Accueil > Bilan Attac-France du FSE

Bilan Attac-France du FSE

Publie le mercredi 3 décembre 2003 par Open-Publishing

A partir d’un premier bilan rapide du deuxième Forum social européen (FSE),
ce texte a pour objectif de faire quelques propositions à mettre dans le
débat pour la préparation de sa troisième édition. Une série de questions ne
sera pas directement abordée ici, notamment le rythme du FSE et son
articulation avec celui Forum social mondial et des autres Forums régionaux,
comme le Forum social méditerranéen.

1.- Un bilan extrêmement positif

Plusieurs points méritent d’être soulignés :
- une participation numérique importante : plus de 51 000 délégués payants,
dont une forte présence européenne ;
- un FSE qui a réussi à mieux prendre en compte les réalités européennes
faisant de l’avenir de l’Europe un thème important de son programme ;
- un élargissement des mouvements engagés, tant du point de vue syndical
(même si les problèmes politiques sont loin d’être résolus), des forces de
l’économie sociale et solidaire, des mouvements issus de l’immigration et
des organisations environnementalistes ;
- la mise en place d’un processus de restitution des débats (séminaires et
plénières) qui, après celui fait à Florence, permet d’avancer réellement
dans la constitution d’une mémoire du FSE ;
- un processus de préparation qui, malgré son caractère lourd, coûteux en
temps, en ressources financières et quelquefois chaotique, a confirmé
l’existence d’une réelle dynamique européenne. Cette dynamique s’est
notamment traduite par un renforcement du travail en commun dans un certain
nombre de pays ;
- le FSE a permis que des forces diverses, parfois nouvelles, lors des
réunions qui leur étaient propres, s’agglutinent à la dynamique des forum
sociaux ;
- le succès de l’Assemblée pour les droits des femmes, qui s’est déroulée
avant l’ouverture formelle du FSE, a montré la pertinence du choix de tenir
ce type d’initiative ;
- une "Assemblée des acteurs et des mouvements sociaux", avec une forte
participation des mouvements à l’échelle européenne. Dans le prolongement du
FSE, elle a permis de proposer des échéances de mobilisation du mouvement
altermondialiste sur la guerre, mais aussi, élément nouveau, sur l’Europe.

Globalement donc, ce FSE a représenté incontestablement un succès politique
et médiatique. Le foisonnement des initiatives a été un des éléments
contribuant à une participation massive, chacun pouvant espérer y trouver
son compte. L’impact politique du FSE a montré que le mouvement
altermondialiste était maintenant durablement installé sur la scène
politique européenne et que ses thématiques ne pouvaient plus être ignorées.
Le FSE a permis, tant dans son processus de préparation que lors de
l’événement lui-même, de faire un pas en avant dans la constitution d’un
mouvement social à l’échelle européenne

2.- Les problèmes

On peut en noter au moins quatre de nature assez différente :
- l’éclatement, pour des raisons matérielles, sur quatre sites, s’il a
permis une visibilité politique du Forum dans des banlieues populaires, a
empêché de retrouver la convivialité et l’esprit "fusionnel" de Florence ;
- le temps consacré dans le processus de préparation à la mise en place des
plénières - discussion sur les thèmes et les équilibres entre les
intervenants -, l’a été au détriment des séminaires qui n’ont pas été
réellement construits et préparés ;
- la discussion sur le programme, si elle a abouti à faire de la question de
l’Europe un point particulièrement important, n’a cependant pas permis de
dégager de véritables priorités de débat assumées collectivement ;
- Les alternatives issues des débats n’ont, une fois de plus, pas eu une
visibilité politique suffisante.

Les premières propositions qui suivent visent en partie à essayer de
répondre à ces problèmes. Elles sont bien évidemment à mettre en débat.

3.- Quelques premières propositions

3.1 Assumer le Forum comme un processus

Le FSE est d’abord un événement politique, mais il ne prendra son sens que
si nous sommes capables d’assurer une continuité entre deux évènements.
Cette continuité existe déjà par l’intermédiaire du processus de préparation
et des campagnes de mobilisations, mais elle est très insuffisante. Pour la
renforcer, il faudrait amplifier ce que nous avions prévu de faire après
Florence, et qui n’a été réalisé que de façon très parcellaire : la
continuation du travail commencé lors des séminaires.
Dans cette conception, les séminaires ne seraient pas simplement un moment
de rencontre de mouvements sur tel ou tel thème, mais le début d’un travail
en commun qui pourrait se traduire par une élaboration commune et par
l’organisation de campagnes de mobilisation. Il s’agirait donc, dans ce
cadre, d’assurer une permanence des séminaires, dont les activités
pourraient être mises sur la liste FSE. Il va sans dire qu’une telle
permanence ne serait évidemment pas obligatoire et relèverait de la libre
décision des organisateurs.

3.2 Repenser le format général du Forum

- Mettre les séminaires au centre du Forum
L’objectif premier des Forums sociaux est l’élaboration d’alternatives au
néolibéralisme et la mise en place de campagnes d’action. Cet objectif est
la raison d’être première des séminaires. Une telle orientation suppose de
changer l’ordre des priorités dans l’organisation du Forum, en mettant les
séminaires au centre du processus de préparation. Il s’agirait alors, en
partant des propositions faites par les différentes organisations,
d’effectuer un travail qui commencerait dès le lancement de ce processus.
Les fusions de séminaires seraient alors le résultat d’une réelle discussion
politique et permettraient un travail en commun débutant plusieurs mois
avant le FSE. Ainsi, durant le FSE, et sur la base du travail déjà accompli,
les séminaires devraient, à la fois d’être plus productifs et permettre
ainsi un débat plus riche avec la salle.

- Transformer les plénières
Les plénières ont une double utilité : donner une image politique du FSE et
permettre que soient exposés les points de vue, souvent peu connus, de telle
ou telle organisation. Le premier aspect peut se décliner d’une façon
différente, notamment à travers la participation aux séminaires. Le second
aspect reste cependant important à condition de veiller à ce que s’établisse
une réelle confrontation entre les participants. Il faut donc que les
plénières ne soient plus, comme aujourd’hui, une suite d’interventions non
coordonnées à l’avance, suivies d’un débat, en général très décevant, avec
la salle. Nous devons privilégier le débat et la confrontation entre des
organisations qui n’ont pas quelquefois ni l’habitude ni la volonté de
travailler ensemble. Cela suppose de les transformer en tables rondes, avec
une véritable animation du débat pour éclairer les enjeux de la
confrontation et définir les débats que nous voulons avoir afin de stopper
la dérive inflationniste du nombre des plénières.

4.- Débattre de priorités politiques pour le Forum

Le FSE doit à la fois être un espace de débats et de confrontations, un lieu
permettant la construction d’alternatives, et un point d’appui pour la
construction d’un mouvement social à l’échelle européenne. Remplir ces trois
fonctions suppose que l’ensemble des organisations souhaitant participer aux
séminaires et ateliers débattent collectivement de priorités politiques à
inscrire dans le programme du Forum. C’est d’ailleurs ce que nous avons
commencé à faire cette année sur la question de l’Europe.
Ce type de discussion permettra, de plus, d’avoir un échange entre les
forces organisatrices du FSE, et donc de mieux cerner les points de
convergence et les divergences, ce qui sera bénéfique pour l’avancée du
mouvement. La définition de priorités doit néanmoins laisser une place
suffisante pour les séminaires et ateliers ne se situant pas dans ce cadre.

5.- Améliorer la qualité du processus de préparation

Il nous faut réfléchir collectivement aux solutions à mettre en place pour
que l’ensemble des mouvements concernés participe réellement au processus de
préparation (plénières et séminaires) au niveau national et européen. Cette
participation est d’autant plus importante que c’est durant le processus de
préparation que les liens entre les différentes forces engagées dans le
Forum se tissent, et que des habitudes de travail en commun se construisent.
L’amélioration du processus de préparation est donc un enjeu politique
majeur.