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Attac ou l’"exercice illégal" de la politique, Tribune de B. Cassen dans Politis du 27/7/06
Publie le dimanche 30 juillet 2006 par Open-Publishing5 commentaires
Pour ceux et celles qui s’intéressent aux problèmes internes d’Attac France, et en accord avec Bernard Langlois (que je remercie), je diffuse la Tribune de Politis du jeudi 27 juillet 2006, qui est encore en kiosque jusqu’au 30 août : Attac ou l’« exercice illégal » de la politique, par Bernard Cassen président d’honneur d’Attac ou il s’exprime à titre personnel.
Carmela Sibaud, membre d’ATTAC, Comité local Sud Essonne
Attac ou l’« exercice illégal » de la politique
Après une croissance rapide, et un an après avoir contribué au succès du « non » au référendum de mai 2005, l’association altermondialiste Attac traverse une grave crise interne. « Politis » ouvre aujourd’hui le débat par un texte de Bernard Cassen, qui revient sur l’histoire de l’association et nous dit comment il voit l’avenir d’Attac, « mouvement d’éducation populaire ». Nous souhaitons que ce débat se poursuive dans nos colonnes et publierons, le cas échéant, d’autres points de vue.
A ATTAC IL N’EST PAS FACILE de prendre du recul, encore moins de faire de la prospective, tant, au cours de ses huit années d’existence, les énergies y ont en permanence été mobilisées autour des actions du jour, du lendemain et du surlendemain que l’actualité nationale, européenne et internationale imposait à l’association. Même en faisant la part du caractère sensationnaliste et partisan (y compris dans ces colonnes) de la couverture médiatique de l’assemblée générale de juin dernier à Rennes - qui a certes laissé de très mauvais souvenirs -, les membres d’Attac ne sauraient désormais faire l’économie d’une réflexion et de débats sur les questions qui y ont été posées « en creux », à savoir quelle est la nature de leur association et qui décide en son sein.
Qui décide ? La réponse est apparemment simple : le conseil d’administration. Et ce conseil de 30 membres en comprend 12 élus par la totalité des adhérents (1), et 18 désignés par un aréopage ‘le Collège des fondateurs) composé d’une soixantaine d’organisations, de syndicats, de journaux (dont les sociétés éditrices de Politis et du Monde diplomatique) et des personnes physiques, parmi lesquelles Bernard Langlois, à la fois acteur et chroniqueur. Mais pourquoi une telle disproportion ? Pour le comprendre, il faut revenir à la genèse d’Attac, et par conséquent à sa nature.
L’idée de créer cette association, destinée à combattre la dictature des marchés financiers en promouvant la taxe Tobin, et de la nommée ATTAC, avait été lancée, un peu comme une bouteille à la mer, par Ignacio Ramonet dans un éditorial du Monde diplomatique de décembre 1997. Par milliers, des lecteurs du mensuel avaient aussitôt exprimé leur enthousiasme et leur exigence de la voir naître. Et naître sous la bannière du Diplo ! Face à cette quasi-sommation, et alors que nous n’avions jamais envisagé une seconde que cette tâche nous reviendrait, nous n’avions plus d’autre choix que d’entreprendre le passage de l’idée à l’acte.
Très rapidement, nous dûmes prendre une option stratégique : Attac serait-elle une association composée uniquement de personnes physiques (et, avec le courrier reçu, nous en avions potentiellement un nombre significatif sous la main) ou une combinaison de personnes physiques et personnes morales, c’est-à-dire d’organisations déjà existantes, dont quelques-unes avaient spontanément fait part de leur intérêt ? Même si nous avons ultérieurement dû en acquitter le prix, les avantages de cette dernière formule étaient évidents : nous disposerions immédiatement de relais dans l’opinion, d’un minimum de ressources de départ et de cadres militants déjà formés. La décision prise, il fallut constituer la liste des premiers fondateurs, et cela à partir de nos relations personnelles et professionnelles.
La première personne que j’appelai dut, je crois, Daniel Monteux, au Snesup et, par son biais, les principaux syndicats de la FSU furent impliqués. De proche en proche, la liste s’élargit à d’autres syndicats, dont SUD, le SNUIPP, la Fédération des finances CGT et l’UGICT-CGT (2). Je contactai aussi la Confédération paysanne, qui accepta aussitôt. Le tableau de famille commençait à prendre tournure. Il ne fallait pas oublier les « nouveaux mouvements sociaux » : DAL, droits devant, organisations de chômeurs et écologique. Gisèle Halimi et René Dumont acceptèrent, à titre personnel de devenir fondateurs. Sollicités par le Diplo, Politis, Témoignages chrétien (alors dirigé par Bernard Ginisty), Golias et même, après un temps de réflexion, Alternatives économiques se joignirent à l’entreprise. D’autres organisations dont, pour certaines, je connaissais à peine ou pas du tout le nom ou le sigle, furent proposées par les uns et les autres. On ne faisait pas dans le détail, il fallait aller vite ! Et c’est ainsi qu’Attac fut lancée le 3 juin 1998, autour du Diplo, par un patchwork de mouvements et de personnalités Les adhérents individuels vinrent après.
Qu’est-ce qui pouvait bien réunir un tel éventail à première vue hétéroclite ? Les motivations étaient diverses. Pour les petites organisations, il était gratifiant d’apparaître sur l’affiche à côté des grandes et d’avoir accès à une nouvelle caisse de résonance, mais pour celles qui « pesaient » le plus, c’est-à-dire les syndicats, il s’agissait de disposer d’une sorte de cercle de réflexion, d’une « centrale » commune de production d’expertise sur la mondialisation financière, ses conséquences et les alternatives à lui opposer : dans un premier temps les deux « t » d’Attac renvoyaient à « taxe Tobin ». Pour éviter de nous enfermer dans cette seule mesure, ils se transformèrent, dans les statuts, en « taxation de transactions financières ».
Peu de gens imaginaient alors que les adhérents individuels, qui affluèrent rapidement, et les comités locaux qui naissaient partout en France voudraient aller au-delà de la réflexion sur la finance internationale. Beaucoup virent dans Attac un substitut au militantisme dans les partis de gauche et dans les syndicats. Ils voulaient aussi agir, et pas seulement pour la taxe Tobin. Aussi, en mars 1999, je proposai la définition suivante du profil d’Attac : « Un mouvement d’éducation populaire tourné vers l’action », qui fit consensus. Progressivement, poussée par la dynamique de sa base, Attac élargit ses activités à l’OMC, aux OGM, aux paradis fiscaux, au G8, aux forums sociaux ; puis, à partir de 2000, à la question européenne ; ensuite aux luttes menées en France sur les retraites, l’éducation, la décentralisation, la Sécurité sociale, dernièrement le CPE, etc. Dans le même temps, en totale autonomie, un réseau d’une cinquantaine de mouvements Attac se mettait en place en Europe, en Afrique, au Japon et dans les Amériques.
S’adaptant aux contours de la mondialisation libérale, qui ne se découpe pas en tranches devient ainsi une organisation « généraliste » et non plus spécialisée dans la seule finance. Elle prenait des positions sur un nombre croissant de domaines et réfléchissait en termes d’alternatives globales au néolibéralisme. Elle se réduisait de moins en moins au plus petit dénominateur commun de ses structures fondatrices, dont beaucoup ne se définissaient certainement pas comme antilibérales. Surtout, aux niveaux local, national, européen, Attac devenait une actrice à part entière, sans référence à ses structures fondatrices, et, sur de nombreux thèmes, beaucoup plus influente que certaines d’entre elles.
Le référendum du 29 mai allait en faire la démonstration éclatante. De l’avis même des tenants du « oui », sa campagne, s’appuyant sur un travail d’éducation populaire sur l’Europe entamé de longue date, fut déterminante pour le succès du « non ». Au passage, elle bouscula quelque peu certains de ses membres fondateurs : certains étaient favorables au « oui », d’autres ne prirent que tardivement parti pour le « non », mais sans faire de campagne nationale. La question de la place d’Attac dans le paysage politique était désormais spectaculairement posée. Et il n’est pas étonnant que, pratiquement au lendemain du scrutin, les attaques internes contre sa direction - qui avaient crû en intensité au fur et à mesure que l’audience de l’association se renforçait - aient redoublé de virulence.
Comme il était impossible de poser la véritable question, celle précisément de la légitimité, pour Attac, d’être une organisation indépendante, y compris de ses fondateurs, et dotée de son projet antilibéral propre, le tir, puissamment relaye par des médias qui n’avaient pas pardonné le 29 mai, se concentra sur des cibles-leurres plus politiquement « vendables » : le « style » de direction, décrit comme « autoritaire », et la prétendue volonté de cette dernière de transformer l’association en parti.
Tout en ne négligeant pas le poids, voire le choc des personnalités, je ne connais aucune organisation moins « autoritaire », plus collégiale et plus transparente qu’Attac : outre que ses comités locaux sont indépendants de la direction nationale, cette dernière, jusqu’à l’éclatement de la crise de sommet déclenchée par certains de ses membres, a toujours pris ses décisions par consensus. Pour ne prendre qu’un seul autre exemple, son bureau hebdomadaire est présidé à tour de rôle par chacun de ses membres (le présidant ne le présidant donc qu’une fois sur douze) et ses relevés de décision sont mis en accès public sur le site la semaine suivante. Qui dit mieux ?
La polémique sur la transformation éventuelle en « parti » est encore plus artificielle. E serait-ce que parce qu’Attac compte parmi ses membres de nombreux militants de formations politiques, toute velléité d’en devenir elle-même une nouvelle serait suicidaire. Il reste qu’est cependant posée celle de son profil dans ce champ. Ma réponse est nette : Attac ne doit pas en changer d’un iota. Elle doit rester un mouvement d’éducation populaire tourné vers l’action et, ajoutera-je, se situer, dans le moyen terme, dans la déconstruction intellectuelle et culturelle du néolibéralisme, et dans l’élaboration d’alternatives globales. A cet égard, les échéances électorales ne sont pas des fins en elle-mêmes, mais des occasions privilégiées pour déplacer le curseur des positions médianes de déplacer le curseur des positions médianes de l’ensemble de la société vers des solutions solidaires et démocratiques.
Même ainsi, Attac piétine des plates-bandes. Elle se livre à ce que Bourdieu appelait l’ »exercice illégal de la politique », lorsqu’il parlait de ces responsables qui « supportant mal l’intrusion des profanes dans le cercle sacré des politiques, les rappellent à l’ordre comme les clercs rappelaient les laïcs à leur illégitimité ». Nous sommes ici au cœur du problème : dans leur totalité, les forces d’extrême gauche et de gauche, et cela est vrai également pour la droite, n’ont aucune envie de voir se renforcer une organisation proposant des alternatives antilibérales, et qui, sans pour autant se situer dans le champ électoral, trouble un petit eu bien rodé dans un pré carré balisé et leur fait craindre des pertes de parts du marché politique entendu au sens large.
Les grandes organisations syndicales et quelques autres associations n’ont pas davantage intérêt à ce qu’Attac prenne trop d’ampleur et se mêle de questions qu’elles estiment essentiellement de leur ressort, et pas pour dire nécessairement la même chose qu’elles... Elles la verraient bien retourner à son cœur de métier initial - la mondialisation financière - et s’y tenir.
Une bonne partie des membres du Collège des fondateurs d’Attac est sur cette ligne de profil bas ou, ce qui revient au même, pour une fonction exclusive de lieu de convergence des positions des différentes composantes du mouvement altermondialiste, de réseau de réseaux, etc. Cette fonction est sans aucun doute très importante, et Attac la remplit déjà. Mais la grande masse de ses adhérents, si on leur pose la question (ce qui n’a jamais été fait car la majorité des fondateurs s’y sont opposés avec succès sous divers prétextes), aspireront sans doute à ce que l’organisation dans laquelle ils militent devienne pleinement adulte et s’émancipe de tous ses géniteurs (ou qui se sont crus tels parce qu’ils étaient sur l’affiche de départ), et notamment de ceux dont l’apport se réduit à la présence à un vote lors d’une réunion ou a une procuration de vote laissée à une autre organisation.
Cela passe par une réforme de leur rôle dans l’association. Au lieu de vouloir continuer à la contrôler, notamment par leur poids prépondérant dans les structures de direction, ils pourraient au moins remplir le rôle statutaire qu’ils ont jusqu’ici complètement négligé -proposer au Conseil d’administration les grandes orientations et lignes d’action de l’association - et laisser les adhérents libres de leurs choix. Ce qui leur donnerait l’occasion de tenter de se mettre d’accord sur autre chose que l’opposition à une Attac vraiment indépendante, et à celles et ceux qui portent cette idée qui va - enfin ! - avoir lieu dans l’association avant les prochaines élections au conseil d’administration, prévue le 8 décembre prochain.
B.C.
(1) Une réforme des statuts qui devrait être acquise à la fin novembre portera ce nombre de 12 à 24.
(2) En juillet 1998, Bernard Thibault, qui allait devenir secrétaire général de la CGT quelques mois plus tard, me confirma le soutien de son organisation et nous promit d’appeler ses unions départementales à s’impliquer. Ce qu’il fit.
Messages
1. > Attac ou l’"exercice illégal" de la politique, Tribune de B. Cassen dans Politis du 27/7/06 , 30 juillet 2006, 22:25
Le texte de Bernard Cassen présente une bonne synthèse de l’évolution d’Attac depuis sa création concrète il y a huit ans.
Aujourd’hui la crise survenue est l’aboutissement d’un faisceau de "sujets qui fâchent" que l’on a tenté pendant des années d’occulter en raison de la culture du "consensus".
La croissance exponentielle d’Attac pendant ses premières années l’a conduit à exercer une sorte "d’hégémonie" sur les microcosmes politique, syndical et associatif.
Cela l’a conduit à s’exprimer sur tout, (et parfois sur n’importe quoi) à la manière d’un parti politique ; il est sorti de la finance internationale, pour aborder des questions de politique générale, sociétales : je crois que l’on a pu avancer le chiffre de 34 pour tous les groupes de travail, comités consacrés à des sujets particuliers autant que variés.
Et les sujets qui fâchent qui traversent transversalement Attac, - comme d’autres organisations politiques ou syndicales -, peuvent s’énumérer de la façon suivantes :
L’Europe : est-ce que l’on admet son organisation actuelle (en espérant l’améliorer) ou est-ce que l’on dénonce les traités actuels en les remettant en cause : Traité de Rome (1957), Acte unique, Maastricht, Amsterdam, Nice.
La régionalisation (un peu corollaire du sujet précédent) : les régions doivent-elles être un outil de démocratie locale ou un moyen, via l’Europe, de démolir l’Etat républicain et de le balkaniser (on a l’exemple récent de la Catalogne, et l’exemple plus ancien du referendum qui a échoué en Corse).
La Laïcité : "laicarde" ou ouverte jusqu’aux communautarismes que cela soit ceux des indigènes de la République (avec par exemple la mansuétude montrée vis-à-vis de Tarik Ramadan par des rédactions comme celle de Politis) ou ceux du Betar ou des amis de feu le Professeur Lejeune.
Le Nucléaire : continuer de développer le nucléaire civil ou le proscrire radicalement (cf réseau sortir du nucléaire).
La croissance économique : une autre croissance ou la décroissance.
Les sans-papiers : les régulariser tous systématiquement ou non.
On pourrait encore trouver quelques autres sujets (l’école, la santé, etc.), mais avec les précités, il y a déjà de quoi s’écharper...
Les motifs annoncés de querelles que l’on a pu voir sur les listes avant le 17 juin et après ont quelque chose de dérisoire, en comparaison du drame du Proche-Orient et du régime de purge qui nous pend au nez après les élections de l’an prochain.
Et de même qu’il serait souhaitable que d’ici janvier les ex-tenants du non proposent, unis, une plateforme crédible avant de proposer un nom, il serait souhaitable avant décembre que les ceusses qui veulent se faire élire au CA d’Attac, disent quelles idées ils proposent, plutôt que de faire des procès d’intention à leurs adversaires agrémentés de noms d’oiseau.
François MAIREY-ROUVELOUP Attac 87 5361
2. > Attac ou l’"exercice illégal" de la politique, Tribune de B. Cassen dans Politis du 27/7/06 , 31 juillet 2006, 08:06
Pour compléter votre information, cet ajout (dans le même numéro de Politis) où je conteste sur deux points la tribune de Cassen :
"LE MANTEAU DE NOE.
Le lecteur a pu lire une tribune de Bernard Cassen, où le président d’honneur d’Attac exprime, à titre personnel, son point de vue sur la crise que traverse l’association qu’il a fondée, avec Ignacio Ramonet, voici huit ans déjà.
Sur le fond — l’historique, le but, le bilan, les perspectives d’Attac —, pas de désaccord irréductible. Je ne polémiquerai pas avec lui sur le caractère plus ou moins « autoritaire » de la direction sortante, d’autres s’en chargeront sûrement. Deux remarques cependant. La première sur la conception qu’il a de la place et du rôle des journaux qui se sont engagés, aux côtés du Diplo, dans cette aventure militante. Pour Bernard, il ne s’agit que des « sociétés éditrices », autrement dit des mandataires sociaux, ce qui tient pour négligeable le personnel de ces sociétés, et en particulier la rédaction (et qu’est-ce donc qu’un journal, sinon ceux qui le font ?). C’est un désaccord de fond. À mon sens, Bernard Cassen a peut-être, comme disait l’autre, « juridiquement raison, mais politiquement tort. » Ma deuxième remarque porte sur l’assemblée générale de Rennes, dont il juge « la couverture médiatique » marquée d’un « caractère sensationnaliste et partisan (y compris dans ces colonnes). » Seuls peuvent en juger ceux qui y ont assisté. J’y étais. Je maintiens, avec l’ensemble de la presse, que nous avons assisté à une bataille de chiffonniers qui a exclusivement porté sur le point de savoir s’il y avait eu fraude ou pas (seule la dernière heure de l’AG, le dimanche en fin de matinée, a expédié le reste de l’ordre du jour.) Et c’est bien normal : comment, dans une association qui (« illégalement » ou pas) entend promouvoir « une autre politique », pourrait-on accepter d’entériner sans broncher les résultats d’une élection interne capitale dont tout indique qu’ils sont entachés de graves irrégularités ? Du reste, Bernard nous indique en fin d’article que de nouvelles élections sont « prévues le 8 décembre prochain. » Bonne nouvelle.
Mais pourquoi donc voter à nouveau, sinon en raison de ces fortes présomptions de trucage sur lesquelles il choisit de jeter pudiquement le manteau de Noé ?
B.L."
3. > Attac ou l’"exercice illégal" de la politique, Tribune de B. Cassen dans Politis du 27/7/06 , 31 juillet 2006, 10:34
Ce texte est évidemment personnel et écrit par quelqu’un qui est plus que partie prenante dans le conflit interne. D’autres analyses d’attac, de l’histoire du conflit et donc de perspectives se trouvent en ligne. A vos souris donc pour plus d’infos !
Dernière étape en date : "Bernard Cassen, président d’honneur d’Attac, et Jacques Nikonoff, présidentd’Attac, portent plainte en diffamation contre Thomas Coutrot, membre du
Conseil scientifique d’Attac
Le 1er juillet 2006, Thomas Coutrot, a publié sur la liste électronique du
Conseil scientifique d’Attac un document intitulé "Comment l’impensable est
devenu possible" qui nous met très gravement en cause. Nous y sommes
nominalement accusés, en tant que membres d’un "noyau directionnel" dont la
composition a été préalablement définie (Bernard Cassen et Jacques
Nikonoff), d’avoir "organisé directement, incité ou laissé faire" une
manipulation de grande envergure sur les bulletins de vote au Conseil
d’administration d’Attac.
ETC".
D’autres mondes sont possibles mais pas comme cela !
Masqué (parce que on ne sait jamais avec des pratiques que je croyais réservées à d’autres) qui :
– attend l’annulation des élections d’attac, de nouvelles élections le plus rapidement possible donc pas en décembre,
– qui demande le retrait de cette plainte au profit d’un débat interne,
– qui désire qu’attac reste une organisation composée des adhérents individuels et de fondateurs divers
– qui désire qu’attac ne soit pas un parti-association politique comme les 100% ALTER .
1. > Attac ou l’"exercice illégal" de la politique, Tribune de B. Cassen dans Politis du 27/7/06 , 31 juillet 2006, 12:10
ATTAC France : Sortie de crise ?
Que l’on soit convaincu de fraude lors des dernières élections du CA en juin 2006 ou que l’on évoque plus pudiquement ou plus prudemment des « anomalies » ATTAC ne saurait aborder son avenir sans examen de son passé afin d’inventer une solution viable à sa crise.
S’il y a bien fraude alors soit un ou des coupables sont sûrement désignés et ils devront « quitter » l’organisation en s’acquittant de diverses obligations sur lesquelles je n’insiste pas ; soit aucun coupable n’apparaît clairement et pour éviter les démissions ATTAC devra être reconstuite voire refondée. Dans les deux cas seul un retour sur la montée en puissance de la crise interne jusqu’à sa récente apogée .
Je souhaiterais présenter ces enjeux de la façon la moins polémique possible. Avant les AG de Rennes, j’étais « non aligné » tout comme mon comité rennais d’appartenance. Depuis Rennes je suis élu non siégeant (au titre des fondateurs et comme délégué du MRAP). Mais je souhaite poser avec d’autres les jalons pour remettre sur pieds ATTAC, une association à nulle autre pareille. N’est-ce pour cela que cette histoire de fraude a pu faire tant de bruit ?
1. - LA MONTEE EN PUISSANCE DE LA CRISE D’ATTAC
I - Le débat qui a fait suite à Larzac 2003
1) Jacques NIKONOFF écrit un article sur les défis que doit affronter ATTAC . Cf notamment l’image "gauchiste" - Le texte est sur attac var.
2) Comprendre pourquoi certains « alters » s’en prennent au stand du PS :
– ATTAC critique le socialibéralisme comme variante du libéralisme
– Le drame des années Jospin après les années Mitterrand
– L’échec du « printemps 2003 » : Ces contestataires se souviennent du socialibéralisme de la CFDT et de la « sagesse » d’une partie de la CGT (l’aile Jean-Christophe Le Duigou qui soutiendra aussi le Oui au TCE)
– Le PS et même la « gauche plurielle » symbolise ce socialibéralisme honni
– Un appel dit Ramulaud « pour une alternative à gauche » - PAG - de juillet 2003 confirme cette analyse et propose une perspective.
3) Un débat mal engagé ou « l’art de s’en prendre au PS avec les précisions utiles » :
– Le PS n’est pas l’intégralité du parti : une fraction reste à gauche qui critique comme nous l’appareil socialibéral. (Lire Filoche and co.)
– Les militants du stand du PS sur le Larzac étaient des camarades altermondialistes : Et alors ? Ce n’est pas eux qui étaient agressés mais le parti qu’ils défendent .
– Il n’était pas utile de démonter ce stand . Certes . Nul n’a défendu l’utilité de cette opération.
– Pour autant le rôle d’ ATTAC n’est pas de défendre le PS et de stigmatiser « ceux d’en bas » qui souffrent du socialibéralisme
II - 2004 ou le "coup d’ Etat manqué" des listes 100% Alter : une « initiative »
– mal engagée en interne : l’opération d’un quarteron de militants a été menée en catimini sans information de l’organisation, ni des adhérents individuels ni des adhérents organisationnels . Ici apparaît pour la première fois, à ma connaissance, le déficit démocratique d’ATTAC. La méthode du consensus a également été déficitaire.
– mal engagée en externe : à l’égard des forces politiques et sociales déjà pleinement engagées dans la recomposition politique – ce qui allait devenir les CCAG – et des forces politiques de gauches potentiellement partenaires à savoir la fraction gauche des Verts et du PS plus le PCF et la LCR (le PT et LO n’étant pas traditionnellement candidates à ce genre de recomposition).
III – LA « Nouvelle dynamique d’ ATTAC » ou l’élargissement problématique du champ de compétence d’ ATTAC
– de la taxe Tobin à la lutte contre la financiarisation du monde ;
– de l’AGCS à la tendance à la marchandisation des services ;
– de l’appropriation publique et citoyenne à l’alter-démocratie
– L’alterdéveloppement ou la liaison du social et de l’écologie
– Etc.. (voir site)
–
– La question de l’élargissement du champ de compétence d’ ATTAC a rebondi en 2005 sur celle des statuts à modifier mais seulement une minorité d’adhérents s’est emparée de ce débat.
2. - L’ACMEE : 2005- 2006
Cette période de crise exacerbée part de du soir du 29 mai et n’est pas terminée.
I - Entre le 29 mai et l’AG de décembre 2005 à La Roche sur Foron
1) La question du style de direction (ré)apparait :
La contribution des trois vices-présidents
L’intervention de Thomas COUTROT à l’université d’été d’ATTAC 2005
La prise de position de Susan GEORGE avant les élections réclamant des élus de soutien face au clan Nikonoff.
Une confirmation ? Le CA d’ATTAC comme lieu d’affrontement particulièrement virulent.
2) Le pendant à la question du style de direction :
Les pro Nikonoff accusent eux le « style » de détermination du choix des membres fondateurs valablement candidats à l’élection du CA. Il fustige plus exactement la méthode bureaucratique et secrète de présentation des candidats sur une liste bloquée et ils demandent l’ouverture du choix des candidats « membres fondateurs ».
3) Derrière l’affrontement se profile en fait deux conceptions d’ ATTAC :
A) Les deux conceptions extrêmes et opposées :
La constitution en parti : La solution « partidaire » suppose de se séparer des syndicats qui doivent maintenir leur indépendance à l’égard du patronat mais aussi du gouvernement
L’enfouissement dans les forums et un ATTAC sans position propre et sans apparition propre.
B) La solution préconisée : « marchons sur les deux jambes » :
a) - Les activités propres :
– contre la financiarisation du monde ;
– contre l’AGCS et pour la défense et réhabilitation des services publics hors logique marchande ;
– pour l’appropriation publique et citoyenne et l’alter-démocratie
– Le « Manifeste » d’ ATTAC (voir site) a ajouté des thématiques.
b) - Les activités unitaires sont de deux sortes :
· au sein de collectifs
– aux contours variables avec des syndicats de salariés et de paysans, des associations et des partis le cas échéants :
– Exemple : en 2003 pour la défense et promotion de la Sécurité sociale et des retraites et contre la décentralisation-féodalisation, en2004 pour la santé contre la réforme Douste-Blazy ; 2005 contre le projet de traité constitutionnel européen dans les collectifs pour une autre Europe (collectifs du 29 mai)
au sein des forum :
ATTAC participe à la construction des FSM, FSE, FSL et autres forum respectant la Charte de Porto Alègre.
Cette participation est offensive et critique car l’altermondialisme fait converger des forces qui ne se sont pas clairement dégagées du socialibéralisme.
4) Deux conceptions organisationnelles pour une seule orientation ?
C’est la thèse notamment défendue par Jean-Marie HARRIBEY à l’université d’été de 2005. Mais la préparation de l’AG de La Roche sur Foron n’a pas permis la vérification pratique de cette hypothèse. Il était prévu un seul texte d’orientation mais avec des « fenêtres » d’expression des désaccords sur tel ou tel point particulier. Cette préconisation qui mettait en exergue à la fois une armature commune et des points de divergences n’a pas trouvé d’application.
L’histoire montre que c’est dommageable notamment en rapport avec la solution « des deux textes » . Le choix de sortie de crise des adhérents présents à Rennes se comprend fort bien - pouvoir choisir clairement - mais la solution est plus risquée que celle qui devait être pratiquée avant La Roche sur Foron.
Les élections de la fin de l’année 2005 devront répondre aux exigences de Rennes (confirmées et validées par le CA restreint d’après Rennes)
II – De l’AG de La Roche aux AG rennaises (de décembre 2005 à juin 2006)
La question posée par l’AG de La Roche sur Foron de décembre 2005 est :
Comment dégage-t-on une orientation dans ATTAC ? Le consensus suffit-il ? Faut-il un texte d’orientation à « fenêtres » ? La solution semblait pencher vers une combinaison des deux : consensus pour l’armature du texte d’orientation et présence des fenêtres pour la mise en évidence des différences de conception dans l’orientation et dans la composition ou la « nature » d’ ATTAC.
La solution de Rennes des 17 et 18 juin 2006
Les élus se séparent et forment chacun un groupe de discussion hors des adhérents qui restent en attente. La crise sous-estimée apparaît alors violemment et heurte la base du mouvement qui dans un sursaut méritoire décide par un « appel du 18 juin » à une clarification sur des orientations. De nouvelles élections doivent intervenir sur cette base.
Le mode de détermination de l’orientation et de l’unité du mouvement est-il définitivement tranché à Rennes ?
III - LA RESOLUTION DE LA CRISE
Tous les éléments indiqués doivent être repris. La découverte d’une fraude électorale nécessitera probablement une reconstruction d’ATTAC voire une refondation avec un autre nom et d’autres mécanismes de direction et d’élection et donc d’autres statuts.
Pour le débat je les cite :
Style de direction : Effacement réciproquement consenti et simultané des trios de chaque camp : JN BC MD et SG GM PK.
Ouverture de la liste des fondateurs : Comment donner matière à intervenir sur le choix des fondateurs sans casser les équilibres. On peut modifier les équilibres mais peut-on les annuler sans changer radicalement la nature d’ATTAC. Certains fondateurs étaient pour le Oui : on comprends qu’ils soient visés pour une éventuelle exclusion.
Réélection sur la base de plusieurs textes d’orientation. Mais ces textes doivent alors intégrer la question de l’organisation d’ ATTAC et notamment la présence ou non de fondateurs.
Elaboration d’un Manifeste présentant de réelles ruptures avec le capitalisme contemporain.
Christian DELARUE
Elu non siégeant ATTAC France
Membre du CA ATTAC Rennes
Secrétaire national du MRAP (Membre du BE et du CA)
2. > Attac ou l’"exercice illégal" de la politique, Tribune de B. Cassen dans Politis du 27/7/06 , 27 août 2006, 18:55
que de gaspillage d’energie,rejoignez tous l’alternative unitaire pour une gauche antilibérale ,toutes les forces du mouvement populaire sont indispensables.
jcb