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Cette ô combien méconnue "racaille"...

Publie le mardi 1er novembre 2005 par Open-Publishing
10 commentaires

de ichlo

D’autant que je me souvienne, la "racaille" dans ses définitions passant par delà les préjugés et se qualifiant comme l’antithèse de la bourgeoisie, remonte en son histoire pour s’identifier à la "canaille", ce ramassis de poètes saturniens et mélancoliques, surréalistes et bohèmes, entre les prés de St Germain et les bas fonds des quartiers parisiens mais jamais de l’autre côté d’une rive circonscrite et - cela me semble le plus important quant aux origines de la définition d’une racaille quelconque -, nous n’insisterons jamais assez là-dessus ; la Racaille, au départ n’était pas violente, à l’égard de personne.

Elle l’est devenue sous impulsion révolutionnaire et par rapport à des mécontentements de masse développés par des excès de soumissions à des pouvoirs politiques autoritaires et inégalitaires.

Quoi leur vouloir dans ces conditions que de leur reconnaître un droit de refuser l’abnégation à la misère ?

Non ! Mr Nicolas Sarkozy se trompe et stigmatise un problème social en enjeu politique de mauvais aloi.

Le Conseil constitutionnel devrait porter plainte contre lui pour dénis de République car la Racaille et la Canaille sont une partie intégrante de la société française, un corps social à l’âme fière.

L’imagination débordante de ses réseaux en a produit des poètes de qualité, de nombreux chansonniers et un terrain propice aux revendications politiques de luttes des classes qu’aucune histoire, si manipulée soit-elle, ne pourra jamais effacer...

Alors pourquoi Mr Sarkozy ne se contente-t-il pas d’utiliser le terme approprié qui inviterait à se limiter à l’appellation de "casseurs" plus proche de la réalité ?

Cherche-t-il dès à présent à faire taire un pan entier de la société française ?

Sous la dénomination de "casseurs" aurait-il peur de rappeler à bon nombre d’entre nous les trop nombreux passages à tabac (surtout dans quelques commissariats), la multitude de poings sur la figure et d’empoignade au collet gratuits montrés en effigie par toute une extrême droite ?

Nul ne peut apporter de réponse suffisamment satisfaisante et nous ne pouvons tous que déplorer un amalgame supplémentaire qui fait communier toutes les droites en une seule par sa même extrême !
Mais ne nous étonnons de rien puisque sur des hypothèses similaires, l’utilisation du terme "racaille" déborde de toute part et infecte jusqu’à des sites web où le syndicalisme dans toute sa structure éponge le même qualificatif.

Culturellement ça s’implante bien aussi, jusqu’à traduire une série américaine en utilisant ce dénominateur passe partout de "racaille" pour le lier à toutes les sauces (ça se passe du côté de la 13ème Rue !!).

Quelle stupeur également lorsque d’une manière militante on prend connaissance avec de virulentes critiques qui n’hésitent pas à retourner la marque de fabrique à son envoyeur en envisageant de mener une lutte sans merci contre la "racaille capitaliste"...

Bref, il y en a pour tout le monde et descendu de son piédestal, le qualificatif de "racaille" peut être pris à sa plus simple expression, démythifiée de tout engagement et se rapprocher de mots plus jolis qui appartiennent à la littérature française à savoir, le poulbot, un "sagouin" dont la République pourrait bien faire sienne Nicolas Sarkozy.

Messages

  • Je voudrais bien pouvoir penser comme vous. mais si l’on s’en tient aux définitions du dictionnaire (Larousse 2006), le mot racaille (qui vient du latin raclere, râcler) ne revêt qu’un sens péjoratif. Je cite :

    1. Couche la plus basse de la société ; considérée comme la plus méprisable ; populace. 2. Ensemble d’individus méprisables.

    Le mot canaille (du latin cane, chien) a le même premier sens péjoratif, mais revêt lui une seconde interprétation. Je cite : 2. Enfant espiègle

    Je trouve très intéresssante votre interprétation révolutionnaire. Mais la langue française (comme les autres aussi, sans doute) revêt bien des nuances. Comprenez que dans mon article intitulé "Racaille", ce terme appliqué aux puissants qui spolie la... la canaille que nous sommes, n’avait rien de poétique.
    Le Yéti

    • Effectivement, canaille vient du latin cane (chien). Et le sens n’est pas forcément péjoratif car Diogène et les cyniques Grecs (kunikos venant de kuôn, kunos, le chien, et de kunizô, vivre en chien) se réclamaient des chiens, contre l’ordre social des "civilisés".
      Quant à la racaille, la définition du dictionnaire est donnée par les tenant de "l’ordre sémantique". Qui méprise la populace ? Certainement pas ceux qui en font partie et qui, fièrement, s’en réclament, contre la société dans laquelle ils ne se reconnaissent pas.
      Voir la chanson ci-dessous !!! :-))

    • Ok pour l’asociation entre racaille et canaille. Ces deux mots sont aussi la traduction en français du fameux "Lumpenproletariat", la racaille, la canaille au service du capital.

    • le " Lumpenprolétariat", prolétariat en guenilles ou sous-prolétariat, a de tous temps alimenté les cohortes fascistes, nazis en particulier. Autrement dit les ennemis de nos ennemis ne sont pas forcément nos amis : ainsi, en prétendant le combattre, les saccageurs de services publics et brûleurs de bagnoles ne font que valoriser Sarkoflic

    • Permettez-moi de vous rappeler les "canaillous" de J.-P. Chevènement. Pour lesquels, en grande partie, avaient été lancés les emplois-jeunes, supprimés depuis par un gouvernement dont un immigré hongrois, qui n’arrive pas à chasser de sa mémoire les chars russes à Budapest, est Minsitre d’Etat. Le subconscient d’un tel libéral est particulièrement lourd.

  • Il existe une bien belle chanson révolutionnaire sur la canaille (et on ne demande qu’à chanter maintenant "c’est la racaille, et bien j’en suis" ! A vos plumes, les poètes de banlieue !)

    L’Eveil de la classe ouvrière
    La Canaille
    (Paroles et musique de J. Darcier et J.B. Clément (1871).

    Dans la vieille cité française
    Existe une race de fer
    Dont l’âme comme une fournaise
    A de son feu bronzé la chair.
    Tous ses fils naissent sur la paille,
    Pour palais ils n’ont qu’un taudis.
    C’est la canaille, et bien j’en suis.
    Ce n’est pas le pilier du bagne,
    C’est l’honnête homme dont la main
    Par la plume ou le marteau
    Gagne en suant son morceau de pain.
    C’est le père enfin qui travaille
    Des jours et quelques fois des nuits.
    C’est la canaille, et bien j’en suis.

    C’est l’artiste, c’est le bohème
    Qui sans souffler rime rêveur,
    Un sonnet à celle qu’il aime
    Trompant l’estomac par le cœur.
    C’est à crédit qu’il fait ripaille
    Qu’il loge et qu’il a des habits.
    C’est la canaille, et bien j’en suis.

    C’est l’homme à la face terreuse,
    Au corps maigre, à l’œil de hibou,
    Au bras de fer, à main nerveuse,
    Qui sort d’on ne sait où,
    Toujours avec esprit vous raille
    Se riant de votre mépris.
    C’est la canaille, et bien j’en suis.

    C’est l’enfant que la destinée
    Force à rejeter ses haillons
    Quand sonne sa vingtième année,
    Pour entrer dans vos bataillons.
    Chair à canon de la bataille,
    Toujours il succombe sans cris.
    C’est la canaille, et bien j’en suis.

    Ils fredonnaient la Marseillaise,
    Nos pères les vieux vagabonds
    Attaquant en 93 les bastilles
    Dont les canons
    Défendaient la muraille
    Que d’étrangleurs ont dit depuis
    C’est la canaille, et bien j’en suis.

    Les uns travaillent par la plume,
    Le front dégarni de cheveux
    Les autres martèlent l’enclume
    Et se saoûlent pour être heureux,
    Car la misère en sa tenaille
    Fait saigner leurs flancs amaigris.
    C’est la canaille, et bien j’en suis.

    Enfin c’est une armée immense
    Vêtue en haillons, en sabots
    Mais qu’aujourd’hui la france
    Appelle sous ses drapeaux
    On les verra dans la mitraille,
    Ils feront dire aux ennemeis :
    C’est la canaille, et bien j’en suis.

  • racaille n. f. Foule méprisable. ¶ Rebut de la population.
    © Hachette Livre, 1998

    Qu’avez-vous à redire à cette définition ?

  • bonjour,

    j’ai 28 ans, je vis en région parisienne depuis que j’ai 10 ans et je peux vous assurer que racaille est le terme qu’emploient les "caïra" (racaille en verlan) pour se désigner.
    Pour eux ce n’est pas péjoratif et même les jeunes issus de quartiers non défavorisés, pour peu qu’ils soient un minimum de leur époque disent en rigolant à un copain : "ouaich joe la caïra" ou autre car c’est bien vu d’être une caïra.

    La première fois que j’ai entendu ce mot employé ainsi j’avais 14 ans et un jeune, le frère du caïd du collège en fait, ma dit un truc comme "eh mais t’es une racaille toi !" : avec un grand sourire et en fait c’était un compliment. J’en avais rougis jusqu’au oreilles de plaisir. J’allais peut-être être "accepté" comme l’un des leur !

    La recette était simple, adopter leurs attitudes, leurs codes (façon de parler, intonation si caractéristique des mecs (en filles aussi) de banlieue, mots employés, même constructions de phrases et phrases fétiches, style vestimentaire, etc), leur musique, en me faisant croire (puis en l’oubliant ) qu’elle m’était aussi adressée puisque moi aussi je vivais dans le 93 ..
    .. en faisant ensuite comme eux pour aller jusqu’au bout .. en ben on devient comme eux.

    C’est simple à cette époque, la grande époque de la dépouille (quand on risquait de rentrer chez soien caleçon en prenant le RER B), la seule façon de ne pas se faire agresser dans la rue ou les transports en commun c’était de s’habiller et de marcher comme eux. (vous savez en roulant des mécaniques)
    Comme on ne peux pas faire ça sans adhérer sauf à devenir fou .. et bien on y a cru.

    Et c’est ainsi que toute un génération, portée par le hip-hop, à la fois effet et cause de l’amplitude de ce "mouvement", a basculé dans la haine (il faut voir les textes, oui c’est technique, ça sonne bien, souvent les jeux de mots sont bien trouvés et signent une certaine maîtrise de la langue mais pour ce qui est de l’élévation à devenir un meilleur être humain .. 10 000 ans d’histoire pour ça ..) et la bêtise (parler avec 300 mots et un accent adopté pour passer pour une brute je suis désolé mais ça rend pas poète).

    Un vieil arabe, ancien garagiste, qui vivait sur un parking dans une caravane m’a dit un jour que en temps de guerre les jeunes chantent la paix et l’amour et que si aujourd’hui ils chantaient la haine du système c’est parce que on avait jamais été aussi "heureux".

    Enfin c’est toujours mieux que 1914-18 ou 39-45 non ? Ah oui mais on veux être riche et pas être smicard et ouvrier comme papa. Ou alors il va falloir choisir, comme y invite le titre du dernier album de hip-hop de je ne sais plus quelle star du rap, en ce moment à l’affiche sur les murs du métro, à "devenir riche ou essayer de mourir" ..

    Allez, stop la démagogie, en 15 ans l’ambiance est devenue pourrie, invivable, même à châtelet les halles en plein cœur de Paris on risque de se faire emmerder si on se ballade seul avec sa chérie en jupette. Et qui c’est qui fait ça ? C’est les caïra. C’est eux qui l’disent. Enfin moi j’ai souvent ouvert ma gueule et je me la suis souvent fait défoncé mais c’est pas possible de ne rien dire quand on se fait insulter non ? ah moins que vous préfériez regarder le bout de vos chaussures quand on vous traite, si poétiquement, de fils de pute ?

    J’ai aussi plus d’une fois fermé ma gueule et laisser des gens se faire embrouiller (pas taper j’ai jamais pu) ou ma mère se faire insulter. La morsure de la honte était ensuite bien pire que le gout salé de mon sang dans ma bouche.

    Alors stop la démagogie, on peut pas parler d’insécurité en France depuis 20 ans à cause d’un vieux racisme latent : sinon on s’en foutrait que 90% des caï soient d’origine étrangère on dirait juste : c’est des hors-la-loi (ah oui je sais le terme fait poétiquement penser à des Mandrin, Robin et autres Don Diego mais là c’est pas de ça qu’il s’agit), on les juge comme des hors-la-loi : prévention en amont, répression efficace sur le terrain et ensuite réelle possibilité de réinsertion pour ceux qui le veulent.

    basta. Si le système est pourri on le change soit de l’intérieur (bah oui, en votant .. ou en se faisant élire) soit ne faisant une bonne vieille révolution "à la loyale", à la régulière, mais pas ne brûlant les écoles, enfin !

    C’es types là n’en ont rien à foutre de votre poésie, ils sont consumés par la haine et entraînés dans une spirale de violence par leur entourage, l’effet de groupe.

    On peut juste les arrêter les séparer et trier le bon grain de l’ivraie et que se range qui voudra.

    Moi aussi ce monde me fait gerber mais j’aime pas leurs méthodes et croyez moi, sans doute il est vrai à cause du racisme peut-être même plsu que latent de nos aînés, mais ils ne nous aiment pas beaucoup non plus, les "caïra".

    Quant à la poésie de ces actuelles canailles. Laisse moi rire, toi à qui je répond, mais tu vis sûrement pas à Aulnay-sous-bois ! ( :-) quand même )

    Bonsoir à toutes et à tous,

    Le soleil brille pour tous,

    Arnaud