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Paris, la banlieue qui résiste au fanatisme
Publie le vendredi 22 juillet 2005 par Open-Publishing2 commentaires
A Aubervilliers vivent face à face une majorité musulmane et une communauté juive radicale. Les travailleurs sociaux combattent l’extrémisme par des "micro actions que l’on peut mesurer dans le temps". Mais sur cette cohabitation plane le cauchemar Sarkozy, qui menace de nettoyer la banlieue.
de ANNA MARIA MERLO PARIS traduit de l’italien par karl&rosa
Aubervilliers est une petite ville de 63.000 habitants, à la périphérie nord de Paris, reliée à la capitale par une ligne de métro, située entre Pantin et La Courneuve, que le ministre populiste de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, a menacé il y a quelques jours - à la suite de la mort d’un garçon, tué par un coup d’arme à feu - de "nettoyer au Karcher".
Aubervilliers, comme toutes les périphéries populaires de la capitale, n’est pas un endroit facile. Sur le papier, il condense tous les problèmes : haut pourcentage de classes populaires frappées aujourd’hui par le chômage, un face à face entre deux communautés radicales juives et une majorité de la population de culture musulmane.
Et pourtant, à Aubervilliers, même si des épisodes d’explosion de violence entre les jeunes n’ont pas manqué, on a l’impression que tout n’est pas encore perdu, que l’Europe n’est pas en passe de se transformer en Bosnie, de glisser vers une guerre civile entre communautés. C’est l’effet de ce que l’animateur Noureddine Skiker appelle "les micro actions que l’on peut mesurer dans le temps". C’est ce que lui et ses collègues font à l’Omja, le siège des jeunes d’Aubervilliers, qui organise les loisirs.
C’est la conséquence positive d’une action volontariste de la municipalité (le maire est Pascal Baudet du Pcf, instituteur de profession) qui n’a pas baissé les bras. C’est la volonté de donner à ces jeunes, avec l’activité extra-scolaire, "la maîtrise de la parole - comme le résume Noureddine - mais savez-vous que dans les banlieues, les jeunes maîtrisent moins bien la langue que les autres ? Que selon une étude, ils utilisent en moyenne 400 mots contre 2500 à Paris ? Et quand on n’a pas la parole, on devient fou, on ne pense qu’à soi, on se referme sur soi, et c’est ce qui peut arriver de pire, il y a de plus en plus de gens qui ne pensent qu’à eux, qui se fichent des autres.
Puis, la religion devient un prétexte". "Nous avons appris les attentats de Londres en Alsace, à la sortie du Musée de la déportation où nous étions aller visiter un camp", explique Louis-Philippe, un lycéen. Serait-il possible qu’un jeune Français se transforme en kamikaze, comme en Grande-Bretagne ? "Tout est possible, mais c’est difficile ici. A Aubervilliers, c’est impossible. Ici, on n’est pas comme en Grande-Bretagne, la France n’a pas participé à la guerre en Irak" explique Yacine, un autre lycéen. L’Irak, mais aussi la Palestine, sont les nœuds de la tragédie de la géopolitique qui sont souvent cités. "Quand il y a eu la première Intifada, nous avons organisé une rencontre avec tous les points de vue, au lycée, cela s’est bien passé" dit Noureddine Skikker.
Et depuis 1998, la municipalité réalise un "projet Palestine" en collaboration avec les Palestiniens, auquel participent les habitants. "Il y a un vrai malaise international - ajoute Noureddine - dont nous, les travailleurs sociaux, percevons bien les effets dans les quartiers. Mais chaque fois qu’il y a un problème, nous cherchons à travailler dessus pour vivre mieux après. Pas pour raconter des histoires aux gens, leur dire que nous trouverons la solution, parce que ce ne serait pas honnête de dire que le problème disparaîtra. Mais pour en comprendre les causes, sinon on n’avance pas".
Noureddine a dit aux jeunes qu’il a accompagnés visiter le camp de concentration en Alsace : "Si vous avez éprouvé ici de la solidarité, sachez qu’elle doit commencer à la porte de votre cité". Mais quelqu’un avait demandé à un jeune :"Mais vous qui venez d’Algérie, vous sentez-vous lié au problème franco-français de l’Alsace ?" Et le jeune d’Aubervilliers a répondu : "Mais, excusez-moi, je suis français". Un autre jeune lui a reproché les deux minutes de silence pour Londres : "Pourquoi on ne le fait pas pour l’Irak ?". "Moi, j’ai de la famille à Londres mais heureusement il n’y a pas eu de victime - raconte Louis-Philippe - mais on a vu à la télé que là-bas les musulmans n’osent plus sortir de chez eux, parce qu’ils ont honte ou parce qu’on les insulte". "Mais ici, ce n’est pas comme ça" intervient Yacine.
"Nous avons vu que leur famille ne les considérait pas comme violents. Peut-être ils ont fait un voyage dans un pays où se trouvent des terroristes, ils sont tombés dans le piège de ce mécanisme", selon Sherine une autre lycéen. "Ça part toujours de là, de l’origine - réfléchit Louis-Philippe - ça peut venir de gens qui viennent du Pakistan, qui vont à Londres et là il y a comme un déclic". A Aubervilliers, ce "déclic" semble exclu. "Ici, il n’y a aucun problème avec les autres religions", affirme Sherine. Mais les choses pourraient-elles changer ? L’inquiétude s’insinue parmi les jeunes, après la séquence d’affirmations "musclées" et populistes du ministre de l’intérieur, aux ambitions présidentielles, Nicolas Sarkozy.
Non seulement "nettoyer" les quartiers difficiles au karcher mais aussi expulser les imam radicaux. "Le problème, c’est qu’après Ben Laden, on parle de l’islam comme terrorisme", dit Louis-Philippe. Sarkozy se vante de "parler comme le peuple" et fait de l’œil à l’extrême-droite, jouant la dangereuse carte de l’anti-parlementarisme et, ce qui est paradoxal étant donné qu’il est le chef de l’Ump, de la lutte au système des partis. Sarkozy "a dans le collimateur tous les musulmans, pas seulement les imam radicaux", réfléchit Yacine.
Avec Sarkozy à la présidence en 2007, le modèle d’Aubervilliers, celui des "micro actions que l’on peut mesurer dans le temps" pour lequel travaille Noureddine, sera-t-il négligé, ne sera-t-il plus financé ? Des signes de fermeture des groupe d’appartenance respectifs sont déjà bien présents dans la France d’aujourd’hui. Le dialogue d’Aubervilliers, la petite ville qui a accueilli, par exemple, le "musée précaire" voulu l’hiver dernier par l’artiste Thomas Hirshhorn, est en contraste avec la fermeture que l’on peut voir dans certaines mosquées : rue Myrrha, par exemple, à Paris, vendredi, la rue était bloquée par des barrières, les tapis de prière occupaient même les rues adjacentes, un monde sans femmes, venu du passé et qui perpétue des valeurs pré modernes, tourne le dos à la diversité de la ville.
"Avez-vous parlé des attentats de Londres et du fait que les kamikazes étaient citoyens anglais ?" : une question à laquelle personne ne veut répondre, tournant le dos à celle qui la pose, que l’on regarde comme une intruse. Une ghettoïsation que la politique de Sarkozy ne fera que favoriser, caressant dans le sens du poil les populismes extrêmes, de l’extrême droite franco-française qui a peur du différent à la radicale islamique qui refuse les valeurs occidentales. Sarkozy fait passer pour un dépoussiérage de la France un système à compartiments étanches, à un moment où la polémique sur les "modèles sociaux" opposés - le modèle britannique et hollandais qui a favorisé le "communautarisme" contre le modèle français de l’intégration républicaine - est désormais partie en fumée.
Personne n’est plus sûr d’avoir trouvé la réponse. Les deux "modèles" sont en crise, montrent des failles. De même qu’en Grande-Bretagne le communautarisme est mis en discussion, il y a en France des poussées dans le sens de la fermeture de chaque communauté sur elle-même : les deux "modèles "autrefois opposés tendent dans les faits à converger pour se centrer sur la "question sociale". Même si, comme le soutient Gilles Kepel, "il est excessif de prétendre, comme le font les islamistes, que dans l’Europe du XXI ème siècle les classes défavorisées sont musulmanes, il est vrai que ceux qui appartiennent à des populations immigrées d’origine musulmane font part dans leur grande majorité des groupes les plus pauvres. La mobilité sociale ascendante se heurte à de multiples obstacles qui ne se réduisent pas à la xénophobie ou au racisme (encore moins à l’islamophobie) mais où ces attitudes discriminantes jouent un rôle.
Le problème, c’est que "il n’existe plus, dans l’espace politique européen, de parti ou d’organisation auxquels puissent s’identifier ceux qui se considèrent injustement mal positionnés dans la hiérarchie sociale. L’extrême droite réussit, parfois, de Vienne à Amsterdam, de Rome à Paris, à capter ce vote de mécontentement, mais il se construit sur un réflexe xénophobe et ne concerne, pour l’essentiel, que la population défavorisée européenne indigène, au détriment de ceux qui sont d’origine immigrée". Selon le chercheur Kepel, pour ne pas préparer le terrain aux extrémismes, "il n’y a pas d’autre voie que de travailler pour la pleine participation démocratique de la jeunesse d’origine musulmane à la vie citoyenne, au moyen des instruments, en particulier éducatifs et culturels, qui favorisent l’ascension sociale". C’est ce que font Noureddine Skikker et ses collègues à Aubervilliers. Pour éviter que l’unique révolte possible ne soit l’alternative entre la fermeture dans le fanatisme religieux ou brûler les voitures stationnées comme cela est arrivé la nuit du 14 juillet pour célébrer la fête nationale : plus de 200 voitures brûlées en banlieue parisienne, "un chiffre stable depuis trois ou quatre ans" selon la police.
http://www.ilmanifesto.it/Quotidiano-archivio/17-Luglio-2005/art20.html
Messages
1. > Paris, la banlieue qui résiste au fanatisme, 6 septembre 2005, 22:41
Le fanatisme n’est pas dans les groupes, il est dans les textes. Ouvrez la bible (ancien & nouveau testament), ouvrez le coran, et lisez ces textes. C’est un kama-sutra du fanatisme, c’est l’école de la haine. La haine des femmes, des homosexuel-les, de toute personne remettant en cause le dogme religieux.
N’oubliez jamais que pour les religions, TOUTES, dieu est perfection, intemporalité, vérité, justice et que son message est donc parfait, intemporel, vrai et juste.
La religion, d’un bord ou de l’autre, est un crime contre l’humanité.
Eïnte.
2. > Paris, la banlieue qui résiste au fanatisme, 6 septembre 2005, 22:43
La religion (toutes) est un crime contre l’humanité. N’oublions jamais notre Histoire.
Eïnte.