Accueil > Petits comptes entre amis - Première partie du feuilleton SARKO
Petits comptes entre amis - Première partie du feuilleton SARKO
Publie le mardi 29 mai 2007 par Open-Publishing__Après Jacques a dit Hérézy a dit__’’’’
’’Le jour, comme la belle Salomé, retire son ultime voile avant la nuit, sur la banlieue de Neuilly. Dans le salon du plus pur style château de Versailles revisité par Conforama, Johnny est venu de Suisse remercier son ami Président des brosses à dents, du cadeau fiscal digne de tout grand monarque qui se respecte. Les deux amis écoutent, religieusement, le bzz bzz d’une mouche, enfoncés dans d’énormes fauteuils en simili cuir rescapés du premier mariage de Cécilia et rapiécés consciencieusement et avec amour par cette femme économe et sentimentale.’’
’’Hérézie se penche sur Johnny.’’
__Hérézie__
– Eh bien, je ne vois pas pourquoi on devrait payer des impôts sur les successions ou sur les donations ! Qu’en dis tu Johnny ? Promis, dès le mois de juillet, croix de bois, croix de fer, si je mens je vais en enfer…
__Johnny__
– Toi, ami de Johnny .Moi ton ami, Tu sais, Johnny il est content…
__Hérézie__
– Ne m’interrompt pas ! Je déteste ça ! Je disais donc, oui, c’est ça, je vais supprimer dès juillet, les droits de succession et de donation pour 95% des français. Je m’y engage.
’’Il crache par terre.’’
’’Johnny l’imite mais rate un tir mal calculé. Il essuie son Jean.’’
__Johnny__
– Johnny est content. Johnny va faire une chanson rien que pour toi. Johnny va pouvoir récupérer sa tirelire laissée dans le coffre fort en Suisse et il va s’acheter un nouveau yacht et inviter son ami Nicolas. Heu, un tout petit yacht bien sûr. Johnny est un peu pauvre. Le pouvoir d’achat en Suisse il est dur pour Johnny.
’’Hérézie se lève brusquement puis marche de long en large. Il allume une cigarette prend des airs à la Humphrey Bogart. Le grand miroir mural lui renvoie le reflet d’un petit homme nerveux pas très photogénique. Du coup il prend l’allure et l’accent d’une racaille Karchérisée. Il attrape la casquette que son fiston a laissé trainer sur une chaise. La visse sur son crâne à l’envers (la casquette pas le crâne). Il lance ses doigts dans tous les sens comme dans les clips de rappeurs.’’
__Hérézie__
– Ok, Ok man ! Et j’te dis moi, que je suis bien le seul à avoir ce courage ! Exo-né-ration fiscale des trans-missions de patri-moines (il reprend un débit normal) ainsi je défends même les petits. Tout le monde est intéressé par cette mesure ! Et en passant, je réhabilite le travail et la famille.
’’Hérézie se redresse sur ses talonnettes, passe la main dans ses cheveux, les replace bien en arrière.’’
__Johnny__
– Tiens ça me fait penser. ..(Il rit intérieurement) (si c’est possible, il va y arriver !) …Dis, elle est où la Cécilia ?
’’Hérézie lance une bourrade dans les côtes de Johnny qui en a le souffle coupé et se tient les côtes, grimaçant de douleur.’’
I’’l fait nuit. Dans une semi pénombre, nos deux compères se prennent une ligne de coka cola avec une paille.’’
’’Maria, 103 ans, entre dans le salon et avance à petits pas vers Hérézie.’’
__Maria__
– Excuse moi petit mais tu es assis sur mon HD (pour les non initiés : Humanité Dimanche). Je vais te gronder car tu me le chipes (handel) pendant que je suis dans la cuisine à récurer tes casseroles ou dans ta salle de bain à nettoyer ta crasse au fond de la baignoire ou à quatre pattes à cirer ton parquet. Tu oublies toujours de rendre, mon HD et puis merdre, tu n’as qu’à t’y abonner après tout !
’’
Maria secoue son doigt devant le nez d’Hérézie qui se rassied vite dans son fauteuil.’’
– C’n’est pas bien ça mon p’tit Nicolas ! Quand même, piquer comme ça les références des autres ! Y’a plus d’une raclée qui se perd c’est moi qui l’dit ! Tiens, J’ me rappelle. Déjà tout petit tu piquais tous les jouets de tes camarades, tu prétendais qu’ils étaient à toi et si les pauvres mioches voulaient te les reprendre et ben tu leur flanquais un mauvais coup dans les tibias ! Ah, tu n’as pas changé ! Bon allez, lèves donc tes fesses de là que je récupère mon HD.
’’Hérézie se lève à contre cœur. Maria se saisie du HD.’’
__Maria__
– Au fait, mon garçon, si je peux me permettre, je trouve quand même que cette mesure antisociale privera le budget de l’Etat d’environ 5 milliards d’euros par an (sur 7,3 milliards de droits encaissés en 2006).
’’ Maria se tourne vers Johnny dont la tête dodeline rythmiquement plutôt à droite sur son menton qui s’affaisse progressivement.’’
__Maria__
– Vous vous rendez-compte monsieur Johnny ? Ca profitera aux plus riches !
’’Johnny baille (depuis qu’il a quitté Nathalie) et suit d’un regard plombé - de souvenirs lancinants - le vol chaotique d’une mouche qui cherche une issue de secours et qui, affolée, se cogne à l’abat jour d’une lampe napoléonienne (le bicorne sans doute). Trop tard. Hérézie l’a intercepté (la mouche, pas la lampe) d’un geste prompt et professionnel. Il l’écrase dans ses deux mains, l’air réjoui.
Cette scène quasi champêtre réveille les sens de Johnny qui sent l’inspiration venir et commence à gratter sur sa guitare. Un regard béat illumine son visage où perle la sueur. Il relève la tête. Les fils de sa dernière chirurgie esthétique craquent. Mais Johnny n’y prête pas attention. Son regard se noie dans celui d’Hérézie. Il pense à ce moment là (si si) "il y a une part d’Hérézie en moi", baisse à nouveau la tête et chatouille de plus belle sa guitare (tordue de rire) qui ,en fait, appartient à Hérézie en personne qui a appris tout petit à jouer « jeux interdits » en si bémol.
Johnny lève la tête vers son fidèle ami.’’
__Johnny__
– Johnny il est content. Johnny il a le début de sa chanson, écoute !
Où vas-tu Hérézie avec les impôts ?
De combien de mignons d’euros
Vas-tu exonérer
Les héritiers qui n’veulent pas payer ?
Et les pov mecs, chanteurs vedettes
Partis en Suisse, planquer l’oseille
IIs te vénèrent, t’es leur soleil
T’es leur patrie, ils ‘n’ont plus de dettes !
Hérézie arrache le HD des mains de Maria qui le lui reprend, chancelant, sur ses maigres cannes, attrape son manteau resté dans l’entrée et sort, brandissant le HD au dessus de sa tête comme un trophée. Elle claque la porte. On l’entend s’époumoner : ’’
– La distribution des patrimoines est plus inégalitaire encore que celle des revenus ! »
Maria est devant l’hôtel particulier de son bon maître. Une Cadillac passe à toute allure et manque la renverser alors qu’elle s’apprête à descendre, non sans difficulté, du trottoir qu’elle a toujours refusé de faire. Hérézie épie Maria derrière la vitre de son HP (hôtel particulier), l’alarme à l’œil, il l’a regarde s’éloigner tel un moucheron retournant à son destin d’insecte sans conscience de classes. (Quoique, il semble que pour Maria un déclic ait eu lieu vers la fin de sa vie) .Elle continue son soliloque serrant bien fort le HD contre son cœur, seul bien qui lui reste dans sa triste vie.’’
__Maria__ avance à petits pas, psalmodiant :
– La plupart des successions portent sur des montants peu importants et ne sont pas taxées. C’est bidon tout ça. Mais les plus grosses successions représentent 46% du capital transmis. Ce sont ces héritiers là qu’Hérézie exonère. Quelle hérésie !
__Quelques mois plus tard...__++++
Dans sa cage dorée, sur sa balançoire, l__’oiseau du paradis fiscal__’’’’ se lisse les plumes. Il ouvre son joli bec et entonne :’’
– Johnny est content. Johnny est content. Johnny est content.
__FIN de ce conte de ’’bécasse’’ et de la mère ’’loi’’ (qui n’a rien à voir avec la réalité - les personnages de ce conte étant purement fictifs).__