Accueil > Bon pour la bourse, mauvais pour l’économie
Contrairement à ce que laisse entendre la presse économique sur les envolées des profits, le boom du CAC40 n’est pas une bonne nouvelle pour tout le monde. En fait le climat boursier est au monde salarié ce que le réchauffement climatique est à la planête : l’emballement des thermomètres de la finance révèle un très grave dérèglement de notre économie.
Car l’annonce simultanée de résultats mirobolants et très souvent record va cette année encore de pair avec une avalanche de licenciements et de fermetures d’entreprises. Il ne s’agit pas d’une fâcheuse coïncidence. Le drame est précisément que l’accumulation actuelle des profits est construit contre le monde du travail, en écrasant les salaires, en pratiquant un chantage systématique à la délocalisation, au dumping fiscal et social, à la mise en concurrence avec d’autres salariés, d’autres pays où la surexploitation du travail est renforcée.
Les uns paient l’addition de l’enrichissement des autres. Et ceux qui trinquent, quelle que soit la région du monde, sont toujours les travailleurs. Protéger l’emploi contre les délocalisations, ce n’est pas contrairement au discours dominant vouloir fermer les frontières. C’est protéger partout dans le monde les conditions de travail, les normes et les droits sociaux contre une guerre des profits et des marchésdont les ouvrières et les ouvriers fournissent la chair à canon.
Voilà quelques jours, à Bamako, au Mali, des tisseuses de coton racontaient à MG Buffet les mêmes malheurs dus à la concurrence mondialisée que les ouvrières du textile français. Les unes et les autres ne veulent pas d’un monde fermé mais un monde où leur droit au travail, à un travail qui les fasse vivre dignement, soit protégé. Ce n’est pas du tout la même chose.
Il faut tout le cynisme de la droite et du monde de l’argent pour affirmer comme vient de le faire le ministre de l’Economie à propos des profits de Total : »L’important c’est que ces entreprises gardent leurs sièges sociaux en France et y paient leurs impôts. Le reste c’est de la philosophie. » Diable de philosophe ! Breton et les siens rêvent d’un avenir radieux où l’homme aurait définitivement renoncé à penser le monde et singulièrement à le penser autrement. Les géants du CAC40 font d’énormes profits. Estimez vous heureux, ils versent leur obole aux deniers de l’Etat. Pas trop sinon vous êtes prévenus, ils plient bagages. Pendant ce temps, des millions de gens s’appauvrissent tout en engraissant la bête.
Mais au nom de quelle éthique de l’intérêt général un ministre de la République, dans un pays qui compte sept millions de citoyens vivant au dessous du seuil de pauvreté, peut-il légitimer un tel chantage à la délocalisation de la plus riche entreprise nationale ? Accepter ce genre de raisonnement, c’est entériner le pouvoir de l’argent sur toute expression de la démocratie, toute revendication collective nationale. C’est inacceptable.
La majorité des Français, l’écrasante majorité des ouvriers parmi eux, ont dit NON au traité constitutionnel européen pour refuser ce diktat de la finance sur le travail. De nouveau tout est fait pour interdire aux Français de choisir, pour les enfermer dans une alternative tronquée. Mais le choix d’une autre politique existe bel et bien. Il n’a pas encore dans les sondages la force espérée. Est-ce une bonne raison pour y renoncer comme le matraquage médiatique nous y invite ou au contraire une bonne raison de travailler à lui donner le poids nécessaire le jour J dans les urnes ?