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Les agriculteurs sont devenus des ouvriers payés à la pièce
Publie le samedi 27 février 2016 par Open-Publishing14 commentaires

Marc Dufumier est agronome, professeur émérite à AgroParisTech. On pensait interviewer un scientifique, on a trouvé un insurgé. Auteur d’ouvrages et initiateur de programmes de développement agricole (1), il milite pour que chacun bénéficie d’une agriculture de qualité, débarrassée de la production industrielle. Comment y parvenir ? En changeant radicalement de voie.
HD. Que va-t-on manger demain ?
Marc Dufumier. Une alimentation bas de gamme avec des antibiotiques dans la viande, des pesticides dans les fruits et légumes. Prenons, parmi les pesticides, le cas des perturbateurs endocriniens : on prédit, pour la génération exposée à ces derniers in utero et jusqu’à la post-puberté, même à faibles doses, une espérance de vie en bonne santé de dix ans inférieure à celle de la génération née en 1950.
L’alimentation issue d’une agriculture industrielle qui essaie de produire, à bas coût et à très grande échelle, des produits standards finit par nous coûter très cher : nous payons des impôts pour retirer les algues vertes des côtes, l’atrazine (un herbicide) de l’eau potable. Nous payons aussi des cotisations sociales pour les maladies que cette alimentation cause.
HD. Le thème du salon, cette année, est « Agriculture et alimentation citoyennes »…
M. D. Cette agriculture-là n’a rien de citoyenne. Elle répond aux besoins de monopoles et oligopoles de multinationales et de grandes et moyennes surfaces. Nos agriculteurs sont devenus des ouvriers payés à la pièce. Et si la pièce présente le moindre défaut, l’agro-industrie en diminue le prix. La pression à la baisse des prix est incessante. Sans compter que nous ruinons les pays du Sud en exportant à vil prix nos produits standards. Nos poulets ruinent les basses-cours des pays du Sud ; notre poudre de lait, les élevages laitiers du Mali et du Niger.
HD. Comment faire alors ?
M. D. L’avenir, c’est la France des terroirs. Une agriculture plus artisanale, qui nécessite et crée du travail. Elle doit être correctement rémunérée. Il y a urgence à la rendre accessible. Pas une agriculture biologique pour les bobos et les perturbateurs endocriniens pour les classes populaires !
Via la politique agricole commune (PAC), 9 milliards d’euros sont versés chaque année à 300 000 exploitations en France. Ces subventions sont accordées à l’unité de surface : plus on a d’hectares, plus on a de subventions. Cet argent doit revenir en totalité à nos agriculteurs. Mais en faveur d’un bon produit et d’un bon service.
Ce produit transiterait par la restauration collective, hors restaurants. En commençant par les écoles, collèges et lycées : l’alimentation doit y être bio. C’est à cet âge que les perturbateurs endocriniens sont à l’origine de maladies qui vont apparaître 40 ans plus tard, ces maladies du vieillissement prématuré comme Parkinson, Alzheimer, certains cancers hormonodépendants. Les subventions de la PAC paieraient le surcoût, pas les parents. Pour les agriculteurs, il y aurait un prix rémunérateur par voie contractuelle. 1,6 milliard d’euros suffiraient pour les établissements scolaires et cantines d’entreprise, plus fréquentées par les ouvriers que par les cadres.
Il faut encourager les démarches de progrès. En céréales, par exemple, les agriculteurs qui font du zéro labour. Cela séquestre le carbone dans les sols, ressuscite les vers de terre, rend le sol perméable et évite ruissellements et inondations dans les vallées, c’est un service d’intérêt général. Encourager ceux qui produisent des protéines pour nourrir les animaux : luzerne, sainfoin… Ça évite des importations de soja du Brésil ou d’Argentine, mais aussi des importations de gaz naturel russe ou norvégien pour fabriquer des engrais azotés… Mettre des haies héberge des coccinelles, neutralise les pucerons, ce qui permet de limiter les pesticides. Pour tous ces services, on peut bien les payer.
Messages
1. Les agriculteurs sont devenus des ouvriers payés à la pièce , 27 février 2016, 17:48, par Gavroche66
Le début du post ne semble pas justifier un suppression de celui-ci. J’aimerais savoir quelles en sont les raisons.
1. Les agriculteurs sont devenus des ouvriers payés à la pièce , 27 février 2016, 18:04
Certains marxistes (surtout trotskistes contrairement aux maoïstes) ont un problème avec la paysannerie souvent perçue comme une survivance de l’Ancien Régime ou soupçonnée d’avoir des revendications réactionnaires.
Parlant des paysans, Mitterrand disait : "Ils cassent tout en semaine, le samedi je ne sais pas ce qu’ils font et le dimanche, ils votent pour le gouvernement."
2. Les agriculteurs sont devenus des ouvriers payés à la pièce , 27 février 2016, 18:31, par Aspaar
Source : http://www.humanite.fr/marc-dufumier-les-agriculteurs-sont-devenus-des-ouvriers-payes-la-piece-600075
3. Les agriculteurs sont devenus des ouvriers payés à la pièce , 27 février 2016, 20:07
Merci Aspaar. Seules les deux premières lignes suffisent à se rendre compte du vide sidéral de ce papier :
P’tain ! ça fait 40 ans que la situation est est telle que décrite par "l’expert" et il répond comme cela en évoquant l’avenir ? On croit rêver. Et les pousins de poulets brésiliens où même les travailleurs sont confinés sur zone, elle-même ultra sécurisée, pour éviter tout risque sanitaire tellment on a poussé à son paroxysme la notion de rendement au point de craindre que la moindre bactérie ou virus étranger n’écroule le fragile équilibre concentrationnaire.
C’est publié dans quelle magazine déjà ? Femme Actuelle ? Non. L’Humanité Dimanche. Ah !
2. Les agriculteurs sont devenus des ouvriers payés à la pièce , 27 février 2016, 20:34
Un suicide par jour , mais toujours un vote droitier .
1. Les agriculteurs sont devenus des ouvriers payés à la pièce , 28 février 2016, 08:53
Et même un peu plus !
3. Les agriculteurs sont devenus des ouvriers payés à la pièce , 27 février 2016, 20:48, par JO
Jacquou le croquant : Son chemin à suivre ou mourir ?
1. Les agriculteurs sont devenus des ouvriers payés à la pièce , 28 février 2016, 10:44
je voudrais qu’on m’explique :
" Ces subventions sont accordées à l’unité de surface : plus on a d’hectares, plus on a de subventions."
N’est ce pas normal et logique ?
Aider en fonction des surfaces ,car c ’est bien en fonction d’elles que se font les déficits ?
un agriculteur investit en fonction des surfaces cultivées,il me semble.LA perte d’exploitation est bien fonction de cette surface .
l’aide doit donc être proportionelle à cette surface ,je crois.
Si on peut m’éclairer sur ce point merci.
2. Les agriculteurs sont devenus des ouvriers payés à la pièce , 28 février 2016, 13:07
Il faudrait plutôt que les subventions dépendent des besoins. Qui varient selon le cours des prix de vente.
Un gars qui a beaucoup d’HA bien productifs (exemple en plaine/en montagne) en céréales, quand le cours est haut (mauvaise récolte en Ukraine par exemple), il se fait des couilles en or.
Et c’est lui qui touche les plus grosses subventions, comme le chef de Monaco ou d’autres qui ont investi (parce qu’ils en avaient les moyens) dans des terres très rentables et de grandes surfaces permettant de réduire les coûts.
Y a un problème...
Mais le principe des subventions est en lui-même un problème puisqu’il fausse le prix de revient et permet par exemple de produire parfois moins cher qu’en Afrique et donc de leur piquer les marchés et de les faire disparaitre.
3. Les agriculteurs sont devenus des ouvriers payés à la pièce , 28 février 2016, 14:03
"L’aide doit être proportionnelle à la surface". A pondérer quand même car dans ce cas, ce sont les plus "gros" qui touchent le plus.
4. Les agriculteurs sont devenus des ouvriers payés à la pièce , 29 février 2016, 09:15
"""L’aide doit être proportionnelle à la surface". A pondérer quand même car dans ce cas, ce sont les plus "gros" qui touchent le plus.""
oui très juste mais l’aide à l’hectare est la même . ils touchent donc plus,mais perdent plus en cas de cours bas.
Systéme pervers sur d’autres plans ,mais peut être pas sur celui là
5. Les agriculteurs sont devenus des ouvriers payés à la pièce , 29 février 2016, 14:10
Mais ça dépend de ce qu’ils mettent sur leurs HA. Et ça peut être rien du tout, ou juste du pré, pour les éleveurs.
Il existe un marché (entre agriculteurs) pour se louer des terres non à finalité qu’elles soient cultivées ou utilisées, mais pour augmenter des subventions ou accéder à d’autres. On voit par exemple pas mal d’agriculteurs qui ont beaucoup plus de tracteurs (de magnifiques 4X4 haut de gamme) qu’ils n’en ont besoin : subventions.
Le système est profondément vicié, c’est une refondation qui est nécessaire.
6. Les agriculteurs sont devenus des ouvriers payés à la pièce , 1er mars 2016, 09:11
"""Mais ça dépend de ce qu’ils mettent sur leurs HA. Et ça peut être rien du tout, ou juste du pré, pour les éleveurs."""
OK donc, critiquer l’aide à l’hectare, n’a pas de sens en soi.
Tout est à revoir, partir d’une rémunération correcte de l’agriculteur,éléveur pour une production nécéssaire sans trop viser les aides à l’export qui détruisent les agriculteurs des pays pauvres.
Oui tout est à remettre en cause.
4. Les agriculteurs sont devenus des ouvriers payés à la pièce , 28 février 2016, 11:27
Un point de vue (qu’on est pas obligé de partager !) :
http://lesmaterialistes.com/eleveurs-figure-reactionnaire-notre-epoque