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de P’tit Nico
"Sont inadaptés à la société dont ils font partie [... ceux qui] éprouvent des difficultés plus ou moins grandes à être et à agir comme les autres" y disait un rapport dans les années soixante d’m’sieur Bloch-Lainé, y dit Polo.
"Dans la revue Preuves (hiver 1974-1975), y disaient des travailleurs sociaux d’lépoque qui lisaient encore l’pote Karl, le secrétaire d’État à l’Action sociale estime "qu’une formidable bataille pour l’emploi va s’engager entre les pays industriels, que des mutations profondes vont affecter leur économie, avec toutes les tensions sociales qui découlent
toujours de ces mutations. [...] la solidarité au niveau national doit être complétée, multipliée, harmonisée par l’action d’individus ou de groupes organisés au niveau du quartier."
Par contre, si "la crise provoquée par la hausse des matières premières et du pétrole est aisément surmontée à la suite d’accords internationaux et des grandes facultés d’adaptation des économies modernes [...], la marche de la société de consommation, un instant ralentie, reprend de plus belle avec ses aspects positifs certes, mais aussi ses aspects négatifs et aliénants [...].
Les noyaux d’inadaptés peuvent se
multiplier, amener peut-être l’intervention plus fréquente des forces de l’ordre et exiger la mise en oeuvre de moyens
ruineux pour la collectivité. La prévention active, au contraire éviterait ces ségrégations et ces perturbations. Elle passe
par une participation active des citoyens à l’action sociale".
Ainsi, le ton est donné. L’action sociale va passer du baume sur les plaies ouvertes par le capitalisme national et
international qui effectue sa restructuration, la rationalisation de ses investissements et l’augmentation de ses profits sur
le dos des travailleurs. M. Chirac ne disait pas autre chose en prononçant un discours, au palais du Luxembourg, le 4
novembre 1974, en commémoration de la Résistance française : "Les difficultés économiques et monétaires que
connaissent les sociétés industrielles rendent plus indispensables que jamais la solidarité active de tous les éléments de
la nation."
Pour que les "mutations" se fassent sans trop de douleur, pour que les révoltes légitimes ne puissent éclater, il est
nécessaire d’instaurer un contrôle social. »
Mon ancien délégué syndical CGT y dit qu’pendant qu’les CRS-SS y posaient les mains sur la tête des gauchistes pour
les soigner d’leur maladie infantile du communisme, l’bourgeois y préparait la crise du pétrole pour continuer la guerre
contre l’ouvrier vu qu’malgré les trempes qu’la lumière du Progrès du commerce et de l’industrie ell’ lui a mis sur la
gueule y l’avait pas encor’ disparu complétement dans l’salariat d’l’État social solidaire d’"l’peuple", l’ouvrier. Vu qu’en
68 y l’avait eu encor’ un’ grosse peur, l’bourgeois.
Mon ancien délégué syndical CGT y dit qu’y faut se souvenir d’comment les choses ell’s s’sont passées pour mieux
comprendre pourquoi, malgré l’combat qu’y l’a mené l’prolo, y l’est toujours en bas d’l’échelle d’l’ascenseur social et qu’y
a d’nouveau d’plus en plus d’pauvres n’ouvriers.
Polo y dit qu’maintenant qu’not’ président y l’a inventé la maladie d’msieur Halzeimer, c’est d’plus en plus dur d’se
souvenir vu qu’avec cett’ maladie on s’souvient mêm’ pus qu’not’ président y l’a dit hier l’contraire d’c’qu’y dit aujourd’hui
et des promesses qu’y l’a faites pour qu’les français qu’aiment bien l’vieux borgne y l’fassent not’ président.
Mais lui y l’a
l’droit d’dire n’importe quoi, vu qu’m’dame Catherine d’Médicis ell’ a dit : « Le mensonge est l’arme des forts, l’arme de
ceux qui ont regardé la vie face à face et ont dit à la vie : tu n’es que néant ! L’arme de ceux qui ont sondé leur
conscience, et ont dit à leur conscience : tu n’es qu’imagination ! Le vulgaire, le troupeau que nous gouvernons, doit avoir
la haine du mensonge. Mais nous, nous pouvons et nous devons mentir, puisque le mensonge est le fond même de tout
gouvernement solide. » Et not’ président, y l’est fort en mensonges.
Vu qu’la mémoire on s’en sert pus, c’est normal qu’on finisse par la perdre et qu’on oublie mêm’ l’formatage d’l’homme
nouveau qu’l’bourgeois y fait d’nous.
« Car la maladie mentale, y disent l’pote Gantheret et l’pote Brohm, est une maladie de la symbolisation, un refus de
l’insertion dans une symbolique commune : et c’est en cela que le discours de la folie prend des résonances
contestataires : car il délie ce qui était lié dans l’organisation sociale commune. » C’est pour ça qu’on devient violent
quand on a la maladie d’la mémoire, on supporte plus la société artificielle où y faut toujours s’tenir comm’ y faut sinon
l’papa, la maman, l’instituteur, l’policier, l’professeur, l’juge, l’gendarme, l’adjudant, l’docteur, l’contremaître, l’huissier,
l’patron, l’m’sieur ASSEDIC, l’assistante sociale, l’mari, la femme, l’notaire, l’regard d’l’autre, le surmoi, l’oeil qu’était
dans la tombe et regardait Jojo, y t’gueulent tous dessus.
« Nous voyons maintenant en quel sens, y l’explique m’sieur Skinner, selon Hobbes, nous restons libres quand nous
agissons en obéissant à la loi. Si la loi nous force à obéir en activant la crainte des conséquences de la désobéissance, ce
n’est pas en nous faisant agir contre notre volonté, et de ce fait en nous privant de notre liberté. C’est toujours en nous
incitant à délibérer de sorte que nous renoncions à la volonté de désobéir, que nous acquérions la volonté d’obéir, et de
ce fait, que nous agissions librement à la lumière de la volonté que nous avons acquise. Cependant, Hobbes n’en insiste
pas moins sur l’idée que la menace de la punition incarnée par la loi sert sans doute, comme il l’exprime prudemment, à
"modeler" ("to conforme") notre volonté, et que la raison habituelle de notre conformité sera la terreur que nous avons
ressentie en envisageant les conséquences de la désobéissance. »
Le moment est donc venu pour vousde franchir le dernier pas.Il faut que vous aimiez Big Brother.Lui obéir n’est pas suffisant.Vous devez l’aimer.
Ouais, y dit Fred, quand tu gardes la mémoire des horreurs du monde, c’est pas gai non plus.
Ouais, y répond mon ancien délégué syndical CGT, c’est vrai, mais ça permet d’relativiser quand mêm’ et d’pas s’faire
prendre pour un con en oubliant qu’l’bourgeois y t’fait toujours la guerre en t’faisant croire qu’t’es "l’peuple souverain".
Parce que l’bourgeois, depuis qu’y l’a inventé la solidarité, l’assurance volontaire et l’assistance aide sociale, y l’essaie
toujours d’t’mettre dans la case "inadapté" pour t’payer l’moins possible et te transformer en domestique pour l’emploi
d’service comm’ c’était avant : « La situation du mineur logé par la Compagnie peut se comparer à celle du domestique
logé par son maître... » comm’ y racontent m’sieur Murard et m’sieur Zylberman.
« Certes, qu’ell’ écrit un’ m’dame Halu en 1934, une nation doit se préoccuper avant tout d’assurer à sa jeunesse saine
d’esprit et de conduite irréprochable les débouchés qui lui sont nécessaires au point de vue économique et qui
correspondent à ses capacités et à ses goûts. Néanmoins, le sens social, le sentiment philanthropique doivent animer
toute société en progression, exigent que ne soient pas délaissés les enfants inférieurs physiquement, intellectuellement
ou moralement. [...] Un autre souci anime, à l’époque actuelle, toute nation désireuse, d’améliorer son organisation,
c’est le côté économique. Aucun peuple ne peut, ne doit même entreprendre une oeuvre quelconque sans, d’une part,
estimer le profit économique qui en résultera et d’autre part mesurer l’effort budgétaire qu’exigera cette entreprise. [...]
L’organisation des établissements assurant l’éducation des anormaux et le relèvement des délinquants réclame des
dépenses. Mais, contrairement aux sommes engagées dans certains services sociaux, ces dépenses seront en partie
récupérées ; ce ne sont point, économiquement parlant, des fonds perdus. L’enfant anormal et délinquant cesse d’être
pour la société un poids encombrant, inutile [...], il est apte à subvenir partiellement à ses besoins. L’anormal prend
place dans le rang des travailleurs et rend à la société un peu de ce qu’elle lui a donné. [...] Une tâche simple,
fastidieuse et peu rémunératrice qui rebuterait et découragerait un ouvrier intelligent conviendra parfaitement au petit
arriéré, dont l’esprit est plus lent, l’habilité motrice moindre, et qui se contentera d’un gain minime. [...] L’avenir de ces
jeunes êtres apparaît bien comme l’une des branches, et non la moindre, du vaste problème de la protection de l’enfance
[...]. La tâche est ingrate. [...] Mais ce sont des malheureux, des créatures qui ne sont même pas responsables de leur
infériorité [...], l’absence d’orientation et de formation professionnelle est l’une des causes et non la moindre, au point
de vue social, qui conduisent les mineurs à leur premier délit, à la récidive, parfois même au crime. »
Et c’est l’p’tit bourgeois travailleur social qui s’occupe d’ça, y dit Fred qu’en mène pas large vu qu’y l’est.
La pote Verdès-Leroux, y dit Polo, un’ sociopathe, tiens un’ femme j’note, ell’ explique qu’ « le service social est un
corps d’agents spécialisés, destinés, dans un premier temps, à conjurer les menaces que faisait peser le mouvement
d’organisation naissant de la classe ouvrière et, dans un second, à rendre impossible toute mise en cause directe de
l’ordre établi en étendant la domination à toutes les sphères de la vie des dominés. Les formes de cette opération
idéologique s’ajustent à chaque moment de l’évolution du rapport des forces, ajustement qui se traduit dans les pratiques
des agents, dans leurs représentations des dominés et dans la désignation de nouvelles cibles en réponse au repérage de
nouvelles menaces. (...) On verra comment le rôle de chargé de mission idéologique de la classe dominante explique à
la fois l’appartenance à certaines fractions de classe, les conditions de recrutement – où l’accent est mis sur les
motivations et les qualités personnelles plutôt que sur un niveau et des aptitudes objectives – et celles de la formation,
axée sur l’"épanouissement" – le façonnement de la personnalité plutôt que sur l’acquisition de connaissances. Ce rôle
s’accorde à l’adhésion personnelle des agents à la vision du monde dominante, naturalisée et spiritualisée sous la forme
d’un certain humanisme chrétien.
On montrera, en analysant leurs relations personnelles aux valeurs culturelles et
morales hégémoniques, comment leur appartenance à la classe dominante, mais dans une position subalterne et
déléguée, se traduit par des relations ambiguës à l’égard des formes symboliques de la domination qu’il s’agit plutôt de
faire reconnaître et respecter que de faire partager ou "vulgariser". On montrera enfin comment l’absence de couverture
technique pour affronter le style de vie propre des dominés a conduit à l’élaboration de savoirs et de pratiques
spécialisés qui prennent leur sens dans les possibilités d’occultation des faits et de supériorité symbolique qu’ils offrent
aux agents. (...)
En le rapportant aux représentations que les assistantes sociales se forment de leur action, c’est-à-dire de la mission
civilisatrice dont elles s’estiment investies, on peut rendre compte de leur attachement particulier aux valeurs de la
culture désintéressée plutôt que, par exemple, aux idéaux de rationalité scientifique et techniques qui sont ceux d’autres
groupes alliés à la classe dominante. Si (...) la culture parvient à légitimer les différences économiques qu’elle reproduit,
l’adhésion respectueusement entretenue à ce qui constitue le noyau idéal et l’ultime justification de la philosophie
morale dominante est implicitement un témoignage d’allégeance à la classe dominante et renforce l’autorité nécessaire à
l’exercice du mandat. L’inégalité devant la consommation d’objets culturels formellement accessibles à tous illustre, de
façon exemplaire, le postulat libéral suivant lequel les moyens de faire fortune sont accessibles à tous. Les marques de
distinction que fournit la possession d’un capital culturel permet à des dominants/dominés de rendre manifeste, sans
l’expliciter, leur appartenance de classe.
Mais surtout, en déplaçant sur le terrain de la culture les rapports entre les
classes, réduits à une opposition entre civilisés et barbares, on fait apparaître comme inscrits dans la nature des choses
les positions de classe et les modes actuels de domination. »
Pour les animateurs, y s’souvient Fred d’c’qui l’a appris dans sa formation, au début de l’animation professionnelle, dans
le IV° plan en 1962, y disaient que l’rôle d’l’animation c’était de : « préparer les travailleurs à affronter l’ère du loisir
mais surtout elle aidera les hommes à s’adapter à leurs nouvelles conditions de vie. » C’est clair qu’on est là pour
qu’l’pauvre y s’adapte aux décisions qu’not’ président y prend pour nous, mêm’ si des fois on fait semblant d’lui
demander son avis : « Est-ce que vous voulez qu’le vide ordure y soit repeint en bleu France ou en vert espérance ? »
« L’animation de loisirs se nomme aujourd’hui "animation urbaine" ou, version gôche, "animation de quartier".
"Encadrement des temps libres de la jeunesse dans la ville", telle serait la définition recherchée. (...) Or l’animation de
loisirs repose précisément sur une escroquerie politique qui tend à faire croire que ce sont les "mauvaises villes" qui
créent l’ennui, les tensions sociales, le racisme, etc., et que l’animation des temps et espaces "libres" serait un élément
essentiel de transformation de chaque agglomération en "bonne ville" : celle où il fait bon vivre, celle qui donne à tous
et à chacun une vie quotidienne créatrice et libérée.
La mission ainsi confiée à l’animation de loisirs (réduire et occulter les problèmes liés à l’exploitation de classe, en
agissant dans les temps libres) est à l’origine de bien des aberrations ; ainsi, la notion de "quartier", tant prisée par
nombre d’animateurs. Le quartier n’existe pas, comme le dit fort bien Pierre Belleville. "Le quartier est implicitement
défini comme l’envers de l’entreprise [...] II existe chez beaucoup des apologistes du quartier une nostalgie du village
[...] ; promouvoir l’idée de quartier, c’est vouloir projeter dans la réalité actuelle les structures figées et hiérarchisées du
village, en remplaçant l’instituteur et le curé par des directrices de centres sociaux, assistantes sociales ou autres
animateurs socio-culturels. [...}
Le seul point commun des habitants d’un quartier, c’est finalement d’habiter là, dans un
espace plus ou moins défini, arbitrairement circonscrit, sans même que cela se traduise de façon électorale par l’élection
d’un conseil. [...] Le quartier n’a pas de domaine propre, sinon les quelques équipements dont la fonction principale est
justement de définir le quartier, de créer une vie sociale artificielle là où n’existe pas de rapports sociaux concrets."
L’animateur est là pour faire face à l’éclatement : tensions, hyperparcellisation de la ville, villes dortoirs, bruit, bagarres,
spéculation, autant d’éléments disparates d’une même réalité. La société capitaliste se veut (et se dit) cohérente,
unifiante, prometteuse d’avenir, alors qu’elle est en proie à des contradictions croissantes, dont la ville est un théâtre
guignolesque » y dit m’sieur Vergnes, un animateur qui s’posait la question en 1976.
Heureusement, les travailleurs sociaux qu’avaient lu l’pote Karl, y z’avaient pas encor’ la maladie d’m’sieur Alzheimer, y
dit Fred.
« M. Lenoir, secrétaire d’État à l’Action sociale, symbolise une démarche politique qui caractérise le gouvernement
Giscard-Poniatowski. Lenoir est à Giscard ce que Debors était à Chaban. Le penseur, l’idéologue avec des airs de
gauche. C’est subtil, sournois, dangereux. Démystifions Lenoir.
Après avoir écrit "Les Exclus", qui lui valut l’encensement de la presse (voir Le Monde, Le Nouvel Observateur), M.
Lenoir se posait comme le défenseur d’une nouvelle classe sociale : les marginaux, les inadaptés et autres handicapés.
Ainsi pouvait-il accéder à un poste de secrétaire d’Etat auprès d’un président de la République décidé à "humaniser la
croissance". Très vite, par de nombreuses interviews, M. Lenoir se créait une image de marque : le "ministre de la
Fraternité" (L’Est républicain du 10 janvier 1975), "le pape d’une nouvelle Eglise" (Philippe Tesson à Actuel 2, le 4
novembre 1974). Il s’est lui-même proclamé "utopiste au pouvoir", lors d’un débat à l’Assemblée nationale en
décembre dernier.
Le projet de loi sociale qui est actuellement soumis au vote du Parlement vise à "organiser la collaboration des
institutions publiques et privées pour leur assurer une pleine efficacité et éviter le double emploi". (...)
Le projet d’institutionnaliser le bénévolat n’est pas apparu avec M. Lenoir. D’autres, avant lui, avaient tenté en vain
d’instaurer un corps de bénévoles.
Ce fut, en premier lieu, la proposition de loi portant sur l’organisation d’un service civique à caractère social et culturel
pour les jeunes filles. L’exposé des motifs, présenté à l’Assemblée nationale le 9 janvier 1969, stipulait : "[...] il paraît
bien normal de faire appel à ces jeunes filles, non pour les encaserner, mais pour leur confier des missions en rapport
avec leurs vertus de féminité, de dévouement de futures mères de familles, gardiennes des traditions de la femme
française.
Quand on analyse tous les besoins en matière sociale, éducative, culturelle, pourquoi ne pas faire appel à ces
jeunes filles qui, tout en restant dans leur famille, feraient l’apprentissage de leur vie de femme, s’emploieraient
utilement pour elles-mêmes et pour la nation. Certains diront que cela va empêcher de gérer des emplois de
fonctionnaires au rabais, etc., mais les gens avertis qui ont étudié les taux de croissance dans les domaines sociaux et
culturels, les besoins, savent qu’aucun budget ne saurait donner satisfaction à de tels besoins en personnel, et ils savent
également que chaque organisation fonctionnarisée aura tout à gagner de l’afflux, chaque année, du sang nouveau de la
jeunesse".
Cette proposition de loi fut combattue à l’époque par les étudiants et professionnels du secteur sanitaire, social et
culturel. Elle avait un double but, outre son contenu idéologique : résoudre, en partie, le problème du manque d’effectifs
dans les hôpitaux (et ailleurs) ; résorber le chômage des jeunes filles.
M. Francis Pavard, ancien directeur de cabinet du secrétaire d’Etat à l’Action sociale, justifiait, lors d’un colloque à
Rennes en 1970, un service civil obligatoire pour les jeunes filles par le fait que "quel que soit l’effort de recrutement, le
nombre des travailleurs sociaux restera insuffisant, compte tenu des tâches à remplir qui seront démesurées.
Le
problème se pose donc de la participation des citoyens à l’action sociale".
M. Lenoir, dans son livre Les Exclus, ne dit pas autre chose : "le personnel hospitalier, aussi dévoué soit-il, suffit à
peine à sa tâche. [...] L’action sociale devrait être de plus en plus le fait de la population tout entière." »
Sauf qu’aujourd’hui, y r’marque Djamel, c’est les infirmières qui font des heures sup bénévoles.
Une loi contre les pauvres17 mars 2004Déclaration d’Olivier BesancenotNouvelle étape de la guerre que mène legouvernement contre les pauvres, leprojet de loi sur la "prévention de ladélinquance" est inaceptable. Lestravailleurs sociaux, le syndicat de lamagistrature, le syndicat national desmédecins de PMI... l’ont bien compris. Ilfaut faire reculer ce gouvernement quientend soumettre les milieux populaires àun contrôle permanent et généralisé. Findu secret professionnel et obligation dedélation, caméras braquées sur les HLMet les établissements scolaires, pouvoirsélargis de la police... Pour legouvernement, tout doit être mis en placepour surveiller et contrôler lesdélinquants potentiels, c’est-à-dire lespauvres. Classes laborieuses = classesdangereuses. Raffarin, Fillon, Sarkozyroulent tout droit vers le XIXe siècle.
« Ainsi, les mêmes arguments ont été avancés pour justifier, hier, un service civil féminin et, aujourd’hui, la mise sur
pied d’équipes de bénévoles sur une grande échelle. Une banque du volontariat a été créée pour la région parisienne.
(...) M. Giscard d’Estaing a présidé la première séance de travail de ce groupement, le 28 février dernier, en déclarant
"Le volontariat, pour moi, ce n’est pas un moyen commode et mesquin de résoudre de perpétuelles insuffisances
budgétaires par le recours à la main-d’oeuvre gratuite et de qualité, c’est un moyen de montrer à tous qu’une société ne
vit pas uniquement sur des relations d’argent, de contrainte ou d’incitation."
Le président a encore parlé d’ "exercice
actif de la fraternité" (Le Monde du 23 mars 1975).
Le 17 octobre 1974, le secrétaire d’Etat à l’Action sociale a diffusé une circulaire passée inaperçue, qui demande aux
préfets et aux D. D. A. S. S. de dresser un inventaire des associations effectuant des activités bénévoles. () Différents
terrains d’action sont proposés : accueil-orientation ; garde d’enfants scolarisés ; visite aux personnes âgées valides et
invalides et notamment celles qui se trouvent en hospices ; animation pour les personnes du troisième âge ;
alphabétisation des travailleurs migrants ; activités socio-culturelles ; enfants abandonnés ou victimes de sévices ;
colonies de "vacances pour enfants de milieux pauvres".
Des équipes éducatives, des assistantes sociales, les bureaux d’aide sociale pourront servir de "médiateurs" entre les
bénévoles et les terrains d’activités. Ces "médiateurs" assureront la formation complémentaire du volontaire et son
intégration dans une équipe. (...)
Comment se fait-il que, dans une société où seul l’argent et le profit commandent, le bénévolat, l’acte gratuit puissent
apparaître ? ("Le profit reste un moteur efficace de l’activité humaine." Lenoir)
"Il manque 10 000 infirmières dans les hôpitaux." ( L’Express). N’est-ce pas là la raison qui explique l’impossibilité
pour le personnel hospitalier de se consacrer à des tâches autres que purement techniques ?
N’y a-t-il pas contradiction dans le projet du bénévolat qui prétend s’opposer aux spécialistes, jaloux de leurs
prérogatives, alors que le bénévole devient spécialiste du "contact humain", tandis que l’infirmière, l’aide-soignante, la
femme de service deviennent spécialistes des traitements, des soins et du ménage ?
Pourquoi le pouvoir (dont fait partie M. Lenoir) casse-t-il les reins des travailleurs sociaux qui veulent sortir du ghetto
et cherchent justement à mobiliser les citoyens sur leurs problèmes (clubs de prévention fermés, animateurs licenciés,
équipes éducatives éclatées, etc.) ?
L’individualisme que prétend combattre le bénévolat n’est-il pas un principe fondamental du système social actuel ?
N’est-il pas inscrit, là, infaillible, dans les disparités de salaires, les primes à la production, l’urbanisme-cages-à-poules,
l’automobile-caisson ?
Pourquoi le pouvoir casse-t-il les reins des usagers qui veulent effectivement participer à la gestion d’un centre social,
d’un foyer de jeunes travailleurs ?
Pourquoi les centres de planning familial, longtemps maudits par le gouvernement, subissent des réglementations qui
empêchent une démocratisation réelle des responsables et favorisent leur "spécialisation" ?
Parce que le bénévolat n’a pas pour fonction les objectifs généreusement définis par son promoteur. Il vient s’inscrire
dans une situation économique déterminée et doit jouer un rôle idéologique et policier.
L’inadaptation, selon M. Lenoir, n’épargne aucune classe sociale et aucun âge de la vie. Dans tous les milieux, on
trouve des fugueurs, des drogués, des délinquants ou des révoltés. "La gangrène menace le corps social tout entier",
écrit-il dans Les Exclus. "Les blessures inévitables que les mutations imposent à toute société vivante (nécessitent une
structuration du) tissu social (par) la participation de citoyens à la solution de problèmes concrets qui se posent sur leur
lieu de vie."
Le bénévolat, la participation des citoyens à l’action sociale ne visent pas seulement à étouffer des révoltes structurelles,
mais aussi à gommer la lutte des classes. (...) "La ségrégation par classe, par âge ou par ethnie est à proscrire [...]. Il est
bon que l’école, le jardin public, le stade, le foyer socio-culturel soient les lieux de brassage des enfants et des jeunes de
toutes les catégories sociales" Les Exclus. (...) Au-delà de sa fonction idéologique, l’action "décentralisée" est amenée à
exercer un rôle véritablement policier. Le peuple sera de plus en plus encadré, contrôlé. (...)
A un journaliste qui lui demande s’il approuve "qu’une assistante sociale recommande à un chef d’entreprise un
demandeur d’emploi qui sort d’un hôpital psychiatrique en taisant d’où il vient", M. Lenoir répond sans détours : "Nous
mettons sur pied des équipes qui auront à suivre ceux qui sortent d’un milieu protégé : hôpital, hôpital psychiatrique,
institut médico-pédagogique. Ces équipes feront la liaison avec l’employeur ou au moins son chef du personnel à qui
elles indiqueront clairement les faiblesses du candidat présenté. Cette complicité - au bon sens du terme - est
indispensable. Sinon, au premier accroc, il risque d’y avoir licenciement et le sentiment - légitime - d’un abus de
confiance."
Les bénévoles seront une armée de réserve disponible pour la classe possédante. Recrutés dans les milieux bourgeois le
plus souvent (qu’on nous donne les origines socio-professionnelles des adhérents de la Fondation Claude-Pompidou,
qui visitent les malades dans les hôpitaux), ils pourront vite avoir pour fonction d’informer le pouvoir. Ils seront
d’ailleurs taillables et corvéables à merci et, s’ils n’entrent pas dans la ligne du parfait petit bénévole, ils seront
révoqués sans tambours ni trompettes. »
Afid y raconte qu’Farida quand ell’ était emploi jeune dans une association du quartier, l’préfet y l’invitait les emplois
jeunes d’la ville à manger à la préfecture et y leur demandait c’qu’faisaient les assos et les travailleurs sociaux dans
l’quartier. C’étaient des "informateurs" !
« Ce serait une erreur de limiter l’analyse du bénévolat au secteur de l’action sociale, même si ce qui précède peut aider
à comprendre les manoeuvres de la bourgeoisie pour assainir la population, la contrôler, la surveiller. Une grande
offensive du pouvoir actuel fait référence à la même doctrine : nier la lutte des classes et contrôler le peuple.
M. Poniatowski, bien que ministre de l’Intérieur, a mis près de dix jours avant de faire la moindre déclaration au sujet
de la milice organisée par le maire de Sommedieue. Après avoir signalé que les milices étaient "porteuses des plus
grands risques de désordre, et à la limite de guerre civile" (cela pour maintenir un climat de trouille), il a rappelé que "le
maire, en qualité d’officier de police judiciaire [pouvait], en cas d’extrême urgence ou de délit grave, demander à ses
concitoyens de lui prêter main-forte jusqu’à l’arrivée de la police ou de la gendarmerie.
Ces initiatives communales sont
parfois nécessaires face à la montée des violences. Elles ont le mérite d’associer des citoyens volontaires à la protection
de la liberté de tous, c’est-à-dire de leur propre liberté". Le bourgeois se rassure : ce n’est pas le peuple armes, mais c’est
l’approbation des milices communale sous le contrôle des autorités. »
« Il faut tout tenter dans une ville » comm’ ell’ dit Rama Yade pour qu’les pauvres y viennent pas salir l’paysage des
p’tites bourgeoises qui font leurs courses. Mêm’ leur mettre sur la gueule du Malodore, l’répulsif pour chien. C’est vrai, y
dit Djamel, qu’ell’ est secrétaire d’État aux droits d’l’Homme, pas du pauvre...
« Après Mai 68, la bourgeoisie doit s’armer pour affronter la contestation, y continue l’travailleur social qu’a lu l’pote
Karl, le combat de la classe ouvrière mais aussi des paysans, des artisans. Cette révolte prend des formes de plus en plus
dures : des méthodes d’action nouvelles mettent en péril les principes de base de la domination bourgeoise. Des secteurs
jusqu’alors restés calmes se mettent à bouger et à dénoncer le système capitaliste.
II faut trouver les moyens de casser cette contestation de l’autorité, non pas forcément par la violenoe (Marcellin la
Matraque), mais plutôt par un discours qui obtienne le même résultat (d’où Poniatowski, Lenoir...). Ce qui ne signifie
pas que le ministre de l’Intérieur laisse sa matraque au vestiaire. Durant ses prestations télévisées, on remarque moins
les C. R. S. armés.
En schématisant un peu, on pourrait dire que le gaullisme c’était une politique étrangère nationaliste (la France, donc le
peuple français), mais l’offensive idéologique n’a pas été suffisante à l’intérieur du pays. Giscard renverse la vapeur :
avant qu’on puisse dire ce que sera véritablement sa politique extérieure, il paraît évident qu’il a choisi de mettre le
paquet sur le nationalisme intérieur. Et c’est l’apparition d’une action politique au ras du sol : la marche (aujourd’hui, on
dit jogging, y corrige Fred), le petit-déjeuner avec les éboueurs ou le dîner chez des travailleurs, la poignée de mains
aux immigrés des bidonvilles de Marseille. (...)
Il est grand temps de dénoncer l’idéologie véhiculée actuellement par le pouvoir. II faut gratter le vernis. Dévoiler le
vrai visage de cette société qui exploite, réprime et exclut, et qui ose parler de solidarité. Les premiers symptômes que
l’on décèle pourraient bien laisser augurer de lendemains qui ne chanteront sûrement pas. »
Et c’était pendant les Trente Glorieuses ! y r’marque Fred.
Ouais, ben le lendemain d’hier, c’est aujourd’hui, y dit Afid qu’a l’sens d’l’histoire.
Ce site reprend la basede données de feuabri.org/antidelation, sitetoulousain de résistanceà la délation qui aaccompagné depuis 2004la lutte des collectifslocaux contre la Loi dePrévention de laDélinquance, finalementvotée en mars 2007.
Mêm’ l’îlotage y z’ont inventé à cett’ époque, y dit rappelle Fred. Ah bon, y s’étonne Djamel, j’croyais qu’c’était les
socialistes...
« À Toulouse, depuis juillet 1974, une centaine de policiers-îlotiers sont mis en place par équipes de trois à six ; prennent
contact avec la population, les associations, centres sociaux, maisons de jeunes, clubs prévention, etc., qu’ils interrogent
et auxquels ils demandent de collaborer. La police, sous le couvert d’une animation, contrôle, fiche et applique plus
précisément la politique de répression du gouvernement. La Revue de la police nationale souligne que "ce procédé doit
permettre un rapide retour aux relations de confiance qui sont nécessaires entre la population et sa police [...], il doit
permettre au policier titulaire de son îlot de mieux connaître sa "population" et aussi à l’inverse de mieux se faire
connaître d’elle". (...).
L’îlotage, qui fut pratiqué particulièrement, rappelons-le, sous l’occupation et en Algérie, consiste en fait à confier à un
policier la surveillance d’un quartier, dont il doit chercher à connaître la vie, savoir ce qui s’y passe, ce qui s’y dit. "En
réalité, comme le déclare le préfet dans La Dépêche du 4 février 1975, les îlotiers sont surtout utilisés dans les quartiers
populeux, dans les cités [... où ils tentent] de créer un climat de confiance, de connaître les groupes par une pénétration
sur le terrain et éventuellement de détecter les associations dangereuses ou susceptibles de le devenir. II n’est pas exclu
que des femmes soient recrutées pour cette mission qui allie pour une part celle de l’assistance sociale à celle du gardien
de la paix !"
Déjà en 1971, Marcellin déclarait, lors du vote du budget de l’Intérieur : "Au moment où une vague de banditisme
déferle à travers le pays, où la criminalité et l’usage de la drogue ne cessent de s’accroître, notre police a un rôle
considérable à jouer." Ou encore : "Dans les périodes de trouble, de contestation où même les institutions les plus
anciennes hésitent, l’État seul sert de rempart à la population contre la conséquence du désordre des esprits. »
La police étant un des piliers essentiels de la dictature de la classe bourgeoise, il n’est pas étonnant de voir l’importance
de plus en plus grande qui est accordée à la police dans l’appareil d’Etat."
Dans le même sens, Poniatowski déclarait le 22 octobre 1974 au congrès du Syndicat des commissaires : "La police a un
rôle prioritaire : assurer directement la "prévention" et, si nécessaire par la contrainte, la sécurité de chacun." Pour
justifier l’îlotage comme les "opérations coups de poing", l’argument fallacieux est la protection de la population face
au banditisme auquel la presse, s’en faisant largement l’écho, prépare le terrain en créant un climat de peur, de panique,
d’insécurité favorable à l’implantation de la police en général. Ainsi l’adversaire principal n’est pas le système
capitaliste mais la jeunesse. En fait, ces opérations visent à préparer l’opinion publique à une répression policière contre
les travailleurs en lutte.
Face à la crise du capitalisme, la classe dominante, pour maintenir ses privilèges, exploite de plus en plus durement la
classe ouvrière (bas salaires, licenciements, chômage, fermetures d’usines), et pour ce faire développe une répression de
plus en plus systématique sur les usines comme sur les quartiers. En effet, la restructuration capitaliste engagée en
France par la grande bourgeoisie avec l’aide de Giscard d’Estaing accentue la domination des trusts multinationaux. Et
ce ne sont pas les prétendus "changements" du gouvernement qui remettent en cause les rapports de production, bien au
contraire. Ce sont précisément ces rapports qui engendrent directement ces inadaptations que l’on connaît, et qu’on nous
demande de pallier en tant que travailleurs sociaux.
"La lutte contre la criminalité" est en effet le récent prétexte trouvé par Poniatowski pour lancer les "opérations coup de
poing" qui visent à institutionnaliser le contrôle policier, à habituer les masses à la répression sous prétexte de sécurité,
à frapper au hasard la population pour atteindre les militants syndicaux et politiques.
De même que Chirac envoie sa police contre les travailleurs en grève, le gouvernement, par le biais de la délinquance,
est en train d’installer un contrôle sur l’ensemble des activités de la population. De même la lutte contre la délinquance
est un prétexte pour instituer un quadrillage systématique des quartiers populaires et des grandes cités par la présence
des îlotiers. »
La police ell’ organisait aussi des centres de loisirs, comm’ aujourd’hui, y dit Fred.
« Mais pourquoi la police est-elle à l’origine d’une telle opération, et a-t-elle vraiment vocation pour s’y intéresser ? » y
demande un directeur départemental des polices urbaines, qui répond aussi sec : « Le désir de mon administration de
lutter contre la délinquance par la prévention me paraît être une première réponse à la question ; j’ajoute qu’il m’est
possible, plus qu’à quiconque, en raison des multiples contacts avec les personnalités, les administrations, les dirigeants
d’association que me procure ma qualité de directeur départemental de services de police, d’être, au départ, le
catalyseur de l’opération. La disponibilité à tout moment de l’année de policiers spécialisés dans certaines disciplines
(judo, voile, natation, tir, etc.) nous permettant, le centre étant créé, d’oeuvrer utilement en faveur de celui-ci. Enfin, le
détachement, en tant qu’animateurs-adjoints, des policiers s’occupant spécialement des problèmes de l’enfance ne peut
être que bénéfique ; il est indéniable qu’à l’occasion de la pratique des diverses disciplines se créeront, entre eux et les
jeunes, des liens, et que naîtra inévitablement un climat de confiance réciproque, voire de sympathie, qui permettra,
ultérieurement, aux policiers de l’enfance, en utilisant le crédit acquis, de mieux remplir leur mission de prévention.
Cela est conforté par les résultats de l’action menée depuis six ans par les moniteurs de mes services attachés au centre
de loisirs jeunesse de Meaux-Trilport, ainsi que par les maîtres-nageurs sauveteurs responsables de la sécurité et de
l’animation de certaines baignades du département. »
En fait, y dit mon ancien délégué syndical CGT, pour encadrer "l’armée des travailleurs", l’bourgeois y met en place un’
armée du travail social : « En première ligne, l’infanterie légère : les C. M. P. P. - G. A. P. ; secteurs psychiatriques
infantiles pour remplacer ou compléter les parents trop fatigués et trop aliénés pour assumer le rôle de parents, pour
remplacer les maîtres trop débordés pour assumer la relation pédagogique avec tous les enfants de la classe ; les clubs de
prévention, les foyers des jeunes avec leurs animateurs destinés à éviter les "mauvaises fréquentations" aux jeunes qui
ont une fâcheuse tendance à rechercher la relation là où elle se trouve encore, c’est-à-dire dans les groupes autonomes
qui deviennent rapidement gênants pour la communauté.
En deuxième ligne, les assistants sociaux, les éducateurs spécialisés, équipés plus lourdement en science-de-la-relation,
s’attaquent à ceux qui sont déjà solitaires, ou asociaux, familles ne pouvant plus lier les deux bouts sans l’aide de
l’alcool, jeunes qui dérivent vers le juge des enfants.
Et derrière, c’est l’artillerie lourde des psycho-costauds, qui savent tout, pour qui le case-work sent la maternelle, qui
font du groupe, de l’individuel, du face à face, du divan ; ici on vend la relation directive, non directive, relaxante,
angoissante, à l’acte, à la vacation ou au mois, en se donnant parfois l’air de l’offrir ; on la vend à tous ceux qui n’ont
rien trouvé sur mesure parmi les bataillons précédents.
Et si même les synthèses n’arrivent plus à sauver les relations entre les spécialistes eux-mêmes, il ne reste plus qu’à
recourir aux armes suprêmes, qu’on aimerait tant éviter : la pharmacie et/ou la matraque, l’hôpital ou la prison, à moins
que ce ne soit une forme intermédiaire et moderne qui hybride les deux, style internat... »
Aujourd’hui, not’ président, y commence par la prison, y dit Djamel.
Mêm’ les associations qu’c’est toujours les p’tits bourgeois qui sont dans l’Bureau, mêm’ dans les "quartiers" comm’ y
disent. « L’intégration du mouvement associatif n’est que la concrétisation de la connivence de classe qui unit, à
l’échelon local, des acteurs sociaux et un appareil administratif dont l’expansion favorise les nouvelles élites
intermédiaires, dont d’ailleurs cette expansion se nourrit », y l’explique l’pote Paul Beaud, parce que « l’action sociale
tend essentiellement à dépolitiser le culturel pour mieux en dissimuler les enjeux politiques et à institutionnaliser ce qui
relevait souvent du bénévolat et du militantisme. Il s’agit de culturaliser le social et le politique, c’est-à-dire de traiter sur
le mode culturel des problèmes qu’on ne veut pas (ou qu’il y a intérêt à ne pas pouvoir) traiter en termes politiques.
Ce
culturalisme présente l’avantage stratégique de paraître rencontrer les problèmes réels en leur donnant, dans le réel, une
solution mystifiée. C’est l’un des buts essentiels de la délégation accordée à la nouvelle petite bourgeoisie dans le
domaine culturel et communicationnel. »
En tout cas, y dit Djamel, quand y a la bagarre dans l’quartier avec les CRS-SS qui nous tuent, les travailleurs sociaux y
z’arrivent toujours après pour nous dire qu’on a raison d’pas être contents mais qu’c’est pas comm’ ça qui faut faire, qu’la
violence c’est pas un’ solution, qu’y faut qu’on fasse un’ association pour revendiquer nos droits, et patati et patata,
comm’ ça tout repart comm’ d’hab’ et y peuvent continuer à gagner leurs p’tit’s pièces sur not’ dos. C’est sûr qu’y z’ont
pas lu l’pote Karl, eux, p’têt’ VictorHugo... Paroles, paroles... Nous on l’sait qu’la violence c’est pas un’ solution (surtout
quand on est pas assez nombreux, y ricane Afid ; en tout cas ça gène pas les flics d’not’ président la violence), c’est un’
réaction.
Mais quand on discute avec les z’autorités, on s’retrouve comm’ l’ouvrier Marche avec m’sieur Lamartine, y
faut attendre l’nouveau nouveau plan Marshall d’la banlieue qu’vous allez voir ça va être super, et on reste dans la
misère qu’l’travailleur social y nous apprend à gérer en bon père d’famille.
C’est pourquoi, y dit Fred, qu’les travailleurs sociaux qui lisaient l’pote karl, y devait quand mêm’ pas y en avoir
beaucoup, y disaient que « vouloir être les alliés de la classe ouvrière, c’est-à-dire se situer dans cette contradiction,
choisir son camp, c’est d’abord ne pas répandre des illusions en présentant le travail social soit comme "apolitique", "au
service de l’intérêt général", soit, ce qui est plus subtil, comme pouvant répondre à la demande, au projet de la
population. Choisir le camp du prolétariat, c’est dénoncer le travail social dans son essence : une vaste entreprise de
contrôle et de répression mise en place par la bourgeoisie et à son service ! »
Et s’casser ! Pôv’ con !
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