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De la distinction entre citoyenneté et confession religieuse

Publie le lundi 30 août 2004 par Open-Publishing
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de Taïeb Jamaï

L’invective du Premier ministre israélien sommant les Juifs français à émigrer en Israël a levé le voile sur un préoccupant phénomène identitaire. Faisant fi de la nationalité qui est celle des sujets interpellés, Ariel Sharon ne les appréhende que par leur religion. Comme si le Vatican demandait à l’ensemble des Catholiques de rejoindre l’espace conféré à l’Eglise dans la sainte ville de Rome.

Le Premier ministre israélien réaffirme avec éclat l’option de l’Etat d’Israël qui ne voudrait reconnaître aux individus que l’appartenance religieuse et non point la qualité citoyenne. Poussée jusqu’au bout de sa logique, cette approche remet en cause, ni plus ni moins, l’état du monde selon les nationalités et, surtout, jette la suspicion sur les citoyens de confession juive de tous les pays ! Une distinction dont l’ensemble des Juifs présents partout dans le monde se seraient bien passés ! Cependant, la sagesse séculaire de ce peuple n’a pas tardé à prévaloir.

Par la voix de M. Theo Klein, président honoraire du CRIF qui représente les associations des Juifs français, ainsi que par l’intervention de M. Patrik Gaubert de la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme. Celui-ci a souligné que les commentaires (de M. Sharon) “ n’apportent ni le calme, ni la paix, ni la sérénité dont nous avons besoin... ”. M. Klein, de son côté, a énergiquement rabroué M. Sharon affirmant que “ ce n’est pas à lui de nous dire ce que nous devons faire et qu’il importe de laisser la communauté juive de France résoudre elle-même ses problèmes ”. Comme on pouvait s’y attendre, le chancelant leader du Likoud n’a pas raté l’occasion de jeter l’approbre sur la communauté musulmane de France représentant, selon lui, 10 % de la population, soit cinq millions d’individus, qui seraient “ le terroir propice au racisme... ”. Aussi, M. Sharon demande-t-il aux Juifs de France de plier bagage.

De fait, cette intervention devant les associations juives américaines reflète l’acharnement puérile contre la France et la recherche d’une vaine couverture aux déboires politiques et financiers de l’actuel Premier ministre d’Israël. Il importe également de noter la vigoureuse réaction de Paris. Le Président Chirac estimant, dans un premier temps, “ la visite de M. Sharon en France impossible ” et le Quai d’Orsay ayant vigoureusement protesté. De fait, la France a exigé, tout à son honneur, des excuses de Tel-Aviv. Cet incident, le plus grave qui ait secoué les relations franco-israéliens, rappelle une série de malentendus diplomatiques.

De la colère de Chirac contre les services de sécurité israéliens lors de sa visite à Jérusalem, aux fins de non-recevoir infligés par Sharon à Dominique de Villepin alors ministre des Affaires étrangères, jusqu’à la dernière bévue à l’égard de M. Michel Barnier, actuel patron du Quai d’Orsay. Ce dernier avait été privé de rencontre avec Sharon parce qu’il avait osé rendre visite au Président Yasser Arafat. Assurément, le Premier ministre d’Israël serait-il “ sûr de lui et dominateur ! ” ?

(*)J ournaliste, fondateur de « Maroc Buisness »

http://www.lematin.ma/journal/article.asp?id=inter&ida=37919