Accueil > G 8, le double aveuglement des occidentaux
Avons-nous besoin de 42 ans pour réduire de 50% nos émissions de CO2 ? Même un enfant rigolerait d’une telle supercherie communicationnelle des 8 devant l’urgence des soins à prodiguer à notre terre malade. L’idéologie croissantiste - aussi cher à nos gouvernants libéraux que le dieu l’est à l’intégriste - a été enfanté et a prospéré au rythme de l’augmentation de la consommation d’énergies fossiles et de la production de CO2. Depuis bientôt 2 siècles, le développement foudroyant de la civilisation occidentale est le fruit des inventions liées à la thermodynamique.
La conquête au 19 et 20 ème siècle, d’abord des territoires indiens d’Amérique du nord par les européens expatriés, et la montée au sommet de la super-puissance états-unienne, ne peuvent être séparés : du rail, des derricks du Texas, de la Ford T et de la Jeep, des alignements de moissonneuses batteuses dans les grandes plaines céréalières de l’Amérique du nord. Aujourd’hui de la guerre en Irak, il n’y a pas de fierté américaine sans pétrole.
Le premier aveuglement consiste à croire et faire croire que ce modèle énergivore et productiviste peut exister sans la surexploitation, voire le pillage, des richesses fossiles de la planète, à un prix artificiellement bas. Sans la casse des systèmes naturels qui ont créé la vie. Même aujourd’hui, été 2008, le pétrole est vendu très en dessous de sa valeur réelle. Si les acheteurs étaient responsables et conscients de sa disparition très proche, sachant qu’il est irremplaçable – 1 litre est équivalent au travail d’une dizaine d’hommes pendant une journée, ou plus - et que sa surconsommation réchauffe la planète, le pétrole coûterait certainement le triple, voire plus. Une véritable gestion des ressources essentielles à l’organisation d’une société se fait sur le long terme, l’immédiateté qui baigne nos pratiques modernes est mortifère. La technologie ne résoudra les problèmes qu’elle a crées que si ses croyants changent le paradigme : productivisme-consommation-croissance-profits.
Personne, sauf Raphaël Correa en Equateur et beaucoup d’autres inconnus, ne veut penser à ce qui restera des ressources fossiles pour les générations futures, ni voir que la plus part des populations qui vivent sur les terres d’où proviennent notre énergie sont, pour la plus part, appauvries et malmenées. Pour cela, après avoir colonisés les peuples, il aura fallu fausser la loi de l’offre et de la demande, pourtant si cher aux libéraux qui nous gouvernent, faire des guerres, créer des dettes illégitimes et corrompre les dirigeants du sud. Les vrais démocrates, qui défendaient le bien être de leur population face à la voracité énergétique du nord, ont été assassinés. L’histoire africaine et américaine en est pleine. Pétrole, charbon, uranium appartiennent à l’ensemble des humains. Ceux qui les sur-utilisent pour leur profit-bien-être personnel réchauffent le climat ou obèrent l’avenir de tous. Le partage semble une utopie, pourtant l’appropriation injuste par les plus puissants et notre surconsommation préparent nos catastrophes.
Le deuxième aveuglement a été de créer sciemment dans l’inconscient collectif des populations occidentales, l’idée d’une supériorité intrinsèque : alors qu’elle était seulement le résultat d’une addiction et d’une suralimentation aux drogues énergétiques. Une attitude plus proche d’une forme de toxicomanie que d’une gestion intelligente des ressources naturelles avec une vision du futur et un esprit de solidarité. C’est ainsi que certains nordistes prétendent que ce modèle supérieur de civilisation doit être partagé par tous, voire imposé. Peu nombreux sont encore aujourd’hui les occidentaux conscients du racisme inscrit profondément en eux. Les autres civilisations sont piétinées, surtout celles qui avaient eu le soin de préserver la nature pour leur descendance, plutôt que de la dévaster. Les pygmées du Congo, les papous d’Indonésie ou les indiens d’Amazonie sont aujourd’hui décimés comme des sous-hommes. Les forêts qu’ils entretiennent depuis des millénaires sont transformées, sous nos yeux, et en quelques dizaines d’années, en fauteuils de jardins, planchers flottant ou remplacées par des cultures de soja et de palmiers à huile pour nourrir nos élevages et nos bagnoles. Qui les défend hormis quelques ONG ?
Certains disent que le capitalisme est le seul système d’organisation sociale, la chute du mur de Berlin signant la fin de l’histoire. Ce cher Fukuyama avait seulement oublié les 4 milliards d’humains survivant dans la plus grande difficulté, une partie d’entre eux mourant de faim. C’est pourtant une conséquence directe de la grande prédation planétaire du système occidentale. Les catastrophes les plus visibles restent cachées à ceux qui ne veulent pas les voir.
Ce monstrueux oubli a permis à une majorité de nos dirigeants et des populations du nord de penser que les autres, ceux qui ont une autre couleur de peau, sont moins intelligents - comme l’a prétendu dernièrement un prix Nobel – plus feignants, plus corrompus et pour tout dire, assez désorganisés, donc responsables. Pourtant ce modèle productivo-consumériste n’est et ne sera jamais transposable aux 6 ou 7 milliards d’habitants. La prise de conscience devra se faire avec la soudaineté et la violence de celui qui sort d’un rêve pourtant si rassurant. Sinon, la surconsommation de ces énergies - dont les pays émergents nous font prendre conscience - et leurs disparitions programmées à court terme, ont toutes les chances de fossiliser notre super civilisation après l’avoir fait cuire.
Que faire ? Chacun d’entre nous, conscient des catastrophes qui se profilent, peut faire de la résistance à son niveau. Des actes, mêmes minimes, qui vont dans le sens de la conscience de sa responsabilité vis-à-vis de tous, changeront le monde. Les mentalités de nos concitoyens bougent. Sans les résistances passées, nous serions peut être, aujourd’hui, sous un régime ouvertement fasciste.
N Sersiron