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Amiante, 4 membres du Lobbying Comité Permanent Amiante mis en examen

par nazairien

Publie le mardi 10 janvier 2012 par nazairien - Open-Publishing

Les lobbyistes de l’amiante mis en examen

Pendant des années, le Comité permanent amiante a oeuvré pour que la fibre hautement cancérigène ne soit pas interdite en France.

En mettant en examen quatre membres du lobby de l’amiante pour "homicides et blessures involontaires", la juge Marie-Odile Bertella-Geffroy a franchi une étape de plus dans la longue route qui mènera, peut-être, à un procès pénal identique à celui qui s’est déroulé en Italie en 2011. Mais on en est encore très loin... Même si, pour Jean-Pierre Hulot, Dominique Moyen, Daniel Bouige et Arnaud Peirani, l’échéance s’en rapproche inexorablement.
Le premier, âgé aujourd’hui de 67 ans, était "secrétaire" - en fait le principal animateur - du Comité permanent amiante (CPA), structure de lobbying financée par les industriels qui, de 1982 à 1997, date tardive de l’interdiction de l’usage de l’amiante en France, parviendra "à effectuer un contrôle du discours scientifique et médical" et à détenir le "quasi-monopole de l’expertise scientifique française sur l’amiante" selon les pièces de l’instruction que Le Point a pu consulter.

Rappelons qu’en 1996, l’Inserm estimait à cent mille le nombre de Français qui devraient mourir d’ici 2025 d’avoir inhalé cette fibre cancérigène dont on connaissait pourtant la toxicité dès le début des années soixante. Mais grâce au formidable travail de Jean-Pierre Hulot, qui hébergeait les travaux du CPA dans les locaux de sa société Communications économiques et sociales, située avenue de Messine à Paris, la France, quand le scandale éclate en 1995, est devenue le premier importateur et transformateur d’amiante en Europe... 35 000 tonnes de cette fibre sont manipulées dans les usines des deux principaux fabricants, Éternit et la société Éverite, filiale de Saint-Gobain, pour fabriquer des bardages, des tuiles ou des tuyaux en Fibrociment. Devant les ravages de cette fibre, sept pays de la Communauté ont, à l’époque, déjà interdit le "magic mineral", mais la France pèse de tout son poids à Bruxelles contre une interdiction totale. C’est en réalité le CPA qui est à la manoeuvre, étant parvenu à obtenir "une influence sur le processus décisionnaire politique en France et en Europe".

"Usage contrôlé de l’amiante"

Comment une obscure structure de communication a-t-elle pu ainsi kidnapper le discours officiel ? Tout simplement en réunissant des scientifiques, puis des responsables d’organismes officiels et même des représentants des ministères concernés, ces derniers étant finalement assez satisfaits d’être débarrassés d’un dossier aussi empoisonnant. Durant ces quinze années, leurs responsables successifs, de droite comme de gauche, préféreront laisser les industriels se charger d’un enjeu majeur de santé publique. Renaud Peirani était ainsi le représentant au CPA du ministère de l’Industrie ainsi qu’expert auprès de la Commission européenne. Et Dominique Moyen, l’un des fondateurs du CPA, dirigeait alors l’INRS (Institut national de recherche et de sécurité au travail), l’organisme de la Sécurité sociale chargé de veiller sur la santé des salariés... Sous le regard bienveillant de Daniel Bouige - directeur de l’Association française de l’amiante et directeur général de l’Association internationale de l’amiante -, les membres du CPA vont donc inventer le concept "d’usage contrôlé de l’amiante" tout en désamorçant les médias dès qu’une affaire éclate.

"Pour l’Andeva - qui avait pointé la responsabilité du CPA dans sa première plainte en juillet 1996 (!) - et pour l’ensemble des victimes de l’amiante -, c’est enfin un signe encourageant que l’instruction progresse", a estimé l’association qui regroupe les victimes de "l’or blanc", tout en soulignant la lenteur de la justice dans cette affaire. Le même enthousiasme ne doit pas être partagé par ceux des membres du CPA qui n’ont pas encore été mis en examen. Et encore moins par leurs supérieurs dans les administrations de la Santé et du Travail qui les avaient envoyés siéger au Comité permanent amiante.

Par François Malye

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