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DOMOTA : premier bilan du LKP et soutien à la grève du 19 mars

Publie le samedi 14 mars 2009 par Open-Publishing
2 commentaires

LKP : Elie DOMOTA fait un premier bilan de la grève générale
Meeting du 13 mars 2009

Byen bonswa tout moun !

J’ai un papier en poche que je sors avec le nom des entreprises qui ont signé ces jours ci [ L’accord Jacques BINO ou Accord régional interprofessionnel sur les salaires ]. Nous allons communiquer les noms de certaines de ces entreprises pour apporter la preuve qu’il y avait des chefs d’entreprises et des syndicats patronaux qui s’exprimaient ; mais depuis la signature de l’accord BINO, il y a nombre d’entreprises qui ont dû signer parce que leurs travailleurs se sont mis en grève !

La liste qui suit n’est pas exhaustive, mais elle sert à montrer qu’on y trouve nombre d’entreprises adhérentes du MEDEF [Qui a quitté la table des négociations, après avoir tenté de torpiller celles-ci].

VIGILE SECURITE - JET SARL - GPS - RSP - MARSHALL SECURITE - EGSTP - DAUPHIN SECURITE - CARAIBES IMPORT - LA BRADERIE - SODEC DISTRIBUTION EDOUARD - SOPIMAT - SUPER U CHANZY - HOTEL FLEUR D’EPEE - HOTELS CARIBEA (SALACO, CLIPPER...) - MAC DONALD - LEADER PRICE - FEDREATION DU BATIMENT - SODEXHO - HOTEL ARAWAK - SUPER U LA ROCADE - MATCH - CORA - M. BRICOLAGE - ECOMAX - SOCREMA - L’ARTCHIPEL SCENE NATIONALE - CIMENTS ANTILLAIS - VIENNOISERIE PLUS - RENAULT - SOCAR - CODIMA - CADI SURGELES - SOFRIBER - CHAMPION BOISRIPEAUX...

Demain matin, les camarades de Carrefour Destrelan ont rendez vous avec Hayot, et avec Despointes pour Carrefour Millenis.

C’est une belle lutte ! Les camarades ont donc eu raison de se mobiliser dans leurs entreprises pour exiger l’application de l’accord BINO.

Nous avons entendus les propos de JEGO, et à sa suite le préfet : tous deux remettant en cause le préambule de l’accord BINO. Il y a là quelque chose d’extraordinaire !

Au moment de la rédaction du préambule, le préfet était présent ainsi que les deux médiateurs mandates par le premier ministre FILLON. Ils ont tous trois participé à la rédaction su protocole. Ils nous ont même suggéré quelques formules à y inclure.

Et voilà qu’aujourd’hui nous les entendons affirmer leur opposition à ce préambule !

Il y a une autre chose qui les gène dans le protocole BINO. C’est ce que nous avons appelé la clause de convertibilité. On est dans la situation suivante : ils sont d’accord pour signer l’augmentation de 200 euro des bas salaires pendant 3 ans. Et je rappelle que s’agissant des entreprises de moins de 20 salariés, les patrons paieront 50 euro, les collectivités 50 euro pendant 12 mois et l’Etat 100 euro pendant 3 ans. Et au bout de 12 mois pour les collectivités et de 3 ans pour l’Etat, l’entreprise versera l’intégralité de l’augmentation. Voilà ce que prévoit l’accord BINO.

Eux [syndicats patronaux non signataires de l’accord : MEDEF - CGPME], considèrent qu’ils vont augmenter les salaires de 200 euro dans les conditions décrites plus haut ; mais qu’au bout de 3 ans ils les reprendront, ces 200 euro !

Où a t-on déjà vu pareille chose ?!

Comment admette qu’un travailleur ayant perçu 200 euro pendant 3 ans, soit 2400 euro pendant 12 mois, puisse accepter une brusque amputation de son salaire après 3 années, en avril 2012 ?!

C’est pourquoi l’accord salarial Jacques BINO contient une clause stipulant que l’employeur prendra en charge les 200 euro au bout des 3 années.
Et tout naturellement toutes les entreprises citées plus haut sont d’accord et signent l’accord BINO. Car elles se rendent bien compte qu’il n’est pas normal qu’il y ait des gens percevant 200 euro et que dans 3 ans on puisse leur dire que « c’est fini », « vous perdez vos 200 euro mensuels de revenus » !

Nous avons bien constaté l’existence d’un certain nombre de frustrations. Notre camarade Marinette [Délégué syndical à l’usine Gardel] en a parlé plus tôt, on a ainsi entendu M. DIEULEVEULT, Directeur de GARDEL AFFIRMER QUE JAMAIS IL NE SIGNERAIT L’ACCORD BINO !
Mais faute de signature, l’usine n’ouvrira pas, les salariés étant en grève.

Nous avons aussi été invités à participer à la manifestation du 19 mars à Paris ! Un camarade du LKP s’y rendra et défilera au nom du LKP.
Pour bien monter qu’il y a de la solidarité, il y a beaucoup de solidarité chez les travailleurs. Pour dire aussi que de très nombreux travailleurs de France nous aident spontanément en nous envoyant par chèque ou mandat de l’argent. Ils nous disent enfin de ne pas lâcher ce combat car nous avons raison de nous battre ; que notre lutte est juste ; et que cela leur donne plus de force pour qu’ils puissent eux aussi se battre !

Nous disons aussi qu’il y a des camarades qui sont toujours en grève, des camarades de la BRINK’S, de TOP ONE SECURITE, de l’AEROPORT... Il y a des camarades qui n’ont pas encore signé, ceux de CARREFOUR, de MILENIS, de la concession TOYOTA, et de tous les autres concessionnaires automobiles. Il y a beaucoup de camarades en grève.

Ce que nous vous demandons, c’est de leur apporter votre soutien.

Car le combat est rude ; surtout quand vous avez en face les HAYOT, les DESPOINTES, qui ne veulent rien entendre, qui ne veulent rien lâcher ! Ils ont l’argent, ils peuvent payer l’augmentation ! Mais ils refusent que des petits nègres leur réclame une augmentation.

Et c’est pourquoi nous nous devons d’être très fermes dans tout ce que nous disons et dans tout ce que nous faisons !

Ces messieurs pensent pouvoir venir faire ce que bon leur semble ici : ils doivent bien comprendre qu’on n’est plus au 16eme ni au 17eme ni au 18eme siècle ! Que c’est fini ! Que dorénavant, dans tout ce qu’ils font, ils devront compter avec nous ! Sinon, ils ne le feront pas, dans ce petit pays de Guadeloupe !

La grève générale est suspendue, et il y a peut-être quelques nostalgiques. Mais nous avons un certain nombre de tâches à réaliser, de choses à continuer à faire ensemble. Et assurément, dans les jours à venir, nous demanderons aux travailleurs, aux Guadeloupéens, à tous les travailleurs de tous les pays présents depuis le 20 janvier et présents ce soir, de continuer à se rassembler ici, devant notre BIK au Palais de la Mutualité. Car nous continuerons les meetings et prises de paroles, nous continuerons les réunions d’information, nous continuerons à nourrir notre conscience, nous continuerons à discuter entre nous et à échanger... Pour que notre mouvement ne s’arrête pas, pour faire vivre tout ce que nous avons mis en place.

Parce que c’est ce qui se produit souvent : nous atteignons les sommets, ensuite nous nous endormons, nous oublions... Mais ce coup ci nous ne devons pas oublier, nous devons continuer à travailler ensemble !

Et ce travail, nous devons le poursuivre dans les communes, dans les sections, dans les quartiers. C’est pourquoi nous invitons tous les camarades, à entamer des discussions avec les voisins, les familles, et les amis pour pour décider ensemble de mettre en place des comités LKP dans toutes les communes.

Dans toutes les communes, car il y a problèmes partout ! A Basse-Terre, à Saint-François... montons des comités LKP pour fédérer la Guadeloupe en comités LKP pou pé déliyanné péyi la !

Cela signifie que nous avons beaucoup de réunions à organiser pour écouter les gens. Car on ne peut imaginer le nombre de propositions qui sont faites ! Il y a des gens qui nous font part de leurs problèmes, d’autres qui viennent exposer leurs problèmes... Mais il y a beaucoup de monde qui vient nous trouver avec des idées : des idées à concrétiser ; des idées dont la réalisation nécessite des financements, des idées de création d’activités, des idées pour développer la production...

C’est ce dont nous avons besoin !!!

Aussi, Jean Marie NOMERTIN en a déjà parlé, cette petite somme de 200 euro que nous venons d’arracher, eh bien cet argent là, n’allons surtout pas la jouer au Loto, n’allons pas la gaspiller chez HAYOT...

Faisons en sorte de développer la production locale, faisons plus souvent un petit tour au marché - même si des fois il nous arrive de penser ou constater que les denrées sont un peu cher, mais eux aussi vendront moins cher, faisons leur confiance... Faisons en sorte d’acheter notre poisson, de nous tourner vers la production locale...

Pour que justement ces 200 euro servent à développer la production locale, à développer l’emploi.

Car c’est ce que nous leur avons répondu quand ils nous ont affirmé vouloir encore créer plusieurs milliers de contrats aidés. Tout le monde peut bien voir les problèmes générés dans les communes par ces contrats aidés. Nous ne disons pas aux gens de ne pas accepter un contrat aidé, de ne pas en faire ; car quand on cherche du travail dans un pays ayant un taux de chômage de plus de 40%, on prend ce que l’on trouve.

Mais aujourd’hui on se rend bien compte que ces contrats aidés sont devenus un outil aux mains des politiques. Un outil pour soit disant faire baisser le chômage ; mais dans le même temps, un outil pour préparer et remporter les élections ! Car comme par hasard, quand un administré rencontre un problème d’emploi : contrat aidé ! Et quand vient la période des élections : contrats aidés !

Et c’est bien à cela qu’ils servent !

Nous devons aujourd’hui nous battre pour le développement de véritables contrats de travail ; car on ne peut pas former un projet de vie avec un contrat aidé, même si ce dernier vous aide pendant un petit moment.

Et pour conclure, camarades, trop longtemps ils nous ont fait croire que tout ce qui venait de l’extérieur était meilleur que ce que nous produisions, que ce qui existait chez nous. Ainsi, le nombre de Mac DONALD implantés dans la région pointoise (Pointe-à-Pitre - Abymes - Baie-Mahault - Gosier) est impressionnant ! Cela signifie que nous avons un gros effort à faire pour habituer nos enfants à nos propres aliments ; et pour nous mêmes nous (ré)habituer à nos propres aliments.

Pour finir, je le redis, dans les jours, semaines et mois à venir nous devons nous retrouver ici même au moins une fois par mois, dans des bik a pawol, pour continuer à échanger et à discuter entre nous...

Afin ansanm ansanm de voir ce que nous faisons avec ce pays, parce que c’est notre pays !

Ansanm nou ka lité ! Ansanm nou ké gannyé ! Ansanm nou ka lité ! Ansanm nou ké gannyé !
Jou nou ké mété a jounou... Péké vwè jou ! Elie DOMOTA,
Meeting au Palais de la Mutualité
Pointe à Pitre le 13 mars 2009

Messages

  • Que de justesse et de lucidité, de la part d’E. Domota, dans l’analyse, le bilan et le projet de développement du LKP.

    Par contre, pour ceux qui croiraient encore à une possible humanisation du capitalisme, on voit bien tout le mal qu’a le LKP pour faire respecter un accord. Le gouvernement ne semble pas vouloir prendre ses responsabilités en la matière.

    On les comprend, le pouvoir sarkozyste s’est montré d’une telle faiblesse avec ces activistes, qu’il a fini par se mettre à dos le patronat. (pourquoi n’a t-il pas eu recours aux bonnes vieilles méthodes coloniales comme en 82, 67, ... ?)

    Donc, le gouvernement ne peut exiger que le patronat applique un accord ?

    Mais alors, quand ce même gouvernement, par tous les moyens, y compris celui qui consiste à proposer à des retraités de l’Education Nationale de remplacer leurs anciens collègues, aujourd’hui grévistes dans les écoles primaires, et même de payer ces retraités "briseurs de grève" par les retenues de salaires des grévistes, ce gouvernement applique donc deux poids, deux mesures.

    Dans un cas, le pouvoir force les choses, innove, trouve des moyens pour faire respecter une décision, et dans l’autre cas, où il s’agit également de faire respecter une décision, le pouvoir semble étrangement absent.

    Allez, n’ayons pas peur des mots, cela s’appelle de la solidarité de classe.

    Jak

  • le texte de l’accord Bino sur le site de l’UGTG

     Accord Bino

     l’avis d’extension publié au Journal Officiel

    La CGT demande l’extension des accords dans les DOM

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    Aux Antilles (Guadeloupe, Martinique) comme à La Réunion, les luttes revêtent des réalités différentes… mais ont toutes un même dénominateur commun : des inégalités encore plus accentuées sur ces territoires qu’en France dans le domaine des salaires, de l’emploi, des prix à la consommation, de la fiscalité et de l’accès aux services publics et aux logements.

    En Guadeloupe, les syndicats regroupés au sein du LKP ont démontré leur capacité à mobiliser et à négocier. Le protocole d’accord signé ouvre un large champ d’engagements : les salaires et l’emploi, la vie chère, mais aussi les questions institutionnelles, économiques, écologiques, culturelles.

    A la demande de la CGTG, la délégation de la CGT soutiendra le principe de l’extension de l’accord lors de la réunion de la Commission Nationale de la Négociation Collective le 20 mars prochain. Outre le revenu mensuel augmenté de 200 à 250 euros (1 à 1,4 SMIC), cet accord prévoit une augmentation de salaire de 3% (au dessus de 1,4 à 2 SMIC)

    En Martinique, la mobilisation se poursuit jusqu’à la signature d’un accord global, permettant une amélioration des conditions de vie des salariés et de la population martiniquaise.

    Concernant la question salariale, un accord signé avec l’ensemble du patronat (Medef compris) permettra à plus de 6O% des salariés du secteur privé de bénéficier d’une augmentation de 200 euros Une augmentation de 4 % est prévue pour les salariés gagnant entre 1,4 et 1,6 SMIC et une de 2 % pour les salariés au-delà de 1,6 SMIC

    A la Réunion, le Collectif contre la vie chère (COSPAR) a fait le bilan des négociations en cours.
    Son porte parole, membre de la CGTR, a d’une part dénoncé la lenteur et l’attitude du patronat qui ne cesse de quitter et de revenir à la table des négociations et d’autre part a appelé à soutenir et à amplifier la mobilisation.

    Pour sa part, la CGT a renouvelé son plein soutien aux centrales syndicales des DOM, organise une solidarité financière permettant une solidarité active des salariés vivant en France vers les salariés des DOM.
    Elle exige du gouvernement de faire en sorte que les accords deviennent rapidement applicables et qu’il cesse de criminaliser ces mouvements pour tenter de s’affranchir de ses responsabilités

    Montreuil 11.03.2009

    Mais....

    LKP - Accord Bino : Cachez ce préambule que je ne saurais voir…

    Par Tiennot Grumbach, avocat honoraire, ancien pdt du Syndicat des avocats de France

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    A droite : T. Grumbach

    Le gouvernement veut minimiser les succès de la Guadeloupe.Les archipels sont fragiles, mais accordés aux multiples vérités du monde actuel. L’océan de la traite fut ainsi un continent obscur où s’implantèrent les plantations à esclaves…
    (Édouard Glissant et Patrick Chamoiseau : l’Intraitable beauté du monde, adresse à Barack Obama, Galaade Éditions, 2009)

    Cachez ce préambule que je ne saurais voir… proclament toutes les forces de régression sociale depuis la signature, le 26 février dernier, de l’accord Jacques-Bino. Ce préambule[1] est pourtant l’illustration du principe « c’est le fait qui fait le droit ».

    Ce principe, énoncé par Loysel au XVIIe siècle, a été rappelé, dans ces mêmes termes, par Élie Domota au ministre Jégo. C’était à l’occasion du deuxième round de négociation quadripartite qui rassemblait, enfin, tous les protagonistes sociaux : les diverses organisations patronales, les élus, l’État et, bien sûr, toutes les organisations syndicales représentatives de Guadeloupe ainsi que les associations et les mouvements regroupés dans le LKP.

    La finalisation de cet accord a dû attendre que le préfet et les représentants des collectivités territoriales signent un second texte, en date du 4 mars. Contresigné par les organisations d’employeurs signataires de l’accord Jacques-Bino et l’ensemble des associations et des mouvements constituant le LKP, il contient cent soixante-cinq dispositions et fait référence explicitement à l’accord Bino.

    La ministre de l’Intérieur, qui était restée taisante pendant le déroulement du conflit, a tracé en quelques mots le nouvel argumentaire de la pensée unique concernant l’accord lui-même : « L’État n’était pas partie prenante à ce texte. Il ne pouvait donc en négocier le contenu. Comme Yves Jégo et Laurence Parisot, je juge certains propos, notamment du préambule, inacceptables » (les Échos, mardi 10 mars). La veille au soir, sur France Info, le ministre du Travail, Brice Hortefeux, a tenu des propos similaires. Il a déclaré, en dénonçant le préambule, que l’extension de l’accord n’était qu’une possibilité parmi d’autres et qu’il n’étendrait pas tant que la Commission nationale de la négociation collective, convoquée pour le 20 mars, n’aurait pas donné son avis.

    Pourquoi tant de protestations sur les termes d’« économie de plantation » qui figurent dans ce préambule ? Il s’agit pourtant d’une réalité historiquement reconnue. En parlant de la pérennisation d’un modèle rien ne devait autoriser quiconque à soutenir que le texte du préambule renvoyait à une quelconque survivance de fait d’une économie esclavagiste. Pourtant c’est cette interprétation spécieuse que retient le MEDEF et qu’exprime Laurence Parisot : « Le protocole d’accord énonce des principes qui sont contraires aux valeurs fondamentales de la République française et auxquelles nous ne pouvons souscrire d’aucune façon. On y lit que l’économie de la Guadeloupe serait une “économie de plantation”. Cela veut dire une économie esclavagiste ! » (le Parisien, 9 mars).

    Cette levée de boucliers des pouvoirs économiques, politiques et médiatiques surprend d’autant plus qu’en l’état le préambule, régulièrement paraphé entre des organisations syndicales représentatives et des organisations professionnelles d’employeurs et de salariés, n’est opposable qu’aux signataires. L’accord bruyamment contesté n’est applicable que sur le territoire de la Guadeloupe.

    Il l’est dans un cadre régional et interprofessionnel. Il est juridiquement conforme aux dispositions du Code du travail. Il est susceptible d’être étendu en application de l’article L2261-15 du Code du travail. Sur quels fondements constitutionnels peut-on soutenir que les principes qu’il énonce sont contraires aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales ?

    Nul ne le sait. On peut par contre constater qu’en refusant la négociation au seul motif du préambule et de l’article V, sur la clause de convertibilité, les responsables des grandes entreprises se démasquent. La clause de convertibilité donne en effet trois ans au patronat pour prendre en charge, au fur et à mesure du déroulement de l’accord, le règlement direct des 200 euros d’augmentation pour les plus bas salaires, en perdant progressivement le bénéfice des dégrèvements fiscaux et sociaux qui leur ont été consentis. Quand les organisations d’employeurs qui représentent les plus petites entreprises de Guadeloupe acceptent ce dispositif, le fait que les plus importantes d’entre elles, qui sont au coeur des surprofits, le refusent met bien en évidence l’opposition à la négociation loyale et contradictoire qui les animait.

    Un nouveau revirement du pouvoir après le 20 mars serait donc d’autant plus incompréhensible que le MEDEF local est contraint de courir après l’accord Jacques-Bino qu’il dénonce dans tous les médias. Il vient ainsi de décider d’un engagement unilatéral sous la forme d’un bonus exceptionnel qui reprend quasiment l’intégralité de l’accord qu’il condamne.

    Que peut-on reprocher aux syndicats de la Guadeloupe quand, sans attendre les consignes de Willy Angèle, ils ont appelé à signer des accords, entreprise par entreprise, avec les employeurs directs pour que soit validée leur adhésion volontaire à l’accord Jacques-Bino ?
    Qui a pu parler d’extorsion de signature quand on sait que de grandes entreprises et des groupes l’ont déjà signé ?

    Quoi que puissent en dire aujourd’hui, a posteriori, princes et les princesses qui nous gouvernent, le préambule existe. Il a une valeur juridique incontestable. Les surprofiteurs peuvent toujours soliloquer dans leur réserve, ils n’empêcheront pas que ce préambule est un fait acquis. Il marque la force poétique de l’utopie du réel sans lequel nul ne sait monter à l’assaut du ciel.

    Tiennot Grumbach

    [1] Le Préambule :
     Considérant que la situation économique et sociale actuelle existant en Guadeloupe résulte de la pérennisation du modèle de l’économie de plantation.
     Considérant que cette économie s’appuie sur des rentes de situation de monopole, des abus de positions dominantes qui génèrent des injustices.
     Considérant que ces injustices touchent aussi bien les travailleurs, que les acteurs économiques endogènes.
     Considérant que ce sont autant d’obstacles au développement économique endogène et à l’épanouissement social.
     Considérant la nécessité de faire tomber tous ces obstacles en instaurant un ordre économique nouveau prônant une revalorisation du travail de chacun (chefs d’entreprise et salariés) et promouvant de nouveaux rapports sociaux.
     Considérant que les parties conviennent à ce titre de la nécessité d’une revalorisation substantielle du pouvoir d’achat par un relèvement des bas salaires selon les modalités qui suivent.