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Palestine : la lutte des habitants de Budrus contre le mur
Publie le lundi 2 février 2004 par Open-PublishingBudrus est un petit village de 1200 habitants au nord-ouest de Ramallah,
à trois kilomètres de la ligne verte (ligne de cessez-le-feu 1967). Les
bulldozers pour la construction du mur de l’Apartheid sont arrivés à
Budrus il y a trois mois, après avoir déjà nivelé une bande de terre
dans le village voisin de Qibbya. En 1953, Ariel Sharon a été à la tête
d’un massacre de 60 personnes à Qibbya et le site de ce massacre est
toujours visible aujourd’hui.
Le but du mur est triple : séparer Budrus et Qibbya et les villages
voisins, Nihilin and Medea, de toutes leurs terres ; les enfermer à
l’intérieur d’un mur supplémentaire qui ressemble à une prison
circulaire ; et s’assurer qu’aucun des habitants de ces villages ne
puissent rejoindre Ramallah, le Le village de Budrus a formé un comité
populaire pour lutter contre le mur. Le comité affirme que les moyens
légaux de lutte contre le mur ne leur sont pas accessibles. Le lendemain
du jour où l’ordre militaire les informait que leurs terres étaient
confisquées et qu’ils avaient quinze jours pour faire appel, les
bulldozers étaient déjà au travail !
Depuis lors le mur n’est pas construit à Budrus. Depuis trois mois,
toute personne valide à Budrus se rend dans une oliveraie de trente
oliviers qui est en première ligne pour les bulldozers pour empecher les
bulldozers de travailler. Le comité populaire a organisé des
manifestations dans l’oliveraie même lorsque les bulldozers n’étaient
pas là. Contrairement à d’autres village, les habitants de Burdrus ont
un but clair : stopper le mur de l’Apartheid. Les villageois disent que
le secret est q’ils sont unis contre le mur, qu’ils travaillent tous
ensemble, quelle que soit l’appartenance à l’un ou l’autre parti. Grâce
à cette force unanime le village a défié tous les couvre-feu décrétés
par les Forces de Défense Israéliennes pour poursuivre leur résistance
non-violente.
Récemment, cependant, la compagnie de bulldozers a été soutenue par un
nombre accru de militaires et la police a commencé à faire des
incursions noctunes dans le village pour arrêter des responsables du
comité populaire et même des jeunes garçons. La résistance non-violente
du village doit être brisée de façon délibérée.
Cela a commencé au matin du 30 décembre 2003 lorsqu’un bulldozer s’es
dirigé vers l’oliveraie la plus exposée. Tout de suite un appel de la
mosquée a annoncé que les oliviers allaient être déracinés. Cinq «
internationaux » et Israéliens qui avaient campé à Deir Ballut dans une
école menacée de démolition à cause du mur étaient heureusement présents
à Budrus depuis le soir précédent. Avec les Palestiniens du comité
populaire nous nous sommes précipités dans les oliveraies en contre-bas
du village. Des soldats nous attendaient avec un papier déclarant que
cet endroit étaient une zone militaire interdite et nous barraient la
route. Nous étions perplexes d’entendre un Palestinien dire qu’il nous
fallait tous retourner au centre du village. En retournant au village
nous avons entendu un second appel de la mosquée et à ce moment-là nous
avons compris : des centaines de femmes, filles, hommes et garçons
marchaient vers les oliveraies. Des enfants arrivant tout droit de
l’école tenaient encore leurs livres.
A ce moment-là un des militants les plus appréciés du village, Abu
Ahmad, a crié : « Nous pouvons y arriver ! Nous pouvons y arriver ! »
Les villageois se répartirent en trois groupes et se mirent à dévaler la
colline vers les bulldozers.
Les soldats ont immédiatement tiré des dizaines de cartouches de gaz
lacrymogène en direction des divers groupes, avant de tirer quelques
minutes plus tard des cartouches de balles de caoutchouc. Lorsque des
groupes de fillettes ont été atteintes par le gaz, elles ne mettaient
que quelques minutes pour retrouver leur respiration et redévaler la
pente. Beaucoup de personnes ont été atteintes aux jambes, aux bras, à
la tête et immédiatement transportées vers une ambulance. De plus en
plus de soldats arrivaient et remontaient la colline. Bien que le
bulldozer était tout près maintenant il semblait que nous n’arriverions
jamais à atteindre les oliviers.
L’arrivée soudaine d’équipes de télévision a pris de court les soldats.
A cet instant, une femme très âgée a couru à travers la ligne de soldats
en direction du bulldozer. Différents groupes ont contourné les soldats.
Ces derniers ont vite repris le dessus et tiré des cartouches de gaz
lacrymogène directement sur les personnes. À ce moment-là, la vieille
femme s’est jetée dans le trou fait par le bulldozer. Une petite fille a
sauté dans la pelle du bull au moment où celle-ci touchait la terre et
s’est mise à lire son livre d’école. D’autres filles ont grimpé sur le
bulldozer et le conducteur a éteint son moteur.
Ce jour-là a été un succès pour les gens de Budrus. Bien que quelques
arbres aient été détruits, d’autres ont été sauvés. Face à la masse de
cartouches de gaz et de balles les habitants de Budrus sont descendus de
la colline avec des chants de liberté, forçant les soldats et le
bulldozer à rebrousser chemin. Lorsque les gens ont atteint les oliviers
et repoussé les soldats jusqu’à leurs jeeps, ce sont les filles qui ont
mené les chants pendant trois heures : « Palestine libre ! Palestine
libre !. » Lorsqu’enfin les soldats sont partis tout le village a fait
la fête.
Cette scène se reproduit depuis trois semaines avec des résultats
divers. Sept fois la compagnie de bulldozers a essayé de déraciner plus
d’oliviers. Les sept tentatives ont été repoussées par les gens de
Budrus. Quatre fois les villagoeis ont réussi à faire partir l’armée
comme ce 30 décembre, mais à trois reprises l’armée forte de 200 soldats
a repoussé les villagois dans leur village. Ces jours-là des dizaines de
blessés ont été conduits à l’hôpital et les soldats ont tirè sur des
enfants avec des balles réelles (?) avant d’occuper les maisons les plus
proches de la route et d’y frapper les femmes et les enfants. Mais même
à ces moments-là les bulldozers n’ont pas osé déraciner des oliviers.
A un certain moment l’armée a déclaré que le village était une zone
militaire interdite. Le village a fait la une dans tous les journaux
lorsqu’un parlementaire suédois, Gustav Fridolin, a été arrêté pour
avoir participé à une manifestation. La semaine passée l’armée
israéienne a arrêté Abu Ahmad et ses frères Na’im et Abdelnasser,
portant le nombre de villageois arrêtés à 10. Abu Ahmad et Na’im ont été
sortis de leurs lits à deux heures du matin. Depuis leur arrestation les
autorités israéliennes jouent au chat et à la souris avec les avocats et
amis qui appellent la prison d’Ofer où ils sont détenus. Parmi les amis
il y a un membre de la Knesset, Ran Cohen, qui a téléphoné à la prison
pour protester. Il lui a été répondu qu’ils avaient été libérés. À
l’heure actuelle il faut craindre une détention administrative
indéfinie. Abdenasser a été inculpé « pour avoir permit à des
internationaux de séjourner dans sa maison. » Le chef d’accusation «
héberger des internationaux » était inexistant jusqu’à maintenant et ne
fait que montrer qu’Israël cherche à écraser la résistance non-violente
de toutes les facettes de sa politique.
Une présence internationale constante a été organisée à Budrus. La
semaine passée les internationaux avec les anarchistes israéliens contre
le mur et le comité populaire ont rencontré les villageois de Nihilin.
Ce village perdra 90% de ses terres à cause du mur d’Apartheid et le 17
janvier ils ont reçu l’information que les travaux commenceraient quinze
jours plus tard. Pour gagner du temps en attendant le procès sur le mur
d’Apartheid à La Haie qui débute le 23 février lles bulldizers
fonctionnent à pleins rendements ppour accélérer la construction du mur.
Des panneaux géants de béton de huit mètres de hauteur sont érigés
quotidiennement. Pour le moment le village de Budrus, malgré les balles,
le gaz lacrymogène, les coups, les arrestations et la terreur qu’il
subit de la part des Forces de Défense Israélienne, a réussi à stopper
la destruction due à la construction du mur d’Apartheid dans le district
de Ramallah.
Anna, Kate
Traduction : Dorothée
indymedia lille