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La peur change de camp.

Publie le samedi 30 avril 2005 par Open-Publishing
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L’avenir s’assombrit. Le capitalisme nous tire vers le bas. Où que l’on regarde, on voit les signes d’une société qui fait marche arrière. Les services publics sont bradés au profit d’intérêts privés. Les hôpitaux et les écoles manquent d’effectifs et de moyens. Le chômage et la précarité de l’emploi s’aggravent, grandissant le cortège des misérables et des laissés-pour-compte. Les plus vulnérables - les pauvres retraités, les malades, les handicapés sans ressources, les sans domicile fixe, les demandeurs d’asile, les RMIstes, les chômeurs en fin de droits - se trouvent pris dans une nasse de misère dont la crise du système capitaliste ne cesse de resserrer les fils.

Pour ceux qui ont la « chance » de travailler, le régime, au sein des entreprises, se durcit nettement. Les employeurs demandent toujours plus, toujours plus vite, et donnent de moins en moins en échange. Ceci va de pair avec la répression anti-syndicale et des pressions morales de plus en plus insupportables à l’encontre des salariés. Le pouvoir d’achat se dégrade. Dans la pratique, les salaires ont été bloqués depuis de nombreuses années. Et quoi qu’on en dise, le passage à l’euro s’est traduit par une forte augmentation des prix et des loyers. Chirac, Raffarin et Sarkozy nous servent des discours pompeux sur les « valeurs » françaises. Mais dans la réalité, où sont-elles, ces valeurs ? Vous avez dit « égalité » ? Selon une étude publiée en 2003 par l’Institut Montaigne, quinze familles contrôlent à elles seules 35 % de la capitalisation de la Bourse de Paris. Ces quinze familles - dont les Arnault, Bouyges, Pinault, Lagardère, Mulliez et Peugeot - et une trentaine de grands groupes de type « non familial » en contrôlent à eux seuls près de 80 % ! La répartition des richesses est bien plus inégalitaire, aujourd’hui, qu’à l’époque de la révolution française. Or, ce sont précisément les intérêts de la petite minorité richissime qui conditionne toute la politique du gouvernement, laquelle consiste en une déclaration de guerre contre les droits et les conditions d’existence des travailleurs, des jeunes, des retraités et de quasiment tout ceux qui ne font pas partie de la classe capitaliste.

Alors que d’immenses fortunes personnelles transitent par des sociétés-écrans et s’accumulent dans les paradis fiscaux, le capitalisme s’est montré incapable de développer l’économie. La production stagne. En France, le taux de croissance du PIB peine à dépasser les 2 %. Non seulement les capitalistes sont incapables d’améliorer le niveau de vie de la population, mais ils s’efforcent par tous les moyens d’éradiquer les acquis sociaux du passé. Tous les gouvernements ont encouragé ou accepté cette régression : les partis de droite, parce que défendre les riches est leur raison d’être, et les partis de gauche, parce qu’ils ont abandonné les idées et le programme du socialisme, ce qui les a laissés désarmés face aux pressions implacables des patrons et des banques.

Ce dernier problème est loin d’être résolu. Aujourd’hui encore, malgré l’ampleur de l’offensive patronale que nous subissons depuis des années, on entend souvent des dirigeants des partis de gauche et du mouvement syndical expliquer que le gouvernement devrait « changer de cap » et adopter une autre « logique ». Ce genre de raisonnement fait totalement abstraction des réalités sociales. La lutte des classes n’est pas un affrontement entre des logiques, arbitrairement acceptées ou rejetées selon l’humeur des protagonistes. Elle est la conséquence de l’existence de classes dont les intérêts matériels et vitaux sont diamétralement opposés et inconciliables. Les dirigeants qui ne comprennent pas cette réalité, ou qui n’en tiennent pas compte dans leur démarche, ne peuvent pas offrir de solution. Au contraire, ils font plutôt partie du problème.

Nos organisations syndicales, ainsi que les grands partis de gauche, sont la seule arme dont nous disposons pour lutter contre la destruction de tous nos acquis sociaux, que les générations précédentes ont arraché de haute lutte. Aussi ces organisations se trouvent-elles devant un défi colossal - comme chacun de nous, qui en formons l’ossature militante.

Le pouvoir qui permet aux capitalistes de façonner la société et nos conditions de vie selon leurs intérêts provient du fait qu’ils possèdent les banques, les grandes industries et les chaînes de distribution. Au fond de lui, chaque travailleur reconnaît cette vérité, et c’est à cette question que les partis de gauche et des syndicats doivent s’adresser en priorité. Il ne s’agit pas seulement de protester et de s’indigner, mais de défendre un programme d’action concret pour enfin abattre les « murs d’argent » qui nous entourent et nous étouffent comme ceux d’une prison.

Les banques et les grandes entreprises doivent être enlevées aux capitalistes et placées sous le contrôle démocratique des salariés, de façon à ce qu’elles puissent servir les intérêts de la collectivité dans le cadre d’une planification rationnelle. Tant que ceci ne sera pas accompli, les concessions que nous pouvons arracher à un moment donné seront reprises lors d’une nouvelle contre-offensive de la classe dirigeante. Ce fut le cas pour les retraites, pour les 35 heures et la sécurité sociale.

Les travailleurs de France constituent une force sociale extrêmement puissante. Dotés d’un programme à la hauteur de la situation, rien ne pourrait les arrêter. Si, à la veille de la Grande Révolution de 1789, l’Abbé Sièyes pouvait dire que, dans la société, le Tiers Etat était « tout », c’est infiniment plus vrai du salariat moderne. Dans un débat public organisé récemment par une section du PCF à Paris, un jeune homme a demandé : « Mais qui sont, au juste, les capitalistes ? Où sont-ils ? » La question peut paraître naïve, mais elle est au contraire très pertinente. Le fait est que toute l’économie, tout ce qui est produit et toutes les fonctions essentielles de l’organisme social sont l’oeuvre du salariat. Les capitalistes pourraient tous partir en vacances en même temps - l’économie tournerait toujours. Mais quand les travailleurs s’arrêtent, tout s’arrête. Nous sommes donc « tout ». Tant qu’il est passif, le salariat est comme un géant endormi sur lequel repose toute la société. Mais aujourd’hui, ce géant commence à se réveiller - comme le démontre la courbe ascendante de luttes - et à sentir sa force.

Le Président Chirac, lors de sa mauvaise prestation télévisée du 14 avril dernier, nous a exhorté à valider la constitution européenne en s’exclamant : « N’ayez pas peur ! » Preuve qu’une fois de plus, l’occupant du Palais de l’Elysée n’a rien compris. La montée des mouvements sociaux, la mobilisation spectaculaire de la jeunesse lycéenne et la progression du « non » à la constitution démontrent que la peur est justement en train de quitter les travailleurs et les jeunes. Oui, Monsieur Chirac, vous et votre système avez toujours joué sur la peur pour faire passer vos projets néfastes : peur du patron, peur du chômage, peur de la pauvreté, peur des CRS, peur des représailles contre ceux qui veulent se syndiquer, etc. Mais aujourd’hui, la peur commence à changer de camp. Nous vous balayerons, vous et votre gouvernement, à la première occasion. Et une fois que nous aurons réintégré, dans le programme d’action de nos organisations, les idées et les objectifs du socialisme, nous en finirons une fois pour toutes avec le capitalisme et la peur du lendemain.

A ce moment-là, l’exploitation de l’homme par l’homme disparaîtra, et les valeurs de la révolution française - Liberté, Egalité, Fraternité - ne seront plus seulement de vains mots. Au contraire, elles pourront enfin gouverner réellement les rapports entre les hommes, pour le plus grand bonheur de tous !

La Rédaction

http://www.lariposte.com/article.php3?id_article=294

Messages

  • ... la peur les rend méchants, voire dangereux. Reste que j’approuve tout à fait cette analyse. Le vent semble enfin souffler dans la bonne direction. Juste une chose : tant que les grands canaux d’information seront détenus par les journalistes (ou pseudo) inféodés, une (trop) grande partie du peuple restera crédule... Heureusement, l’info libre sur le net est désormais un contrepoids réel. Mais pas suffisant !

    Verdi

    http://vive.laliberte.chez.tiscali.fr