Accueil > Déduction généralisée des intérêts d’emprunt : un coûteux cadeau fiscal

Déduction généralisée des intérêts d’emprunt : un coûteux cadeau fiscal

Publie le jeudi 31 mai 2007 par Open-Publishing
2 commentaires

Le président Sarkozy a réaffirmé mardi que la déduction fiscale des intérêts s’appliquerait à tous les emprunts en cours pour l’achat d’une résidence principale, une mesure au coût élevé pour les finances publiques, dont l’effet d’entraînement sur l’économie est jugé incertain.

"Cette déduction, je l’ai promise et je la ferai", a lancé Nicolas Sarkozy, lors d’une "réunion républicaine" organisée au Havre sous l’égide de l’UMP.Fustigeant "la pensée unique" qui s’opposerait à une telle mesure, l’une des plus emblématiques de son programme électoral, le chef de l’Etat a assuré que cette déduction "s’appliquera à tous les emprunts en cours".

"Les intérêts seront déductibles à partir du jour où la loi sera votée", a-t-il précisé.

Ces déclarations sonnent comme un rappel à l’ordre pour certains ministres, qui avaient indiqué ces derniers jours que la déduction des intérêts ne concernerait que les ventes actées depuis le 6 mai, date de l’élection du nouveau président.

Mais, en élargissant le nombre de bénéficiaires, elles signifient surtout une facture beaucoup plus salée pour les finances publiques.

"On peut faire des estimations. Il y a un débat là-dessus mais c’est de l’ordre de trois à quatre milliards (d’euros) sans doute", a estimé Patrick Devedjian, secrétaire général délégué de l’UMP, sur France Info, sans préciser sur quelle période.

Pour Christophe Crémer, président du courtier immobilier en ligne Meilleurtaux, la mesure coûterait "sans doute de l’ordre de 4 milliards d’euros la première année". Plusieurs économistes évoquaient de leur côté un coût d’environ 10 milliards d’euros sur l’ensemble de la législature.

Nicolas Bouzou, du cabinet d’études sectorielles Asterès, estime que l’effet sur la demande sera positif car ce coup de pouce fiscal aux ménages déjà emprunteurs "équivaut à une baisse de l’impôt sur le revenu".

Marc Touati, fondateur de l’Association pour la connaissance et le dynamisme économiques (ACDE), voit lui aussi dans cette annonce un "beau cadeau fiscal" pour les ménages qui ont déjà un crédit en cours, mais qui "n’aura qu’un impact très limité sur la croissance et l’emploi", car, même si elle redonne du pouvoir d’achat aux ménages, "sur 100 euros de produits achetés, il y a 40 euros de produits importés".

Pour Nicolas Bouzou, les effets négatifs sont ailleurs. D’une part, cela risque de "déséquilibrer la structure de l’endettement des ménages" au détriment du crédit à la consommation, qui joue un rôle important dans une économie tirée par la consommation des ménages.

Cet économiste donne également raison à Ségolène Royal (PS), qui a estimé mercredi que "le principal risque d’une décision comme celle-ci, c’est la flambée du coût de l’immobilier".

En effet, Nicolas Sarkozy veut "une France de propriétaires" mais "les gens veulent déjà devenir propriétaires aujourd’hui et n’en ont pas les moyens", souligne Christophe Cremer, pour qui il aurait mieux valu cibler ces ménages plutôt que "d’offrir un avantage fiscal à quelqu’un qui a acheté son bien en 2000, alors que la valeur de ce bien a été multipliée par deux".

Le président de la République n’a en tout cas toujours pas précisé les détails de la mesure. Le ministre du Budget Eric Woerth avait affirmé jeudi dernier dans Les Echos qu’elle devait prendre la forme d’un "crédit d’impôt limité dans le temps", les intérêts pouvant "être déduits des revenus à hauteur de 20%", des annonces qui restent à arbitrer.

Messages

  • Ha, bon, vous êtes sùr que ça va durer, alors pourquoi la droite (RPR UMP) et l’ex 1er ministre Juppé (de nouveau dans ce gouvernement) avaient ils supprimer cette possibilité de déduire ces intérêts d’emprunt de leur impôts en 1996 sous le gouvernement Juppé, dans le projet de lois de finances pour 1997 ?!....
    http://www.admi.net/jo/19961231/ECOX9600105L.html

    "Art. 89. - I. - L’article 199 sexies du code général des impôts est ainsi modifié : 1o Les dispositions actuelles constituent le I ; 2o Il est ajouté un II ainsi rédigé : <> >
    C’est où l’erreur...?
    On attribue à la gauche de défaire ce que la droite à fait, et vice versa,
    mais là c’est encore plus vice et vice...
    On peut donc s’apercevoir que cette mesure n’est qu’une mesure électoral, qui nous dit qu’après les législatives, ils ne nous ressortiront pas les mêmes arguments qu’en 1996 pour supprimer la déduction des intérêts d’emprunts.
    Confiance ?

    • LA QUESTION DU DROIT AU LOGEMENT POUR TOUS

      La déduction des intérêts d’emprunts pour l’acquisition de l’habitation principale ne régle en rien celle ESSENTIELLE du droit au logement pour tous.
      Le droit au logement ne peut être confondu avec l’accès à la propriété sauf à considérer que les catégories sociales prioritaires sont celles bénéficiant de revenus permettant d’acquérir un logement.
      Cette mesure outre qu’elle plombera les recettes fiscales est à rapprocher de la mise en demeure de Bruxelles d’ouvrir au réseau bancaire privé l’accès au livret A délivré jusqu’ici uniquement par la Poste et les Caisses d’Epargne.

      Le livret A draine l’épargne populaire et sert essentiellement par l’intermédiaire de la Caisse des Dépôts à financer le vrai logement social.
      S’il était proposé par les banques privées il servirait de "produit d’appel" et les banques proposeraient très vite aux épargants des produits financiers plus alléchants,assèchant ainsi le financement du logement social à leur profit.

      Ainsi d’un coté on aurait une pertie des classes moyennes accèdant à la propriété avec à la clé une ponction sur les recettes publiques et de l’autre un assèchement des capacités financières pour le logement social laissant la plus grande partie des demandeurs de logement sur le flanc.

      Telle est la "politique du logement" pronée par le gouvernement Fillon
       : faire miroiter le "rêve américain" du "tous propriétaires" et laisser ceux qui en ont le plus besoin sur le bord du chemin.

      JL GREGOIRE

      NOTA : La mise en demeure de Bruxelles a été contestée dans les mots par le précédent gouvernement De Villepin. Il faudra surveiller de très près ce que dira le nouveau ministre des Finances à ce sujet.