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Le soutien des USA aux thèses israéliennes est reçu comme une gifle par l’Autorité palestinienne

Publie le jeudi 15 avril 2004 par Open-Publishing

L’inquiétude perceptible du côté des responsables palestiniens depuis plusieurs semaines s’est
brusquement transformée en colère, mercredi 14 avril, quelques instants après le discours du
président George Bush. Les propos du président américain sur les colonies israéliennes de Cisjordanie et
sur le sort des réfugiés de 1948 ont fait sur eux l’effet d’une gifle.

"Nous ne pouvons accepter cela, car ces questions doivent être décidées lors de négociations entre
Israéliens et Palestiniens. Ce n’est pas au président des Etats-Unis de décider ce qui est
réaliste et ce qui ne l’est pas", a vitupéré le premier ministre palestinien Ahmed Qoreï, furieux, au
cours d’une conférence de presse.

M. Qoreï s’est également indigné, au cours d’un entretien réalisé ultérieurement à la télévision
du Qatar Al-Jazira, que M. Bush soit "le premier président américain qui donne une légitimité à la
colonisation sur la terre palestinienne". "Nous n’acceptons pas que les Etats-Unis traitent avec
la partie forte en faisant fi des droits de la partie faible", a ajouté M. Qoreï.

"DÉCLARATION DE GUERRE"

Les factions radicales palestiniennes ont réagi, de leur côté, en estimant que le discours de M. 
Bush validait leurs thèses. A Damas où il réside, Khaled Mechaal, le chef du bureau politique du
Mouvement de la résistance islamique (Hamas), a déclaré que la déclaration du président américain
apportait la preuve que "la résistance armée est la seule voie" pour les Palestiniens. M. Mechaal a
ajouté que le discours de M. Bush marquait la fin "des illusions selon lesquelles il pourrait y
avoir un règlement politique -entre Israël et les Palestiniens- parrainé par les Etats-Unis".

A Gaza, des représentants du Djihad islamique, Khaled Al-Batch et Mohammed Al-Hindi, ont jugé
qu’il constituait une "déclaration de guerre" contre le peuple palestinien.
Les derniers contacts entre l’Autorité palestinienne et des membres de l’administration américaine
remontaient au début du mois d’avril, lorsqu’une délégation venue négocier avec M. Sharon les
détails de son plan de retrait de Gaza avait rencontré brièvement à Jéricho le premier ministre
palestinien et les négociateurs habituels.

M. Qoreï avait demandé à cette occasion des "garanties" sur une nécessaire coordination pour gérer
l’évacuation de Gaza et mis en garde les émissaires américains contre les exigences de M. Sharon
en échange de ce retrait. Selon certaines sources, la rencontre n’avait cependant pas fait naître
un quelconque espoir chez les Palestiniens, tenus en marge de ces négociations.

Dans son
intervention de mercredi, le président américain est allé plus loin que ce que redoutait l’Autorité
palestinienne.
"Indépendamment de la réalité mise en avant par les Américains mercredi, la ligne de démarcation
de 1967 et le retour des réfugiés étaient pour les Palestiniens des éléments de la négociation,
des cartes dont ils connaissaient pertinemment les limites mais des cartes parmi les rares qu’ils
comptaient dans leur jeu et qui étaient comparables à leurs yeux aux revendications israéliennes sur
des secteurs de la Cisjordanie.

Or, ils ont le sentiment qu’on leur retire ces cartes d’autorité,
avant même que la négociation ne commence. Dans ce cas, quel sens pourrait-elle avoir ?", a
commenté une source européenne, jeudi 15 avril.

"Je m’inquiète à présent de leur réaction. Ils pourraient tout aussi bien faire le choix de la
rupture et laisser filer les choses", a ajouté cette même source.

"VASTE PRISON"

Dans un communiqué diffusé, mercredi, avant la rencontre entre M. Bush et M. Sharon, la direction
palestinienne avait évoqué "les dangers"d’un accord entre Israël et les Etats-Unis à propos de
Gaza, transformée en une "vaste prison", qui "détruirait toute possibilité de paix, de stabilité et
de sécurité dans la région et y lancerait un cycle de violence".

Même si le premier ministre israélien a cru pouvoir affirmer que son plan augmentait les chances
d’une reprise des négociations, pour l’actuelle direction palestinienne, l’affront subi mercredi
leur porte un coup particulièrement sévère, et sans doute pour très longtemps.

LE MONDE