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Lettre ouverte à R. Couderc Sénateur Maire de Béziers. Rased

Publie le vendredi 28 novembre 2008 par Open-Publishing

Les enseignants des Rased de Béziers Ville
Béziers le 20/11/2008

Ecole Les Oliviers
Rue Jacques Balmat
34500 Béziers

Monsieur le Sénateur-Maire,

Nous avons été particulièrement déçus par la réponse que nous avons reçue de votre part concernant l’avenir des Rased. Votre courrier ne fait que reprendre mot pour mot le discours du Ministre de l’Education Nationale. D’autres élus ont aussi utilisé cette lettre-type faisant preuve d’un suivisme peu flatteur ne faisant aucun cas des inquiétudes de leurs administrés. Pourtant, certains de vos amis politiques (nous pensons notamment, sur le département, à M. Jean-Pierre Grand, maire UMP de Castelnau le Lez mais il n’est pas le seul), ont su les écouter et analyser leurs arguments. Ils ont pris position contre la suppression des Rased sans qu’on puisse les accuser de trahir ni leur parti ni leurs idées. Nous espérions, en nous adressant à vous, être l’objet d’une attention plus particulièrement centrée sur les difficultés spécifiques de notre – votre - arrondissement qui, comme vous le savez, est particulièrement visé par les crises financières et sociales.

Les arguments mentionnés dans votre courrier concernent quatre points que nous vous proposons de reprendre :

1) Organisation et efficacité du dispositif Rased. « les élèves sont extraits de la classe et n’assistent pas à la totalité des enseignements. »

Oui, ces élèves sont extraits 45’ de la classe et ces 45’ sont pour eux l’occasion de reconstruire leurs savoirs, de se reconstruire, de souffler un peu. La volonté de Xavier Darcos (voir le point 4 de votre réponse) est d’envoyer ces élèves dans les CMPP ou autres thérapeutes en dehors de l’école si leurs difficultés persistent. Ce sera alors une demi-journée que ces élèves perdront pour ne parler que des chanceux qui trouveront une place en CMPP (tous saturés notamment celui de Béziers) ou qui pourront se payer un thérapeute extérieur.

« L’action des maîtres E et G apparaît trop dispersée et n’a pas l’efficacité escomptée. » Nous réclamons des moyens supplémentaires depuis longtemps sans les obtenir. Il est facile, dans ce cas, de nous accuser de ne pas être efficaces !

A titre de comparaison, prenons l’exemple des pédopsychiatres : ils sont souvent trop peu nombreux pour traiter l’ensemble des demandes. Le Ministre de la Santé a-t-il eu l’idée de les forcer à s’installer comme généralistes en raison de leur impossibilité à répondre à toutes les demandes ? Non ! Bien sûr !

2) « 3000 maîtres spécialisés seront sédentarisés… Ils exerceront dans une classe les fonctions de maîtres titulaires… »

« Sédentariser 3000 enseignants spécialisés équivaut à supprimer les Rased, qui travaillent, par définition en RESEAU. Monsieur le Ministre avait affirmé en 2007 qu’il ne « toucherait pas au Rased » Nous savons aujourd’hui que c’est faux !

« Il ne s‘agira pas pour eux d’enseigner à une classe dans laquelle seraient concentrés les élèves en difficulté de toute une école mais de devenir maîtres d’une classe ordinaire nécessitant un enseignement soutenu. » Pourriez-vous nous expliquer, Monsieur le Sénateur Maire ce que le Ministre entend par là et que vous avez bien voulu reprendre ? Nous nous sommes longuement penchés sur cette phrase sans arriver à en tirer le moindre sens. Merci de nous éclairer.

3) « Les deux heures libérées du samedi matin sont investies sous forme d’aide personnalisée…

Des stages de remise à niveau en français et mathématiques sont proposés pendant les vacances scolaires… » Faire croire que la mise en place de ces modules d’aide va remplacer l’aide spécialisée n’est pas sérieux. Il ne viendrait à l’idée de personne de faire croire que pour faire des économies, les médecins généralistes vont avantageusement remplacer les spécialistes. Nous répétons que ce n’est pas en re-proposant de la soupe à un anorexique qu’on réussira à le faire manger. Un enfant qui bloque à l’école relève des aides spécialisées prodiguées par les spécialistes formés que sont les enseignants de Rased. Certainement pas des collègues généralistes qui reconnaissent être démunis vis-à-vis de ces enfants là !

4) En cas de « difficultés qui relèvent du champ social, l’assistante sociale scolaire peut déclencher les procédures d’aide sociale à l’enfance. »

Nous sommes surpris de voir mentionnée l’existence d’assistantes sociales scolaires qui n’existent pas dans le primaire.

Vous n’ignorez pas, Monsieur le Sénateur, que l’origine de la difficulté d’un enfant n’est jamais mono-causale. Nous savons, nous, que les difficultés des élèves peuvent, la plupart du temps être traitées rapidement par l’école, dans l’école, grâce à cette collaboration Enseignants- Rased-Parents en évitant ainsi une médicalisation et donc un alourdissement de la procédure d’aide.

« Si les difficultés sont d’ordre psychologique… le psychologue scolaire peut être conduit à pratiquer des entretiens d’accompagnement… » : Vous savez sans doute, Monsieur le Sénateur, qu’il est très difficile pour les psychologues scolaires de « suivre » des élèves en difficulté compte tenu du nombre d’élèves concernés. D’autre part, les envoyer, comme le texte auquel vous faites référence le préconise, vers les CMPP ou les thérapeutes extérieurs, ne résoudra en rien le problème du plus grand nombre, parce que, la plupart du temps, ces élèves ne relèvent pas d’une aide « médicale », mais bien d’une aide « spécialisée » à l’intérieur de l’école. Beaucoup de pays européens nous envient ce dispositif et l’ont même repris depuis quelques années, en Finlande par exemple, pays si souvent cité pour ses bons résultats, « Cette obligation de faire appel à des enseignants spécialisés dès qu’un élève est en difficulté. A la demande du professeur de matière, des parents, et parfois de l’élève, peuvent intervenir un tukiopettaja, professeur de soutien ou un erityisopettaja, sorte de pédopsychiatre spécialisé dans les difficultés d’apprentissage des dyslexiques par exemple, ou des enfants incapables de s’organiser. »

Envoyer nos élèves en difficulté vers des structures extérieures à l’école va de toute évidence renforcer leur sentiment d’exclusion alors qu’une prise en charge, DANS l’école, leur permet de vivre, et la plupart du temps, de régler, leur souffrance scolaire sans les stigmatiser.
Nous espérons, Monsieur le Sénateur-Maire, vous avoir fait toucher du doigt les véritables problèmes des élèves en difficulté. Nous souhaitons cette fois que nos éclaircissements vous permettront de vous faire une idée plus personnelle des problèmes rencontrés par ces élèves et renouvelons notre demande d’entretien avec vous pour en débattre de vive-voix.

Attendant votre réponse et espérant que vous pourrez nous accorder un entretien rapidement, nous vous prions de recevoir, Monsieur le Sénateur-Maire, l’expression de nos sincères salutations.

Des enseignants spécialisés des Rased de Béziers ville.