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Le mensonge comme arme de destruction massive

Publie le lundi 26 janvier 2004 par Open-Publishing

Edito international du 26/01/2004, RFI

Le mensonge comme arme de destruction massive

Presque un an après la guerre contre l’Irak, déclenchée sans l’aval
des Nations unies, le vice-président américain Dick Cheney s’est
livré, samedi au Forum de Davos, à un vibrant plaidoyer du
multilatéralisme.

« Une coopération plus efficace entre nos gouvernements et les
institutions internationales revêt aujourd’hui plus d’importance que
par le passé » a-t-il déclaré.

Hier, méprisés par les ténors de l’administration Bush, l’ONU et les
Européens sont aujourd’hui très courtisés par les mêmes, et ce pour
une simple raison : le coût de l’intervention pour les contribuables
américains, avec des pertes humaines qui continuent de s’accumuler.
A Davos, Dick Cheney a aussi demandé aux pays qui ont des créances
sur l’Irak « de se montrer généreux » en allégeant leurs dettes.

En 1991, la première guerre contre l’Irak a été payée, rubis sur
ongle, principalement par l’Arabie Saoudite, l’Allemagne et le Japon.
Mais les factures financières et humaines d’aujourd’hui sont
autrement plus lourdes, par conséquent le président Bush, qui bat la
campagne électorale, doit impérativement trouver une porte de sortie
honorable.

Et cette sortie du guêpier irakien s’impose d’autant plus pour le
candidat George Bush que la démission de David Kay - chef des
inspecteurs américains en désarmement - relance la polémique sur
l’existence des prétendues armes de destruction massive irakiennes
qui ont motivé la guerre américaine.

« Je ne pense pas qu’elles existaient » a déclaré vendredi David Kay
expliquant qu’il n’a pas été possible de trouver la moindre preuve
matérielle d’armes de destruction massive en Irak.
Pourtant - mardi dernier dans son discours sur l’état de l’Union -
George Bush affirmait le contraire, et je cite : « Le rapport Kay a
identifié des douzaines d’activités liées à des programmes de
destruction massive ».

Ce mensonge d’Etat qui perdure et s’est imposé comme mode de
gouvernement constitue une véritable imposture. C’est le candidat
favori à l’investiture démocrate John Kerry qui affirme ainsi que
l’exécutif américain a menti aux citoyens, non seulement sur les
armes introuvables, mais aussi sur les liens prétendus entre Saddam
Hussein et Oussama Ben Laden, liens qui restent, eux-aussi,
indémontrables.

Aussitôt accusé de favoriser le camp démocrate David Kay s’est
rattrapé, hier, en déclarant au quotidien londonien de droite le
Sunday Telegraph qu’une partie des armes irakiennes avait été
transféré avant la guerre... en Syrie.

Accusations mensongères et sans fondement rétorque Damas qui fait
l’objet de pressions croissantes de la part de Washington cherchant,
par tous les moyens, à imposer son nouveau « grand Proche-Orient », un
Proche-Orient revu et corrigé par l’administration Bush et la droite
israélienne.

Pour les néo-conservateurs américains, si les armes de destruction
massive irakiennes ne sont pas en Irak, elles se trouvent sûrement en
Syrie, en Iran ou peut-être en Europe, voire même à Paris...
A l’évidence, le mensonge d’Etat est - lui-aussi - une arme de
destruction massive.