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Plan de campagne du PS pour capter le vote musulman

par patrice bardet

Publie le mercredi 12 octobre 2011 par patrice bardet - Open-Publishing
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Plan de campagne du PS pour capter le vote musulman - PARTIE 1- Éléments de langage et postures à mobiliser vis-à-vis des immigrés et des musulmans

par Fatouche Ouassak, membre du PIR

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Je me présente pour ceux qui ne me connaissent pas encore, monsieur Carotte, responsable du service Communication et Business du PS, notamment dans le cadre de la campagne « Tous ensemble dans la diversité, votons pour que les dirigeants du PS récupèrent enfin le pouvoir ». Je vous ai réunis aujourd’hui pour que nous puissions, à quelques mois seulement de l’échéance électorale, préciser nos axes de campagne. Il est temps pour nous de peaufiner la stratégie à adopter vis-à-vis de nos électorats-cibles et de construire les argumentaires adaptés. Je vous propose de commencer par l’électorat le plus facile, le plus fidèle au PS : nos compatriotes de confession musulmane. Voyons ensemble la manière d’aborder les musulmans et les immigrés (partie 1), les réponses à apporter à leurs éventuelles interpellations (partie 2), les propositions à faire pour les convaincre définitivement de voter PS (partie 3) et enfin les modalités d’organisation de la campagne et le calendrier (partie 4).

Comment nommer cette catégorie de population ?

Pour désigner les immigrés, n’utilisez pas le parler populaire, il a souvent une connotation raciste. Ça ne correspond pas du tout à notre registre de langue. Au PS, nous sommes sophistiqués, lorsque nous parlons des immigrés, nous nous devons d’être inattaquables. Vous allez me dire Georges Frêche et Manuel Valls. C’est vrai que ce bon vieux Georges Frêche n’en loupait pas une dès qu’il s’agissait de se faire piéger. Quant à Manuel Valls, il a toujours été tête en l’air, il n’a pas fait exprès de ne pas voir la caméra planquée derrière lui. Mais aujourd’hui tout est rentré dans l’ordre : Frêche mort, nous sommes soulagés de la moitié du problème ; quant à Valls, il a bien retenu la leçon, il sait dorénavant sur quel bouton appuyer pour éteindre un micro.

Quand vous parlerez des immigrés lors de la campagne, pour éviter le dérapage, optez pour la sobriété. Appelez-les par exemple « français issus de la richesse extraordinaire de la diversité ». Ou « français issus de lointaines contrées qui ont apporté énormément à la diversité ». Ou encore « français issus d’un ailleurs riche en couleurs générant toute cette magnifique diversité ». Sobre et humaniste. Entre « issus de » et « diversité », intercalez tous les mots chaleureux qui vous viennent, qu’on reconnaisse bien le style généreux et enthousiaste du PS. Retenez qu’il est très important que face caméra, puisque vous êtes les glorieux défenseurs des musulmans et des immigrés face à Sarkozy, vous les appeliez « français issus de minimum la diversité ». Minimum.

Évidemment en interne, je ne vous demande pas de vous casser la tête avec toutes ces conneries de richesse de la diversité. J’ai bien conscience qu’être humaniste, ça alourdit considérablement le verbe. Et je comprends que vous ayez envie en interne de nommer les choses de manière plus directe et plus objective. Mais attention à ne pas trop vous laisser aller quand même, nous sommes de gauche. Même en interne, les « barbus », les « sauvageons », les « bâchées », c’est seulement au sens pas méchant du terme, après plusieurs heures de travail, quand vraiment on est fatigué de faire attention.

Quelles problématiques mobiliser avec cet électorat-cible ?

Évidemment pas la lutte des classes, déjà qu’on ne parle pas de ça à ceux qui comprennent ce que ça veut dire. Pour faire court, vis à vis des immigrés et des musulmans, on n’aborde rien de socio-économique.

Je vous fais un schéma :

D’un côté, il y a la classe ouvrière qui n’existe plus, qui est de plus en plus précarisée, et qui ne veut plus voter pour nous parce que le PS est trop moderne. La classe ouvrière qui n’existe plus, faudra comme à chaque fois essayer de la convaincre, c’est pas gagné, que si le PS au pouvoir a financiarisé l’économie, démantelé et privatisé les services publics, c’est parce qu’il était obligé pour arrêter d’être archaïque.

De l’autre côté, rien à voir, il y a les immigrés. L’immigré, il n’a que des problèmes culturels et identitaires. L’immigré, il n’a pas de classe sociale, il ne s’inscrit pas dans des rapports sociaux, ça l’intéresse pas tout ça l’immigré, il s’en fout, c’est trop compliqué. Lui ce qu’il demande c’est qu’on l’accepte, qu’on l’aime, qu’on se marie avec lui, il veut la tolérance c’est son rêve.

Vous voyez que ce sont deux électorats-cibles bien différents, deux argumentaires bien distincts. Quand il s’agit des immigrés, zdeg-zdeguisez au maximum la question sociale, et pour ce qui est de la question raciale, faites-la disparaître dans un tourbillon de bons sentiments.

Insistez donc sur « l’accueil », « l’apport », « la tolérance ». Sur « le métissage », « le mélange », « la mixité », « la diversité ». Sur « le vivre ensemble », le « vivre ensemble autrement », le « savoir vivre ensemble ». Vous faites comme vous voulez je veux pas le savoir, mais vous me casez au moins un « ensemble » et un « diversité » dans chacune de vos phrases.

D’ailleurs « Ensemble dans la diversité » c’est bien, on dirait du Cali, on pourrait garder la formule pour notre prochain concert de la tolérance avec SOS. « Ensemble dans la diversité pour la tolérance ». Encore mieux.

Surtout faites-vous plaisir, juxtaposez de manière aléatoire plein de mots genre qui n’ont pas de sens, vous croirez que le résultat est complètement débile, et en fait effectivement ça fait les slogans spécial immigrés du PS.

Quelle posture adopter ?

A l’égard des musulmans, nous avons toujours été très bienveillants et très protecteurs. Et puis nous sommes quand même en demande par rapport à leur vote, donc ne refusez jamais de discuter vite fait avec eux.

Mais attention parce que parfois ils s’imaginent que la discussion avec eux, c’est pas seulement pour consolider les réserves de voix. J’ai l’impression qu’ils pensent que c’est vrai, qu’on va réellement débattre.

Pourtant on leur a déjà faxé à plusieurs reprises aux musulmans qu’ils sont loin d’être notre priorité des priorités, ils devraient commencer à imprimer. Rappelez-vous quand Martine Aubry et Laurent Fabius avaient retiré en toute urgence, tout écœurés qu’ils étaient, leur signature d’une pétition parce que Tarek Ramadan l’avait signée aussi. Des voisins avaient même aperçu Laurent Fabius frapper à la porte de Respect Mag au milieu de la nuit pour mettre lui-même du super-blanco sur sa signature, pour être bien sûr. Vous me direz c’est anecdotique. Mais quand même. J’ai même entendu un jeune maghrébin dire qu’à part d’oublier de les comptabiliser lors du recensement de la population, parce qu’on les aurait déjà recensés dans le cheptel national, il voyait pas comment le PS aurait pu être plus clair vis-à-vis des musulmans. Alors évidemment il exagère le jeune maghrébin, c’est toujours pareil, mais c’est pas faux de dire qu’au PS on n’en a rien à foutre des musulmans, ils peuvent crever, ça c’est pas faux de le dire.

C’est d’ailleurs ce qui explique que dans certains quartiers, les dirigeants PS sont parfois accueillis par les musulmans avec une certaine hostilité. Et parmi ces musulmans, vous seriez étonnés de voir que les enfoulardées sont souvent les plus enragées. Le foulard et la rage. A la manipulation fondamentaliste, rien d’impossible.

De toute façon, au pire, si des musulmans viennent perturber les beaux discours de campagne que vous prononcerez dans les quartiers populaires, faites comme Ségolène Royal à la Paillade à Montpellier, appelez au secours des maures sont en train de violer la république, criez Santiago ! un glaive à la main en marche pour la Reconquista, et vous vous en sortirez très bien. C’est vrai que c’est un peu insultant vis à vis des musulmans, mais votre mépris n’aura d’égale que la fidélité de leur vote au moment des urnes, puisque nous sommes les seuls capables de les défendre face à Sarkozy. Ils n’ont pas le choix, et ça ils le savent très bien.

Éléments de vigilance quant à la posture à adopter vis-à-vis de certains immigrés

J’attire votre attention sur le fait qu’il existe un certain nombre d’individus parmi les immigrés qui ont une assez bonne connaissance de l’histoire croisée de la gauche française et de la colonisation, qui peuvent vous réciter dans le détail les exploits de Guy Mollet et de Mitterrand pendant la guerre d’Algérie, qui ont participé, remplis d’espoir, à ce qu’ils appellent la marche pour l’égalité, la marche des beurs de son vrai nom, qui ont assisté à l’envoi de troupes françaises en Irak en 91, qui ont un avis sur les banlieues, la France-Afrique, la Palestine et ainsi de suite.

Ne vous approchez jamais de ces individus je vous aurais prévenus.

Je suis sérieux ils sont dangereux. Vous les voyez là-bas, ils discutent calmement, ils passent un bon moment. Mais dès qu’ils nous entendent dire que le PS est, et a toujours été, un parti anti-raciste et anti-colonial, c’est Hulk. Ils hyperventilent, les yeux révulsés, des claquements de mâchoire compulsifs, ils sont capables du pire. Je les ai vus de mes yeux vus. Je crois qu’ils ont développé au cours des années une sorte d’hypersensibilité à notre égard.

La bonne nouvelle c’est que vous n’aurez aucun mal à repérer l’immigré phobique du PS. Dites « touche pas à mon pote » et si l’immigré est pris de convulsions, au secours, stoppez net l’argumentaire, partez comme si de rien.

Comment articuler les différents électorats du PS et les différents argumentaires ?

A première vue, dans notre stratégie d’accès au pouvoir, nous avons affaire au PS à un vrai casse-tête chinois par rapport aux musulmans. D’un côté, étant donnée l’ampleur de l’islamophobie dans la société française, le PS ne peut pas faire une croix sur l’électorat islamophobe, le PS étant d’ailleurs lui-même traversé, de sa base militante à sa direction, par l’ampleur en question. D’un autre côté, l’un des chevaux de bataille essentiels du PS aujourd’hui, c’est de se présenter comme le vaillant défenseur humaniste des pauvres petits musulmans, accessoirement électeurs du PS, contre les attaques de la droite.

Dilemme.

Mais ce serait sans compter l’habileté rhétorique de nos dirigeants, qui ne sont pas tout en haut du PS pour rien. Notre discours multi-usages multi-fonctions est à la pointe, c’est même en matière de double discours ce qui se fait de mieux actuellement. Admirez par exemple cette déclaration de Benoît Hamon à la radio fin 2010. Que vous soyez islamophobe ou musulman, vous trouverez qu’il n’a pas complètement tort Benoit Hamon à propos des « prières de rue » :
« Il n’est pas normal aujourd’hui que dans l’espace public, il puisse y avoir des prières et il faut avoir une réponse. Ce qui relève de la foi doit se faire dans une enceinte qui est une enceinte privée ; il faut séparer l’exercice de sa foi et l’espace public. De la même manière, aucune religion ne doit interférer dans le fait de rédiger, faire et voter la loi. Cette frontière là, c’est la gauche qui l’a toujours préservée. Ce sont des situations qui ne sont pas tolérables beaucoup plus longtemps. On a une situation de tension avec les riverains et il faut trouver des solutions, il faut arriver à une discussion, à une négociation avec un calendrier, un échéancier pour trouver des solutions en termes d’espaces dans lesquels les fidèles peuvent exercer leur culte, pour libérer l’espace public. Il n’y a aucune raison que la laïcité ne soit pas partout garantie. »

Bien sûr il ne s’agit pas d’égaler l’art oratoire tout en subtilité de Benoit Hamon et sa manière noble et digne de faire de la politique. Mais au moins inspirez-vous.

Pour vous exercer et pour que vous vous imprégniez bien de la mécanique deux-en-un du PS, je vous donne une série de thématiques avec à chaque fois deux points de vue opposés. Charge à vous de concilier ces deux points de vue dans des constructions de phrases deux-en-un traduisant le positionnement du PS sur l’islam et l’immigration en période de campagne électorale.

Les discriminations :
Les jeunes issus de l’immigration subissent effectivement des discriminations
Les jeunes issus de l’immigration ont développé des sentiments paranoïaques voyant de la discrimination partout pour masquer leur oisiveté et leurs échecs

Le foulard :
C’est incroyable qu’on ose interdire à des femmes voilées d’accompagner leurs enfants lors des sorties scolaires
C’est incroyable que des femmes voilées osent accompagner des enfants lors des sorties scolaires.

L’intégration :
Le système discriminatoire de la société française fait des français d’origine maghrébine et sub-saharienne des citoyens de seconde zone
Les français d’origine maghrébine et sub-saharienne ne font aucun effort pour s’intégrer dans la société française.

Pour gagner du temps, je préfère vous donner tout de suite les réponses. Cela ne doit pas vous empêcher de refaire l’exercice chez vous.

Les discriminations :
« Ce n’est pas normal que les jeunes issus de l’immigration aient sans arrêt le sentiment d’être discriminés alors même que les lois de la République reconnaissent comme étant égaux tous les citoyens sans distinction de race, de couleur, de religion ».

Le foulard :
« Qu’on en soit encore aujourd’hui au 21ème siècle à interdire à des femmes voilées d’accompagner des gamins lors de sorties organisées par l’école de la République, c’est proprement incroyable, et ce d’autant plus qu’on est en France dans un pays où le principe d’égalité entre les hommes et les femmes est sacré ».

L’intégration :
« L’intégration des personnes d’origine maghrébine et sub-saharienne connaît aujourd’hui des difficultés. Force est de constater que les efforts nécessaires à leur intégration harmonieuse dans la société française n’ont pas été réellement fournis ».

Si vous trouvez de meilleures deux-en-un, n’hésitez pas à m’en faire part.

Retenez en tout cas que tous nos électorats doivent pouvoir faire leur marché dans ce que vous dites. Les fachos de gauche, les laïcards, les immigrés, les musulmans. En tout cas tant que la gauche sera, selon Manuel Valls, « complexée sur ces questions ».

Parce que quand la gauche se décomplexera enfin sur ces questions, là d’accord, on ne sera plus obligé de se contorsionner, finis les complexes, finis les tabous, on osera enfin laisser la chèvre manger le chou.

Reste à savoir si le musulman fera la chèvre ou le chou, on ne sait pas parce que Manuel Valls ne nous a pas encore bien expliqué s’il trouvait que le PS avait un complexe par rapport à l’islamophobie et le racisme ou un complexe par rapport à l’islam et l’immigration.

Manuel Valls, c’est celui qui veut « sortir d’un discours dogmatique et compassionnel » grâce aux quotas d’immigration et au durcissement de la lutte contre les sans-papiers ; c’est celui qui tenait à ce que la gauche participe au débat sur l’identité nationale ; c’est celui qui, après avoir chaleureusement serré la main d’un vieux maghrébin, s’interrogeait sur l’image répugnante que tous ces immigrés donnent à Evry et se désespérait, étant un grand défenseur de la mixité sociale, qu’il n’y ait pas plus de blancs aux alentours pour purifier un peu le paysage.

C’est pas clair dans quel sens Manuel Valls veut la décomplexer la gauche.

On verra bien quand le PS sera au pouvoir.

En attendant, ayez un discours benoit-hamoniste pendant toute la durée de la campagne, et en parallèle, refusez de signer les pétitions quand ce gros fourbe de Tarek Ramadan les signe aussi ; le PS n’aura de cesse de dénoncer son double discours pervers et démoniaque.

Plan de campagne du PS pour capter le vote musulman - PARTIE 2 : Réponses aux interpellations des immigrés et des musulmans à l’égard du PS

Je vous ai listé quelques unes des nombreuses interpellations que j’ai pu entendre, qui traduisent les griefs et les ressentiments de beaucoup d’immigrés et de musulmans lorsqu’ils viennent quémander auprès du PS, interpellations auxquelles vous risquez d’être confrontés. Pour vous éviter toute déstabilisation, je vous propose à chaque fois une contextualisation du contenu de l’interpellation, ainsi que quelques éléments de réponse qui vont permettront de contre-argumenter avec finesse et intelligence.

- Interpellation 1 : « Le PS n’a pas tenu ses promesses de 1981 vis à vis des immigrés »

Contexte et éléments de réponse : Ils parlent du droit de vote des étrangers aux élections locales, qu’on a promis et qu’on n’a pas accordé. Difficile de nier. Mais dites-leur que les français n’étaient pas prêts. Alors c’est vrai que les français n’étaient pas prêts non plus pour le traité européen de 2005, ils ont dit non vraiment on n’est pas prêts, mais ça n’a rien à voir. Le PS a été obligé d’approuver le traité de Lisbonne parce que prêts ou pas prêts, les français fallait qu’ils arrêtent un peu de se replier sur eux-mêmes, d’être aussi nationalistes, franchouillards, pour pas dire autre chose. C’est pas pareil, faut arrêter de vouloir toujours tout comparer. Ce dont vous pouvez peut-être parler à propos du vote des étrangers, c’est des initiatives de démocratie participative dans les villes PS. Et plus particulièrement des Conseils de résidents étrangers qui permettent aux résidents étrangers de donner un avis consultatif non décisionnel sur la couleur qu’ils choisiraient si éventuellement un jour on décide d’installer de nouvelles poubelles dans la ville et qu’on n’arrive vraiment pas à se décider pour la couleur entre vert anis et vert pomme. Ça compense pas complètement le droit de vote, mais c’est comme quand on offre une dînette aux petites filles, ça leur permet de jouer à faire semblant pour quand elles seront grandes. Par ailleurs, dites-leur que justement on compte leur promettre à nouveau le droit de vote des étrangers pour 2012, que c’est prévu, on va la leur re-promettre.

- Interpellation 2 : « Le PS au pouvoir a eu une gestion coloniale des quartiers populaires »

Contexte et éléments de réponse : Cette interpellation traduit l’ingratitude sans limites des immigrés. Les immigrés et la pacification des banlieues, nous en avons toujours fait une priorité au PS. On a réussi à faire mentir l’adage très répandu dans les quartiers populaires qui veut que, en termes de politiques publiques, si le PS te désigne comme prioritaire, t’as du souci à te faire. Les immigrés n’arrêtaient pas de pleurer que les inégalités sociales qu’ils subissaient étaient spécifiques. On en a tenu compte. Pour les banlieues, on a remplacé le droit commun, qu’on a du coup réservé aux non-prioritaires, par la politique de la ville inventée spécifiquement pour eux. A chaque fois qu’ils venaient mendier en brûlant des voitures, on leur a fait des chèques avec en tout pas moins d’une dizaine, si c’est pas une centaine, de milliers de centimes qu’on saupoudrait généreusement sur l’ensemble des banlieues. Les immigrés se plaignaient du chômage massif, de la précarisation, du manque d’infrastructures publiques, du manque de logements, des discriminations. Plutôt que de traiter ces désagréments qui ne sont jamais que des conséquences, le PS à travers sa politique de la ville a eu l’intelligence de traiter directement les véritables causes des problèmes de banlieues : l’oisiveté des jeunes, la démission des parents, les filles qu’on brûle à l’essence. Et on a fortement soutenu les associations dites de re-socialisation, de civilisation en réalité étant donnée l’ampleur de la tâche, pour porter ces enjeux sur le terrain. La politique de la ville du PS, parce que c’est une politique de gauche, a osé s’attaquer aux problèmes d’intégration des immigrés, alors qu’elle aurait très bien pu, par facilité, s’attaquer aux discriminations institutionnelles qu’ils subissaient. De la même manière, quand les immigrés se sont plaints des crimes policiers, de l’impossibilité de circuler librement, des humiliations et du harcèlement des pouvoirs publics, nous les avons entendus. Nous avons répondu par le dispositif anti-été chaud qui a permis aux jeunes de jouer à la belote afin d’être occupés à oublier d’être en colère, par le renforcement des RG en banlieue pour prévenir leurs sautes d’humeur, et surtout par la création de la BAC pour qui les immigrés honnêtes ont encore aujourd’hui un attachement tout particulier. Nous aurions pu répondre aux complaintes des immigrés de manière encore plus efficace, mais au PS, on avait à l’époque quelques tabous par rapport à la sécurité, on n’osait pas y aller franco. Dorénavant, rassurez les immigrés, nous n’avons plus de tabous, au diable les tabous. Nous ferons, comme le dit très justement Rebsamen, la guerre aux quartiers. Cette guerre contre les immigrés, c’est pour les immigrés qu’on la mènera, parce qu’il n’y a pas de raison que les immigrés n’aient pas le droit à la sécurité. De toute façon quoi qu’on fasse, les immigrés n’arrêtent pas de se plaindre qu’ils sont moins bien lotis que les autres, ils comparent sans arrêt les banlieues avec les autres territoires de la République. S’ils vous interpellent encore avec leurs comparaisons, pour rigoler un peu, dites-leur qu’ils n’ont pas à se plaindre parce que les écoles en ZEP, les routes en ZUS et les ponts construits entre l’école et le commissariat sont au moins d’aussi bonne qualité que les écoles, les routes et les ponts qu’on a construits à Alger ou à Dakar en 1936. Là je plaisante, mais en même temps faut que les immigrés apprennent à comparer ce qui est comparable. Dites-leur pour terminer que lorsque nous serons au pouvoir, nous prévoyons un nouveau plan Marshall pour les banlieues, mais cette fois ce sera différent, on l’appellera plan Jules Ferry pour les banlieues, hommage à ce grand humaniste de gauche qui s’est beaucoup intéressé au sort de ceux que la Nature a le moins favorisés, la référence historique gagnera en pertinence.

- Interpellation 3 : « Le PS a instrumentalisé la cause des immigré-e-s, et a confisqué leur lutte »

Contexte et éléments de réponse : Ils parlent de SOS racisme. Dites-leur que les plus grands analystes politiques s’accordent à dire que cet épisode a constitué le sommet du génie politique de Mitterrand. Sauf s’ils sont d’une extrême mauvaise foi, ils ne pourront pas nier que c’était super bien joué.

- Interpellation 4 : « le PS a instrumentalisé la cause des immigrées et a confisqué leur lutte. Une deuxième fois »

Contexte et éléments de réponse : Ils parlent de Ni putes ni soumises. Demandez-leur pourquoi diable on aurait jeté une idée de génie qui a fait ses preuves à la poubelle.

- Interpellation 5 : « le PS est un parti anti-musulman-e-s »

Contexte et éléments de réponse : Ils trouvent qu’on n’est pas super crédibles quand on défend les pauvres petits musulmans face à Sarkozy, notamment parce qu’on a voté avec zèle les lois anti-musulmans de 2004 et 2010. Expliquez-leur que si on a voté ces lois, c’est parce qu’avec la droite, on s’est dit qu’il fallait faire union sacrée pour aider les musulmans à comprendre ce qui leur arrive. Les musulmans, des noirs et des arabes en réalité, se posent plein de questions sur les discriminations qu’ils subissent dans l’accès aux ressources et aux responsabilités politiques, ils s’interrogent sur leur concentration dans les secteurs d’exploitation du travail les plus précarisés. Ils sont très perplexes parce qu’ils se disent que normalement c’est l’égalité raciale en France. Ils sont tentés de croire n’importe quoi, qu’ils sont dominés par les blancs qui les discriminent et les exploitent, ça part dans tous les sens, ils sont complètement déboussolés. C’est là que l’islamophobie est utile, et en premier lieu pour les musulmans eux-mêmes. Sa fonction est de faire comprendre aux musulmans que ce qui leur arrive, c’est justement parce qu’ils sont musulmans, parce qu’être musulman, c’est ne pas être capable d’avoir accès aux ressources comme les autres. A cause du foulard, de la barbe, du Coran, peu importe. Le PS contribue ainsi à donner aux musulmans des clés de compréhension qui leur permettent d’avoir des réponses à leurs nombreuses interrogations. A la question pourquoi les discriminations, la réponse c’est de votre faute les musulmans. Les musulmans sont ainsi tout disposés à rester polis et malléables sur le marché du travail, tout occupés qu’ils sont à faire un travail sur eux-mêmes pour pouvoir prétendre à l’égalité de traitement. Les musulmans sont reboussolés et le marché du travail peut continuer à fonctionner normalement. Alors c’est vrai que certains musulmans peuvent nous reprocher d’avoir davantage aider les femmes musulmanes voilées, en mobilisant spécialement pour elles des clés de compréhension répressives. Rassurez ces musulmans en leur expliquant l’effet domino des lois anti-foulard et anti-burka. Les enfoulardées à l’école ont certes été le point de chute du galet jeté dans le lac, mais on a pu ensuite, grâce à la progression des cercles concentriques, aider tous les musulmans, dans tous les espaces sociaux. Accordez-leur tout de même que les enfoulardées ont effectivement été privilégiées. Mais d’une part c’était les plus faciles à aider, et d’autre part le PS a toujours été un parti très féministe, on se refait pas.

- Interpellation 6 : « Julien Dray ! »

Contexte et éléments de réponse : Ils font tous une fixette sur Julien Dray je sais pas pourquoi. Laissez, ne dites rien c’est pas la peine. Par contre, ce qui sera jouissif à voir, c’est la petite gueule des interpellants 6 quand Julien Dray sera nommé ministre de l’intérieur.

- Interpellation 7 : « Le PS est un parti structurellement raciste »

Contexte et éléments de réponse : Commencez par reformuler avec eux leur interpellation : « les instances de décision du PS ne sont pas encore totalement représentatives de l’extraordinaire diversité culturelle de la société française ». Expliquez-leur que si on en est là au PS, c’est parce que les maghrébins et les blacks du PS, on ne peut raisonnablement pas leur faire confiance, les maghrébins surtout, c’est culturel chez eux, on ne sait jamais ce qu’ils pensent vraiment, quelles sont leurs réelles intentions. Souvent ils sont gentils, les blacks surtout, on voit bien qu’ils essaient de nous faire plaisir, mais on ne peut raisonnablement pas donner nos places à des gens aussi immatures, faut leur laisser le temps de grandir, de mieux comprendre les choses. De toute façon, déjà qu’il y a une concurrence de chacals entre nous pour le partage du gâteau, on ne va pas s’amuser à les faire entrer eux sur le terrain. Et je ne parle pas du risque communautariste interne que le PS blanc de chez blanc court avec toutes ces histoires. Et puis merde, c’est quand même pas notre faute s’il y a des maghrébins et des blacks, qui sous prétexte de vouloir transformer le parti de l’intérieur soit disant, sont assez stupides pour croire qu’ils vont faire carrière grâce au parti et qu’on va gentiment leur laisser nos places. Ils voient bien que ça fait 30 ans que mises à part des petites tapes sur l’épaule, on ne leur donne rien du tout. La stupidité du maghrébin, ça aussi ça va être notre faute ? Cela étant dit, qu’il y ait au PS des arabes et des noirs de service, comme les mauvaises langues aiment à les appeler, juste bons à faire les petites mains et à décorer de leurs faciès nos affiches de la diversité, c’est un fait. Mais auquel cas, c’est aux arabes et aux noirs de se questionner sur leur capacité, grande semble-t-il, à accepter un traitement raciste dans l’espoir d’être aux avants-postes du second collège électoral. Ils n’ont qu’à s’interroger je suis désolé. Sur ce que ça traduit de leur nature profonde.

- Interpellation 8 : « le PS est un parti sioniste »

Contexte et éléments de réponse : Je tiens à vous prévenir que c’est sur la Palestine que ça va être chaud de les endormir avec notre contre-argumentaire. Les jeunes de banlieues, c’est les derniers de la classe pour ce qui est de l’Histoire de France, ils ne sont pas foutus de retenir Poitiers 732. Mais pour ce qui concerne l’Histoire du positionnement de la SFIO et du PS par rapport à Israël, si le département existait à la Sorbonne, ils obtiendraient l’agrég les doigts dans le nez. Faut dire aussi que le PS leur a fourni pas mal d’archives pour potasser les cours. Pourtant on essaie d’être discret sur le soutien concret qu’on apporte à l’un des protagonistes du conflit israelo-palestinien- on peut pas dire lequel on souhaite rester neutre - mais même nos silences sont considérés comme des archives.

Pour rééquilibrer les archives, et pour que les jeunes de banlieues soient à même de saisir correctement les enjeux du conflit israelo-palestinien, le PS a contribué à une vaste campagne d’information, en communicant sur un certain nombre d’éléments objectifs.

Avec en vrac, la nécessité d’avoir un point de vue équilibré parce que le débat est trop passionné de part et d’autre, l’espoir de paix entre deux frères ennemis qui vont bien finir par se réconcilier parce que c’est trop ballot, l’horreur d’Auschwitz, le risque d’importation du conflit en France, l’anti-sionisme est-ce que ce serait pas de l’anti-sémitisme par hasard, l’inquiétude face à la montée de l’antisémitisme de banlieue, la réaction d’Israël qui cette fois est un petit peu disproportionnée c’est vrai, la légitimité du besoin de sécurité d’Israël qui est bien obligé de se défendre face aux organisations terroristes faut qu’on se mette à leur place, le mur est un mur de sécurité, les boucliers humains, Israël est la seule démocratie de la région, le soutien aux palestiniens mais seulement s’ils ne sont pas islamistes, les palestiniens sont islamistes, la menace islamiste, les palestiniennes les pauvres qu’on oblige à se voiler à cause du Hamas, les palestiniennes les pauvres qui marchent 5 mètres derrière leurs maris à cause du Hamas, les palestiniennes les pauvres qui ne peuvent pas se mettre en bikini sur la plage à cause du Hamas, les palestiniennes les monstres qui enfantent comme des lapines pour multiplier les bombes humaines, les palestiniennes les monstres qui éduquent leurs enfants dans la haine du juif, les palestiniennes les monstres qui poussent leurs fils à aller se faire sauter dans des bus scolaires israéliens.

Et qu’ont retenu de tout ça les jeunes de banlieues à qui on a passé en boucle ces informations objectives ?

Les petits morveux de banlieues, qui d’habitude ne savent pas aligner deux mots correctement, épelant avec peine leur propre prénom, ont retenu de tout ça que le PS a toujours soutenu le projet colonial européen qui depuis plus d’un siècle a consisté à déposséder le peuple palestinien de sa terre ; ils ont retenu de tout ça que le PS soutient l’entité sioniste dans son entreprise de terreur, de pillages, d’expulsions, de privations, d’isolement, de manipulation, d’exploitation, d’humiliations, d’emprisonnements et de massacres visant à anéantir le peuple palestinien ; ils ont retenu de tout ça que le PS œuvre activement à la disqualification de la résistance armée légitime du peuple palestinien pour reconquérir sa terre spoliée, et ce en diabolisant la lutte anti-impérialiste et anti-coloniale héroïque du Hamas et du Hezbollah ; ils ont retenu de tout ça que le PS assure activement la propagande et les intérêts sionistes en France, au niveau de l’Union européenne et au sein des organisations internationales.

Et ça c’est ce qu’ont retenu les petits morveux les plus modérés.

Comme vous pouvez le constater, on a du oublier de mettre un boulon parce que ça n’a pas super bien fonctionné nos efforts en terme de pédagogie auprès des petits analphabètes de banlieues. A croire que plus on informe les jeunes de banlieues sur les éléments objectifs nécessaires à la compréhension du conflit israelo-palestinien, plus ils en déduisent que leur manière de retenir ces éléments est la bonne.

Évidemment dans le cadre de la campagne présidentielle, on s’en fout de ce que pensent les musulmans et les jeunes de banlieues à propos du soutien inconditionnel du PS à Israël. Notre soutien ne date pas d’hier, et ça n’a jamais empêché les musulmans de voter pour nous aux élections. La Palestine, c’est soit-disant important à leurs yeux, mais au moment de se décider devant l’urne, finie la solidarité, ça ne vaut plus rien. Alors c’est vrai qu’ils nous ont fait un show spectaculaire en janvier 2009 quand le PS a gardé le silence on massacre, pour ensuite faire un communiqué équilibré : les musulmans étaient là à se rouler par terre, jurant la main sur le cœur les larmes dans les yeux qu’ils ne voteraient plus jamais PS, que c’était la goutte, que trop c’était trop. Mais vous verrez que tout ça sera oublié en 2012, comme d’habitude.

Ce qui m’inquiète par contre, c’est l’interprétation des jeunes de banlieues sur ce qui se passe en Palestine, recoupant l’interprétation qu’ils font des guerres humanitaires en Irak, en Afghanistan, en Libye. Au delà de la solidarité qu’ils éprouvent, c’est comme si la situation des palestiniens éclairait en partie leur propre situation. J’ai l’impression que ça a tendance à les conscientiser politiquement. Or vous savez que la conscientisation des jeunes de banlieues, c’est dangereux, y compris pour eux-mêmes. Ce qui est révélateur, c’est qu’avant dans les manifestations pro-palestiniennes, c’était l’extrême gauche qui tenait le gros des troupes. Maintenant faut voir la tête des manifs, elles sont infestées de banlieues et de foulards. Les associations pour la paix un jour dans le monde, les syndicats et l’extrême-gauche sont complètement débordés par ces hordes j’ose pas dire sauvageonnes. Plus personne n’arrive à les tenir en laisse. Avant les slogans c’était sympa, c’était « Vive la paix », « Arrêtez de vous bagarrer, vous êtes frères ». Les jeunes de banlieues, leur registre c’est plutôt « Hamas vaincra » et « Allahou Akbar ».

Il serait urgent de réagir. Pourquoi pas une nouvelle union sacrée avec la droite face au danger du communautarisme islamiste ? Faudrait réfléchir à un projet de loi pour interdire de dire « Allah », et a fortiori « Allahou Akbar », lors des manifestations en réaffirmant que dans l’espace public des français c’est la laïcité normalement. Faudrait voir aussi si la loi qui interdit le foulard à l’école n’est pas extensible aux femmes voilées qui vont manifester juste après avoir récupéré leur enfants à la sortie des écoles. Et puis faudrait penser à avoir un peu plus d’imagination dans les associations d’idées qu’on produit à propos de la résistance armée palestinienne. Le terrorisme, le fondamentalisme religieux, c’est pas suffisant, faut renouveler la boite à outils. La torture d’enfants handicapés, les boucliers nourrissons malades, ça c’est du sang neuf. A brûle-pourpoint, vous ne voyez peut-être pas bien les jonctions potentielles, mais on l’a déjà fait, il s’agit juste de trouver les bons maillons susceptibles de rendre le raccord évident.

Pour en revenir aux réponses à apporter à ceux qui aboient que PS c’est pour Parti Sioniste, je pensais à un truc. Ce que vous pouvez peut-être faire à la limite, s’il devait y avoir d’ici la présidentielle un nouveau gros massacre de palestiniens, c’est de demander aux maghrébins qu’on a au PS de pondre un texte où ils expriment leur sincère indignation face aux exactions d’Israël. Mais bien sûr, après que la direction du PS ait fait part de son point de vue équilibré. Genre longtemps après. Une fois que le travail est terminé. Vous me direz, personne n’avait été dupe de cette combine lors du massacre de 2008-2009 et on ne gagnera rien à resservir la merguez. Et vous avez raison. Mais c’est pour le principe de faire semblant. Et puis ce genre de texte d’indignation, ça permet aux maghrébins qu’on a au PS de sortir un peu, on ne leur laisse pas souvent l’occasion de voir la lumière du jour ils ont le teint gris.


 source partie1

(site des Indigènes de la République)

 source partie2


lire aussi, repris sur Bellaciao, l’article publié dans Le monde

Le PS et les sans-papiers : la trahison tranquille

introduction

Le PS et les sans-papiers : la trahison tranquille

par Thomas Heams-Ogus, écrivain

Pour l’électeur potentiel qui aura écouté jusqu’au bout le dernier débat en date de la primaire "citoyenne", les dernières minutes eurent un parfum amer. Questionnés sur l’immigration, les candidats ont frappé par leur unanimité : le ou la prochain(e) hôte de l’Elysée exclut désormais toute régularisation massive ; chacun, son coeur en badoulière, nous promet des critères justes voire "humains" (sic) pour régulariser au cas par cas. Pas un n’envisagea même un simple moratoire sur les expulsions ! Pour qui a suivi l’histoire du PS avec les sans-papiers, cet aveu décomplexé est attendu et pourtant absolument écoeurant. Qu’entend-on en effet, derrière ce bon sens autoproclamé et les bons sentiments qui l’accompagnent ? Que l’immigration est un problème, que les régularisations massives créent un appel d’air, que la crise impose de ne pas crisper less travailleurs français. C’est une triple capitulation face à la droite qui est ainsi benoîtement entérinée.

(...)

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