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Les quatre facteurs déclencheurs d’une grande faillite bancaire
Publie le vendredi 16 novembre 2007 par Open-Publishing11 commentaires
Les quatre facteurs déclencheurs d’une grande faillite bancaire
LEAP/E2020
Thursday, 15 November 2007
LEAP/E2020 estime désormais qu’au moins un grand établissement financier américain (banque, assureur, fond d’investissement) fera faillite d’ici Février 2008 provoquant la banqueroute de plusieurs autres établissements financiers et banques en Europe (notamment au Royaume-Uni), en Asie et dans les pays émergents. C’est bien un « trou noir » financier, selon l’expression employée par Tony James1, président de Blackstone, qui s’est formé à partir de la crise des « subprimes » américains.
Les facteurs déclencheurs d’un tel événement sont désormais si puissants et les signaux précurseurs si nombreux, que, selon nos chercheurs, sa probabilité à trois mois atteint désormais près de 100%. Il est tout aussi certain pour notre équipe que les autorités financières américaines tenteront de mettre en place un filet protecteur de remboursement pour éviter la contagion de la panique à l’ensemble du système financier américain2 ; mais que l’ampleur de la faillite touchera immédiatement les institutions financières les plus exposées aux Etats-Unis et dans le reste du monde. Les pays où les opérateurs financiers sont les plus liés aux opérateurs financiers américains seront donc en première ligne : Royaume-Uni, Japon, Chine en particulier3.
Les principaux facteurs déclencheurs sont, selon notre équipe, au nombre de quatre :
1. Réduction drastique des revenus des banques opérant aux Etats-Unis
2. Effondrement accéléré de la valeur des actifs détenus par ces mêmes banques sous l’effet de la nouvelle réglementation bancaire US (FASB regulation 157)
3. Fragilisation croissante des assureurs obligataires
4. Récession économique aux Etats-Unis.
Ces facteurs sont bien entendu à replacer dans le contexte général que décrit LEAP/E2020 depuis le début de l’année 2006, à savoir la crise systémique globale, que visiblement les dirigeants politiques, financiers et économiques mondiaux ne font que commencer à appréhender4. Le fait que depuis près de deux années les banques centrales, notamment la Réserve fédérale US et la Banque d’Angleterre, comme les principaux opérateurs financiers, aient été systématiquement en retard sur les évènements, laisse penser que cette fois encore ils ne prendront la juste mesure de la crise bancaire qu’une fois un événement majeur consommé. C’est en général le moment où il est trop tard pour empêcher efficacement la contamination systémique.
Facteur N°1 - Réduction drastique des revenus des banques opérant aux Etats-Unis
Comme analysé dans le GEAB N°19, l’application de la norme FASB 157 dès le 15 Novembre 2007 va exposer directement le bilan des établissements financiers opérant aux Etats-Unis aux conséquences de l’effondrement de la valeur d’une part importante de leurs actifs. Et cette part est en accroissement constant, car la crise des « subprimes » n’est en fait que le catalyseur d’une crise financière plus vaste affectant désormais l’ensemble des actifs financiers américains5. Les différents CDOs sont dorénavant entraînés dans cette crise de confiance généralisée, alors qu’ils constituent une part importante des actifs bancaires, puisque ces dernières années les grandes banques sont sorties de leur rôle de prêteur pour se lancer dans l’investissement et la spéculation, à la manière des « hedge funds ».
Ces derniers ont d’ailleurs représenté depuis près d’une décennie une source croissante de revenus pour les grandes banques internationales. On se souvient encore des honoraires faramineux que les « hedge-funds » et les fonds d’investissements versaient aux banques ! dans le cadre de leurs multiples opérations, dont les rachats en LBO (« Leverage Buy-Out », ou rachat à effet de levier financier), fusion-acquisitions (ou M&A, « Merger and Acquisition ») et autres introductions en bourse (IPO, ou « Initial Public Offering »). Cette époque, pourtant pas si lointaine (puisqu’elle s’est terminée cet été), est maintenant révolue.
Désormais les « hedge-funds » se battent pour ne pas tomber en faillite. Les fonds d’investissement creusent leurs pertes en tentant d’éviter d’être aspirés dans le « trou noir financier » dont parle le patron de Blackwater (cité en introduction de ce numéro du GEAB).
Les projets de fusion-acquisitions sont au point mort. Ainsi, dans le secteur technologique (marché par excellence des fusion-acquisitions), Wall Street a vu le montant des transactions passer de 99 Milliards USD au troisième trimestre 2006 à 52 Milliards USD au troisième trimestre 2007 (soit une baisse de près de 50%) alors que la crise du crédit n’en était encore qu’à ses débuts. Pourtant la faiblesse du Dollar US a provoqué au troisième trimestre 2007 une frénésie d’achats européens aux Etats-Unis puisque ces derniers ont pour la première fois dépensé autant que leurs homologues nord-américains6 .
Les introductions en bourse à Wall Street, qui avait mieux résisté à la crise estivale, sont désormais repoussées « aux calendes grecques » en attendant des jours meilleurs. Ainsi le nombre d’introductions en bourse de plus de 1 milliard USD est passé de 8 par trimestre (au troisième trimestre 2006) à 2 (au troisième trimestre 2007). Et ce phénomène se renforce comme viennent par exemple de l’illustrer RWE, le producteur d’énergie allemand qui a décidé de repousser la mise en bourse de sa filiale American Water du fait de la crise du crédit aux Etats-Unis7 ainsi que Rusal, le géant russe de l’aluminium qui a repoussé à une date indéterminée son introduction en bourse alors qu’elle promettait d’être la plus importante de l’année 2007 et que les banques opératrices avaient déjà été choisies (à savoir Morgan Stanley, JP. Morgan et Deutsche Bank)8.
Quand aux LBO (ces remarquables montages financiers permettant d’acheter une entreprise en utilisant la richesse potentielle qu’elle recèle9), non seulement leur marché s’est pratiquement éteint, mais les transactions qui n’ont pas pu être gelées ou annulées finissent au tribunal comme le montre le cas emblématique de SallieMae, la société de prêts étudiants, et JC. Flowers (un fonds d’investissement très actif, mais qui, pour l’anecdote, n’a pas de site web)10. D’ailleurs en Octobre, les LBOs n’ont représenté que 5% des transactions de fusion-acquisitions contre 31% en Juin 2007.
Toutes ces évolutions convergent dans la même direction, à savoir la perte d’une source importante de revenus des banques opérant aux Etats-Unis, qui va donc se cumuler aux conséquences de l’application de la norme FASB 157 et de la crise des CDOs, à savoir la perte de valeur d’une part importante de l’actif de ces mêmes banques.
En 2006 en effet, les revenus provenant de leurs honoraires de conseils et intermédiaires pour ces rachats, fusions, acquisitions, etc... ont constitué 27% de l’ensemble de leurs revenus, avec la plus forte progression enregistrée depuis sept ans (sept ans plus tôt, en 1999, nous étions à la veille de l’explosion de la bulle Internet !). Par ailleurs, en 2006 déjà, ces revenus avaient dû compenser les pertes générées par les premiers effets de la crise des « subprimes ». En 2007, les pertes liées au marché hypothécaire ont littéralement explosé par rapport à 2006, et, comme on peut le constater, les revenus de conseils et intermédiaires des grandes transactions financières se sont taris11.
Nul besoin d’être un grand clerc pour en conclure que ces banques vont connaître entre la fin 2007 et le début 2008 une crise très grave qui va entraîner pour certaines des pertes auxquelles elles ne pourront pas faire face. Ce que nous voyons aujourd’hui de la crise n’est selon LEAP/E2020 que les signaux avant-coureurs de cette crise bancaire.
LEAP/E2020
Laboratoire Européen d’Anticipation Politique
GEAB n° 19 - 15/11/2007
Notes :
1 Tony James a utilisé cette expression pour décrire l’environnement financier qui a conduit sa société de capital-investissement, l’une des « merveilles » de Wall Street il y a encore peu, à afficher une perte de 113 Millions USD (source Forbes, 12/11/2007). Blackstone a été introduite en bourse l’année passée comme d’autres méga fonds d’investissements, KKR et Fortress par exemple. Notre équipe avait d’ailleurs prévenu au Printemps dernier que ces introductions en bourse visaient sans aucun doute à mutualiser les pertes à venir plutôt que les bénéfices passés. C’est désormais confirmé.
2 Comme c’est le déjà le cas avec le « super-conduit Paulson » (voir GEAB N°18).
3 Pour plus de détails sur ces degrés d’exposition aux risques financiers américains, consulter notamment les GEAB N°16, 17 et 18.
4 C’est à dire qu’ils commencent à peine à comprendre la nature « systémique » de la crise. Jusqu’à présent, ils ont d’abord nié l’existence d’une crise, pour, depuis quelques mois, la traiter comme un épisode habituel des cycles économico-financiers.
5 Source : Bloomberg, 13/11/2007
6 Source : The451Group, 01/10/2007
7 Source : YahooNews/Reuters, 14/11/2007
8 Source : Financial Information Service, 21/09/2007
9 Pour peu qu’on parvienne à convaincre un nombre suffisant d’opérateurs financiers de vous prêter la somme correspondante.
10 Source : SeekingAlpha, 25/11/2007
11 Il faut lire sur ce sujet le remarquable article de Diana Choyleva, de Lombard Street Research, publié sur AlphaVille, 06/08/2007
http://newropeans-magazine.org/index.php?option=com_content&task=view&id=7301&Itemid=87
Messages
1. Les quatre facteurs déclencheurs d’une grande faillite bancaire, 16 novembre 2007, 20:07
Si le PCF était resté vivant, c’est de ses organes qu’émaneraient de telles analyses qui exigent des capacités d’observations et de mise en perspective du mouvement du monde qui autrefois - du temps de Lénine et de Trostky - étaient son apanage. Aujourd’hui, rongé par le carriérisme de ses dirigeants qui ne visent qu’à endosser le costume du crétinisme parlementaire - être élu, mon Dieu, maire, conseiller général, régional, and so on...à l’image des traîtres au prolétariat de la première guerre mondiale, de la seconde, des guerres de décolonisation - il n’est plus capable que de parler pour ne rien dire. Ni Marx, ni Lénine ne s’en retournent de là où ils sont car ils avaient conscience de la force d’inertie qui s’oppose à la marche de l’Esprit. Malgré quelques étroitesses, vive le Monde Diplomatique et des sites comme LEAP/E2020. Jesse
2. Les quatre facteurs déclencheurs d’une grande faillite bancaire, 16 novembre 2007, 22:02
Je vois aussi une raison majeure au cataclisme financier qui s’annonce aux USA, c’est la stupidité des américains d’avoir choisi pour président un imbécile, dépourvu de capacités intellectuelles. La soupe à la grimace, ça va les changer du crédit permanent : un vrai gruyère leurs finances !
Pourvu qu’il ne nous arrive pas la même chose !
1. Les quatre facteurs déclencheurs d’une grande faillite bancaire, 16 novembre 2007, 22:09
Mais si, il va nous arriver la meme chose, parce que c’est dans la NATURE du capitalisme, et que comme le servage et l’esclavage, le capitalisme DOIT disparaitre. Vieux stal borné.
2. Les quatre facteurs déclencheurs d’une grande faillite bancaire, 16 novembre 2007, 22:30
Salut VSB, toujours a l’affut ? Ouais comme tu dis, c’est le coté prédateur du genre humain qu’il faut aussi faire disparaitre pour le progrès. Prédation et capîtalisme, deux mots qui définissent d’une certaine façon la mème chose. Skapad
3. Les quatre facteurs déclencheurs d’une grande faillite bancaire, 17 novembre 2007, 00:54
Salut Skap, j’ai plus l’occase de faire marcher ma tete ici que dans un troquet. Je fais comme les mémés de mon village quand j’étais jeune. Elles passaient leurs journées à faire le chouf derrière leurs rideaux. Maintenant, elles draguent, elles picolent ou elles fument. Pour certains sujets, je suis à l’affut, et je m’autorise ( comme disait Coluche ) autant de grasses matinées que je veux. A force d’emm......mon taulier, j’ai fini par me faire mettre à la retraite. Et je vais te dire un truc : la retraite, y a que ça de vrai. Vieux stal borné.
4. Les quatre facteurs déclencheurs d’une grande faillite bancaire, 17 novembre 2007, 01:00
Alors vivement la retraite, car je vois que les mémés dans les villages s’éclatent drôlement : elles picolent ? Eh ben, quelle descente !!!
5. Les quatre facteurs déclencheurs d’une grande faillite bancaire, 17 novembre 2007, 01:26
Ben oui, que veux-tu, les mémés de maintenant, ça craint. Le vrai problème, c’est pas qu’elles picolent ou qu’elles fument, c’est qu’elles conduisent. Si on empechait les mémés de conduire, on diviserait d’autant le nombre d’accidents de la route. Au fait, tu as vu ? On va tout droit vers une implosion du capitalisme. On va vivre une époque épique. Vieux stal borné.
6. Les quatre facteurs déclencheurs d’une grande faillite bancaire, 17 novembre 2007, 05:03
une lecture salutaire pour cette fin d’année : le bouquin de Jean-Claude Michéa "L’empire du moindre mal" édition Climats et le placement n’est que de 19 euros
Jean-Paul
7. Les quatre facteurs déclencheurs d’une grande faillite bancaire, 17 novembre 2007, 10:49
Le capitalisme se meurt ? Vite l’euthanasie !
Il ne mourra pas tout seul, il mourra que si on l’écarte. Là la crise qui se prépare (je crois que nous n’y sommes pas encore pour quelques années, pour des raisons techniques, mais....) ne signe pas un effondrement du capitalisme. Il y a effondrement que si d’autres forces sont susceptibles de prendre le relais , là ça traine, ça tarde et la cavalerie ne point etoujours pas le bout de son museau, seulement le groin de la bourgeoisie.
Et puis, on peut faire confiance (après les centaines de milliards déversés par les banques centrales) pour qu’on puise des sommes encore plus gigantesques de nos poches pour sauver le soldat banquier de ses agapes. On peut se retrouver avec des explosions dévualatrices pour financer la bourgeoisie et l’exonérer du risque.
Copas
8. Les quatre facteurs déclencheurs d’une grande faillite bancaire, 17 novembre 2007, 19:18
Salut Cop, toujours aussi mauvais esprit. Effectivement, l’impérialisme va tenter de surmonter la crise par les méthodes habituelles, mais à nous de nous préparer à prendre la relève. Le remplacement du capitalisme par le socialisme requiert bien l’action des masses exploitées, mais plus on arrivera avec une conscience travaillée et plus on aura de chances de s’en sortir. Il y a moins d’une heure, j’écoutais un artisan qualifier le régime de Sarko de " communisme déguisé ". Amusant, n’est-ce pas ? Vieux stal borné.
3. Enfin, une excellente nouvelle !!!, 15 septembre 2008, 06:53, par JEAN NEGRE
Tout d’abord, bravo et félicitations pour votre analyse.
Je me réjouis comme jamais de ces excellentes nouvelles de faillites américaines en cascade. Je souhaite vraiment que ce capitalisme financier fondé sur la malhonnêteté et l’avidité, la cupidité et un goût immodéré et indécent pour l’argent facile, se casse la gueule. Le cynisme qui est aussi à l’origine de tout cela, fait que l’on peut être un profiteur, c’est à dire un salaud, en toute impunité. L’impunité, cela devrait être terminé : intervention de l’Etat et des tribunaux. Beaucoup de ces spéculateurs, sinon tous, tirent sur la corde de manière éhontée en se disant que s’il y a un pépin, on pourra toujours faire appel à la Banque Centrale, au gouvernement, etc. Et bien non, une telle passivité des instances dirigeantes confine à la complicité : dans le cas d’une faillite partielle ou étendue, il ne faudrait surtout pas que l’Etat lève le petit doigt. Car après tout, quand tout va bien, les banques reversent-elles une part de leurs énormes bénéfices à l’Etat, pour co-financer le chomage, par exemple ? Non ! Il n’y a donc aucune raison de "soutenir le marché" comme ils disent. Il faut assainir le marché capitaliste en mettant un terme à la spéculation mortifère et, comme je le disais, toujours impunie. Je parle ici non pas en économiste mais en moraliste et en "justicier". Que l’on tire un peu profit de ses placements, je peux le concevoir (mais c’est toujours sur le dos de quelqu’un !), mais que l’on s’enrichisse en étant rentier sans jamais se préoccuper de l’état des entreprises réelles qui fonctionnent avec des gens réels, c’est inacceptable. Et si l’on interdisait en France les fonds de pension, où et quel serait le dommage ?
Je vous remercie de m’avoir lu jusqu’au bout et d’avoir essuyé ma colère et mon indignation.
JEAN, professeur de Lettres au Mans