Accueil > Affaire Laëtitia : la révolte des "petits pois"

Affaire Laëtitia : la révolte des "petits pois"

Publie le vendredi 4 février 2011 par Open-Publishing

PARIS (AP) — La révolte gronde chez les "petits pois" après les propos du chef de l’Etat demandant des sanctions dans l’affaire Laëtitia. Le principal syndicat de magistrats a appelé vendredi à un report des audiences dans toutes les juridictions jusqu’au jeudi 10 février qui devrait être une journée de manifestation nationale.

Un mouvement de protestation auquel pourraient se joindre les policiers. Le Syndicat national des officiers de police (SNOP) n’exclut pas de soutenir cette initiative, a-t-il indiqué dans un communiqué.

"Je suis surprise par les déclarations du président de la République qui parle de sanctions alors que les inspections sont encore en cours", regrette Sylvie Feucher, secrétaire général du Syndicat des commissaires de la police nationale (SCPN), majoritaire. "En fonction des résultats, je n’exclus pas de me joindre jeudi à la journée nationale de protestation des magistrats." Selon elle, les policiers de Sécurité publique sont ceux qui ont le moins de moyens et qui dénoncent les problèmes techniques, notamment en matière d’interconnexion de fichiers, auxquels ils sont confrontés. "On a fait des lois, mais ça ne règle pas tout", ajoute Sylvie Feucher. "Les décisions ne doivent pas être que politiques, il faut aussi écouter les techniciens."

De leur côté, les syndicats Unité Police SGP FO, FO Pénitentiaire et FO Magistrats dénoncent dans un communiqué commun "cette mode qui consiste à rechercher, à l’occasion d’événements médiatisés, pour satisfaire l’opinion publique, la responsabilité des serviteurs de l’État qui accomplissent leur travail dans des conditions souvent difficiles". Ils ajoutent que "cette mise en accusation systématique a atteint son apogée avec l’affaire dramatique de Pornic, les ministres de la Justice et de l’Intérieur n’ont pas hésité à mettre en doute la compétence professionnelle des magistrats, des policiers, et des personnels pénitentiaires, en cherchant à mettre en évidence des fautes personnelles, alors que le dysfonctionnement de l’administration et ses carences évidentes trouvent leur source dans la mise en oeuvre de la Révision générale des politiques publiques".

Jean Claude Delage, secrétaire général d’Alliance police nationale affirme apporter "son total et entier soutien aux fonctionnaires de police visés dans l’enquête sur l’affaire du décès de la jeune Laetitia". "A ce jour, au regard des éléments portés à notre connaissance, notamment sur les premières constatations de l’IGPN, il apparaît qu’aucun dysfonctionnement n’a été relevé de nature à engager la responsabilité de nos collègues, gradés et gardiens de la paix, et de justifier une sanction à leur encontre", souligne-t-il.

L’Union syndicale des magistrats a invité ses adhérents à renvoyer jusqu’au 10 février les audiences civiles et pénales, et appelé ce même jour à une journée de mobilisation nationale en signe de protestation aux propos du président de la République.

Jeudi à Orléans (Loiret), Nicolas Sarkozy a mis en avant des "dysfonctionnement graves des services de police et de justice" dans le traitement judiciaire de Tony Meilhon, l’assassin présumé de Laëtitia Perrais. Il a promis des sanctions.

Tony Meilhon était sorti de prison le 24 février 2010 après avoir purgé une peine d’un an, dont six mois avec sursis, assortie d’une mise à l’épreuve de deux ans pour outrage à magistrat. Il avait été condamné auparavant pour viol et vols avec arme.

Il n’avait pas fait l’objet d’un suivi. Au tribunal de Nantes, dont il dépendait, "trois juges de l’application des peines (JAP) doivent prendre en charge près de 4.000 personnes condamnées", rappellent la CGT Pénitentiaire, le Syndicat de la magistrature (SM) et le Syndicat des avocats de France (SAF) dans un communiqué.

Partie jeudi de Nantes (Loire-Atlantique), la contestation pourrait faire tache d’huile. Selon l’USM, des audiences ont été reportées vendredi à Dijon, Quimper, Rennes et en Outre-mer.

"Ce qui se joue là, ce sont les principes démocratiques fondamentaux", affirme Nicolas Léger, secrétaire national de l’USM, qui n’hésite pas à qualifier ce mouvement de protestation de "réaction historique".

Les "dysfonctionnements" mis en avant par Nicolas Sarkozy ont choqué la Conférence des Premiers présidents de cour d’appel, une association qui représente les présidents des 35 cours d’appel.

Dans un bref communiqué, celle-ci a fait part vendredi de sa "vive préoccupation" après cette mise en cause présidentielle.

Ces hauts magistrats, sans citer le chef de l’Etat, ont mis en garde contre toute tentation "de reporter sur les magistrats et les fonctionnaires (...) la responsabilité de fonctionnement" que connaissent les juridictions sous le double effet de "contraintes budgétaires" et de "la succession des réformes législatives".

Le ministre de la Justice, Michel Mercier, a promis de recevoir les organisations syndicales, une fois reçus les rapports des inspections des services judiciaires et de l’administration pénitentiaire diligentées à Nantes. AP

http://tempsreel.nouvelobs.com/actualite/societe/20110204.FAP4631/affaire-laetitia-la-revolte-des-petits-pois.html