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Islamophobie : du racket conceptuel au racket politique

par La Discordia

Publie le mardi 19 janvier 2016 par La Discordia - Open-Publishing
8 commentaires

Débat public à Paris le mardi 26 janvier 2016 – 19h

Le concept d’islamophobie est un racket sémantique et politique qui se situe au carrefour de deux camps conceptuels, celui du religieux et celui du racisme. Son but est en effet d’enlever toute légitimité à la critique de la religion musulmane (et donc, par glissement, aux religions en général), taxant systématiquement toute critique de racisme envers les croyants (réels ou supposés). De nombreux soi-disant « révolutionnaires » se sont réappropriés ce concept et, par conséquent,l’aveuglement face au rôle autoritaire et pacificateur de toute religion.

Alors que nos pieux « révolutionnaires » nous parlent d’« islamophobie » à toutes les sauces, les fachos du printemps français nous parlent, eux, de « cathophobie », d’autres encore de « négrophobie » ou de « judéophobie ». Chacun tente son petit racket politique sur l’antiracisme. Chacun a sa petite oppression et ses petits particularismes à mettre en avant, toujours en concurrence avec ceux des autres, approfondissant les divisions entre exploités. Et surtout, plus personne ne parle de la lutte contre le racisme en tant que tel, et sous toutes ses formes.

Refuser ce raccourci conceptuel est un point de départ pour s’opposer à toutes les religions, y compris l’islam, présenté à tort par les défenseurs du concept d’« islamophobie » comme la religion des opprimés (comme le catholicisme irlandais ou le bouddhisme tibétain à d’autres époques). Il s’agit alors de nous faire passer la religion comme élément d’émancipation dans le pire des cas, et dans le moins pire, de faire passer l’idée que la religion n’est pas, en soi, un outil de domination séculaire au service de l’ordre. Derrière cela se cache l’idée que les rapports de domination, lorsqu’ils sont portés par de supposés « opprimés », deviendraient émancipateurs.

Parce que la religion reste un problème majeur pour ceux et celles qui veulent une transformation radicale de ce monde, sa critique est nécessaire, aujourd’hui plus que jamais. Parce qu’il n’y a pas de « religions des opprimés », seulement des religions qui oppriment.

Mardi 26 janvier 2016
19h à la bibliothèque anarchiste La Discordia.
45 Rue du Pré Saint-Gervais, 75019 Paris
Métro Place des Fêtes (lignes 7bis et 11 du métro).

http://ladiscordia.noblogs.org/

Messages

  • La ou il y a racisme anti musulman ou Islamophobie , c’est lorsque se fait l’amalgame"musulmans = terroristes.
    Par contre le fait de critiquer une religion," y compris " la religion musulmane ne doit pas être assimilé a de l’islamophobie .

  • Il me semble quand même que certains sont un peu trop dans la généralité, les principes (bons principes), mais appliqués hors-sol, en refusant de voir la signification concrète de certaines positions dans certains contextes***.

    Des exemples sous forme de questions :

    Est-ce la même chose...
     Un Tunisien (ou un Saoudien, ou un...) qui, dans son pays, critique et lutte contre l’influence de l’islam sur la société.
     Un Français qui, en France, critique et lutte contre l’influence de l’islam.

    Est-ce la même chose...
     Lutter contre l’influence de la religion traditionnelle, locale, millénaire, qui a influencé grandement l’Histoire d’un pays.
     Lutter contre une religion importée récemment, minoritaire, ayant peu d’influence (comparée à l’autre), concernant essentiellement une population plutôt socialement malmenée.

    Je crois que sur un plan philosophique, idéologique, théorique, il est important de critiquer toutes les religions.

    Mais sur un plan politique, les nobles principes ne doivent pas faire oublier que nos actes ont des conséquences, il me parait très dangereux de ne pas regarder cela en face.

    C’est aux progressistes de culture (d’origine) musulmane de faire le ménage dans leur héritage, comme nous avons commencé à le faire avec notre religion "de souche".

    Nous, "Français de souche", devrions plutôt balayer devant notre porte, il me semble, si j’en juge par la réalité quotidienne :
    A 7H et quelques, les cloches de l’église de mon village célèbrent tous les matins je ne sais quel rituel catholique.
    Puis en déposant ma louloute au car je passe devant l’école "Présentation de Marie", fréquentée par des gosses qui iront ensuite au collège du Sacré Coeur à la ville d’à côté, puis au lycée Saint Joseph.
    Établissements financés entre autre par mes (et vos) impôts.
    Lycée st machin où existe par exemple une section Arts appliqués qui n’existe pas dans le lycée public.

    Quand on voit l’énergie mise à taper sur l’islam par rapport à d’autres religions, sans rapport avec la "taille" des entorses à la laïcité dues à telle ou telle croyance, forcément on se pose des questions sur les motivations réelles.
    Que chacun fasse déjà le ménage dans sa propre maison, sa propre tradition !

    Sans compter qu’il vaut mieux s’attaquer aux causes qu’aux conséquences.
    Par exemple, n’y aurait-il pas un lien entre l’influence grandissante de l’islam en France et la situation sociale des gens concernés ? Si on n’a pas d’espoir pour l’avenir, si on est traité comme une merde, on cherche une bouée de sauvetage, un truc qui redonne espoir et force, on est tenté de se shooter, à la religion ou à autre chose.
    Je ne sais pas si c’est urgent de s’en prendre à la drogue (la religion), mais en tout cas s’en prendre au drogué c’est ne pas comprendre que c’est la première victime, et c’est oublier que c’est surtout contre les conditions qui l’ont poussé à se droguer qu’il faut se battre.

    Sinon danger, attention, on est un peu sur le fil du rasoir, en ce moment...

    Oc

    *** L’occasion de sortir le classique : Sur le fond vous n’avez pas tort, mais le problème c’est qu’on vit en surface.

  • Il est devenu à la mode depuis quelque temps pour une partie du mouvement libertaire de se trouver de nouveaux ennemis consensuels comme l’islam, ce qui ne demande pas un grand courage quand on a de son côté la quasi-totalité de la classe politique et des médias, et présente l’avantage de pouvoir se laisser aller à toutes les dérives verbales en surfant sur la vague Charlie. Cette tendance va de Non Fides à l’OCL, en passant par les incontournables Coleman et Guillon, Autre Futur et divers groupuscules donneurs de leçons.

    Se sentant majoritaires dans le consensus politique français, ils ont toutes les audaces, nous accusant de « racket sémantique et politique », de « soi-disant révolutionnaires », « d’approfondir les divisions entre exploités », de « refuser de parler du racisme sous toutes ses formes », nous assimilant aux « fachos du printemps français », et d’une manière plus générale d’être tout simplement les complices de la religion et de l’abrutissement du prolétariat.

    Il est bien évident que ce n’est même pas la peine de discuter avec ces gens-là, qui se présentent eux-mêmes comme nos ennemis et qui essaient de placer le débat au niveau du mensonge, de la calomnie et de pratiques qui n’ont absolument rien de libertaires.

    Les libertaires, pour leur part, ont exprimé leurs positions, que nos petits propagandistes confortés par l’union nationale n’ont pas daigné lire, ou fait semblant, car ça foutrait en l’air toute leur argumentation. Ces positions sont claires, elles combattent TOUS les racismes, y compris bien sûr l’islamophobie, que certains voudraient exonérer de toute critique car cela les renverrait à leur conception plus qu’ambiguë du racisme et la justification de certains d’entre eux au nom de l’antithéisme et de la laïcité.

    Pas d’islamophobie au nom des idées libertaires !

    Samedi 15 mars 2014, lors du rassemblement commémorant les 10 ans de la loi du 15 mars 2004 dite « sur les signes religieux ostentatoire » (dans les faits une loi contre les jeune filles portant le foulard islamique), des militant-e-s libertaires ont décidé d’apparaître avec une banderole portant le slogan « Libertaires​ contre l’islamophobie ». Si nous avons pris cette initiative, c’est qu’il arrive parfois que la rhétorique libertaire soit utilisée, y compris dans notre propre mouvement, pour justifier un positionnement anti-islam.

    Depuis 10 ans et la première loi anti-voile, se propagent sur les plateaux télévisés et dans plusieurs organes de presse des propos qui heurtent les militant-e-s libertaires que nous sommes. Nous, libertaires contre l’islamophobie, sommes souvent aussi engagé-e-s sur le terrain des luttes antiracistes, des luttes des quartiers populaires, contre les crimes et violences policières, dans la solidarité avec la Palestine, ou encore dans le combat féministe radical…

    En effet, les luttes concernant directement certaines populations, les « damnés de l’intérieur » selon l’expression du sociologue Mathieu Rigouste, sont trop souvent sous-estimées. La peur de l’islam, les discours sur les échecs de l’intégration, la mobilisation de la rhétorique islamophobe est devenue l’arme ultime permettant de justifier la politique xénophobe, répressive, inégalitaire ainsi que les discriminations ou encore les guerres impérialistes. A​ cette offensive, nous devons​ opposer une résistance totale​ et ne pas nous couper des premier-e-s visé-e-s.

    C’est pourquoi des militant-e-s libertaires, détaché-e-s des préjugés qui parasitent les milieux de gauche et conscient-e-s de l’enjeu central que représente la lutte contre l’islamophobie, ont décidé à l’automne 2012, suite à la Une islamophobe de Charlie Hebdo et aux débats internes au sein de l’anarchosphère après le chahutage de Caroline Fourest à la Fête de l’Humanité, de rédiger un appel : « ​Libertaire et sans concession contre l’islamophobie » (1). C’est également dans cet esprit que nous avons décidé d’apparaître le 15 mars dernier au rassemblement initié par le Collectif Féministe Pour l’Égalité. Au-delà de l’impératif d’une opposition large à ces offensives racistes ciblant spécifiquement les musulman-e-s, la motivation de cette apparition était de porter clairement deux messages :

    -Une parole politique libertaire forte contre l’islamophobie et pour la construction d’une riposte antiraciste large, afin d’unir toutes les victimes du racisme d’état (sans-papiers, immigré-e-s, français-e-s issue-s de la colonisation, roms, noir-e-s, arabes, musulman-e-s, asiatiques…) sans en laisser sur le bord de la route !

    – Un refus de l’utilisation de nos arguments libertaires pour légitimer l’islamophobie, une façon de dire : Pas en notre nom !

    Noyée dans un fatras d’arguments pseudo-laïques, pseudo-féministes, pseudo-progressistes avancés par des personnalités telles Michel Onfray ou l’équipe de Charlie Hebdo, émerge aussi parfois de leur discours l’auto-affirmation de leur sensibilité libertaire, en réalité l’usage d’un lexique libertaire se réclamant du combat antireligieux des anarchistes, de l’impertinence, la provocation, la liberté d’expression, etc. Quelle qu’en soit la forme, le rapprochement entre l’islamophobie de ces individus et nos convictions libertaires nous est intolérable. D’autant que cette tendance traverse également notre courant politique.

    La suite :

    https://quartierslibres.wordpress.com/2014/07/25/pas-dislamophobie-au-nom-des-idees-libertaires/

  • Un témoignage de l’impossibilité de débattre de manière libertaire dans un milieu se proclamant tel :

    Vous avez dit « race sociale » ?

    Lettre ouverte à mes camarades anarchistes.

    par Geoffrey

    Samedi 7 novembre 2015 à Lyon avait lieu, à la librairie libertaire « La Gryffe », une conférence intitulée « Anarchisme et Islam ». Cet article ne traitera pas du contenu de la conférence mais plutôt du débat qui en a découlé. Au cours de ce dernier une personne que je considère comme une camarade de lutte, musulmane et voilée, en est venu à parler du terme de « race sociale ». Grosse erreur ! S’en est suivie plus d’une demi-heure d’attaques envers cette camarade au cours de laquelle elle fut traitée de « racialiste », accusée d’utiliser des termes d’extrême droite. En sous texte il lui a été reproché de ne pas avoir une analyse de classe du racisme.

    J’écris cet article pour enfoncer le clou. Je suis blanc et communiste libertaire comme l’écrasante majorité des personnes qui ont attaqué ma camarade. Dire ceci est central pour ce qui va suivre. Je précise aussi que j’ai l’appui de ma camarade pour écrire ce texte : elle a jugé qu’il était bon de donner mon avis d’anar blanc sur le sujet, elle a relu ce texte et je le publie parce qu’il lui convient.

    L’anarchisme et l’extrême gauche en général ont un problème avec le concept de race. Et comment peut-il en être autrement puisque de prime abord ce terme peut résumer à lui seul deux périodes les plus honteuses de l’Histoire de l’Occident : la Colonisation et l’Holocauste où des millions de personnes sont mortes, les premiers Noir.e.s et Arabes, les seconds Juif.ve.s et Tziganes pour la plupart, seulement parce qu’ils étaient considérés racialement comme inférieur à l’Homme blanc et chrétien. C’est-à-dire que cette infériorité, pour les bourreaux de ces génocides résidait dans le code génétique de leurs victimes.

    On pourrait donc comprendre pourquoi l’utilisation du terme de race dans une conférence libertaire puisse susciter l’émoi. Ma camarade serait donc une nazie puisque elle utilise ce terme ?

    Eh bien pas du tout.

    Pour le comprendre, il est fondamental de faire la distinction entre race biologique et race sociale. Ma camarade ne croit pas en l’existence de la race biologique, elle ne croit pas qu’un peuple, qu’une ethnie, qu’une couleur de peau soit supérieure à une autre. Elle croit en l’existence des races sociales. Ce qui signifie qu’au sein d’une société structurellement raciste, les institutions de cette société et la population « racialisent » les individus. En France un.e Noir.e, un.e Arabe, un.e Rrom n’aura pas la même place dans la société qu’une personne de couleur blanche. Face au marché du travail, face au logement, face à la police, face aux différentes institutions un.e blanc.he est avantagé.e face à une personne « racisé.e ».

    Il ne s’agit pas là de racialiser la question sociale, mais plutôt l’inverse, de socialiser la question raciale : d’expliquer que le concept de race, s’il n’est pas une réalité biologique est une réalité sociale : un Rrom est considéré par l’Etat français et son racisme systémique comme un Rrom en premier lieu, et non comme un « individu » et encore moins comme un « citoyen ». Ainsi, dire qu’il n’y a pas de différence entre lui est moi est au mieux de la naïveté, au pire de l’hypocrisie républicaine. Je ne suis évidemment pas supérieur à lui, mais ma place dans la société que me confère ma couleur de peau et mon identification comme étant français m’accorde sur tous les points de nombreux avantages. C’est ça la race sociale. […]

    Voir la suite :

    http://lmsi.net/Vous-avez-dit-race-sociale

  • Il ne s’agit évidemment pas d’un « débat » ni d’une « discussion », mais d’un procès dans le style des procès staliniens. La présentation n’est pas autre chose qu’un réquisitoire des procureurs « libertaires » où sont désignés les bons et les méchants, et où ces derniers ne sont convoqués que pour reconnaître leurs erreurs, longuement énumérées à l’avance, et s’excuser d’avoir une pensée différente.

    Tous les arguments avancés par les islamophobes « libertaires » sont une provocation, car ils déforment volontairement la position des antiracistes pour se présenter comme le seul rempart contre la religion et l’islamisme dont nous serions les complices. Ce qui est une grossière calomnie. La position des antiracistes, libertaires ou non, et sans exceptions pour l’islamophobie, a été clairement exprimée, et faire semblant de ne pas la connaître, c’est essayer de transformer les « débats » en procès de Moscou contre les déviants.

    http://lmsi.net/A-propos-de-l-islamophobie

    http://lmsi.net/De-l-atheologie-a-l-islamophobie

    http://lmsi.net/Glossaire-de-l-ignorance

    http://www.alternativelibertaire.org/?Racisme-antimusulman-Riposter-a-l

    http://www.cnt-f.org/59-62/tag/islamophobie/

    http://www.ujfp.org/spip.php?article4590

    http://www.ujfp.org/spip.php?article4541

    etc.

    En dehors des étiquettes d’orthodoxie « libertaire », sont nos camarades de lutte celles et ceux qui luttent contre TOUS les racismes, et sûrement pas celles et ceux qui essaient d’en exclure l’islamophobie.