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Le site d’actualités allemand Spiegel Online a interviewé le fasciste ukrainien Iaroch

par Peter Schwarz

Publie le mardi 29 avril 2014 par Peter Schwarz - Open-Publishing

Le 22 avril, Spiegel Online a publié une interview de Dmitri Iaroch, dirigeant de l’organisation paramilitaire fasciste ukrainienne Secteur droit. Cette interview confirme que les fascistes ont non seulement joué un rôle décisif dans le renversement le 22 février du président Victor Ianoukovitch, mais jouent aussi un rôle significatif dans l’actuel gouvernement de transition dirigé par Arseni Iatseniouk.

Iaroch a expliqué que l’aile armée de son organisation n’avait pas été dissoute mais légalisée. « Nos bataillons font partie de la nouvelle défense territoriale. Nous entretenons des contacts étroits avec les services secrets et l’état-major. Nous avons de très bons rapports avec tout le monde, mis à part la police, » a-t-il dit à Spiegel Online.

Iaroch est étroitement lié à Andriy Parubiy, qui commandait les forces d’auto-défense durant les protestations sur la place de l’Indépendance (le Maïdan). Parubiy était le co-fondateur du parti fasciste ukrainien social-national, prédécesseur de Svoboda. Il est actuellement un membre influent du parti Patrie du premier ministre Iatseniouk et il dirige le conseil national de sécurité et de défense de l’Ukraine. Iaroch était initialement supposé devenir son adjoint mais a décliné l’offre afin de garder sa liberté de manœuvre contre le gouvernement.

Lors de l’interview, il a clairement fait comprendre que Secteur droit n’accepte pas l’autorité du gouvernement actuel ni celle d’un futur gouvernement élu. « Notre révolution ne sera parachevée que lorsque nous aurons totalement renouvelé l’Etat, » a-t-il déclaré.

Ses objectifs sont visiblement d’un caractère fasciste. Le choix des mots qu’il utilise est identique à celui des nazis qui décrivaient aussi leur régime de terreur comme étant un « gouvernement de la révolution nationale. »

Interrogé par Spiegel Online sur ses motifs, Iaroch a répondu, « Je suis un nationaliste ukrainien. Mon but est un Etat fort. » Il décrit le libéralisme comme étant « une forme de totalitarisme. » Quant à l’UE, il critique sa présumée « orientation anti-chrétienne. »

« Nous rejetons la destruction de la famille traditionnelle et nous sommes contre le mariage homosexuel. » En revanche, il soutient la politique sociale et économique de l’UE, en réclamant des réductions d’impôts pour soutenir les classes moyennes et l’investissement étranger.

Comme le fait remarquer Spiegel Online, Iaroch s’est exprimé encore plus explicitement dans son oeuvre militariste « Nation et révolution. » Il s’y oppose ouvertement à la démocratie parlementaire et préconise un nationalisme fondé sur l’ethnie. Il a l’intention de propager « l’idéologie nationaliste à travers tout le territoire de notre Etat, » de « dé-russifier » l’Ukraine orientale et de garantir que la population autochtone joue un rôle de premier plan au sein de l’Etat.

Iaroch n’apparaît plus en uniforme militaire. Il est candidat aux prochaines élections présidentielles et il porte à présent un costume et une cravate. Lors de son interview avec Spiegel Online, il a cherché à minimiser ses croyances antisémites qui pourraient s’avérer embarrassantes pour les soutiens occidentaux du nouveau régime de Kiev.

L’interview avec Iaroch, et le fait que Spiegel Online lui ait assuré une tribune politique, montre le caractère foncièrement réactionnaire des forces sur lesquelles se sont appuyées les puissances occidentales pour arriver à un changement de régime à Kiev et provoquer une confrontation avec la Russie. En février, les provocateurs armés de Secteur droit avaient joué un rôle clé dans l’escalade du conflit avec les forces de sécurité, provoquant la mort d’une centaine de personnes et le renversement du président élu, Viktor Ianoukovitch.

Pendant ce temps, il existe des reportages qui montrent que la coopération occidentale avec Secteur droit remonte à un certain temps. Selon un reportage de l’hebdomadaire polonais Nie (« Non »), publié par le journaliste Jerzy Urban, âgé de 80 ans, le ministre polonais des Affaires étrangères, Radoslav Sikorski, avait invité, en septembre dernier, 86 membres de Secteur droit à suivre un cours intensif de quatre semaines au centre de formation de la police de Legionowo qui se trouve près de Varsovie.

Les fascistes avaient été formés à la gestion des foules, à la reconnaissance des personnes, aux tactiques de combat, aux compétences de commandement, au comportement à adopter en situation de crise, à la protection contre les gaz utilisés par la police, à l’érection de barricades et tout spécialement à la maîtrise de tir et au maniement des fusils d’assaut. La formation avait été officiellement décrite comme un « échange d’étudiants. »

Cette visite avait eu lien deux mois exactement avant que le président ukrainien Viktor Ianoukovitch refuse de signer le 21 novembre l’accord d’association avec l’UE, événement qui avait déclenché les protestations de Maïdan. Si le rapport paru dans Nie est vrai, il montre que les événements qui ont conduit au changement de régime à Kiev étaient une provocation soigneusement planifiée.

Le ministre polonais des Affaires étrangères Sikorski entretient des liens étroits avec les cercles dirigeants des Etats-Unis. Il est marié à l’historienne américaine de droite Anne Applebaum et il fut, à partir de 2002, le directeur du New Atlantic Initiative de l’American Enterprise Institute à Washington.

Le 21 février, Sikorski, en partenariat avec le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier et le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius, avait négocié l’accord entre le président Ianoukovitch et l’opposition ukrainienne et qui avait ensuite été saboté en l’espace de quelques heures par Secteur droit et d’autres groupes armés. Si Sikorski maintenait des liens étroits avec Secteur droit alors il avait dû être au courant voire éventuellement avoir planifié la provocation avec les fascistes.

http://www.wsws.org/fr/articles/2014/avr2014/spie-a26.shtml