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Après l’anniversaire de Pat

Publie le vendredi 20 octobre 2006 par Open-Publishing

par Kevin Tillman (Publié le 19 octobre 2006)

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Kevin Tillman s’est engagé dans l’armée avec son frère Pat en 2002. Ils ont servi tous les deux en Irak et en Afghanistan. Pat a été tué en Afghanistan le 22 avril 2004. Kevin, qui a été libéré en 2005, a écrit un puissant document que chacun doit lire.


Ce sera l’anniversaire de Pat le 6 novembre prochain et les élections se tiendront le lendemain. Cela me fait penser à une conversation que j’ai eue avec Pat avant de nous engager dans l’armée. Il parlait des risques quand on signe son engagement. Comment une fois qu’on est engagé, on se retrouve à la merci des dirigeants américains et du peuple américain. Comment on peut être envoyé dans une direction contraire à notre volonté. Comment combattre en tant que soldat nous laisserait sans voix ... jusqu’à la fin de notre engagement.

Beaucoup est arrivé depuis que nous avons échangé nos paroles :

D’une manière ou d’une autre, nous avons été envoyé envahir une nation parce qu’elle était une menace directe pour le peuple américain, ou pour le monde entier, ou parce qu’elle abritait des terroristes, ou qu’elle était impliquée dans les attaques du 11 septembre, ou qu’elle avait reçu de l’uranium militaire du Niger, ou qu’elle avait des laboratoires mobiles d’armements, ou des armes de destruction massive, ou qu’elle avait besoin d’être libérée, ou qu’elle avait besoin d’établir une démocratie, ou d’arrêter une insurrection, ou de stopper une guerre civile que nous avons créée mais qui ne peut être appelée une guerre civile même si elle l’est. Quelque chose comme ça.

D’une manière ou d’une autre, nos dirigeants élus subvertissent la loi internationale et l’humanité en mettant en place des prisons secrètes aux quatre coins de la planète, en kidnappant des gens dans le secret, en les détenant secrètement indéfiniment, en ne les accusant secrètement de rien, en les torturant secrètement. D’une manière ou d’une autre, cette politique manifeste de torture est devenue la faute de quelques « brebis galleuses » au sein de l’armée.

D’une manière ou d’une autre dans notre pays, supporter les soldats signifiait avoir un gamin de cinq ans gribouillant un dessin au crayon et l’envoyant à l’autre bout du monde, ou coller des autocollants sur des véhicules, ou faire du lobbying au Congrès pour obtenir un coussinet supplémentaire dans un casque. Il est intéressant qu’un soldat qui en est à son trois ou quatrième tour devrait prêter attention à un dessin d’un gosse de cinq ans ; ou a un autocollant défraîchi sur une voiture alors que des amis meurent autour de lui ; ou un coussinet en plus dans son casque, comme si il allait le protéger quand une explosion envoie son véhicule 50 pieds en l’air alors que son corps est déchiqueté et que sa peau fond dans le siège.

D’une manière ou d’une autre, plus des soldats meurent, plus l’invasion illégale devient légitime.

D’une manière ou d’une autre, les dirigeants américains, dont le seul crédit est de mentir à son peuple et d’envahir illégalement une nation, a été autorisé à voler le courage, la vertu et l’honneur de ses soldats sur le terrain.

D’une manière ou d’une autre, ceux qui avaient peur de se battre dans une invasion illégale il y a quelques décennies [NDT : légère allusion à G.W.Bush ?] sont autorisés à envoyer des soldats mourir pour une invasion illégale qu’ils ont lancée.

D’une manière ou d’une autre, truquer le caractère, la vertu et la force est toléré.

D’une manière ou d’une autre, profiter de la tragédie et de l’horreur est toléré.

D’une manière ou d’une autre, la mort de dizaines, si ce n’est de centaines de milliers de gens est tolérée.

D’une manière ou d’une autre, la subversion de la Constitution américaine et de ses amendements est tolérée.

D’une manière ou d’une autre, la suspension de l’Habeas Corpus est supposée maintenir ce pays en sécurité.

D’une manière ou d’une autre, la torture est tolérée.

D’une manière ou d’une autre, mentir est toléré.

D’une manière ou d’une autre, la raison est abandonnée pour la foi, le dogme et le non-sens.

D’une manière ou d’une autre, les dirigeants américains ont réussi à créer un monde plus dangereux.

D’une manière ou d’une autre, une histoire est plus importante que la réalité.

D’une manière ou d’une autre, l’Amérique est devenue un pays qui projette tout ce qu’il n’est pas et qui condamne tout ce qu’il est.

D’une manière ou d’une autre, le pays le plus raisonnable, le plus digne de confiance, le plus respecté est devenu un des plus irrationnels, belligérants, craints et défiés des pays du monde.

D’une manière ou d’une autre, être politiquement informé, diligent et sceptique a été remplacé par une apathie résultant d’une ignorance active.

D’une manière ou d’une autre, les mêmes criminels incompétents, narcissiques, sans vertu, idiots et malveillants sont encore en charge de ce pays.

D’une manière ou d’une autre, tout ceci est toléré.

D’une manière ou d’une autre, personne n’est responsable de tout ceci.

Dans une démocratie, la politique des dirigeants est la politique du peuple. Alors ne soyez pas choqués quand nos grands enfants enterreront la quasi-totalité de cette génération comme des traîtres à la nation, au monde et à l’humanité. Plus probablement, ils finiront par réaliser que « d’une manière ou d’une autre » était nourri par la peur, l’insécurité et l’indifférence, laissant le pays vulnérable face à des parasites incontrôlés et incontestés.

Par chance, ce pays est encore une démocratie [NDT : euhhhh ... pas vraiment de l’avis des nombreux lecteurs qui ont laissé leurs commentaires dans l’article original]. Le peuple a encore une voix. Le peuple peut encore réagir. Cela peut commencer après l’anniversaire de Pat.

Le frère et un ami de Pat Tillman.
Kevin Tillman