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Une famille porte plainte après le suicide de leur fils au mitard de la prison d’Epinal

Publie le mercredi 14 avril 2004 par Open-Publishing
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Son père avait prévenu en vain l’administration.

Metz (Moselle) de notre correspondant

Alors qu’une marche silencieuse d’une centaine de personnes se
déroulait, mardi 13 avril au matin, devant la maison d’arrêt d’Epinal
(Vosges), la famille d’Erhan Celik, Messin de 18 ans qui s’est suicidé
le 3 avril au quartier disciplinaire de cette prison, annonce qu’elle va
engager la responsabilité de l’Etat devant le tribunal administratif de
Strasbourg.

"Il est clair que dans cette affaire tous les clignotants étaient au
rouge et que ce gamin était en danger de mort, s’indigne Me Dominique
Boh-Petit, avocat des parents de la victime. Depuis son incarcération,
il y a un an pour des faits mineurs, Erhan a tenté par sept fois de
mettre fin à ses jours. Transféré à quatre reprises, il a accompli deux
séjours en psychiatrie."

Dans un courrier adressé le 9 janvier 2004 à la direction régionale de
l’administration pénitentiaire de Strasbourg, M. Tahsin Celik, le père
d’Erhan, avait fait part de ses craintes : "Je suis très inquiet pour
mon fils. Depuis son incarcération, à Metz puis à Nancy, il multiplie
les tentatives de suicide. Nous souffrons d’une angoisse permanente." Le
13 janvier, le directeur de la maison d’arrêt de Nancy
(Meurthe-et-Moselle) lui répondait qu’"un suivi tant médical que
pénitentiaire -était- mis en œuvre à son endroit". Erhan Celik, qui a
multiplié entre-temps les incidents et les tentatives, est transféré le
25 mars de Nancy à Epinal, après un séjour de quinze jours en milieu
psychiatrique. Quelques jours après son arrivée dans les Vosges, il
s’est pendu aux barreaux du mitard, où il venait d’être placé pour avoir
bousculé un surveillant. "En incarcérant ce jeune homme à plus de 150 km
de sa famille et en le plaçant au quartier disciplinaire, où la
probabilité d’intenter à ses jours est sept fois plus importante qu’en
détention normale, l’administration pénitentiaire a multiplié en toute
connaissance de cause les facteurs de risque, réagit François Carlier,
de l’Observatoire international des prisons (OIP). Cette affaire est
l’exemple type de ce qu’il ne faut pas faire et va à l’encontre des
recommandations du psychiatre Jean-Louis Terra, l’auteur d’un rapport
sur le suicide en prison." Selon l’OIP, 120 prisonniers se sont suicidés
en 2003.

"SITE PILOTE"

"La place de ce détenu n’était pas en prison mais à l’hôpital, explique
Denis Erbrech, premier surveillant à la maison d’arrêt d’Epinal et
délégué CGT. Cette affaire est d’autant plus dommageable que notre
établissement a été classé "site pilote" en matière de prévention du
suicide alors que quatre détenus s’y sont donné la mort en moins de deux
ans." Condamné au total à seize mois d’emprisonnement pour des faits de
vol et de violences, Erhan Celik était "libérable" cet été. Son frère,
également détenu, n’a pas obtenu de permission pour assister aux
obsèques, prévues ce mardi à Metz.

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