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Le compte-à-rebours avant la victoire

Publie le dimanche 21 mars 2004 par Open-Publishing
2 commentaires



De Oryx

Mais...
Mais il semblerait que...

Mais... Mais oui ! ça y est ! Nous y sommes, c’est l’ grand jour !! Dans sept heures,
six heures, cinq heures, plus qu’une question d’instant(s)... Le peuple de France
va donc voter, il va faire vivre la Démocratie, il va choisir son camp, dire
s’il est de gauche, extrême ou pas, de droite,
extrême ou pas, il s’isoler dans l’isoloir et s’arranger pour faire tenir dans
une petite enveloppe recyclable son engament (recyclable aussi), puis il va le
déposer dans l’urne, son engagement, en attendant le résultat.
Mais du résultat ne dépend pas toujours le résultat.
Une majorité (d’américains) peut choisir un homme pour président et en
hériter d’un autre...

Quelques heures encore, et la Démocratie fonctionnera. Et, puisque c’est de la
Démocratie dont il s’agit, certains auront sans doute attendu toute la nuit devant
les lieux où cela se tient, comment appeler vous ça déjà ?.. Attendre pour n’en
pas rater une miette, être sûr d’en avoir un peu, faire partie du combat, puisqu’on
a choisi son camp !...

Le compte a rebours est enclenché, plus que quelques heures !...
Six ? cinq ? quatre ?
Vous allez pouvoir voter. La Démocratie, bien sur.

Et si je choisis le candidat raciste et qui porte dans son idéologie, ou
plutôt dans celles de ceux qui l’entourent, autant de principes contraires à cette
très chère Démocratie, comme la remise en cause du droit de vote par exemple...
Suis-je encore en train d’accomplir un acte démocratique si je vote pour un tel
candidat, pour de telles idées ? La Démocratie est-elle
soluble dans la Liberté ? Ou l’inverse ?

Dans ma rue, la fête ne laisse que peu de place à la politique, art noble pourtant.
Et si toutefois les illuminéEs qui composent le microcosme du "coin" venaient à s’y
intéresser, ils ne comprendraient pas cette manière
ulcérée de concevoir l’engagement, de croire que ce geste, ce papier,
recyclé certes, mais plié en deux, en quatre, comme autant de concessions au
réalisme mou qui nous enferre... Qui pourrions-nous menacer ainsi ? Est-ce le
grand capital qui se trouverait menacé ? Est-ce la gangrène fasciste qui pourtant
prospecte sur les plateaux télés, ceux du service public plus
spécialement...

Voter pour changer les choses ?

Et puis qu’entendons-nous par changer les choses ?

Notre rue, ça va. Hasard de la migration ? nous aspirons tous à la fête, et le
printemps venu nous excite. Oui il nous excite. Interprétez ce mot comme vous
pouvez... Nous fêtons cette aspiration commune, la fête, ainsi nous ne tournerons
pas en rond, ou nous nous en contenterons modestement.
Mais la rue d’à coté, qui aspire à la méditation, et qui hurle après nos musiques
saccadées, électroniques, partielles et suffisantes... Et que dire de l’avenue
d’au-bout-là-bas où la voiture tient lieu de
conduite...

La différence, je m’y perd, je m’en régale aussi.

Je comprend les gens qui votent, puisqu’ils ont pris parti, ils ont choisi un
camp, ils se sont positionnés. Le hic, c’est qu’il arrive qu’on soit, par choix
ou pas, un peu ici, un peu là bas. Tenez moi, je suis de la rue de la
fête, c’est vrai, mais ma princesse a ses quartiers dans ceux de la
méditation, et mon pote fait ronronner ses chevaux fiscaux au-bout-là-bas. Un
peu de partout, comme le pote gitan de Mouloudji ou celui de Collard, vous savez,
ce jeune réalisateur plutôt talentueux, happé par la modernité cynique, il faisait
un peu de musique aussi... Génération Collard.
Génération, mon cul ! Pas plus de Hamon que de Rotman, pas plus de Collard que
de Tulard ! Je les comprend les gens qui votent, mais moi, je ne vote plus. Parce
que le vote d’aujourd’hui est aussi factice qu’un titre de
Libération ! parce que demain, ce vote ne sera plus q’un titre de Libération !
et qu’après-demain le vote et Libération iront dîner chez monsieur et madame
le Pouvoir, et que tout rentrera dans l’ordre. Le conseil municipal conseillera,
le conseil régional conseillera, le conseil des ministres conseillera, et surtout,
last but not least le conseil immobilier conseillera. Tout rentrera dans l’ordre,
l’Ordre, qui n’est pas vraiment Nouveau mais qui s’impose lentement, y compris
chez ceux qui votent, en
rang ! en urne ! et émarge camarade !

Un peu de partout, mais de pas trop loin sinon, RIEN, le vote je n’y aurais pas
droit ! Quelle poilade d’entendre un socialiste ou un communiste, ministre de
surcroit, dire du droit de vote aux immigréEs "Oui, il aurait fallu que la gauche
le fasse...", tu crois camarade ? Tu rigoles non ? Le droit, simplement, pour tout
individu, quelqu’il soit, quelque soit sa
couleur, quelque soit sa rentabilité. Rentabilité, voila bien l’enjeu !

Tout à l’heure, je vais répéter à qui voudra, dans le désert sûrement, que je
n’ai pas voté, et pourquoi je ne voterai plus. Je demanderai à celui ou celle
qui me le demandera si lui ou elle a participé au scrutin. Et
j’écouterai sa réponse avec autant d’intérêt que je porte à la mienne. Nous serons
divergents, et cette multitude de l’esprit me suffira.

Ce soir, vous aurez gagné. L’abstention crèvera les records, et le débat
consistera à comprendre pourquoi les gens n’ont pas voté. Il ne s’agira pas de
raisonner philosophiquement sur comment repenser la Démocratie autrement que
par un système de représentativité tronquée que sont les délégations de pouvoir
non-révocables et autoritaires. Il sera question de la Démocratie en danger,
non pas par la présence d’un parti raciste, anti-démocratique dans
l’échiquier politique, mais sur l’abstention galopante signe de désintérêt, et
j’t’emmanche !... et on entendra sans doute les ritournelles habituelles concernant
le service minimum, droit régalien y compris concernant le vote, qu’on pourrait
avoir alors envie de rendre obligatoire... La belle affaire !
Je pense déjà à la patrouille de cognes qui viendront sonner chez moi pour
m’emmener à l’isoloir ! Seront bien reçus tiens ! ;o)

Sur ce, considérant le temps pluvieux et mes convictions fermes, je n’irai pas
voter, et je vous invite à faire de même.

Bonne nuit, bonne journée,
Bonne semaine, bon bah voila...

"ORIX" MEMBRE DE L’EQUIPE DU PARISIEN
LIBERTAIRE, SUR radio Libertaire.

21.03.2004
Collectif Bellaciao

Messages

  • Quel bel élan dans cet article , qui pour un peu embraserait pour, pour ...ne rien faire ?
    Je peux vous comprendre mais je suis allée voter :
     Parce que ce que vous nommez réalisme mou, je l’apelle vie quotidienne.
     Parce que "Etat de droit" n’est pas une simple formule que l’on pourrait croire vide , mais une réalité bien concrète : Notre société est fondée sur le droit, c’est à dire les lois et leur interprétation jurisprudentielle : la loi Perben II, par exemple, n’est pas une attaque du grand capital , c’est un choix philosophique et politique où il s’agit de priviliéger la sécurité sur les libertés fondamentales.C’est un choix qui est celui d’une majorité parlementaire , et il bien temps, ensuite, d’aller saisir le conseil constitutionnel pour tenter de limiter les dégâts ou de râler en rang sérrés dans les rues ( quoique, que je sache, aucune grande manifestation n’a véritablement eu lieu tant la "sécurité" est un thème sensible).
    Bien sûr,Il ne s’agit ici "que" d’élections régionales , mais l’économie ne domine pas tout, la politique repose également sur des choix de vie (que souhaite-t-on priviliéger ,) et dire que ceux de la droite et de la gauche se valent ,c’est laisser se préparer les conditions de survenance d’autres lois qu’il sera bien difficile de combattre !!!
    Bon , voilà j’ai exercé "démocratiquement" mon droit d’expression râleuse et en tout cas je suis ravie de l’existence de votre site .
    Cordialement
    val.

  • je suis absolument pas d’accord. Mais merci quand même.
    Arlette Olivier