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Assemblée extraordinaire du PCF : les liquidateurs sur la défensive

Publie le jeudi 13 décembre 2007 par Open-Publishing
6 commentaires

de Jérôme Métellus (PCF Paris 18)

L’Assemblée extraordinaire du PCF qui s’est tenue à La Défense, les 8 et 9 décembre dernier, a eu un mérite majeur : celui d’exprimer clairement l’opposition de l’écrasante majorité des militants communistes à toute forme de liquidation du parti. Cette question a très largement dominé les débats. Elle les a même monopolisés. En conséquence, d’autres questions fondamentales – la situation politique et le programme du parti – sont passées au deuxième plan des discussions. On peut le regretter. Mais c’était inévitable. Les délégués de section ont paré au plus urgent : riposter à l’offensive liquidationniste d’une large fraction de la direction nationale.

Depuis le revers électoral du PCF aux présidentielles, l’idée de créer une « nouvelle force », en lieu et place du parti, s’est nettement renforcée, au sein de la direction nationale. Les formules des dirigeants qui veulent « faire autre chose » sont plus ou moins prudentes, et donc plus ou moins vagues. Les éléments les plus ouvertement liquidationnistes – Braouezec, Martelli, Zarka, Gayssot, etc. – parlent sans détour de dissoudre le PCF dans un nouveau parti ou une nouvelle « mouvance », dont les communistes ne seraient plus qu’une « composante ». Mais d’autres dirigeants, à commencer par Olivier Dartigolles, porte-parole du PCF, évoquent eux aussi une « nouvelle force de gauche ». Face à l’hostilité que cette idée suscite dans les rangs du parti, ils se sont retranchés, lors de l’Assemblée extraordinaire, derrière une fausse neutralité. Au nom du « débat qui doit avoir lieu, d’ici le congrès de 2008 », ils insistent pour qu’« aucune hypothèse ne doit être écartée » – y compris celle d’en finir avec le PCF.

Nous ne verrions pas d’inconvénient à ce que Dartigolles n’ait pas de position tranchée sur la Star Academy ou le dernier Harry Potter. Mais sur une question aussi décisive que le maintien ou la dissolution du PCF, on ne peut accepter que les dirigeants du parti restent « neutres » et prétendent simplement « organiser le débat ». Lorsqu’une maison est assaillie par des pyromanes, l’heure n’est pas au « débat » pour savoir s’il faut, ou non, les laisser faire, sous prétexte de « n’écarter aucune hypothèse » – y compris celle qui réduira la maison en cendres ! En fait, celui qui se comporterait ainsi serait considéré soit comme fou, soit comme complice des pyromanes. Or, Dartigolles et ses partisans ne sont pas fous.

Le texte du « mandat » soumis au vote des délégués, lors de l’Assemblée extraordinaire, reprend la formule : « n’écarter aucune hypothèse ». Après d’âpres débats, le mandat a été adopté par 72% des délégués de section. Face à des dirigeants nationaux qui se succédaient, au micro, pour que soient maintenues « toutes les hypothèses », et qui sont allés jusqu’à menacer le parti « d’explosion » si cette formule était biffée du texte, de nombreux délégués ont voté avec le souci de ne pas précipiter une crise. Cependant, sur la question de l’avenir du PCF, il est clair que cette majorité de 72% n’a strictement aucune signification. Les procès verbaux des Assemblées de sections qui se sont tenues en amont de l’Assemblée extraordinaire sont parfaitement clairs. L’opinion de l’écrasante majorité des militants communistes est bien résumée par l’intervention d’une camarade d’Arcachon : « Que ceux qui ne veulent plus du parti le quittent : ils sont libres. Quant à nous, nous construirons le PCF ! » C’est exactement le point de vue de La Riposte.

Réformisme et liquidationnisme

Les liquidateurs jurent qu’ils sont « attachés » au parti, mais exhortent les camarades de ne pas tomber dans le fétichisme. Ils nous tapotent amicalement le dos en disant : « On l’aimait bien, nous aussi, mais il n’y a plus rien à faire : il se meurt. » Ils cherchent sciemment à démoraliser les camarades qui veulent maintenir le parti.

La question du parti – de son maintien ou de sa disparition – n’est pas seulement organisationnelle. Elle a d’abord et avant tout une signification politique. Lutter pour que le PCF existe et se renforce, c’est lutter pour qu’existe et se renforce une expression organisationnelle des idéaux communistes, c’est-à-dire de la lutte pour le renversement du capitalisme et l’établissement d’une société débarrassée de toutes les formes de misère et d’exploitation. Est-il mort, cet idéal ? Non : il est plus vivant que jamais, car le capitalisme produit chaque jour son lot de désastres, d’injustices et d’humiliations. Plus que jamais, il faut que vive et se développe un parti fermement engagé à nettoyer la société de la domination capitaliste. Ce n’est pas seulement le sort du PCF qui est en jeu : c’est celui de la jeunesse, des travailleurs et de tous les opprimés, auquel le système capitaliste n’offre aucun avenir digne de ce nom.

Mais c’est précisément avec ces idéaux que les liquidateurs veulent en finir. A travers l’existence du parti, ils visent les aspirations révolutionnaires qui continuent d’animer la majorité de ses militants et sympathisants. D’ailleurs, ils ne conçoivent la liquidation du parti que comme une étape d’un processus engagé de longue date. Au cours de la dernière période, ces dirigeants ont progressivement vidé le programme du parti de toute atteinte à la propriété capitaliste, ce qui revenait à complètement le désarmer. Sous couvert de « modernité », ils se sont ralliés à l’économie de marché. Entre 1997-2002, ils ont cautionné les privatisations massives du gouvernement Jospin. Ce n’est pas un hasard si, parmi les liquidateurs les plus zélés, on trouve l’ex-ministre Jean-Claude Gayssot, qui a piloté la privatisation d’Air France et de l’Aérospatiale – entre autres. Ainsi, ceux qui veulent en finir avec le PCF sont les principaux responsables de son déclin au cours de la dernière période.

Les tendances liquidationnistes qui se développent, dans la direction du PCF, sont le dernier chaînon d’une longue dérive réformiste. A quoi bon un parti « communiste », s’il n’est plus question de toucher aux fondements du capitalisme, c’est-à-dire à la propriété privée des banques et des grandes entreprises ? Il faut une « autre force de gauche », nous dit-on. Comprenez : une force ouvertement réformiste, qui aurait définitivement et formellement rompu avec les idées du communisme. Dans leur aveuglement réformiste, ces gens sont persuadés qu’une telle force aurait une base électorale beaucoup plus large que celle du PCF. Ils se trompent lourdement. Le Parti Socialiste occupe déjà cette position. Il n’y a pas de place viable, à ses côtés, pour un petit parti réformiste. C’est d’ailleurs l’une des causes de l’affaiblissement du PCF, au cours des vingt dernières années.

Réarmement politique

Les militants opposés à la disparition du PCF ne sont pas ces « orthodoxes » obscurs et nostalgiques que décrit la presse capitaliste (laquelle soutient évidemment les liquidateurs). Ils ne sont pas victimes d’« immobilisme » ou de « fétichisme ». Ils réfléchissent, cherchent des solutions. Au cours de l’Assemblée extraordinaire, ils ont été nombreux à réclamer une meilleure formation interne. Ils ont parfaitement conscience des graves carences théoriques du parti.

Plusieurs camarades ont dénoncé, à juste titre, la « langue de bois » et les « idées creuses » qui circulent dans les sommets du parti. A titre d’exemple, prenons deux phrases du rapport introductif de Dartigolles : « [Nous devons] approfondir les conditions politiques contemporaines de la transformation sociale et travailler à une transformation profonde des conceptions et pratiques de la politique. Cela nous demande d’agir sur la crise du politique, de la démocratie ». Vérifiez : cela ne veut strictement rien dire. A la décharge de Dartigolles, il est loin d’être le seul à pratiquer cette « novlangue ». Martelli et Zarka en sont les maîtres incontestés. On ne peut lire ce qu’ils écrivent sans être saisi d’un insupportable bourdonnement cérébral, qui est l’effet d’une succession chaotique de phrases complètement dénuées de substance. Faute d’idées sérieuses, ils semblent aligner aléatoirement des mots fleuris – « transformation sociale », « démocratie », « solidarité », « émancipation », etc. – sur le fil d’un discours qui, en définitive, n’a aucun sens. Cette logorrhée est l’une des expressions de la faillite du réformisme « anti-libéral ».

S’il est un domaine où il faut « révolutionner le parti », pour reprendre une expression de Marie-George Buffet, c’est avant tout celui de ses idées et de son programme. C’est la question centrale, la clé de l’avenir du parti. D’ici le congrès de décembre 2008, la lutte contre le liquidationnisme doit aller de pair avec une lutte contre le réformisme impuissant qui en est la base politique. On ne peut mener séparément ces deux batailles : elles sont indissolublement liées. Le PCF doit renouer avec les idées marxistes et révolutionnaires qui étaient à l’origine de sa création : telle est l’unique garantie de sa survie, de son développement et de l’accomplissement de sa tâche historique – la transformation socialiste de la société.

Messages

  • est-ce que depuis notre lente descente aux enfers , tout ou presque n’a pas été essayé ? et où en sommes-nous ? AU PIRE DE NOTRE HISTOIRE ! j’ai adhéré au PCF , en 2002, me disant que ce n’était pas possible que le pcf disparaisse du paysage politique français et qu’il était temps qu’en tant que sympathisante , j’apporte mon soutien entier !
    mais mes camarades, je n’arrive pas à vous suivre, quand vous criez aux "liquidateurs" mais enfin qu’est-ce que ça veut dire pour vous "la fin du pcf" ? NON § NON §
    il nous faut prendre en compte l’évolution sociétale : notre parti ne peut survivre sans changements profonds sinon on s’autodétruit VOLONTAIREMENT ! est-ce que vous voulez, je ne le crois pas ?
    alors oeuvrons et cessons de brailler les uns contre les autres , liquidateurs, orthodoxes , rénovateurs, identitaires ....ET J’EN PASSE ET DES MEILLEURS ! êtes-vous conscients de l’image que nous donnons dans la société, parmi les jeunes ? est-ce ainsi que nous allons nous sauver ? je suis triste de nous voir arriver à ce point !!!!!
    Anna

    • Tiens, tiens , Anna, le retour de la "duchesse de Bretagne"...

      Comment vont les pigeons et autres coucous ma chère ?....

      Si je puis me permettre, Anna...

      ...je comprends ton discours, et ce que tu entends par là. Peut être même aussi pourquoi tu penses cela....

      Mais à mon avis tu tombes dans le "panneau petit bourgeois", qu’agitent certains au Parti et ailleurs, qui est d’assimiler le mouvement souhaitant garder le PCF et s’opposer à sa disparition, à un courant qui serait tenant de l’immobilisme, de l’absence de renouveau, du défaut de volonté de changement etc.

      Par ailleurs, et sur un autre sujet, le rôle des communistes n’a jamais été d’être "majoritaires" à tout prix mais d’être populaires ( dans les 2 sens du termes) et d’être suffisamment forts (ce qui ne veut pas dire majoritaires) pour peser sur les luttes, la politiques, les mouvements, la construction du socialisme et entraîner un mouvement révolutionnaire à terme. Enfin il me semble.

      Donc cette quoi cette nouvelle folie "majoritariste" qui nous secoue ?!

      Dernière chose : Anna, l’Histoire est PLEINE de Partis qui ont disparu ! C’est quoi ce nouvel argument qui court ici ou là qu’un parti ne "pourrait disparaître ?" !! Parfois, avec eux ont même disparu des courants de pensée voire des idéologies très importantes pour une société , pour la gauche.

      Je suis viscéralement attachée au maintien du Parti en tant que tel, je suis également plus que favorable à des changements radicaux dans ses pratiques, ses statuts, ses alliances etc. Et ce faisant, je suis AUSSI très attachée à la "boussole" marxiste, au socialisme, au communisme, au républicanisme...Ce n’est pas du tout antinomique c’est au contraire une conséquence normale et presque naturelle !

      La Louve

  • Bonjour,

    Moi aussi je vais jouer à l’ancien combattant avec 37 ans de PCF. J’ai adhéré jeune....
    Je suis convaincu qu’il faut faire confiance aux communistes. Le choix n’est pas entre l’immobilisme suicidaire et la construction politicienne d’une force nouvelle ( avec qui ? sur quelles bases ?..).

    La société a été reprise en mains par la bourgeoisie. La promotion du mode de vie consumériste fait presque l’unanimité en vécu pour ceux qui ont les moyens, ou en souhait pour ceux qui ne les ont pas.

    La mise en concurrence des salariés du monde entier et l’effondrement soviétique ont porté un coup très dur à l’idée de transformation sociale.

    Le capitalisme ne peut résoudre les problèmes immenses de ce monde. Problèmes sociaux et environnementaux. Le réchauffement climatique appelle des réponses que ne peut porter la course au profit. Mais le capitalisme a par contre la capacité de formater les individus dont il a besoin à chaque période. Le matraquage médiatique ne baisse pas d’intensité.

    Le PCF doit se transformer pour retrouver sa capacité de dialogue avec la société. Cela ne veut pas
    qu’il doit porter seul les reproches et les défauts. Pour ma part quand un salarié modeste vote SARKOSY il porte aussi la responsabilité de s’enfoncer dans les difficultés...

    L’année 2008 doit être une grande année d’élaboration dans la clarté en exposant honnêtement les enjeux. Les communistes sont capables d’avoir ce débat. Je pense de plus en plus que le CN actuel de 250 membres ne produit pas la réflexion due aux communistes. Il nous faut une direction qui impluse et qui expose les alternatives dans la franchise.
    GB 26100,

  • Je rejoins entièrement, intégralement, complètement l’analyse de Jérôme Métellus, que je signe des deux mains.

    J’étais délégué de section du Montargois ( 45 Montargis, Châlette et environs), je me retrouve aussi dans la description qu’ Astrée Questiaux fait de L’Assemblée Générale Extraordinaire : voici le lien vers son article, http://bellaciao.org/fr/?page=article&id_article=57707

    Salut fraternel à tous mes camarades.

    Fabrice Selingant

    • La semantique libérale veut « casser les briques » communiste !

      commentaire sur la Grèce

      « Avec 8,1% des voix et 22 sièges (contre 5,9% et 12 sièges en 2004), le parti communiste grec (KKE), formation ultra-orthodoxe, l’une des rares en Europe à n’avoir pas fait sa réforme depuis la chute de l’URSS, retrouve des couleurs inespérées. C’est aussi le cas de la Coalition de la gauche radicale (Syriza), qui obtient 14 sièges avec 5% des voix, contre 6 sièges avec 3,2% en 2004. Ces deux formationsont immédiatement annoncé qu’elles profiteraient de ce regain de légitimité pour lutter pied à pied contre les réformes économiques et sociales du gouvernement. »

      Cette façon de cataloguer , religieusement dans le camp des traditionalistes tous ceux qui luttent contre le capitalisme n’est pas propre à la Grèce !

      Dsk explique qu’il faut que le Ps fasse son aggionamento, et rompe avec le mouvement social ! La même semantique que kessler sur son papier à chiottes dans challenge !

      Il faut prendre le mot orthodoxe dans le sens " celui qui professe l’"opinion droite" (de ortho (droite , correcte)doxa (opinion ) ) en fait celle qui interprête (qui suit ?) les dogmes à la lettre.
      Les liquidateurs/renovateurs du PCF , sont des intellectuels , les autres sont les gardiens du temple , des vieux attachés sentimentalement au PCF etc...!

      Tout cela est mensonge, manipulatuion , les jeunes privés de parole dans cette assembles étaient majoritairement pour , à la fois perenniser et renover le pcf .

      Cette situation n’est pas nouvelle depuis 1983 , un travail de sape est organisé pour liquider le PCF , mais aujourd’hui avec le resultat traumatisant pour tous de MGB, les fauves sont lachés .

      Les oligarques russes ou chinois dans les économies post-"communistes" font des envieux au pcf ?

      Le mauvais resultat est grandement lié à une stratègie de gribouille en amont et suite au gouvernement gauche pluriel , bouge l’Europe , rassemblement anti libéral etc.. .

      Tous les delires du monde pagnolien monté dans la charrette de la mutation tragi-comique , un coup de barre à droite, un cout de barre à gauche, entrainent le pcf mais aussi toute la gauche vers l’abime si les militants ne se réaproprient pas très vite leur parti !

      boris