Diplomatie : Sarkozy rentre dans le rang !

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Diplomatie : Sarkozy rentre dans le rang !
PERSPECTIVE | 00h05
JEAN-NOËL CUÉNOD | 07 Mai 2008 | 00h05

Il y a un an à peine, Nicolas Sarkozy clamait à tous vents qu’il serait le « président des droits de l’homme » et se présentait aussi comme le « président du pouvoir d’achat ». Assez rapidement, les caisses de la France sonnant creux, le pouvoir d’achat fut passé par pertes et profits. Restaient les droits de l’homme. Après le voyage du président Sarkozy en Tunisie la semaine dernière, force est de reconnaître que cette notion ne figure plus dans les priorités de la diplomatie française.

On s’en doutait un peu depuis que le socialiste démissionnaire Jean-Marie Bockel, alors secrétaire d’Etat à la coopération (c’est-à-dire aux relations avec les ex-colonies), s’est retrouvé transféré aux Anciens Combattants. Le malheureux sous-ministre avait pris au sérieux les promesses de Nicolas Sarkozy qui voulait en finir avec la « Françafrique » cette notion qui recouvre les rapports opaques et suspects des dirigeants de pays africains francophones avec Paris.

Plusieurs gouvernants africains se sont alors plaints à l’Elysée des leçons de démocratie que leur infligeait Jean-Marie Bockel. Ce dernier a donc été rapidement écarté, ce qui en dit long sur l’influence que conservent encore ces chefs d’Etat au plus haut sommet de la
République française.

Bockel n’est pas le premier secrétaire d’Etat à la Coopération qui subit pareil revers. En 1982, Jean-Pierre Cot - un socialiste français natif de Genève - avait démissionné dans les mêmes circonstances, manifestant son désaccord avec François Mitterrand qui avait, lui aussi, renoncé à évacuer les eaux troubles de la « Françafrique ».

Par son déplacement en Tunisie, Nicolas Sarkozy a donc confirmé la conversion de la France à la diplomatie des contrats juteux. Les droits de l’homme doivent rester une fleur de rhétorique, rien de plus.

Que Sarkozy utilise la diplomatie de façon cyniquement économique, après tout ses confrères chefs d’Etat font pareil, avec plus ou moins de nuances. Pourquoi reprocher à la France ce que la Grande-Bretagne et les Etats-Unis pratiquent sans états d’âme ?

Mais le plus grave dans le cas de Nicolas Sarkozy est l’espoir qu’il a fait naître chez les victimes des dictatures, notamment dans les pays qui, jadis, appartenaient à l’Empire français.

Durant sa campagne présidentielle et juste après son élection, il s’était tellement engagé à faire des droits humains un axe prioritaire de sa politique que les démocrates africains et maghrébins ont commencé à croire que ses propos flamboyants seraient suivis d’effets. Ils en étaient d’autant plus persuadés que Sarkozy avait choisi comme ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner - l’homme du devoir d’ingérence - et Rama Yade, une brillante avocate des droits humains d’origine sénégalaise. Aujourd’hui, ces démocrates se sentent non seulement floués mais abandonnés, délaissés. Ils commençaient à relever la tête, encouragés par ce vent nouveau qui se levait à Paris. Mais désormais les dictateurs ont reçu l’assurance qu’ils pouvaient acheter leur tranquillité avec des Airbus et des centrales nucléaires.

Dans ces conditions, on se demande ce que font encore Bernard Kouchner et Rama Yade au sein de ce gouvernement.