Education sans frontières appelle à protéger les jeunes sans papiers

Le Réseau éducation sans frontières (RESF) a appelé jeudi à "parrainer, protéger et même héberger", quitte à enfreindre la loi, les jeunes et leurs familles sans papiers menacés d’expulsion et à combattre "la chasse à l’enfant".Créé il y a deux ans pour aider les jeunes sans papiers scolarisés et leurs familles et réclamer leur régularisation, le Réseau (80 associations membres) a officiellement présenté à la presse à Paris une pétition, lancée il y a huit jours et qui a déjà recueilli près de 10.000 signatures, dont celles de quelque 160 personnalités du monde politique et culturel.

"Nous les prenons sous notre protection", affirme le texte. "Nous ne laisserons pas commettre des infamies en notre nom. Nous les hébergerons et nous les nourrirons, nous ne les dénoncerons pas à la police", ajoute-t-il.

RESF évoquait la circulaire d’octobre dernier du ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, accordant un sursis à expulsion jusqu’au 30 juin aux jeunes majeurs scolarisés et aux familles d’enfants scolarisés.

"A cette date, le sursis tombera pour des milliers d’entre eux. Ils risquent l’expulsion en masse, verront leur avenir et leur vie même anéantis. La chasse à l’enfant sera ouverte. Nous ne pouvons couvrir des mesures inhumaines et c’est dès maintenant qu’il faut agir", a déclaré le porte parole de RESF, Richard Moyon.

"Nous savons que nous risquons 5 ans de prison et 30.000 euros d’amende. Nous assumons le risque. Cela contrevient aux lois en vigueur, mais comment donner l’exemple de la soumission à un ordre injuste. Chacun a en mémoire des épisodes où, face à des persécutions insupportables, chacun a dû faire des choix et où ne pas choisir était choisir de laisser faire", a-t-il ajouté.

Plusieurs personnalités signataires de la pétition, présentes jeudi à Paris, en ont, elles aussi, revendiqué la responsabilité. L’ancien ministre de l’Education nationale Jack Lang (PS) a déclaré : "soyons les soldats de cette cause, acceptons d’être des boucliers. Et si cela n’est pas très +légal+, rappelons-nous qu’il existe une loi humaine qui est supérieure aux lois éphémères de certains gouvernements de passage".

Signataire également, Nicole Borvo, présidente du groupe PCF au Sénat, a évoqué "une période de triste mémoire" et appelé à "la désobéissance civile". Le président de l’Observatoire des libertés publiques, Maurice Rajsfus, a lancé : "mettons-nous en danger, sinon c’est toute la société qui est en péril".

"Les vieux démons sont de retour. Nous voyons les mêmes comportements, les mêmes haines : en 1942 contre les youpins, en 2006 contre les bougnoules", a-t-il ajouté. "Déjà, du temps où mes parents risquaient la déportation, Vichy avait prévu amendes et prison pour ceux qui hébergeaient des Juifs", a-t-il ajouté.

Combien d’enfants risquent l’expulsion ? "Heureusement, il n’y a pas de recensement systématique dans les établissements, mais si on se réfère aux estimations allant de 200.000 à 400.000 sans papiers majeurs, on peut estimer qu’il y a au moins autant d’enfants menacés", selon Richard Moyon.

"Avec sa volonté d’expulser 25.000 personnes par an, Sarkozy ne réussira jamais à endiguer l’immigration, mais il réussit à semer la peur, à provoquer l’angoisse. C’est inadmissible. Nous nous devons de les protéger, par solidarité et aussi par choix de société, par refus d’un pays qui se dit celui des Droits de l’homme et qui pratique la xénophobie", a-t-il conclu