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De la Nakba, je me souviens !

Publie le jeudi 8 mai 2003 par Open-Publishing

M. Chadi Marouf, President de SDHP
M. Ahmed Abdirahman, VP et Porte parole de SDHP
 
Le 07 mai de chaque annee, plusieurs de nos concitoyens celebrent
l’anniversaire de la creation d’Israel. Un Etat dont la creation, en 1948, a
represente pour de tres nombreux Juifs du monde comme la "reparation"
officielle d’une immense injustice commise depuis des siecles par nombre de
societes occidentales, injustice et oppression qui ont culmine dans
l’inconcevable horreur de l’holocauste nazi.

Si le peuple juif a ete un peuple victime, le peuple palestinien est victime
parmi les victimes. Il a ete litteralement depossede de sa terre, de son
identite, de tous ses droits. Ce que commencent a reconnaître les nouvelles
generations d’Israeliens, moins aveuglees que les anciennes par les mythes
qui
impregnent encore profondement les livres d’histoire israeliens. Ces nombreux
mythes relatifs a la creation d’Israel ou encore a l’exode palestinien de
1948
ont longtemps impregne l’imaginaire et l’inconscient israeliens. Cet
inconscient mythique peut en partie expliquer ce refus obstine de l’ "Autre",
le Palestinien, qui, a la limite, n’existe pas.

Nous pensons qu’il n’y aura pas de solution durable possible tant que le
passe
ne sera pas analyse lucidement et tant que les deux peuples ne reconnaîtront
pas clairement les droits de l’ "autre" a la dignite et a la liberte.

1948 : creation d’Israel, catastrophe pour la Palestine

Les annees 1947-49 ont ete cruciales et pour la population juive et pour la
population palestinienne. Annees qui ont vu la naissance de l’Etat d’Israel,
la
guerre civile israelo-palestinienne puis la guerre israelo-arabe. La version
israelienne de cette periode largement propagee est qu’Israel serait ne
heroïquement dans la "douleur de l’enfantement", en butte a l’hostilite et a
la
haine de tous ses voisins, et que les centaines de milliers de Palestiniens
(environ 800.000) qui ont quitte la terre où ils habitaient pour aller
ailleurs, l’ont fait de leur propre gre, tout simplement parce qu’ils ne
voulaient pas vivre a côte de l’ "ennemi sioniste".

Mais cette vision est de plus en plus refutee par les nouveaux historiens
israeliens (Benny Morris, Avi Shlaïm, Ilan Pappe, Simha Flapan...) et
contredite par les archives relatives a cette epoque. L’histoire revisitee
par
ces historiens de cette epoque, c’est bel et bien l’histoire de l’expulsion
massive des Palestiniens et donc, pour ces derniers, de la "catastrophe", la
Nakba.

Tout concourt a montrer qu’il y a bien eu une volonte deliberee
d’expulsion et de destruction de villages arabes (environ 350), et un exode
"force" et massif. Le massacre terrifiant, le 9 avril 1948, des 350 habitants
(hommes, femmes et enfants) du village de Deir Yassin, perpetre par l’Irgoun,
dirigee a l’epoque par Menahem Begin, devenu par la suite Premier Ministre
d’Israel, a fortement incite les populations palestiniennes a fuir. D’autant
plus que les memes historiens israeliens ont retrouve trace d’au moins dix
operations du meme genre contre des villages arabes en l’espace de deux mois.

Ces revelations, largement confirmees par la communaute internationale des
historiens, entraînent une consequence essentielle au regard du droit
international :

les 800.000 Palestiniens qui ont ete contraints par la force et
la terreur de quitter leurs maisons et leurs villages, et qui peuplent
actuellement les camps de refugies dans les pays arabes voisins, ne sont
nullement des "fuyards", mais bel et bien des refugies, qui relevent de la
Resolution 194 adoptee le 11 decembre 1948 par l’ONU, resolution qui affirme
les droits des refugies au rapatriement et a l’indemnisation. Resolution qui
a
ete revotee 21 fois depuis cette date.

Avant qu’il ne soit trop tard...

Aujourd’hui, le bilan de la deuxieme Intifada (commence le 28 septembre 2000)
est tres lourd :

2400 morts, dont les 4/5 sont Palestiniens et des milliers de
blesses, dont beaucoup seront handicapes a vie. Il n’est plus possible
d’accepter un tel engrenage. Mais c’est logiquement au plus fort, a celui qui
occupe, a celui qui poursuit une politique d’assassinats "cibles" et
d’humiliation permanente des Palestiniens de briser ce cercle de la violence.

Comme le reclame le Mouvement israelien de la Paix, l’Etat d’Israel doit
mettre
fin a cette escalade en disant "Nous sommes prets a negocier". C’est a Israel
de cesser de mener les Palestiniens au desespoir, de detruire
systematiquement
leurs maisons et leurs plantations, de les empecher de circuler, de se
soigner,
d’etudier, ce qui ne peut que provoquer des reactions de revanche de leur
part.

Il est trop facile d’accuser le leadership palestinien de ne pas contrôler
les
mouvements "extremistes" et d’etre donc responsable des attentats perpetres
par
les Kamikazes quand ce meme leadership ne peut sillonner les Territoires
palestiniens. Ce n’est pas en diabolisant Arafat ou en deshumanisant les
palestiniens qu’Israel fera avancer la cause de la paix...

En essayant d’ecraser par la force toute velleite de liberation
palestinienne,
y compris par les pires moyens, l’actuel Premier Ministre d’Israel, Ariel
Sharon, oublie une donnee permanente de l’Histoire, a savoir qu’on ne peut
jamais baillonner eternellement un peuple. Il risque par ailleurs d’entraîner
toute la region dans une situation de plus en plus explosive et
incontrôlable.

De plus, Ariel Sharon denature totalement une certaine idee d’Israel et une
certaine ethique juive que se font nombre d’Israeliens et de Juifs de la
diaspora. C’est en cela que les Juifs du Quebec et du Canada sont directement
concernes, et qu’il est plus qu’urgent qu’ils fassent connaître leur
desaccord
avec une politique qui ne peut que mener au desastre et au deshonneur
d’Israel.

Ensemble, nous appelons a mettre un terme a la volonte du gouvernement de
Sharon de continuer la Nakba par une politique de colonisation des
territoires
palestiniens, la poursuite des implantations illegales, les punitions
collectives systematiques et les nombreuses violations des droits humains du
peuple palestinien. Nous pensons qu’il est de notre devoir de travailler
ensemble et que chacun agisse en ce sens dans sa propre communaute pour
reconstruire la confiance, la foi et l’espoir en une juste paix. Avant qu’il
ne soit trop tard...

Solidarite pour les Droits Humains des Palestiniens (SDHP)
http://www.sphr.org