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Les députés ont voté la réforme de la double peine
Publie le vendredi 11 juillet 2003 par Open-PublishingL’allègement du régime de la double peine proposé par le ministre de
l’intérieur, Nicolas Sarkozy, a été adopté à la quasi unanimité. Quatre
catégories d’étrangers seront désormais protégés du bannissement. Saluée par
la gauche, cette importante réforme s’inscrit dans un texte sur
l’immigration qui durcit nettement les conditions d’accueil et de séjour des
étrangers en France.
Durcissement de la législation actuelle, mais réforme importante du régime
de la double peine : comme prévu, l’examen à l’Assemblée nationale du projet
de loi sur l’immigration présenté par le ministre de l’intérieur, Nicolas
Sarkozy, a conforté ces deux tendances. Mercredi 9 juillet, les députés ont
adopté à le quasi unanimité les articles du texte allégeant le régime de la
double peine, qui prévoyait l’expulsion de France des étrangers condamnés,
une fois leur peine purgée.
Cette adoption, saluée par l’opposition, constitue une victoire pour ceux
qui, depuis des années, ont combattu ce régime, même si cette réforme de la
double peine s’incrit dans une loi qui durcit les conditions d’accueil et de
séjour des étrangers. Le dispositif allège le régime de la double peine en
instituant quatre catégories d’étrangers qui seront protégés du bannissement
: les étrangers nés ou entrés en France avant l’âge de treize ans, les
étrangers résidant régulièrement en France depuis plus de vingt ans, les
étrangers résidant régulièrement en France depuis plus de dix ans et mariés
depuis trois ans à un Français ou à un étranger qui a passé toute son
enfance en France, et les parents d’enfants français. Toutefois, les auteurs
d’actes de terrorisme ou d’atteintes aux intérêts fondamentaux de l’Etat
seront exclus de cette règle.
L’adoption de ce dispositif constitue un succès politique pour le ministre
de l’intérieur, qui a prononcé un long plaidoyer en faveur de l’allègement
de la double peine, afin de convaincre les dernières réticences sur les
bancs de la majorité. "Elle est totalement inefficace pour lutter contre la
délinquance, pour maîtriser les flux migratoires", a-t-il lancé. Il ne faut
"pas confondre la fermeté et l’injustice", a commencé M. Sarkozy, or "une
politique ferme, pour durer, doit être équilibrée". "Jusqu’à présent bien
souvent la droite républicaine et modérée n’a pas su faire la différence
entre ce qui était nécessaire et juste" et "ce qui était trop", a-t-il
poursuivi, alors "ne vous caricaturez pas en prenant des décisions
inapplicables", a-t-il lancé à ses amis.
"DOMMAGE QUE CE NE SOIT PAS LA GAUCHE"
La gauche a apporté son soutien à la réforme en saluant "une avancée
significative". Christophe Caresche (PS) a jugé ces dispositions "justes et
adaptées". André Gerin (PCF) et Noël Mamère (Verts) ont cependant regretté
que le texte n’aille pas plus loin. "Cette question aurait pu être traitée
depuis pas mal de temps, c’est dommage que ce ne soit pas la gauche qui
l’ait fait", a regretté au passage M. Gerin. L’UDF Jean-Christophe Lagarde a
aussi salué la réforme. "Un grand pas a été fait", a dit l’UMP Etienne
Pinte, qui, depuis un an, faisait activement campagne en faveur de
l’allègement de la double peine, aux côtés d’artistes, comme le cinéaste
Bertrand Tavernier, auteur d’un film intitulé La double peine.
Dans l’après-midi, l’Assemblée a également voté la création d’un délit
spécifique pour les mariages blancs, punis de cinq ans de prison et 30 000
euros d’amende. Verts et PCF s’y sont opposés, mais le PS Christophe
Caresche a donné son accord "sur le principe" en regrettant des peines
"disproportionnées". Les députés ont aussi décidé de faire payer à
l’employeur d’un clandestin les frais de rapatriement de cet étranger dans
son pays d’origine. Ils ont renforcé les peines contre les passeurs,
ajoutant quatre nouvelles circonstances aggravantes aux crimes commis en
bande organisée : mise en danger de la vie d’autrui, atteintes à la dignité
humaine, trafic de mineurs isolés et utilisation abusive "de badges de
sécurité dans les aéroports". Le délai de recours contre un arrêté de
reconduite à la frontière a été allongé de 48 à 72 heures.
Ces dernières mesures sont venues complèter une loi qui durcit
considérablement les conditions d’accueil et de séjour des étrangers en
France. Le texte porte de 12 à 26 ou 32 jours le placement en centre de
rétention avant éloignement. Il instaure un traitement informatique des
empreintes digitales pour les demandes d’un visa de tourisme et rend plus
difficile l’obtention des attestations d’accueil nécessaires aux
autorisations de séjour de moins de trois mois. Il étend de trois à cinq ans
le délai d’attente pour obtenir une carte de résident de dix ans.
L’examen du projet de loi sur l’immigration devrait s’achever dans la nuit
de mercredi à jeudi ou jeudi à mi-journée. Le Sénat devrait finalement
l’examiner à la rentrée.