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Yvon Quiniou s’exprime sur les divergences des antilibéralistes

Publie le samedi 30 décembre 2006 par Open-Publishing
9 commentaires

Point de vue
La tragique désunion de l’extrême gauche, par Yvon Quiniou
LE MONDE | 29.12.06 | 13h02 • Mis à jour le 29.12.06 | 13h02

Jacques Bidet vient de prendre position, avec passion et talent, contre le choix du Parti communiste français de présenter Marie-George Buffet à l’élection présidentielle (Le Monde du 26 décembre). Mais je pense qu’il se trompe, non dans sa préférence stratégique, mais dans son analyse et son acte d’accusation.

L’analyse d’abord. On ne peut reprendre la formule connue de Marx sur la répétition en histoire (de la tragédie à la farce) si on l’applique à des situations totalement dissemblables. En 1977, le PC rompit unilatéralement une union avec le PS, qui pouvait l’amener au pouvoir, parce qu’il craignait d’en sortir affaibli et qu’il n’en partageait pas les choix politiques à long terme.

Aujourd’hui il est dans un processus d’union hors du PS, avec des forces qui ont en commun le même projet antilibéral. Il a initié ce mouvement aux élections européennes et il y a fait la preuve qu’il pouvait se mettre au service d’une cause commune, sans calcul partisan, et pratiquer pleinement la démocratie, sur les estrades et dans les médias. Peut-on dire alors qu’il opère un "coup de force" quand on sait que sa candidate a été régulièrement élue par les comités locaux, ce qui était l’une des exigences partagées par tous ? Certes, l’autre exigence, le consensus des organisations, n’a pas été remplie. Mais d’où vient qu’on refuse ainsi une personnalité de qualité sous prétexte de sa responsabilité politique au PC ? Je n’en vois pas le motif idéologique, seulement des mobiles psychologiques liés à l’ego ou à des stratégies de pouvoir inavouées qui déconsidèrent à mes yeux la politique, surtout quand elle se prétend de gauche et prétend en révolutionner le fonctionnement.

C’est ici que l’accusation doit changer de nature. La désunion de la gauche anti-capitaliste a bien d’autres sources que le choix actuel des communistes, et M. Bidet n’en souffle mot. Elle vient d’abord de l’incapacité des trotskistes (Lutte ouvrière, Ligue communiste révolutionnaire, Parti des travailleurs) de dépasser un contentieux avec le PCF qui date de l’époque où il était stalinien et qui n’a rigoureusement aucun sens aujourd’hui. Ce sont eux qui, dès le départ, ont décidé de candidatures séparées, ont affaibli le camp antilibéral et lui ont interdit de peser réellement sur la politique d’un éventuel gouvernement socialiste par un score qui aurait pu dépasser largement les 10 %.

Plus profondément, leur analyse de la social-démocratie française bloque toute perspective de transformation sociale à court ou moyen terme : en l’assimilant purement et simplement au social-libéralisme, sans voir sa spécificité au sein du mouvement socialiste européen, ils s’interdisent et interdisent au mouvement antilibéral de contribuer, directement ou indirectement (à travers un soutien parlementaire, par exemple), à des réformes susceptibles d’inverser le cours actuel des choses.

Au nom d’un projet radical dont la réalisation, si elle est souhaitable, est subordonnée à un rapport de forces qui n’existe pas, ils risquent de renforcer le pouvoir de la droite en 2007 et de lui permettre de détruire les acquis sociaux que l’histoire commune des socialistes et des communistes avait patiemment obtenus au XXe siècle. Là est la vraie farce, sauf que dans ce cas elle sera suivie de la tragédie.

Messages

  • Il n’y a pas une specificité de la socialdemocratie française autre que celle que lui dicte un fort courant révolutionnaire .
    sinon elle est en accord complet avec la gestion des interets et de l’état capitaliste.
    Ne pas comprendre que le ps est la roue de secours du capital lorsque celui ci perd le pouvoir politique c’est ne rien comprendre aux guerres coloniales que fit le ps,de l’aventure de suez,du refus de l’indépendance kanak ,et de toutes les atteintes aux droits et acquis sociaux des travailleurs,
    Et même si ces droits ont été acquis lors de gouvernement ps ,c’est parceque les luttes les avaient imposés ,comme en 1936 avec les occupations d’usine lors de la greve.
    Des que les luttes baissent ,que le ps sent le rapport de force lui redevenir favorable,il reprend ce qu’il a du concéder.
    On le voit bien et on le verra encore en 2008 sur les retraites.
    L’incapacité de toutes les sociaux democrates de l’europe à changer reellement et durablememnt la condition des salaries,n’est pas un erreur,mais bien le resultat d’une volonté politique de servir la bourgeoisie.
    C’est cette certitude qui a conduit la lcr à demander clairement que les collectifs antilébéraux ne finiraient pas en caution de gauche d’une politique de droite.
    J’aurais préféré que le lcr(je ne suis pas encarté) participe et se batte politiquement dans ces comités sur une base de refus d’une participation gouvernementale avec le ps.
    Au vu de la tournure des evenements ,je vois que la majorité de la lcr a eu tort de ne pas essayer,elle a eu raison de se donner les moyens de presenter son candidat si les chôses echouaient dans les comités .
    Je voterai donc LCR,non parcequ’elle ne comprend pas la specificité de la socialdemocratie,mais justementparceque son analyse de la nature du PS est juste.

    • Excellente analyse, le MEDEF se frotte les mains : il n’aura même pas besoin de la roue de secours du PS. Sarko va se débrouiller tout seul.

      Le rassemblement antilibéral REEL est à faire immédiatement si nous ne voulons pas en prendre pour cinq ans de plus et si nous ne voulons pas que le problème des retraites soit résolu non par le PS mais par la droite.

      Bonjour les dégâts : la LCR (majoritaire, 2000 militants) fera alors la révolution avec tous les vieux (5,5 millions) dans les rues. Vive l’avenir !

      Si les collectifs locaux, antilibéraux et unitaires sont responsables, ils vont en entrer en campagne avec MG Buffet, comme ils ont manifesté vouloir le faire : c’est la démocratie locale, militante qui a raison.

    • "TRES BONNE ANALYSE" mais conclusion médiocre ! Que le PS francais, digne successeur de la SFIO ne se distingue en rien des partis socio démocrates européens est une évidence. Après Mollet (qui m’a envoyé en Algérie il y a 50 ans), Hollande, Blair, Schroder, même combat. Pourtant, en France , un réel courant révolutionnaire conduit le PS à faire de la politique "autrement". Question : mais qui donc assume ce rôle d’aiguillon ? Il y a en France, chez le peuple de gauche, et fort heureusement ; une forte volonté à chaque élection : battre la droite. Mitterrand, Jospin et jusqu’au plus obscur député PS en ont connu les effets positifs. Dans cet électorat de second tour se trouvent bien évidemment l’ essentiel des électeurs des candidats gauchistes . Quelles que soient les agitations des dirigeants LCR ou LO, l’union se fait pour tenter d’éviter le pire. Une fois élus, bien évidemment le PS n’en tient aucun compte. Et si parfois ils ne sont ni Blair, ni Mollet, ni Schroeder c’est uniquement grace à l’action du PCF, de ses militants, de ses électeurs et de ses élus. Et c’est bien ce dont il s’agit aujourd’hui : battre la Droite et son Sarko de service. Et pour cela l’union s’impose. Pas une union négociée : une union sans condition en faveur du(présidentielle) ou des(législatives) candidat arrivé en tête. Pas de participation gouvernementale mais uniquement soutien de ce qui va dans le bon sens.
      Autrement dit, l’objectif c’est d’appeler l’electorat gauchiste (il existe) à ne pas attendre le second tour pour voter utile mais à le faire pour une fois dès le premier tour en votant MGB. Roland

  • Analyse qui a un gros défaut : ne voir les responsabilités des échec que dans ce que font les adversaires.
    C’est ce qui condamne à l’immobilisme et à la reproduction des mêmes erreurs à l’infini.
    Mais visiblement, il y en a qui aiment ça et que ça rassure !

  • Comme le premier intervenant je pense que la spécificité de la social démocratie française tient à un rapport de force particulier au sein de la gauche française ; et en premier lieu le poids du PCF. Son affaiblissement a ouvert au PS une possibilité d’accomodement avec une partie de la droite et des thèses libérales.
    dans cette perspective, l’extrème gauche se trompe de combat. toute à sa critique du stalinisme, par ailleurs légitime, elle joua objectivement le jeu des forces conservatrices engagées, elles, dans la lutte acharnée contre le "communisme".
    Aujourd’hui le PCF n’est plus du tout stalinien, ou alors qui ne l’est pas ? c’est la raison pour laquelle les débats devraient changer de nature.
    personnellement j’ai été longtemps à l’extrème gauche. je l’ai quittée parce que d’abord anti-communiste et, se saoulant de mots, trop idéaliste.
    je pense, c’est là un objet de débat, que le positionnement du PCF est celui qui convient : A l’inverse de ce qui est couramment présenté, il n’est pas "pris en tenailles" entre une extrème gauche et le PS, mais au contraire tente l’articulation entre le désir de changer les choses dans le réel, appuyé sur une analyse radicale.
    A défaut, que voyons nous : d’un coté la gestion loyale du système par une social-démocratie dont plus personne n’attend de changement, tout juste une petite protection comme "moindre mal", de l’autre la contestation bruyante mais inopérante car hors sol de l’extrème gauche. ces deux plans clivés se nourissent l’un de l’autre.
    Disant cela, je n’oublie ni les dérives sectaires dans le PCF, ni les compromissions de R. Hue. Il reste que le rapport de forces est nécéssaire à la crédibilité de notre démarche, car quoi qu’on en dise, on pourra difficilement oublier les socialistes dans l’état actuel des choses, ou alors on opte pour une droite pour 50 ans. C’est à cela que doit servir le PCF et au delà, tous ceux qui oeuvrent à une société plus juste.
    Léon

    • je n’arrive pas à comprendre la démarche de Bidet...

      Dans le fond de quoi était-il question lors de "la rupture" du programme commun et ce qu’il reproche à Marchais... Tout simplement du fait que le PCF se rend compte que l’on va vers une hégémonie du PS au sein de la gauche et donc que la transformation espérée va être bloquée...

      Les socialistes au pouvoir, Mitterrand maître total de la situation, un PCf roue de secours, c’est la situation à laquelle nous sommes confrontés aujourd’hui et à laquelle l’hypothèse d’une candidature anbti-libérale tentait d’échapper...

      Alors pourquoi se plaindre ? Si ce n’est toujours pour les mêmes raisons, une partie des donneurs de leçons comme Bidet sou un langage ultra-gauche ne veut pas du PCf mais préfère dans tous les cas et sous diverses formes une social démocratie... La tragédie devenue comédie c’est la position de Jacques Bidet plutôt que celle du PCF...

      Danielle Bleitrach

    • 50 ans de social democratie ou 50 ans de droite pour les retraites,les chomeurs,les exclus c’est du pareil au même on l’a vu ces 25 derneires anneés !!!
      Alors au deuxieme tour sego peut être mais au prmier aucun de ceux qui ont été gouvernement depuis 1981 !!aucun ,j’en ai mare d’entendre dire ;oh bien sur on y était ,mais c’est les autres qu’étaient les plus nombreux !!
      trop facile et surtout on a trop dégusté nous les salariés:un chomeur,un sdf,un rmiste sous buffet et jospin reste un rmiste,un exclus,un pauvre !

  • J’ai un problème avec cette présentation des choses : celle d’Yvon Quiniou. En gros on nous dit qu’en France la social-démocratie est moins libérale qu’ailleurs en Europe du fait de l’existence du PCF. Sans nier le rôle du PCF, je pense qu’il ne faut pas inverser les choses. Ce rôle du PCF me parait être plus une conséquence, un révélateur d’autre chose de plus profond que la source, l’origine de cette spécificité. Je vise par là le tempéramment du peuple français, en particulier de ses masses populaires. Ce tempéramment d’une part est antérieur à la naissance du PCF lui-même et aujourd’hui encore il est présent bien au-delà des militants, sympathisants et même électeurs du PCF. Les français sont des raleurs, jamais satisfaits de leur sort, en recherche permanente de "mieux-être", ne croyant pas à la fatalité qu’on voudrait leur faire gober, et persuader d’avoir entre leurs mains leur destin. C’est sur ce terreau qu’a pu naître le PCF et non pas le contraire. C’est ce terreau qui ne laisse pas les mains totalement libre au PS pour s’égayer dans le libéralisme. S’il n’y avait que le PCF ...

    Hugo