deviendrait brutalement tolérable ". " Les voilà qui justifient leur lâcheté future ", maugrée un militant.
Hollande rassuré sur son sort
Réplique des tenants du " oui ", un Comité de la gauche pour le " oui " au traité constitutionnel, avec à sa tête Élisabeth Guigou, Bernard Kouchner et Gérard Collomb, le maire de Lyon. " Je pense qu’il faut vraiment se mobiliser et dénoncer les faux procès ", a estimé l’ancienne ministre des Affaires européennes, en affirmant que le texte " n’apporte aucun recul mais que des avancées ", formule empruntée à Jack Lang. Et qu’il sera " toujours possible de le réviser, il n’est pas gravé dans le marbre ".
François Hollande, prononçant dimanche matin son discours de rentrée, a convenu que la constitution " s’est glissée dans l’agenda socialiste de la rentrée ". Rassuré par un débat qui ne devrait pas engager son avenir à la tête du parti, " dès lors que chacun le déconnecte d’enjeux internes, de direction, voire de désignation " du candidat socialiste à la présidentielle, François Hollande a appelé à " ne pas réduire le débat au schématisme binaire, même si au bout du compte il convient bien de répondre clairement à la question posée ". Rassuré également par l’état de la droite, le premier secrétaire du PS pouvait mettre en garde à gauche : " Il y a des partis qui, pour ne vouloir qu’écouter les gens, finissent par ne plus trouver leurs électeurs. " Avant d’annoncer pour octobre un questionnaire adressé aux Français, dans la perspective d’un " contrat global " signé entre partenaires de gauche, " pour gouverner ensemble dans la durée ". " La gauche arrive " s’est même risqué François Hollande, plutôt avare d’audaces en général.
http://www.humanite.presse.fr/journal/2004-08-30/2004-08-30-399581