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La journée d’Enzo ou l’école de demain....
Publie le dimanche 15 juin 2008 par Open-Publishing11 commentaires

La journée d’Enzo - 3 septembre 2012
Enzo est assis à sa place, parmi ses 32 camarades de CP. Il porte la vieille blouse de son frère, éculée, tâchée, un peu grande. Celle de Jean-Emilien, au premier rang, est toute neuve et porte le logo d’une grande marque.
La maîtresse parle, mais il a du mal à l’entendre, du fond de la classe. Trop de bruit.
La maîtresse est une remplaçante, une dame en retraite qui vient remplacer leur maîtresse en congés maternité. Il ne se souvient pas plus de son nom qu’elle ne se souvient du sien. Sa maîtresse a fait la rentrée, il y a trois semaines, puis est partie en congés.
La vieille dame de 65 ans est là depuis lundi, elle est un peu sourde, mais gentille. Plus gentille que l’intérimaire avant elle. Il sentait le vin et criait fort. Puis il expliquait mal.
Du coup Enzo ne comprend pas bien pourquoi B et A font BA, mais pas dans BANC ni dans BAIE ; ni la soustraction ; ni pourquoi il doit connaître toutes les dates des croisades.
On l’a mis sur la liste des élèves en difficulté, car il a raté sa première évaluation. Il devra rester de 12 à 12h30 pour le soutien. Sans doute aussi aux vacances.
Hier, il avait du mal à écouter la vieille dame, pendant le soutien ; son ventre gargouillait. Quand il est arrivé à la cantine, il ne restait que du pain. Il l’a mangé sous le préau avec ceux dont les parents ne peuvent déjà plus payer la cantine.
Il a commencé l’école l’an dernier, à 5 ans. L’école maternelle n’est plus obligatoire, c’est un choix des mairies, et la mairie de son village ne pouvait pas payer pour maintenir une école.
Son cousin Brice a eu plus de chance : il est allé à l’école à 3 ans, mais ses parents ont dû payer.
La sieste, l’accueil et le goûter n’existent plus, place à la morale, à l’alphabet ; il faut vouvoyer les adultes, obéir, ne pas parler et apprendre à se débrouiller seul pour les habits et les toilettes : pas assez de personnel.
Les enseignants, mal payés par la commune, gèrent leurs quarante élèves chacun comme une garderie. L’école privée en face a une vraie maternelle, mais seuls les riches y ont accès.
Mais Brice a moins de mal, malgré tout, à comprendre les règles de l’école et ses leçons de CP. En plus, le soir il va à des cours particuliers, car ses parents ne peuvent pas l’aider pour les devoirs, ils font trop d’heures supplémentaires.
Mais Enzo a toujours plus de chance que son voisin Kévin : il doit se lever plus tôt et livrer les journaux avant de venir à l’école, pour aider son grand-père, qui n’a presque pas de retraite.
Enzo est au fond de la classe. La chaise à côté de lui est vide. Son ami Saïd est parti, son père a été expulsé le lendemain du jour où le directeur (un gendarme en retraite choisi par le maire) a rentré le dossier de Saïd dans Base Élèves.
Il ne reviendra jamais.
Enzo n’oubliera jamais son ami pleurant dans le fourgon de la police, à côté de son père menotté.
Il parait qu’il n’avait pas de papiers...
Enzo fait très attention :
Chaque matin il met du papier dans son cartable, dans le sac de sa maman et dans celui de son frère.
Du fond, Enzo ne voit pas bien le tableau. Il est trop loin, et il a besoin de lunettes.
Mais les lunettes ne sont plus remboursées. Il faut payer l’assurance, et ses parents n’ont pas les moyens.
L’an prochain Enzo devra prendre le bus pour aller à l’école. Il devra se lever plus tôt. Et rentrer plus tard. L’EPEP (établissements publics d’enseignement primaire) qui gère son école a décidé de regrouper les CP dans le village voisin, pour économiser un poste d’enseignant.
Ils seront 36 par classe. Que des garçons.
Les filles sont dans une autre école.
Enzo se demande si après le CM2 il ira au collège ou, comme son grand frère Théo, en centre de préformation professionnelle. Peut-être que les cours en atelier seront moins ennuyeux que toutes ces leçons à apprendre par coeur.
Mais sa mère dit qu’il n’y a plus de travail, que ça ne sert à rien. Le père d’Enzo a dû aller travailler en Roumanie, l’usine est partie là-bas. Il ne l’a pas vu depuis des mois. La délocalisation, ça s’appelle, à cause de la mondialisation.
Pourtant la vieille dame disait hier que c’est très bien, la mondialisation, que ça apportait la richesse. Ils sont fous, ces Roumains !
Il lui tarde la récréation. Il retrouvera Cathy, la jeune soeur de maman. Elle fait sa deuxième année de stage pour être maîtresse dans l’école, dans la classe de monsieur Luc. Il remplace monsieur Jacques, qui a été renvoyé, car il avait fait grève. On dit que c’était un syndicaliste qui faisait de la pédagogie.
Il y avait aussi madame Paulette en CP ; elle apprenait à lire aux enfants avec des vrais livres ; un inspecteur venait régulièrement la gronder ; elle a fini par démissionner.
Cathy a les yeux cernés : le soir elle est serveuse dans un café, car sa formation n’est pas payée. Elle dit : « A 28 ans et un bac +5, servir des bières le soir et faire la classe la journée, c’est épuisant. » Surtout qu’elle dort dans le salon chez Enzo, elle n’a pas assez d’argent pour se payer un loyer.
Après la récréation, il y a le cours de religion et de morale, avec l’abbé Georges. Il faut lui réciter la vie de Jeanne d’Arc et les dix commandements par coeur. C’est lui qui organise le voyage scolaire à Lourdes, à Pâques. Sauf pour ceux qui seront convoqués pour le soutien…
Enzo se demande pourquoi il est là.
Pourquoi Saïd a dû partir.
Pourquoi Cathy et sa mère pleurent la nuit.
Pourquoi et comment les usines s’en vont en important le travail.
Pourquoi ils sont si nombreux en classe.
Pourquoi il n’a pas une maîtresse toute l’année.
Pourquoi il devra prendre le bus.
Pourquoi il passe ses vacances à faire des stages.
Pourquoi on le punit ainsi.
Pourquoi il n’a pas de lunettes.
Pourquoi il a faim.
" Projection basée sur les textes actuels, les expérimentations en cours et les annonces du gouvernement. Est-ce l’école que nous voulons ? Le
gouvernement a-t-il reçu un mandat populaire pour cela ? Qu’attendons nous pour réagir ? "
Messages
1. SIMPLE HISTOIRE DE L’AVENIR....., 15 juin 2008, 22:03, par Patrice Bardet
Notre avenir, et pire, celui de nos enfants, sans nul doute, si nous continuons à nous laisser battre à plate couture
1. SIMPLE HISTOIRE DE L’AVENIR....., 15 juin 2008, 22:09, par bruno
Hé oui, l’ami...
bonne lutte....pour la semaine et les jours qui suivront.....
faisons tout pour empécher celà !!!!
bruno
2. SIMPLE HISTOIRE DE L’AVENIR....., 16 juin 2008, 08:03, par bruno M
Ce texte est issu de ce site..... "LGS"
Toutes mes excuses de ne l’avoir pas mis en bas de page
bruno M
3. SIMPLE HISTOIRE DE L’AVENIR....., 16 juin 2008, 09:36, par Roberto Ferrario
Ciao Bruno
Non cet texte c’est ni de "Marc" et encore moins de cet site "LGS", site que est habitue a cet pratique...
Faisons une petite recherche on a trouve la publication la plus ancienne du Mercredi 4 juin 2008 et on a ajoute l’adresse en bas du texte...
A presto...
Dr Furioso
4. SIMPLE HISTOIRE DE L’AVENIR....., 17 juin 2008, 21:35
Oh... au moins ça voudrait dire qu’on a un avenir...
5. SIMPLE HISTOIRE DE L’AVENIR....., 18 juin 2008, 13:08
Hé ho, camarade ... Le Grand Soir ? "site que est habitue a cet pratique..." ?
pas vraiment non.
Par contre, il arrive qu’on recoive directement un texte proposé par mail - sans avoir de références.
2. SIMPLE HISTOIRE DE L’AVENIR....., 16 juin 2008, 00:42
et oui nous rétrogradons.! à fond la cale "mal barré vous prie le bonjour"espérons que dans les jours avenirs .nous serons nombreux a réagir et lutter !!!car du courage il va en falloir.nous perdons tous les acquits que nos anciens ont bagarrer pour obtenir."comme le dit bruno ,bonnes luttes"a tous et a toutes
3. La journée d’Enzo ou l’école de demain...., 16 juin 2008, 23:09
Ce texte est un commentaire publié sur rue 89 suite à un article concernant la mobilisation des parents contre la réforme Darcos.
http://web2.rue89.com/2008/06/04/contre-darcos-les-parents-prennent-le-relais-des-profs
Par ailleurs à noter et à diffuser une nouvelle mobilisation :
l’école est finie ? samedi 28 juin
http://bellaciao.org/fr/spip.php?article67741
http://lecole.est.finie.over-blog.com/
Faites circuler l’info !
1. La journée d’Enzo ou l’école de demain...., 17 juin 2008, 00:52, par Roberto Ferrario
Allor je me repet l’article a été publie le Mercredi 4 juin 2008 ici :
http://sauvons-lecole.over-blog.com/article-20170316.html
et le commentaire sur Rue 89 a été publie le 05/06/2008
donc c’est pas difficile a comprend non ?
Stop la désinformation please...
Dr Furioso
2. La journée d’Enzo ou l’école de demain...., 23 juin 2008, 13:21, par El Duende loco
Première publication là :
http://forums.france2.fr/france2/education/demain-sujet_8524_1.htm
et diffusé par mail la veille
l’auteur
El Duende loco
4. La journée d’Enzo ou l’école de demain...., 18 juin 2008, 01:01, par Eric
"Il porte la vieille blouse de son frère, éculée, tâchée, un peu grande."
... "tachée" (maculée) sans accent, c’est mieux . Et puis "éculée" se dit d’un talon (ou d’une plaisanterie), pas d’une blouse ...
Un instituteur (public) qui constate, un peu plus chaque jour, que le niveau monte ... :-(