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Magouilles radioactives

Publie le jeudi 14 octobre 2004 par Open-Publishing

Branle bas de combat contre l’empoisonnement radioactif !
A Feurs, la population et les salariés disent NON !!!

Vendredi 8 octobre, à 20h30, la salle de la Maison de la commune est comble. Près de 250 personnes sont venues à cette réunion publique convoquée par l’Association pour la Défense de la Santé et de l’Environnement (ADSE) et la Commission de Recherche et d’Information Indépendante sur la Radioactivité (CRIIRAD).Les visages sont inquiets et l’ambiance est tendue. Pour cause !

De quoi s’agit-il ?
Les salariés de la fonderie Feurs Métal (450 personnes) alertent la population forézienne sur les dangers extrêmes d’un projet industriel hautement mortifère.
Ils sont épaulés par leur syndicat CGT, l’ADSE, une association locale, et la CRIIRAD, une commission indépendante, dont la réputation est fameuse pour son intégrité militante en matière de lutte contre l’empoisonnement radioactif.
L’objectif est de mobiliser la population, les mondes associatifs et syndicaux, afin de stopper le projet de Mr Jean Luc Gambiez, le patron fou de Feurs Métal, entreprise appartenant au groupe AFE, une multinationale de la métallurgie.
Non moins fou est le préfet de la Loire qui a autorisé ce projet, par arrêté du jeudi 30 septembre 2004.
Non moins fous sont les élus, ainsi que les patrons de la nomenklatura forézienne, qui lui ont accordé leur bénédiction !
Non moins fous sont les fonctionnaires de la DRIRE et les experts officiels qui acquiescent à ces décisions irresponsables !

D’après l’ADSE, "la Direction du groupe AFE envisage de retraiter des ferrailles contaminées, voire faiblement irradiées issues de la filière de l’Uranium sur le site de Feurs Métal."
L’usine de Feurs Métal est dans un état de vétusté et d’insalubrité avancée. Les ouvriers en témoignent publiquement. Elle est entre autre spécialisée dans le recyclage de ferrailles spéciales. En particulier, elle s’occupe des piles salines et alcalines, par le biais de l’unité autonome VALDI (une trentaine de salariés), qui possède une concession à vie dans la filière. Le garde pêche a retrouvé des piles dans la Loire, mais pas que ça. Et il n’est pas le seul à avoir constaté des pollutions, parfois grave, de l’environnement... Des procès sont en cours contre la direction de l’usine.
Pourquoi les ouvriers sont-ils inquiets ? Avouez qu’il y a de quoi ! La vétusté des installations, les pollutions "accidentelles" ... Il y a beaucoup de raisons de s’inquiéter...

Déjà, en 1983, un premier scandale est étouffé. L’usine retraitait des matériaux irradiés à l’insu des salariés et de la population.
Puis, en 1996, l’usine déverse dans les égouts des produits toxiques issus du traitement des films gamma graphiques.
Le 6 février 2000, un four à arc explose. Six personnes sont blessées par brûlures dont deux très grièvement.
Ensuite, en avril et octobre 2003, la vétusté des installations occasionne des dégagements de métaux lourds dans les fumées. Sous la pression du syndicat, certains cadres seront ensuite sanctionnés pour avoir tenté d’empêcher les ouvriers de sortir de leurs ateliers. Ceux-ci fuyaient l’asphyxie.
La population fut évacuée à 50 m. Ceux qui résidaient à 55 m, et au delà, ne furent pas évacués, car considérés comme hors d’atteinte des brouillards envenimés.

La dame de la médecine du travail témoigne quant à elle que l’usine de Feurs était déjà réputée à Paris, dans les années soixante, pour ses maladies professionnelles. Aujourd’hui, c’est pareil, sauf que d’autres maladies sont concernées.

Le nouveau projet concerne le démantèlement de la centrale du Tricastin. Rien moins que ça ! 120 000 tonnes de ferrailles contaminées à retraiter, d’ici 2012. Il s’agit des containers de la société SOCATRI, ayant servi à transporter de l’uranium appauvri et faiblement enrichi, ainsi que les tuyauteries de la société Eurodif. Un premier essai concernera quatre coulées, 20 tonnes en tout. À 1 becquerel par gramme de radioactivité moyenne, d’après les dossiers de la DRIRE, on obtient pour ces vingt tonnes : 2 millions de becquerels, pour ce simple essai ! Ça promet !

Le procédé de retraitement est basé sur un mensonge grossier et éhonté : prenez 20 % de ferrailles irradiées, mélangez les à 80 % de ferrailles saines, et le tout sera acceptable pour la consommation civile courante des biens de consommation. A lui seul, ce bobard mériterait une condamnation pour tentative de crime contre l’humanité par empoisonnement radioactif de populations civiles !
En fait, on obtiendrait 3 600 000 T de ferraille contaminée, c’est à dire 5 fois plus.
Allez savoir ce que vont devenir les ferrailles concernées. Les procédures de traçabilité invoquées par les experts pour rassurer les naïfs ne sont que des foutaises. Quelques mensonges de plus. Dans le milieu industriel, tout le monde sait que cette "traçabilité" est quasi impossible à obtenir dès lors qu’on atteint les cycles de recyclage ultérieurs. C’est à dire qu’on pourra difficilement suivre la matière contaminée au delà de sa deuxième vie, au cours des cycles multiples de retraitement. Lorsque l’on sait que les effets de la radioactivité mettent plusieurs milliers d’années, au minimum, à s’estomper, imaginez l’ampleur du désastre.

Cette opération crée un précédent gravissime : par ce procédé, on contourne la législation française, qui interdit d’utiliser les déchets du nucléaire dans les produits de consommation courante. Alors les becquerels, où va-t-on les retrouver, dans un avenir plus ou moins éloigné ?
Sur les rivages de l’estuaire nantais, suite aux pollutions possibles de la Loire ? Où bien dans l’acier de construction de nos futurs immeubles d’habitation, de travail, de loisir ... ? A moins que ce ne soit dans les futures canettes de Coca, dans les châssis des lits d’hôpitaux, ou bien même dans les composants métalliques de nos autos et des jouets que nous offrirons à nos enfants.
Allez savoir !
Il sera bien temps là de déclencher une enquête épidémiologique pour se laver de la misère créée, à défaut de pouvoir inverser les taux de leucémies en constante progression !
Bénévoles et bonnes consciences de tous horizons, il va falloir filer votre pognon à la recherche sur le cancer. On déduira 50 % de vos dons sur vos revenus imposables, grâce à la loi Coluche.

L’usine pourrie est au cœur de la bourgade forézienne (7877 habitants, au recensement de 1999), rejetant ses trop pleins de merde dans le fleuve le plus long de la France et dans l’atmosphère d’un pays de terroir. Ses employés, embauchés ou précaires, viennent de toute la région, contraints à travailler dans des conditions d’hygiène et sécurité déplorables, sous l’autorités de cadres irresponsables, menteurs et méprisants !
Les ouvriers de Feurs Métal comptent d’autres calamités. Outre les conditions d’hygiène et sécurité dégradées, ils endurent aussi les méfaits économiques des délocalisations. AFE a expédié une partie des activités de Feurs Métal en Slovaquie, à Robotnicka, là où ils peuvent empoisonner les gens pour bien moins cher. Depuis un an, on compte une centaine d’emplois en moins, rien que sur le site de Feurs.

Les bandits en col blancs sont sans scrupules. Avec ce nouveau projet, ils dépassent toutes les limites. Il faut dire que le cours des ferrailles sur les marchés boursiers mondiaux s’est récemment envolé de 120 %. Certains comptent les (gros) sous ! On ne peut imaginer la totalité du pactole que si l’on envisage qu’après Tricastin, il y aura plein d’autres centrales à démanteler.
C’est effrayant.

La réunion est conduite par le délégué CGT de la boîte. Il raconte le dossier. Le représentant de la Fédération Rhône Alpes de Protection de la Nature (FRAPNA), une institution de défense de l’environnement dépendant du préfet, tente ensuite d’expliquer pourquoi sa chef (absente à la réunion) s’est abstenue de voter contre le projet. Mais que peut-être, au vu des multiples incohérences et insuffisances du dossier qu’ils n’ont pas manquées de souligner, ils envisageraient de reconsidérer leur position.
 Ben ..., faudra bien vous résoudre à choisir votre camp, et à en assumer toutes les conséquences !

Les ouvriers au début, peinent à se faire entendre. Leur parole est moins facile. Mais dès qu’ils obtiennent l’attention de l’assemblée, chacun y va de son témoignage. Ils décrivent les accidents que nous avons évoqués. Ils parlent de la vétusté de leurs outils de travail.
Lorsqu’au fil des interventions citoyennes, quelqu’un évoque de demander leur soutien aux élus, les ouvriers répondent que les élus étaient au courant du projet et qu’ils ont donné presque tous leur accord.
Un autre absent notoire de la réunion est d’ailleurs Monsieur le Maire. Il a quand même envoyé quelques adjoints afin d’expliquer qu’il s’était rendu à une réunion de travail à Monsac (en Dordogne). Lorsque l’ADSE demande à Mme l’adjointe s’ils pourront s’installer sur le marché de Feurs, mardi 12 octobre à 9h, histoire de ne pas se faire sortir comme la semaine précédente sur le marché de Montbrison, avec leurs panneaux et leurs pétitions, celle-ci répond après de longues hésitations par une vague question : "De quelle taille les panneaux ?".
L’assemblée est outrée, et le délégué syndical intime aux représentants de la Mairie que pour le soutien, ou c’est oui, ou c’est non. C’est pas oui peut être et peut-être que non.

Nous sommes tous concernés ! Ouvriers, commerçants, résidents du comté de Feurs, habitants et travailleurs du Forez, de France, de Navarre et de partout ailleurs. Cette certitude revient comme un leitmotiv au cours de la soirée.
Il faut stopper cette saloperie. Tout le monde est d’accord !
Comme première action, une manifestation est programmée pour le samedi 23 octobre, à 9h, devant le siège de Feurs Métal. Elle déambulera ensuite dans les rues de la commune.
D’ici là, toutes les énergies militantes sont bienvenues pour :
 sensibiliser la population, les syndicats, les mouvements associatifs, sur les dangers de ce dossier.
 faire signer la pétition en vue de retarder le projet par le déclenchement d’une enquête publique. 20 000 signatures sont requises au minimum.
 mobiliser la population pour la manifestation. Il est en effet important de marquer un grand coup pour cette entrée en matière, même si nous sommes convaincus qu’une simple manifestation ne suffira pas à stopper le projet.

La lutte sera difficile, mais nous sommes déterminés à vaincre !
La FRAPNA évoque la possibilité d’associer les experts de la CRIIRAD aux groupes d’experts officiels. Cela est bien loin d’être suffisant. Comme il a été rappelé, l’objectif absolu est de stopper le projet, et non pas d’envisager d’éventuelles négociations qui consisteraient à rendre le projet acceptable, aux yeux de l’opinion publique et des ouvrier de l’usine. Au pire, si de telles réunions venaient tout de même à exister, il faudrait y associer les organisations ouvrières, commerçantes, le mouvement associatifs, les organisations de défense de l’environnement et de la santé, la population au travers de ses individus les plus variés . Leurs voix ajoutées, ne devraient pas être consultatives, mais bien décisives et majoritaires.

Une autre décision est prise par l’assemblée, c’est l’organisation d’une consultation référendaire des électeurs à l’échelle du comté. Nous restons critique par rapport à cette décision, même si nous la respectons. Cette consultation citoyenne ne risque-t-elle pas de faire double emploi avec la pétition ? Le pari de compter sur les électeurs, dans un contexte plus officiel n’est-il pas risqué ? On risquerait de s’apercevoir qu’il y aura des votes favorables au projet. L’état et les patrons sont en effet maîtres dans l’art de la propagande. Il n’est pas exclu qu’une partie de l’électorat succombe à leur communication.
Déjà, la direction d’AFE émet un chantage à l’emploi, invoquant 6000 postes concernés, et tente de culpabiliser les ouvriers protestataires, malgré l’évidence flagrante : ceux qui ferment les usines, c’est toujours les patrons, et jamais les ouvriers.
Parlons-en des ouvriers, et rendons leur hommage. Ils prennent des risques personnels importants en dénonçant cette histoire. C’est par leur initiative et leur courage que nous sommes alertés sur cette saloperie. Sachons être solidaires et dignes de leurs démarches.

Acteurs du mouvement syndical, associatif, activistes de touts poils, défenseurs de l’environnement, de la santé publique et autres, il est l’heure de sonner le branle bas de combat au travers de tout le territoire, et de fournir une mobilisation maximale pour soutenir les salariés de Feurs Métal, ainsi que la population de Feurs et du département de la Loire, pour stopper un projet de contamination radioactive de masse, qui dépasse largement l’échelle de notre département.
Venez toutes et tous à Feurs, le samedi 23 octobre 2004, à 9h, devant le siège de l’usine Feurs Métal !

Agenda : jeudi 21 octobre à 20h30 : prochaine réunion publique du collectif, à la Maison de la Commune de Feurs.

Des outils Internet (site + liste de diffusions) vont être mis en place, nous vous tiendrons au courant.

Ramon - Saint Etienne - le mardi 12 octobre 2004