Accueil > La répression aux trousses

La répression aux trousses

Publie le dimanche 30 octobre 2005 par Open-Publishing
14 commentaires

Agé de 14 ans lors de la rafle du "Vel d’hiv" des 16 et 17 juillet 1942 où 13000 Juifs "étrangers" sont arrêtés à Paris, Maurice Rajsfus en réchappe. Militant à Ras l’front, il est président de l’Observatoire des libertés publiques. Il a publié notamment "Jeudi noir" (Manya) en 1992, "la Police de Vichy" (Cherche-Midi) en 1995 et récemment "De la victoire à la débâcle, 1914-1940".

de Maurice Rajsfus

Les plus anciens militants de la LCR ne peuvent avoir oublié l’une des affiches les plus célèbres de Mai 68 : "Chassez le flic de votre tête !" A cette époque, et durant les années qui allaient suivre, l’idéologie sécuritaire connaissait déjà quelques succès.

C’était le temps où le ministre de l’Intérieur, un certain Raymond Marcellin, dénonçait le complot fomenté contre la France par les étudiants, et tous ces contestataires qui mettaient l’ordre républicain en péril. Rappelez-vous, camarades, la dureté des matraques des hommes en noir, à une époque où les staliniens approuvaient bruyamment cette répression.

Notre société satisfaite a toujours eu besoin d’un bouc émissaire pour contenir ses angoisses existentielles. La xénophobie, sans faiblir, s’est associée à une variété de racisme antijeunes tout à fait terrifiante. Au début des années soixante, les blousons noirs étaient censés mettre la France à feu et à sang. Dans le même temps, la police de ce pays, au travers de la répression contre les travailleurs algériens, retrouvait son instinct de mort des années noires de l’occupation nazie. Comment oublier cela ?

En ce début du XXIe siècle, la revendication sécuritaire s’est élargie - à gauche comme à droite. Il y a bientôt deux ans, un intéressant sondage, publié par "Le Monde", permettait d’apprendre que plus on s’éloignait des lieux dits "sensibles", plus l’angoisse sécuritaire était forte. Et pourtant, nous savons très bien que nombre de Français ont basculé dans une délinquance quasi officielle. Que ces concitoyens ont développé une société qui se goinfre ignominieusement au détriment des plus démunis. Que cette économie parallèle du fric facile secrète la précarité et la violence des jeunes des banlieues qui ne peuvent rester résignés comme l’ont été leurs parents. Si nous voulons que ces jeunes nés en France ne se comportent pas en "mutants" mal dans leur peau, gardons-nous bien de hurler avec les tenants de l’idéologie sécuritaire.

Bien entendu, les effectifs de la police et de la gendarmerie n’ont cessé d’être renforcés, et les moyens techniques mis à la disposition des forces de l’ordre sont tout à fait étonnants. Certes, ce n’est pas l’Etat policier - pas encore - mais nous vivons dans une société policière. Les mentalités sont peu à peu corrodées par les tentations délatrices - au nom d’une certaine morale, évidemment. C’est une spirale sans fin qui peut nous entraîner très loin, jusqu’à faire de chaque citoyen le vigilant cerbère de son voisin. Je me souviens, dans les mois ayant suivi Mai 68, qu’un excellent confrère journaliste m’expliquait, le regard chargé de haine, qu’il veillait tard le soir à sa fenêtre, une carabine long rifle à la main, pour tirer sur l’éventuel "petit salaud" qui oserait toucher à sa voiture.

Les jeunes des banlieues ont bon dos. Ils sont parfois violents c’est vrai. Ils développent une économie parallèle, ce n’est pas niable. Ils vivent surtout dans des ghettos, sous haute surveillance de la police, et cela nul ne peut le nier. Cette situation créée de toutes pièces par les gaullistes bâtisseurs de barres de béton, durant l’ère Pompidou, ne trouvera pas sa solution dans la diabolisation des jeunes de banlieue, quelles que soient les déprédations dont ils sont les auteurs et qui ne peuvent que nous chagriner. Le bon citoyen s’offusque de voir les voitures brûler, il devrait plutôt s’étonner qu’il n’en brûle pas davantage ! Rappelez-vous, camarades, les voitures qui brûlaient rue Gay-Lussac. Parfois allumées par la police.

Cela fait plus de 20 ans qu’il est question de combattre les causes de cette désespérance qui contribue à pourrir la vie des cités. Durant ces deux décennies écoulées, de bonnes âmes n’ont cessé de nous expliquer que la priorité - dans l’urgence - était de combattre les effets. C’est un dialogue de sourds dont nous ne sortirons jamais. Et moins encore si des militants révolutionnaires succombent à leur tour à cette idéologie sécuritaire qui constitue le pire poison d’une société démocratique digne de ce nom.
Il faut constamment revenir à la réalité, et l’actualité nous "mord la nuque", selon une formule bien connue. Très récemment, alors que venaient de se tenir les Assises de la police proximité, un gardien de l’ordre public agressait violemment, et insultait bassement une jeune femme marocaine - enceinte de surcroît à Ris-Orangis.

Ce qui doit nous intéresser, au premier chef, bien plus que les dérapages des jeunes des banlieues, c’est le comportement d’une police raciste, brutale et sexiste. Plutôt que de montrer constamment du doigt, ces jeunes marginalisées il serait certainement plus judicieux de s’intéresser à cette police trop nombreuse, qui voudrait mettre le pays en coupe réglée.

Faut-il s’interroger longuement pour comprendre que l’idéologie sécuritaire - avec pour cible les jeunes nés de l’immigration maghrébine - n’est qu’une vitrine masquant le modèle achevé de la société répressive que nous prépare la droite - éventuellement secondée par l’extrême droite ? Face à ce scénario toujours possible lorsque la gauche au pouvoir prépare le terrain pour le retour de la droite au pouvoir, notre vigilance ne doit pas être dévoyée.

Demain, ce ne seraient plus seulement les jeunes des banlieues, les sans-papiers, et les sans-logis qui se trouveraient dans le collimateur des défenseurs de la morale. Déjà, nous avons vu comment un pouvoir de gauche traitait les chômeurs qui occupaient les Assedic et les agences de l’Anpe. Avec la droite, l’ordre public serait menacé par les grévistes, les manifestants, les militants politiques et syndicaux. Transformés globalement en travailleur précaires grâce aux bons soins du Medef, les citoyens de ce pays n’auraient plus qu’à raser les murs, regrettant peut-être le temps où des jeunes un peu énervés leur lançaient, pour se défouler : "Nique ta mère !"

http://www.lcr-rouge.org/archives/041300/champli.html

Messages

  • cher maurice
    a part votre petit couplet sur les stals qui approuvaient les hommes en noir ( cela semble etre l’incontournable de toute intervention quelque soit l’epoque concernée ) je suis assez globalement d’accord avec votre article , quoique :
    l’habitant d’un quartier qui voit sa bagnole flamber , alors qu’il s’en sert pour aller bosser , ne partage pas forcement votre analyse de la situation !
    les parents qui voient toute sortes de produits en vente libre au bas de leur barre d’immeuble attendent sans doute que la societé la police et la justice mettent fin a ces trafics !
    la femme et la fille d’un pauvre homme qui ont vu leur mari et leur pere mourir sous les coups de trois loubards, alors qu’il voulait photographier un lampadaire ne comprennent peut etre pas l’etrange indulgence qui fait que les assassins se retrouvent victime !
    ceci etant ,
    tant que les jeunes des quartiers qui ont mené des etudes parfois longues , se retrouveront au chomage parcequ’ils s’appellent said ou mohamed , il ne faudra pas s’etonner si le modele porteur des cités est plutot celui du dealer roulant en BMW !
    tant que l’integration dans les entreprises se traduira par des profils de carriere inegaux , il ne faudra pas s’etonner si ceux qui ont eu la chance de trouver un boulot ne se font pas les chantres de l’integration par le travail .
    le probleme dans tout cela c’est que se sont des exclus du systeme qui souffrent en premier lieu des exactions d’ autres exclus du systeme , les bons bourgeois aux salaires confortables vivant dans des banlieues sécurisées par la segregation sociale , ne souffre en rien de ces problemes ils sont pourtant les premiers à revendiquer plus de securité et plus de police !
    leur egoisme ne rend pas pour autant anormal le legitime besoin de securité des braves gens des cités, quelque soit leur origine sociale ou ethnique .
    claude de toulouse .

    • e ne comprend pas le sens profond de ta réponse :
      "l ?habitant d ?un quartier qui voit sa bagnole flamber , alors qu ?il s ?en sert pour aller bosser , ne partage pas forcement votre analyse de la situation !
      les parents qui voient toute sortes de produits en vente libre au bas de leur barre d ?immeuble attendent sans doute que la societé la police et la justice mettent fin a ces trafics !" peut-être veux tu nous dire par là qu’il faudrait plus de flic et surtout une vrais répression ? Peut-être pense tu que la libertés d’entreprendre ne s’accorde qu’aux escrocs en-cravattés, et que les autres n’ont qu’à vivre ou survivre des aides sociales misérables. Qu’il crèvent certes mais honnêtement merde !
      "l ?etrange indulgence qui fait que les assassins se retrouvent victime !" laisse entendre le chant de l’impunité et du soutien de la société, je rêve, tu connais le taux de remplissage des prisons pour oser une telle affirmation ?
      T’en viens à parler des bons gars et filles de quartiers qui ont fait des études, la valeur par le travail, le mérite, la sueur, tout ça pour rien de par leur origine, on doit pas vivre ni travailler dans la même société, où t’a vu que le patronat récompensait ce genre de valeur, il me semble que s’est plutôt la soumission qui à le vent en poupe aujourd’hui, non ? En plus ce créneaux exclue les autres celles et ceux qui n’ont pas de diplôme, n’ont qu’à rejoindre les premiers...
      Et comme cerise sur le gâteau la litanie "le legitime besoin de securité des braves gens des cités"allé t’es bon pour voter julien dray.
      L’insécurité c’est du pré-maché médiaticopoliticard, c’est le cache misère des programmes politiques qui n’aborde surtout pas, surtout pas l’insécurité de l’emploie, de l’économie, environnementale, etc...
      Flippe, tremble, et cris au loup, mais fait gaffe les keufs on la fâcheuse tendance à mélanger victime et bourreau en ce moment...
      Raymond la science

    • Cher CLAUDE

      Habitant de cité en banlieue parisienne (une des plus grosses barres HLM de la région) je veux juste témoigner que le quotidien des quartiers est loin des réalités véhiculés par les médias, sans vouloir nier les difficultés sociales présentes sous diverses formes, nos cités ne sont pas des no man’s land mais des endroits où le mot solidarité veut dire encore quelque chose, où une conscience de classe demeure malgré tout (dans notre ville plus de 60 % de logement social et plus de 80 % de "non" au référendum sur la constitution). Pour moi l’insécurité c’est plutôt les patrouilles et contrôles incessants de la BAC qui le plus souvent mettent de la tension dans le quartier

    • cher anonyme ,
      loin de moi l’idée que les quartiers c’est l’enfer ,j’ai longtemps habité à empalot , ancien quartier ouvrier de toulouse , devenu du fait de la politique ethnique de l’OPHLM un quartier ( à problemes)
      avec une concentration de familles d’origine etrangere , des problemes de langue , de chomage deux ou trois fois superieur à la moyenne , des problemes de drogues et des problemes de peur pour je le repete les braves gens qui veulent vivre en paix dans leur quartier .n’en deplaise à l’autre intervenant , le gars qui s’est acheté une voiture d’occase pour allez bosser et qui la voit flamber n’en a rien à battre de vos beaux discours angeliques , il souhaite que les incendiaires soient foutus en tole point barre .
      et je suis bien d’accord avec lui , le genre de discours gauche caviar avec trois brins de sociologie appliquée n’a qu’un resultat pousser les braves gens dans les bras de lepen puisque tout le monde trouve normal que ces povres jeunes se defoulent un peu , la solidarité existe dans les quartiers , a Empalot , une MJC , des tas d’associations dans tous les domaines , la MJC devalisée trois fois en un an , ce coup ci tous les ordinateurs volés , les bureaux saccages et 600 jeunes à la rue parce que la maison des jeunes a du fermer ses portes !
      au fait l’autre intervenant met sur le net ton adresse et le numero de ta plaque et on verra ta tete quand ta belle bagnole aura flambée .
      je ne rends pas tous les habitants des quartiers difficiles responsables de ce qui leur arrive , je dis que les braves gens ont droit à la protection de l’etat , et si julien dray dit la meme chose que moi cela ne me gene pas .
      claude de toulouse ;

    • Le discours de Claude est symptomatique de cette gauche qui par soit-disant "réalisme" dit a peu prés la même chose que la droite. Il ne faut pas s’étonner de son faible ancrage dans les milieux populaires.

    • oh que non , je ne fais pas partie de la gauche realiste au sens hollandaise ou langienne ou royale , si c’est ce que tu veux dire , je fais partie de la gauche qui reve qui croit encore en des lendemains qui chanteront un jour , de cette gauche qui a revé le non du 29 mai et qui l’a transformé en réalité , de cette gauche qui s’est battue pour la SNCM et qui se bat pour edf !
      de cette gauche qui à vu son electorat populaire passer dans le camps de le pen , parceque cet electorat s’est cru trahi par ses defenseurs habituels .
      et que j’en ai marre de tout cela !
      est ce que je parle une langue incomprehensible pour vos oreilles ?
      oui des quartiers entiers ont été transformés en ghettos !
      oui la jeunesse de ces quartiers n’a pas d’avenir !
      oui il faut detruire les ghettos et reinventer l’urbanisme social !
      oui il faut stopper net la discrimination a l’emploi comme toutes les autres discriminations !
      mais aussi :
      oui il faut proteger les pompiers victimes de caillassage
      oui il faut mettre hors d’etat de nuire les dealers de tout genre !
      oui il faut arreter et deferer au parquet les incendiaires de voitures !
      dans ordre republicain il y a ordre mais il y a aussi republique .
      et je n’arrive pas à saisir en quoi l’indulgence pronée par certains serait la marque de convictions de gauche .
      je persiste et je signe !
      claude de toulouse .

    • Moi je pense que :
      Les noirs, arabes, gaulois, juifs, riches, policiers, pauvres, humain-animaux, tout cela c’est des mots.

      Arrêtons de distinguer ! Tous sont vivants, ont peur de la mort, souffre et on du plaisir et sont conscient de leur entourage.

      Mais il existe une certaines dégénérescence de la morale en ce moment, des exemples :

      Chez les très riches : cette mondialisation et cette technoscience en expansion , sans scrupule et criminelle (pour la Vie tout cours dont nous faisons parti être humain)

      Les salariés qui ont de moins en moins de conscience professionnelle et d’honnêteté
      Des africains qui haïssent les français et la France et ses institutions qui détruisent parfois les équipements.

      Certain(es) voyou(s) des ghettos (ou non) qui sont des crapules (assassinats d’humains, vols de pauvres, viols, maltraitance d’animaux brûlés vifs bref des horreurs)

      Les scientifiques menteurs et sans scrupules,

      politiques = mafieux

      etc etc

      LE PROBLEME EST UN PROBLEME ETHIQUE

      RESPECTONS LES AUTRES

    • AVEC CLAUDE DE TOULOUSE...

      Je soutiens les propos de Claude de Toulouse...
      Je pense que le système est étonnamment inventif pour diviser ses victimes et les faire s’affronter, tout en se servant du tableau pour alimenter et aggraver la situation par une politique sécuritaire.
      Je pense que SARKOZY recycle à merveille le fond idéologique de LE PEN.
      Je pense que chaque fois qu’il parle "Karcher", "racaille", etc. il provoque à la haine ; il est devenu un facteur de troubles à l’ordre public et il faudrait avoir le courage de le traîner devant la Justice.
      Le fascisme en complet veston, c’est lui.
      Et à côté de lui, une ribambelle de politiciens (de droite et de la gauche libérale) sont prêts à museler la démocratie au nom de la lutte contre les "galopins" et autres qualificatifs semblables qu’on montre du doigt...

      Prenons garde !

      Un fascisme rampant nous guette et une course de vitesse est engagée : soit on arrive à définir et organiser les voies du changement, soit on subit un recul de civilisation encore plus brutal et dans un cadre mondialisé !

      NOSE

    • LE DISCOURS DE 83* 69* ...

      Ce discours là est aussi très symptomatique... malheureusement !
      Et c’est ce qui nous coûte de subir encore le régime actuel, parce que c’est un discours policier et de suspiscion stalino-sarkozien... qui n’a pour seul effet que de laisser les gens choisir entre "les petits pas" et le refus du "chaos"...
      D’ailleurs, comment comprendre que ces brillants "sympto-mâteurs"
      avancent toujours masqués sous l’anonymat ?

      Alors Claude, tu as raison et je te soutiens totalement : ces conseilleurs ne sont jamais les payeurs et ils sont toujours très généreux avec la misère des autres.

      J-J NOSE

    • Montpellier, quartier plan cabane, là ou il fait bon croiser des gens de toutes les couleurs, sauf les bleus. Ouature clio blanche, 1764 ML 34, fracturé plusieurs fois elle porte la marque du quartier. Préviens moi quand tu passe qu’on se marre ensemble.
      Un petit salut à Maurice...
      Raymond la science (c’est mon pseudo, info pour l’autre...)

    • "Je pense que SARKOZY recycle à merveille le fond idéologique de LE PEN." t’as lu "le racisme républicain" ? de Pierre Tévanian à l’esprit frappeur.
      Raymond la science

    • raymond , excuse moi pour l’autre , j’avais plus ton pseudo en tete en ecrivant ,je comprends pas trop ce que tu reproches à ma position ,les voyous sont des voyous quelque soit leur origine sociale , ethnique , la couleur de leurs yeux , laisser à la droite la plus dure l’exclusivité de cette evidence , ne peut qu’approfondir l’incomprehension entre les habitants des cités et ceux qui à gauche je t’assure tres à gauche , veulent faire bouger les choses pour que les richesses des quartiers ne soient pas cachées par quelques dizaines de voyous , loubards ou dealers .
      vraiement je suis désolé de ne pas te comprendre et de ne pas etre compris !
      claude de toulouse .

    • Je voudrais nuancer des propos entendus plus haut à travers un petit exemple. Je supporte de moins en moins la manière dont on parle de la jeunesse

      Avril 2002, vous vous souvenez Chirac et Le Pen au 1er tour ? Que nous vendait-on dans les médias juste pendant la campagne électorale ? LA VIOLENCE DES JEUNES. Il y a eu une enquête qui a révélé que le nombre d’articles, d’emissions sur ce thème avait explosé. TF1 montrant l’exemple. A votre avis à qui profite le crime ? Qui a été élu en 2002 et avec combien de voix, et pour faire quelle politique finalement ? Un discuors ultra sécuritaire avait envahit massivement la plupart des médias et la gauche républicaine a emboité le pas sur ce "laxisme" envers les jeunes qu’il faudrait arrêter.

      Tout ça me fait penser au film de Jean-François Richet "MA 6-T va crack-er". Une fiction, quelques jours dans une cité de banlieue, il y a dans un bout de la cité une soirée RAP où tout le monde est content. Dans un autre coin de la cité des gangs ultra armés en pleine fusillade ne sont pas inquiétés par les flics (on ne peut pas arrêter tous les trafics du marché noir, ça rendrait les cités plus explosives). Bien plus loin se trouvent des petits jeunes pas bien méchants, à qui on a refusé l’accès à la soirée RAP et qui plutôt désoeuvrés en effet s’attaquent à une bagnole garée (d’un gars sans doute pas mieux loti) mais l’un des jeunes se prend tout de même une balle de flic dans la tête, et enfin, la soirée rap dégénère et se transforme en émeutes dans la cité.

      On a vu ce film à Saint-Denis il y a quelques mois, suivi d’un débat. Une dame était outrée par le film, le jugeant violent, sans discours de fond, provocateur, voire dangereux car donnant le mauvais exemple. Elle dénonçait notamment "l’utilisation abusive" de l’article 35 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de la constitution de 1793 que Richet met juste avant le générique de fin :
      " Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs."

      Moi j’ai répondu que cela ne me choquait en rien. Jean-François Richet est marxiste léniniste, il dit clairement dans son film que "ce qui fera changer les choses c’est la grève générale, parce que les ouvriers il peuvent bloquer le fric". Il n’a aucune illusion CLAIREMENT sur l’issue d’une émeute de quartier. Ce qui ne l’empêche pas de se positionner du côté des jeunes REVOLTES. Il sait que la justice est une justice de classe que les gros voyous ne sont pour la plupart jamais inquiétés, certains bénéficient même d’immunité... Que la police n’est pas la même pour les grands et les petits. Que l’accès aux savoirs, au logement, à une vie socialisante épanouissante n’est pas donné pareil que tu naisses d’un côté ou de l’autre du fossé qui se creuse toujours plus entre plus riches et plus pauvres. C’est pourquoi on voit à la fin Richet, alors que l’émeute reflue et qu’il pourrait fuir comme les autres, se jeter dans les flics et se faire tabasser. Il montre la solidarité, le désespoir et la résistance et l’impasse. Mais il est du côté des jeunes.

      Bon quoi après, la violence est le fruit de l’insécurité économique, sociale. Des excuses, mais quelles excuses, quel laxisme ? J’ai été agréssée violemment par trois jeunes gens dans le bus. Personne n’est intervenu. A part le chauffeur au bout d’un moment qui menaçait de ne plus redémarrer si mes assaillants ne s’arrêtainet pas. Savez vous ce que j’ai dit quand j’ai pu reprendre mes esprits ? J’ai enguelé les gens dans le bus, je leur ai dit "Si vous ne réagissez pas qui le fera ? Voulez vous qu’on ait un flic derrière chacun de nous ? " Je vous signale que je suis d’origine algérienne, et que la plupart des gens dans le bus étaient également d’origine étrangère. Je peux vous assurer que là est ma lecture du conflit de classe, que Sarko et conseurs veulent NOUS voir transformer en un confli ethnique, intergénérationnel, voire interquartiers. Alors plus de flics NON ! Des travailleurs sociaux et de bonnes luttes pour faire reculer ces voleurs de patrons ça OUI !

      Je ne veux pas plus de flics ! Ca changera rien à la "démocratie", complètement faux. La liberté ne s’assène pas elle se PREND ! Que croyez vous que les gens pensaient pendant et après l’agression, elle est là notre véritable maladie sociale, l’éclatement des solidarités. Le sentiment d’impossible et qui n’est certainement pas le fruit de notre jeunesse agitée. Le problème ne vient pas de ces soit disantes émeutes qui restent une forme symbolique de résistance, par contre elle révèle, l’isolement des jeunes des quartiers. Ca c’est bien vrai.

      Et je trouve que cet isolement est à l’image de ces quartiers populaires de plus en plus désertés par la gauche combative. Alors vous voyez, moi j’ai voté NON, j’ai beaucoup milité, je crois qu’un monde meilleur est possible si on s’y met ensemble, mais de grace, ne tapez pas sur l’un de nous, car c’est sur nous tous que vous tapez au final.

      Amel

    • Amel je craint que tu ais mis le doigt sur les véritables problèmes : manque de solidarité , désertion de la gauche des quartiers et individualisme croissant sur fond de peur due à la méconnaissance de l’autre !

      Ce qui permet aussi à quelques crétins de passer aux yeux de certains pour des héros alors qu’il ne sont que des voyoux, rappelons ici que la violence est souvent le lit du fascisme !