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Laurence Parisot était traînée devant les prud’hommes le jour de son élection triomphale

Publie le mercredi 6 juillet 2005 par Open-Publishing
3 commentaires

La patronne du MEDEF s’est déjà affranchie du code du travail

de Jean-François Julliard - Le Canard enchaîné

Un méchant procès au prud’hommes devait se tenir le 5 juillet - le matin même de l’élection à la présidence du MEDEF -, et il risquait fort de ternie l’image de la toute nouvelle patronne des patrons.

L’une de ses ex-employées de maison, Corinne L., lui reprochait une « rupture abusive de contrat ». Mais - coup de théâtre -, au début de l’audience, la plaignante s’est très spontanément désistée de sa requête et des 20 000 euros de dommages et intérêts qu’elle réclamait. A la grande surprise de ses défendeurs (dont la CGT), qui n’en avait même pas été informés ! Et ses persifleurs d’interpréter son revirement de dernière minute comme la conséquence d’un chèque reçu en dédommagement. Même si la plainte se trouve annulée de facto, les pièces produites à cette occasion ne se sont pas volatilisées. Entre autres, les fiches de paie reçus par Corinne L. de mars 1998 à novembre 2000. Celles-ci attestent que Laurence Parisot a fait salarier cette employée de maison par une filiale de l’Ifop (qu’elle dirige depuis 1990), dénommée Phone City. Officiellement « assistante » dans cette boite de sondages par téléphone, Corinne L. ne mettait jamais les pieds au bureau.

Elle travaillait au domicile parisien de Laurence Parisot comme « gouvernante », maître d’hôtel et cuisinière. Moralité, sa patronne a fabriquée un faux contrat de travail, de fausse fiche de paie et rédigé une fausse lettre de licenciement. Et utilisé les fonds de l’Ifop à des fins personnelles. Le péché n’est certes pas mortel et les sommes en jeu guère astronomiques. Mais cette pratique a déjà valu à , nombre de chefs d’entreprise de se retrouver en justice pour abus de bien sociaux. Et ce n’était guère convenable vis-à-vis des actionnaires de l’époque (Accor et chargeurs). Enfin, voilà qui augure mal des méthodes et de la philosophie de la nouvelle patronne des patrons. Laquelle n’a pas souhaité répondre aux question du « Canard ». Au cours de sa campagne pour la succession d’Ernest -Antoine Seillière, la chef sondeuse s’est d’ailleurs illustrée par cette déclaration : »la liberté de penser s’arrête où commence le droit du travail. » Visiblement, sa propre liberté n’est pas toujours bridée.

Preneurs de sondes très flexibles

La très libérale Laurence Parisot possède, avec l’Ifop, un intéressant laboratoire. Les neufs dixième de ses salariés ont droit à un statut tout à fait spécial : sous contrat à durée déterminée, ils peuvent se voir révoquer à volonté mais aussi reconduire indéfiniment, comme le permet le statut des « sondeurs de terrain », dérogatoire au Code du travail. Et voilà encore un peu de « liberté » gagnée ! Doyen des instituts de sondages français (il fut fondé en 1938), l’Ifop a sa tradition syndicale, et quelques-uns de ses salariés bénéficient de contrat à durée indéterminée ou sont « chargés d’enquête à garantie annuelle ». Peu après son arrivée à la tête de l’entreprise, en 1990, Laurence Parisot a contourné cette difficulté grâce à deux astuces. Primo, en sous-traitant une partie de enquêtes à la société Catherine Delannoy et Associés, où la contestation sociale n’est pas de tradition. Secundo, en créant une filiale spécialisée dans les sondages par téléphone, Phone City, celle-là même qui employait fictivement sa gouvernante.

Comme on l’imagine, les CDI n’y sont pas légion, et les syndicats figurent aux abonnés absents. En mai 2000, Laurence Parisot déclarait à « La Tribune » : « les femmes ont une vision plus optimiste de l’avenir, elles apportent de la flexibilité dans l’entreprise. » En tout cas, la démonstration en est faite à l’Ifop. A ce sens de la flexibilité, ma nouvelle présidente du MEDEF ajoute un goût indéniable pour la transparence. Certes, le chiffre d’affaires et les résultats de Phone Cityt, qui assure le plus gros de l’activité de l’Ifop, sont introuvables. Au moins dans les banques de données consultées par « Le Canard », qui indiquent : « comptes annuels non publiés ». N’empêche qu’en mai dernier c’est très spontanément que Laurence Parisot a communiqué les résultats de l’Ifop. Une enquête de « L’Express » venait en effet de souligner que cet institut les dissimulait depuis plusieurs années. Malencontreuse erreur aussitôt rectifiée. A deux mois du scrutin du MEDEF, il n’était que temps.

Messages

  • laurence va pouvoir désormais embaucher ses larbins persos grâce au Contrat Nouvelle Entourloupe et la virer sans aucune espèce de procés avant 2 ans ... Aux frais de la princesse...
    Qui entartera Lolo ??
    Marianne

  • Genre Medef

    Au sortir de sa triomphale élection à la succession d’un baron et dans la proximité d’un micro baladeur, elle confiait à quelques-uns de ses pairs congratulateurs que des gens, dehors, dans le monde ordinaire, l’avaient identifiée comme « la nana du Medef ». Et de glousser (1) un peu. L’émotion, sans doute... En quatre mots, Laurence Parisot venait de livrer la clé communicationnelle du sens à donner à sa promotion, mardi, en patronne des patrons. Et certes, voilà une nouvelle censée bien augurer de l’avènement désormais imminent ­ sonnez gazettes, résonnez tambours ! ­ de l’égalité professionnelle. Quand elle-même ose à peine l’évoquer, tant la chose doit lui sembler risible, on aurait plus spontanément tendance à se défier de cette illusion, autant qu’on se défiera de n’importe quel(le) citoyen(ne) que Seillière intronise, que le Figaro qualifie de « fausse chétive », Denis Kessler de « chef d’entreprise, point », et dont un Serge Dassault décrète avec gourmandise qu’« elle a de bonnes idées » (et les jetons de présence qui vont avec chez Havas, Michelin ou Eurodisney). D’où cet amusant paradoxe, où il appert rudement qu’à droite, toute, on ne se préoccupe pas le moins du monde d’entretenir la fiction d’une « nature » féminine qui n’amuse plus guère que la presse people et les petits enfants. Les patrons savent bien, eux, qu’en cette matière il importe peu que le boss soit un homme ou une femme, pourvu qu’il ou elle attrape des profits... Et le risque est grand que la contribution de Laurence Parisot à la cause sinistrée du féminisme s’arrête bientôt à la preuve qu’en matière d’égalité hommes-femmes une présidente du Medef se révèle une tueuse aussi « performante » qu’un président du Medef. Grande victoire ! Dans l’expression « la nana du Medef », le terme qui compte, ce n’est pas nana, mais Medef.

    (1) Non, l’emploi de ce verbe ne ressortit pas à l’expression tordue d’une forme de sexisme lexicologique. Car le dindon glousse autant que la poule, et M. de Chateaubriand atteste que le renard aussi.

    (Source : P.Marcelle in Ration du 7/7)

  • Vue de l’IFOP Un champion de la précarité

    À la 198e place du dernier classement annuel des 500 pre- mières fortunes professionnelles figure le nom de Parisot. En face, un chiffre : 100 millions d’euros, agrémenté d’une flèche montante pour signifier l’évolution en cours. Pour les Parisot, ça baigne. Leur fortune, ils la tirent d’abord, et surtout, du groupe Jacques Parisot, premier fabricant français de meubles, mais aussi de l’IFOP, dirigée par la fille, Laurence, qui, au demeurant, n’hésite pas à exhiber ses signes extérieurs de richesse : elle gare régulièrement sa Maserati, héritée de son père, sur le parking de la boîte.

    Cette femme qui va piloter un mouvement patronal défendant surtout les intérêts des grands groupes présidait jusqu’alors une entreprise jouant dans la cour des PME. À l’IFOP, 130 salariés permanents en France (plus des filiales en Chine, en Argentine et au Canada), elle laisse le souvenir d’une « personnalité marquée », qui « impose ses choix », « délègue peu ». Une patronne « très ferme, mais pas dure », plutôt « attachée à la paix sociale », menant sa barque « de manière assez paternaliste », n’hésitant pas « à lâcher quand elle sent un risque de conflit », selon Marie-Paule Colback, déléguée syndicale CGT à l’IFOP depuis 1990, qui, expérience à l’appui, la juge encore « ouverte au dialogue » avec les syndicats.

    Une ouverture qui a cependant ses limites. À l’IFOP, comme dans de nombreux instituts d’opinion, la précarité règne en maître. Pour réaliser ses sondages, l’entreprise emploie 10 enquêteurs en CDI et... 210 payés à la vacation, laquelle peut durer aussi bien trois jours que trois semaines, au maximum. Pour rompre avec cette insécurité permanente infligée aux vacataires, la CGT du secteur, rapporte Marie-Paule Colback, propose de longue date l’instauration d’un CDI à temps partiel, passé avec plusieurs employeurs, et garantissant un salaire mensuel. Sans succès auprès de Mme Parisot.

    Yves Housson

    (Source : L’Huma 6/7)